Les mérites de notre maître et calife ‘Uthmân ibn Affân

Il est ‘Uthmân Ibn Affân ibn Abî al-‘Âs ibn Umayya ibn ‘Abd Shams ibn ‘Abd Manâf ibn Qusayy ibn Kilâb (1), et c’est en la personne de ‘Abd Manâf que sa lignée rencontre celle du Prophète Muhammad (‘alayhî salât wa salâm). Du côté de sa mère, Arwâ bint Kurayz ibn Rabî’a ibn Habîb ibn ‘Abd as-Shams ibn ‘Abd Manâf ibn Qusayy était la fille d’Umm Hakîm al-Baydâ’ bint ‘Abdul Muttalib, sœur du père du Prophète. Selon Az-Zubayr al-Bakkâr ils étaient jumeaux. ‘Uthmân était ainsi le fils de la fille de la tante paternelle du Prophète Muhammad (‘alayhî salât wa salâm) et le Prophète était le fils de l’oncle maternel de sa mère, ce qui établit leur lien de parenté. La mère de ‘Uthmân devint musulmane et décéda durant le règne califal de son fils (‘Uthmân). Il la porta à sa tombe de ses propres mains (2), – quel noble fils ! -. Quant à son père, il décéda avant l’avènement de l’Islam.

   Il est ‘Uthmân Ibn Affân, « l’homme aux 2 lumières », le pieux, le pudique, le calife bien-guidé, le compagnon intime du Prophète, le généreux envers les musulmans et envers ses proches, le réciteur du Qur’ân et de sa transmission, celui qui subit de terribles tortures afin de le pousser à abandonner l’Islam, celui qui émigra par 2 fois sur ordre du Prophète, celui qui exécuta des missions d’une importance capitale pour le Prophète et sa communauté, celui dont son arbre généalogique rejoint celui du Prophète !

   L’avis le plus solide établit sa naissance à la Mecque, – mais certains le situent à Tâ’if -, environ 6 ans après l’année de l’Eléphant en 576 de l’ère chrétienne (3).

  ‘Uthmân Ibn Affân fit un songe spirituel où Allâh lui annonça la venue du Prophète Ahmad (Muhammad) lors de son retour à la Mecque depuis la Syrie. En route, il vit son ami Abû Bakr (en compagnie de Muhammad) qui l’invita à embrasser l’Islam, et après lui avoir expliqué l’Islam puis lui avoir récité des versets du Qur’ân, il eut la certitude spirituelle, où la prémonition se confirme dans la réalité, et il embrassa l’Islam. Avant même sa conversion à l’Islam, il n’était pas de ceux qui adoraient des idoles ni ne se prosternait pour eux. Il n’était pas de ceux qui buvaient de l’alcool ou qui commettaient l’adultère, et il était quelqu’un de très pudique. On rapporte qu’il fut le 4ème homme à se convertir à l’Islâm après Abû Bakr, ‘Alî et Zayd ibn al-Hâritha. Alors que l’Islam était « faible » et que les croyants étaient persécutés, et qu’il était riche et très apprécié par les arabes du Hijaz, il embrassa l’Islâm, se mit au service du Messager d’Allâh, dépensa sa fortune pour sa cause, avait une foi inébranlable en Allâh, endura les pires sévices de la part des idolâtres dans le but de lui faire abjurer de la foi musulmane, mais il endura tout cela au point d’en lasser ses tortionnaires qui finirent par le libérer. Tout cela démontre sa sincérité et son amour pour Allâh et Son Messager. Qui donc, parmi ses détracteurs, peut se targuer d’avoir accompli ne serait-ce qu’1/100ème de ses mérites ? Bien plus, non seulement ils n’ont rien accompli de similaire, mais ils insultent les proches compagnons du Prophète, ses épouses, ses cousins et les gens de sa proximité, calomnient et persécutent des croyants, et profèrent des paroles impures et obscènes, signes de leur égarement manifeste.

   Il dépensa ainsi sa fortune au service de l’Islam, devint un compagnon intime du Prophète, avait une belle récitation du Qur’ân (que le Prophète aimait particulièrement) et l’enseignait aux autres compagnons. Il lui arrivait de réciter parfois presque tout le Qur’ân en une seule nuit, sa pudeur impressionnait même le Prophète, il épousa Ruqayya la fille du Prophète et eut un fils nommé Abdullâh avec elle, mais qui mourut à l’âge de 6 ans. Il épousa ensuite une autre fille du Prophète, Umm Khultûm lorsque Ruqayya décéda. On dit de ‘Uthmân qu’il était très beau, et que Ruqayya l’égalait en beauté, et qu’ils étaient considérés comme l’un des plus beaux couples. Sa vie tournait autour du Qur’ân et le Prophète dit de lui le plus grand bien. Plusieurs versets du Qur’ân font allusion aux mérites de ‘Uthmân Ibn Affân. Quiconque le méprise, l’insulte ou le maudit, s’oppose ainsi à Allâh et à Son Messager.

