L’Islam – à propos du réformisme et des interprétations

   Quand on parle d’Islam, ou d’autres religions, qui ont des textes considérés Sacrés, il est absurde de parler de réforme des textes. D’une part, pour des textes considérés comme étant de nature humaine à l’unanimité, comme l’hymne national français (la marseillaise), personne n’appelle à la suppression ou à la réforme des textes, et pourtant il y est fait mention d’égorgement, de violence, de guerre, de sang, etc., dans un texte très court. Mais la majorité des français, alors même qu’ils chantent cet hymne, n’arpentent pourtant pas les rues pour égorger les gens.

   Dans le cas des Textes Sacrés ou des traités philosophiques, juridiques, théologiques ou astronomiques, écrits durant les époques passées ou même à notre époque, on ne parle pas non plus de réforme ou de suppression. D’autre part, supprimer un texte qui est déjà mémorisé par cœur et accessible à tous sur différents supports (physiques et virtuels) ne règlera absolument pas la question, – bien au contraire même, puisque cette action entrainera une opposition encore plus déterminée pour rétablir la vérité et contester cette décision irresponsable -. Les ouvrages et encyclopédies écrits par les Pères de l’Eglise, par les Rabbins du Moyen-Âge, par les philosophes des « lumières », par les auteurs nazis ou marxistes qui ont défendu ou cautionnés l’esclavage, la misogynie, le colonialisme, la torture, l’extermination de certains peuples ou autres actes criminels selon les cas, ne sont pas « sommés » de réformer ou de « supprimer » les « passages compromettants » selon la doxa officielle (sachant que le curseur de ce qui est « bien » ou « mal » varie considérablement selon les époques et les personnes même au sein d’une même nation, en dehors des actes universellement admis comme « horribles » ou « injustes »).

   Dans le cas du Qur’ân, il n’y a aucun texte à réformer ou à supprimer. La problématique demeure toujours, essentiellement, dans la lecture et le rapport que l’on entretient au Texte. Ce qu’il faut enseigner (ici aux musulmans) ce n’est pas une lecture fidéiste ou réformiste des Textes, mais une lecture cohérente et intelligente du Texte, en conformité avec les principes et les finalités qui sont définis dans le Texte-même : connaissance et amour de l’Unique, la réalisation de la sagesse, l’accomplissement de la Paix, la bonté pieuse, la justice et l’équité en toute circonstance, la générosité et la bonté envers notre prochain, la défense des opprimés et le soutien aux femmes, aux orphelins et aux pauvres, le refus du génocide et la mobilisation politico-militaire en cas d’agression injuste.

   Quant à la Sunnah et aux avis recensés des différents Compagnons et juristes venus après eux, là aussi, le patrimoine islamique est un océan dans lequel on peut facilement se perdre. Une approche intelligente et pondérée s’impose également. D’une part, le fait de tout préserver permet de mieux prendre conscience de la complexité et de la diversité des opinions, des sensibilités et pratiques culturelles, des priorités de chacun, des divergences d’interprétation, des mœurs et réalités anthropologiques et psychologiques des sociétés à cette époque. Supprimer une partie du patrimoine, – même dans les aspects les plus violents ou absurdes, – beaucoup d’inventions apocryphes de part et d’autre pour différentes raisons -, ne ferait que déplacer le problème. A partir des principes et des finalités de la Religion, il faut savoir indiquer les méthodes rigoureuses et légitimes pour réadapter les outils juridiques et politiques à chaque nouveau contexte, comme l’ont fait les Compagnons de leur vivant même lorsqu’ils ont émigré vers d’autres régions, ou comme l’ont fait leurs disciples à leur tour. En effet, s’il est utile et intéressant de savoir comment vivaient les anciennes générations dans les temps passés, et comment ils furent inspirés par l’islam dans leur façon de vivre et de penser les arts, la politique et le droit, il faut bien se garder d’appliquer aveuglément des méthodes particulières et particularisées qui n’ont plus les mêmes finalités ou la même efficacité à notre époque.

   En développant la conscience morale, l’éducation spirituelle, la perspective métaphysique, l’assimilation des différents outils juridiques, ainsi qu’une connaissance sérieuse de l’histoire (à travers une bonne méthodologie et un recoupement des sources), le tout en les rattachant aux principes de l’Islam, permettra alors de résoudre les problématiques et les faux-débats dont on nous inonde à longueur de temps dans les médias ou sur les réseaux sociaux.