Le fait que le calife ‘Uthmân accepta comme gardes rapprochées les imâms Hassân et Hussayn, – sur ordre de l’imâm ‘Alî, témoigne de la confiance et de la proximité qu’il leur témoignait. Et si ‘Alî chargea ses fils, les prunelles de ses yeux, de protéger le Calife ‘Uthmân, c’est qu’il lui faisait confiance, qu’il était considéré a minima comme un calife légitime, n’étant pas foncièrement injuste ni pervers, ni mécréant, sinon il n’aurait jamais associé ses enfants au règne et à la protection d’un calife injuste, mécréant, usurpateur et pervers.

Plusieurs sources shiites admettent ce fait, tandis que d’autres, – contredisant les récits notoires et fiables à ce sujet – émettent des doutes mais admettent tout de même l’hypothèse et ont tenté de la concilier avec leur dogme (cf. Jaʿfar Murtadâ al-ʿÂmilī, al-Sahîh min sîrat al-Imâm ʿAlî, p. 313 ; Sayyid Murtadâ, al-Shâfî fi l-imâma 4/242).

(1) Ibn Sa’d, at-Tabaqât al-Kubrâ 3/53 ; Ibn Hajar al ‘Asqalânî, al-Isâba 4/377 n°5463

(2) Al-Yahyâ, al-Khilâfat ar-Râshida, 388.

(3) Ibn Hajar al ‘Asqalânî, al-Isâba 4/377 n°5464.

Les éloges d’Allâh et du Prophète Muhammad (‘alayhî salât wa salâm) son égard

   Comme pour les autres califes bien-guidés, le Calife ‘Uthmân fut agréé par Allâh et Son Messager. Ainsi, le Qur’ân y fait allusion dans plusieurs passages, ainsi que plusieurs paroles prophétiques bien authentifiées.

   Parmi les paroles prophétiques, citons : « Le plus sérieux de cette Ummah en termes de pudeur est ‘Uthmân »[1].

   Juste avant l’expédition de Tabûk, – alors qu’Uthmân dépensa une grande part de sa fortune en charité -, le Messager d’Allâh dit : « Après ce jour, ‘Uthmân ne sera pas touché par le mal (dans son cœur) ; après ce jour ‘Uthmân ne sera pas touché par le mal »[2].

   Al-Bukharî relate dans son Sahîh que le Prophète prédit une calamité qui le toucherait ainsi que l’heureuse nouvelle du Paradis (il mourut en martyr) qui suivre cette calamité.

Allâh a dit : « Et ceux qui, pour (la cause d’) Allâh, ont émigré après avoir subi des injustices, Nous les installerons dans une situation agréable dans la vie d’ici-bas. Et le salaire de la vie dernière sera plus grand encore s’ils savaient » (Qur’ân 16, 41).

« Dis : « O Mes serviteurs qui avez cru! Craignez votre Seigneur ». Ceux qui ici-bas font le bien, auront une bonne [récompense]. La terre d’Allâh est vaste et les endurants auront leur pleine récompense sans compter » (Qur’ân 39, 10).

Ces versets parlent en premier lieu des premiers musulmans qui ont émigré en Abyssinie, après avoir subi des injustices (dont la torture), et qui accompagnèrent Jâ’far Ibn Abû Tâlib (le cousin du Prophète, et frère de l’imâm ‘Alî), et parmi ceux-là, figuraient ‘Uthmân et son épouse Ruqayya (fille du Prophète Muhammad), voir notamment le récit de Ibn ‘Abbâs (cf. Al-Qurtûbî dans son Tafsîr 10/107).

De même, ce verset le concerne également : « Est-ce que celui qui, aux heures de la nuit, reste en dévotion, prosterné et debout, prenant garde à l’au-delà et espérant la miséricorde de son Seigneur… Dis : « Sont-ils égaux, ceux qui savent et ceux qui ne savent pas? ». Seuls les doués d’intelligence se rappellent » (Qur’ân 39, 9). La nuit où ‘Uthmân fut encerclé lorsque ses opposants étaient venus le tuer, – alors qu’il refusa de les traquer par compassion -, son épouse leur dit : « Tuez-le ou bien laissez-le tranquille, car je jure par Allâh qu’il restait debout toute la nuit pour réciter le Qur’ân (tout entier) en une seule unité de prière ! » (Rapporté notamment par Ibn Kathîr dans al-Bidaya wa an-Nihaya 7/225, et de nombreux autres récits vont dans le même sens, cf. Al-Yahyâ dans al-Khilâfat ar-Râshida, p. 397).

Allâh lui annonce donc la bonne nouvelle du Paradis et montre Son Agrément le concernant !

Parmi les paroles que l’on rapporte du Calife ‘Uthmân Ibn ‘Affân, il y a celles-ci :

« Si nos cœurs étaient purs, ils ne se lasseraient jamais du discours d’Allâh (Qur’ân), le Puissant, le Majestueux » (rapporté notamment par Ibn Kathîr dans al-Bidaya wa an-Nihaya 7/225 et par Ibn Taymiyya dans Majmû’ al-Fatawa 11/122).

« Assurément, je détesterais que vienne un jour où je ne regarde pas le pacte d’Allâh (Qur’ân) » (rapporté notamment par Ibn Kathîr dans al-Bidaya wa an-Nihaya 7/225 et par ‘Ashûr dans Farâ’îd al-Kalâm p.270).