   Le manque de lucidité et d’intelligence chez tous ceux qui critiquent constamment les « traditionnalistes » est consternant, alors que ces derniers ne sont pas impliqués dans les actes criminels et terroristes de notre temps. En effet, les « jihadistes extrémistes » parmi les wahhabi ou les shiites identitaires ne sont pas des musulmans ayant suivi un cursus traditionnel, quand bien même certains d’entre eux pourraient être obtus ou sectaires dans leur façon de penser, mais ne commettant pas d’actes barbares ou atroces. Le « jihadisme extrémiste » découle justement d’un mouvement réformiste.

   Par ailleurs, entendons-nous les laïcs, les réformistes, les marxistes, les athées, les humanistes ou les démocrates, parler de réformer leurs idéologies pour les méfaits et les massacres commis par leurs adeptes, – soit en leur nom propre soit au nom de ces idéologies – ? La réponse est non.

   La folie prend de l’ampleur depuis quelques temps, et les « réformistes » se sentent pousser des ailes en procédant constamment à des amalgames. Or ce n’est pas le « réformisme » qui va régler le problème de fond, puisque l’on pourra toujours trouver des assassins, des terroristes, des sexistes, des misogynes, des criminels ou des idiots parmi les réformistes se réclamant de l’Islam, aussi bien que chez les athées, les juifs, les chrétiens, les communistes, les nationalistes, etc. bref, des personnes qui n’ont que faire du fiqh musulman, de la Sunnah ou même du Qur’ân pour beaucoup. Ne trouve-t-on pas, parmi les démocrates, les laïcs et les humanistes, – tout ceux qui prétendent pourtant respecter la liberté et la vie d’autrui -, les pires criminels de notre temps, et ayant justifié leur folie meurtrière, par tout un tas de prétextes, parfois les uns plus ridicules que les autres ? La poussée des mouvements extrémistes, – toutes communautés confondues – s’est faite dans les pays sécularisés, la sécularisation[1] n’est donc pas un antidote, en soi, au terrorisme ou à l’extrémisme.

  Rappelons-nous de quelques faits qui illustrent l’échec du « sécularisme » à ce niveau, puisque dans le monde musulman (Sissi en Egypte, Bashar en Syrie, Mohammed Ben Salman en Arabie Saoudite, Khalifa ben Zayed Al Nahyan l’émir d’Abou Dabi, etc.) ou en Occident (comme les derniers présidents français : Nicolas Sarkozy, François Hollande, Emmanuel Macron) qui appellent à la réforme de l’islam, – et qui ne s’inscrivent donc pas dans le traditionnalisme – sont tous impliqués dans des guerres sanglantes et illégitimes, dans des affaires de corruption ou de pédocriminalité, dans des crimes de guerre, des arrestations arbitraires, des ordres autorisant le viol de femmes dans certains pays. Difficile donc de les prendre au sérieux. Ce sont pourtant des réformistes acquis au modernisme (au sens idéologico-social du terme) et non pas des traditionnalistes. Preuve que le réformisme et le modernisme ne règlent pas les problèmes et n’endiguent pas la violence. Même chose concernant le traitement des enfants ou des femmes, dont les violences sont nombreuses selon les statistiques gouvernementales en France, en Belgique, aux États-Unis et dans les autres pays modernistes (comme en Inde, en Chine ou ailleurs aussi). Pour justifier leurs amalgames, certains réformistes n’hésitent pas à qualifier de « traditionnalistes » des individus suspects qui ne sont pourtant pas traditionnalistes, mais bien « réformistes », du moins d’un certain type[2]. En outre, lors de débats où des réformistes ne savaient plus trop quoi répondre, – nous et d’autres – avons été victimes d’injures, de menaces et de censures, ce qui montre à quel point le réformisme ne protège en rien du fanatisme ou du mauvais comportement.

   Nous connaissons de nombreux professeurs, savants et étudiants s’inscrivant dans la perspective « traditionnelle » et « traditionnaliste », et qui se comportent de façon très courtoise, civique, morale et bienveillante, et qui n’ont jamais appelé au terrorisme, bien au contraire même, à partir des règles juridiques et des convenances éthiques et spirituelles qu’ils enseignent et apprennent, condamnent la délinquance, le banditisme, le trafic de drogue et d’arme, la misogynie et le sexisme, tout comme ils condamnent le terrorisme et la barbarie de façon générale. L’étude des textes suit ainsi une discipline spirituelle, une méthodologie rigoureuse et une rigueur intellectuelle, – bien que l’on puisse diverger sur un certain nombre d’avis -, qui poussent les étudiants à la réforme spirituelle et à dissocier les avis de l’école du passé avec les nouvelles réalités et conditions de vie (et d’application) contemporaines. En somme, tout cela fait défaut chez les autodidactes réformistes, qui par la suite, passent à l’acte pour un certain nombre de facteurs multiples.

   C’est tout simplement donc une question de bonne éducation morale et spirituelle, d’intelligence dans la façon d’aborder les Textes (peu importe si l’on rejette ou non un certain nombre de ahadiths qui sont ahad[3] ou d’avis juridiques élaborés par des juristes des époques passées) et des principes métaphysiques et des valeurs éthiques que l’on placera au-dessus des textes étranges ou singuliers (ahad) qui ne peuvent pas, en toute logique, prévaloir sur les principes et règles immuables du Qur’ân et des nobles valeurs enseignées dans les paroles prophétiques qui sont mutawatir.

   Pour illustrer à travers l’histoire musulmane, « l’intelligence » des textes dans leur compréhension tout comme dans leur application, citons quelques cas.

  Le Shaykh Ibn Atâ’Allâh As-Sakandarî (m. 709 H/1309) a dit lors de son débat face à Ibn Taymiyya : « Et l’Imâm Ahmad – qu’Allâh soit satisfait de lui – critiqua les actions de certains de ses disciples qui avaient l’habitude d’aller en patrouille, brisant les tonneaux ouverts de vin (dans les magasins de leurs marchands chrétiens), déversant leur contenu par terre, bastonnant les chanteuses et confrontant les gens dans la rue. Tout cela, ils le firent au nom de prêcher le bien et interdire le mal. Cependant, l’Imâm ne donna aucune fatwa les motivant à censurer ou réprimander tous ces gens. En conséquence, ces disciples (responsables de ces actions) furent fouettés, jetés en prison, assis à dos d’ânes à l’opposé c’est-à-dire faisant face à l’arrière de l’âne et défilant »[4].

  On voit bien que sous prétexte d’ordonner le bien et d’interdire le mal, – qui est un principe qurânique : « vous ordonnez ce qui est convenable, vous interdisez ce qui est blâmable et vous croyez en Allâh » (Qur’ân 3, 110) -, l’islam, et les grands savants de l’islam, n’ordonnent pas de le faire n’importe comment ou de façon brutale, car même si l’on veut interdire une chose clairement blâmable ou néfaste pour les gens, ceux-ci n’accepteront pas toujours le bon conseil. Par conséquent, il existe des manières, des conditions, etc. avant d’appliquer une méthode visant à détruire les idoles, les boissons alcoolisées en public, la prostitution, etc., de peur que cela engendre encore plus de tensions, de vices, de fanatisme ou de désordre.

   Même si la Shar’îah, dans ses jugements, interdit une chose, l’application de cette interdiction ne doit pas toujours être appliquée quand le contexte ne s’y prête pas, ni sur l’ensemble des personnes, ni si l’on craint encore plus de mal et de rejet que de bien. Si l’on craint un plus grand mal par une action (visant à l’origine à répandre le bien), alors il faut s’en abstenir, et privilégier une autre méthode (licite), qui doit être adoptée (la suspension d’une application pénale, fait partie du licite quand il y a une nécessité ou une circonstance atténuante), en vue d’éviter des plus grands maux. Parfois, certains sont bien intentionnés mais sont trop brutaux et effraient les gens, malgré qu’il s’agisse de condamner une pratique blâmable, mais l’islam interdit une telle méthode de façon générale, et ce sont alors les auteurs de la méthode brutale qui doivent être sanctionnés pour avoir effrayé ou brutalisé les gens. Il y a le célèbre cas du hadîth rapporté par al-Bukharî dans son Sahîh, où un juif testa le Prophète et lui avait manqué quelque peu de respect, alors ‘Umar s’énerva et effraya « involontairement » le juif, et le Prophète dit à ‘Umar de ne pas agir ainsi, et un dédommagement fut donné au juif, et ce dernier se convertira plus tard à l’islam, en ayant vu également les signes de la prophétie sur le Prophète Muhammad, – ‘alayhî salât wa salâm -).

   Un autre cas, à l’époque des Pieux prédécesseurs, est celui où le célèbre Calife ‘Umar ibn Abd al-Azîz, du début du 2e siècle de l’hégire, – un salaf vertueux qui rencontra des Compagnons et des disciples de Compagnons, tels que Muhammad Al-Bâqir et Hassân al-Basrî -, faisait déjà le constat d’une certaine dégénérescence dans les mœurs : « Un jour,’Umar ibn al-‘Azîz fut ainsi questionné par son fils Abd al-Mâlik : « Père, pourquoi n’appliques-tu pas [toutes] les choses ? Je ne me soucie pas que moi et toi ayons à supporter des difficultés à cause de la vérité ». Le calife répondit : « Ne te presse pas, mon fils. Car Allâh a, dans le Qur’ân, critiqué 2 fois l’alcool, (puis,) la 3ème fois, l’a interdit. Je crains que si j’applique d’un coup aux gens (tout) ce qui est établi, ils rejettent d’un coup (tout ce qui est établi) ; et que naisse à cause de cela une fitna »[5].

   Or, l’alcool a été clairement interdit en l’an 8 de l’hégire, et cette interdiction religieuse est complète et définitive, applicable pour tout musulman quel que soit le lieu qu’il ou elle se trouve. Mais dans le fait de faire respecter sur la scène publique cette interdiction, par l’autorité de la Dâr ul-islâm du début du 2e siècle, il a évalué le bénéfice de cette action, et la nuisance que cette action entraînerait sur l’ensemble de la société musulmane d’alors. ‘Umar II a perçu que l’application immédiate ou rapide de cette action aurait entraîné une nuisance trop grande, d’où une non-application immédiate, – autrement dit une suspension ou un « report » de la loi – de la totalité de ce qu’on devait faire respecter par l’autorité publique. Il y avait d’un côté le fait d’atteindre une action utile et bénéfique, et de l’autre côté le fait de se préserver de la nuisance que l’application immédiate de cette action bénéfique aurait alors entraînée.

   D’autres peines ne sont applicables que sous certaines conditions. Ainsi ‘Umar ibn al-Khattâb a suspendu la peine de l’amputation de la main pour les voleurs avérés en temps de famine, puisque les conditions étaient absentes pour l’application d’une telle peine. Après avoir mentionné que ‘Umar fit suspendre l’amputation de la main du voleur en cette année (de disette) : « As-Sa’dî dit : « Hârûn Ibn Ismâ’îl nous rapporta que ‘Alî Ibn Al Mubârak dit que Yahyâ Ibn Abi Kathîr lui raconta que Hasân Ibn Zâhir lui narra que ‘Umar (qu’Allâh l’agrée) dit : « Pas d’amputation pour le vol [des fruits] d’un palmier (al ‘idhqou) ni lors d’une année de sécheresse (‘âma sana) ». As-Sa’dî dit : « J’interrogai Ahmad Ibn Hanbal au sujet de ce hadîth ». Il me dit : « al ‘idhq désigne les palmiers et sana désigne la famine ». Je lui demandai ensuite : « C’est l’avis que tu adoptes ? ».

Il dit : « Oui, certainement ». Je dis [alors] : « S’il vole pendant la famine, on ne lui ampute pas la main ? ». Il dit : « Non, dans la mesure où c’est la nécessité qu’il l’a poussé à voler et que les gens souffrent de la famine et d’une grande difficulté » »[6].

   Al Awzâ’î s’accorde avec Ahmad pour dire que l’amputation de la main est suspendue en cas de famine…D’où la règle établie par les fuqaha : « Tudra’u al Hudûdu bi sh-shubuhât » (les peines sont levées en présence d’ambiguïtés).

   A l’époque du Calife ‘Umar ibn al-Khattâb, il y eut une famine, ce qui avait poussé 2 domestiques à voler un chameau dans le but de se nourrir. Lorsqu’ils furent dénoncés et que le cas fut communiquéà ‘Umar, il n’appliqua pas la peine des voleurs sur eux, car ils le volèrent par nécessité. ‘Umar exigea alors à leur maître (employeur, responsable) Hâtib de payer le prix du chameau à la victime du vol[7]. ‘Umar ibn al-Khattâb, qui est une référence chez tous les sunnites traditionnels et chez la grande majorité des ahl ul bayt vertueux, était connu pour sa perspicacité de façon générale, – tout en reconnaissant la pertinence et la supériorité des avis de Abû Bakr, de ‘Alî et d’autres dans certains cas précis -, et l’importance qu’il accordait au contexte et aux finalités visées. Cela est justement enseigné dans les cercles (traditionnalistes) de science, ce qui évite justement un grand nombre d’abus et de dérives.

   Le juriste et chercheur ‘Abd Allâh al-Mâliki a dit : « De même, établir la justice et confirmer la vérité est une partie essentielle de la sharî’a de Dieu. De même, l’ordre de faire le bien et l’interdiction de faire le mal sont un des piliers de la sharî’a. De même, l’action de s’entraider dans la bienfaisance et la piété ou le fait de dire la vérité devant un chef inique représentent une partie principale de la sharî’a. Je dirais même plus, se rendre utile à autrui, bien traiter les animaux et les plantes, respecter et préserver l’environnement et la nature, font partie de la sharî’a. Tout ce qui contribue à donner à l’homme sa dignité ou à la concrétiser ou à la renforcer, tout ce qui contribue à élever celui-ci matériellement et spirituellement, tout ce qui constitue une utilité ou une amélioration sur la terre relève de la sharî’a et constitue un moyen d’en établir les fondements. Toute œuvre, tout effort qui vise à écarter l’injustice, l’oppression ou empêche la corruption et le préjudice sur la terre, entre dans le cadre de la sharî’a »[8]. Il s’agit là des principes en vigueur défendus par les sommités traditionnalistes, même si évidemment, selon les époques ou les avis propres à chacun, il y a des choses à revoir ou des avis qui évoluent avec le temps et l’espace.


[1] Nous entendons par là, le fait de détacher la politique et la société des normes traditionnelles de la Religion, pour lui supplanter le droit positif moderne et la vision mercantile des relations humaines et internationales, excluant de plus en plus la spiritualité de la sphère publique.

[2] Un cas récent est celui de Metmati Maamar en France, qualifié « d’islamiste » par la presse et de « traditionnaliste » par des réformistes. Or ce qu’ils ne disent pas, c’est que Metmati ne savait même pas comment prier correctement, s’en prenait à pratiquement tous les prédicateurs musulmans, contestait beaucoup de points doctrinaux et juridiques du sunnisme traditionnel, et était libre de diffuser ses vidéos radicalistes pendant près de 20 ans. Sans même parler de sa vie de truand et d’escroc avant même qu’il se mette à parler d’islam Il n’était pas traditionnaliste, de plus il critiquait des Compagnons proches du Prophète (mais Metmati n’était pas shiite pour autant), ce qui le disqualifie du point de vue du sunnisme traditionnel. Il était réformiste et autodidacte, et était déjà un voyou notoire avant qu’il ne se mette à parler d’Islam. Il vivait comme un moderniste consumériste et non pas comme un traditionnaliste : “Un islamiste fiché S soupçonné d’avoir détourné plus de 4 millions d’euros”, Le Parisien, 14 novembre 2020 : https://www.leparisien.fr/faits-divers/un-islamiste-fiche-s-soupconne-d-avoir-detourne-plus-de-4-millions-d-euros-14-11-2020-8408357.php

[3] Dans la Sunnah, certains récits sont dits « mutawatir » (transmis par de nombreuses voies indépendantes les unes des autres, excluant donc la possibilité de mensonge concerté) et d’autres qui sont « ahad » (singuliers, transmis par une ou quelques voies de transmission seulement, ne garantissant pas, à eux seuls, une certitude « totale » ou « catégorique », et peuvent donc être relativisés ou rejetés s’ils contredisent formellement le Qur’ân, la Sunnah mutawatir, l’expérience fiable, un fait historique bien établi, des observations directes, etc.).

[4] Ibn Kathir dans al-Bidaya wa al-nihaya 1351/1932, 14/45, As-Suyûtî dans Husn al-muhadara fi akhbar mirs wa al-qahira 1299/1880, 1/301 et d’autres ont fait allusion à ce débat.

[5] As-Shâtibî, Al-Muwâfaqât, 1/402.

[6] Ibn Al Qayyim, I’lâm al Muwaqqi’în, Ibn Qudama dans Al-Mughnî 8/278.

[7] Voir Sâlim al-Bahnasâwî, al-Khilafa wa al-Khulafa’ ar-Rashidûn, p. 165.

[8] ‘Abd Allâh al-Mâliki, La souveraineté de la Umma passe avant l’application de la Sharî’a, éd. Maison d’Ennour, 2018, p.41, traduit par le Shaykh Corentin Pabiot ; cité aussi par Ahmad Ar-Rîsûnî dans Al-Fikr al-islamî wa Qadâyâ-nâ as-Siyâsiya al-Mu’âsira, p. 83.


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