« 3 choses de ce bas-monde m’ont été rendues plaisantes : rassasier ceux qui ont faim, habiller ceux qui n’ont rien (pour se vêtir décemment) et réciter le Qur’ân » (Rapporté notamment par As-Salmân dans Irshâd al ‘Ibâd p.88).

« 4 choses sont vertueuses en apparence mais elles contiennent une obligation cachée : la compagnie des pieux est une vertu et il est obligatoire de suivre leur exemple, la récitation du Qur’ân est une vertu et il est obligatoire d’agir selon ses enseignements, la visite des tombes est une vertu et il est obligatoire de se préparer pour la mort, et enfin, la visite des malades est une vertu et il est obligatoire de recueillir leur testament » (Rapporté notamment par As-Salmân dans Irshâd al ‘Ibâd p.90 et par ‘Ashûr dans Farâ’îd al-Kalâm p.278).

« Les plus grands gaspillages sont au nombre de 10 : un savant (véridique) qui n’est pas consulté, un savoir utile qui n’est pas appliqué, un avis correct qui n’est pas accepté (par ego ou par ignorance), une arme qui n’est pas utilisée (dans ce qui est juste et nécessaire), une mosquée où personne ne prie, un exemplaire du Qur’ân qui n’est pas lu, de l’argent qui n’est pas dépensé (dans le licite et le louable), un cheval que personne ne monte (dans le convenable), la connaissance de ce qu’est l’ascèse spirituelle lorsqu’elle tombe dans le ventre d’une personne qui désire la vie présente (éphémère), et les longues années de vie de ceux qui ne se préparent pas pour leur séjour céleste (après la mort terrestre) » (Rapporté notamment par As-Salmân dans Irshâd p.90 et par ‘Ashûr dans Farâ’îd al-Kalâm p.278).

Un jour, alors qu’il avait mémorisé entièrement le Qur’ân, on l’interrogea à ce propos et il dit : « Il est béni (le Qur’ân), apporté par quelqu’un de béni (le Prophète Muhammad) » (rapporté notamment par Al-Jâhizh dans al-Bayân wa at-Tabyîn 3/177, par ‘Ashûr dans Farâ’îd al-Kalâm p.273).

Il rapporta également ce hadîth prophétique : « Le meilleur d’entre vous est celui qui apprend le Qur’ân et l’enseigne » (Rapporté notamment par al-Bukharî dans son Sahîh).

Son rang dans l’ésotérisme islamique

   Le maître spirituel, l’imâm doté de solides connaissances dans les sciences islamiques, un océan de savoir doté de charismes et de dévoilements spirituels, l’illustre poète, l’amoureux du Très-Haut, le serviteur muhammadien, la fierté du monde persan, le martyr face aux mongols, le célèbre Farîd ud-Dîn Attâr a écrit dans son Manṭiq al-ṭayr (Le langage des oiseaux) ce magnifique poème en l’honneur de notre maître ‘Uthmân Ibn Affân, l’homme aux deux lumières (qui épousa deux filles du Prophète, la seconde lorsque la première décéda), le pudique, le calife, celui qui fut calomnié, le généreux, le proche du Prophète, le calife des musulmans, celui auquel le Prophète l’associa dans son amour, le martyr :

« Seigneur de la tradition, lumière grandiose
Et plus même puisqu’il possédait les deux lumières (1)

Lui, plongé dans la sainteté et la gnose
‘Uthmân, fils d’Affân, sommet de la religion

L’élévation qu’acquit la bannière de la foi
Elle l’acquit par ‘Uthmân, commandeur des croyants

La lumière de son coeur, lui l’homme aux deux lumières
Fut un titre de gloire acquis par les deux mondes

Un deuxième Yûsuf, au dire de Muhammad
Océan de vertus, mine de fidélité.

Lui qui donna sa vie pour défendre les siens
Qui les favorisa au risque de tout perdre

On lui trancha la tête justement pour cela
Lui demandant des comptes d’avoir placé ses proches (2)

Il déploya son art en matière de guidance
Et ce fût en son temps que s’étendit (considérablement) l’Islam

La foi se répandit dans le monde en son temps
Le Qur’ân par son ordre fut enfin rassemblé (en un corpus unique)

Le sayyîd des seigneurs disait à son propos :
« Même les anges aux cieux s’inclinent devant lui ! »

Et le Prophète a dit qu’au Jour du dévoilement
Allâh ne demandera pas de comptes à ‘Uthmân

Comme il n’était pas là le jour de l’Alliance
Le Prophète lui-même pour lui scella le pacte (3)

Ceux qui étaient présents s’exclamèrent : « Comme ‘Uthmân
Ah, si nous aussi, nous avions été absents ! » »
.

En effet, son caractère ressemblait beaucoup à celui du Prophète Yûsuf (‘alayhî salâm), il était doux, généreux, humble, pudique, compatissant, patient et beau.

(1) Son nom des Deux Lumières lui vient du fait qu’il a épousé 2 filles du Prophète, Ruqayya et Umm Khaltûm, ainsi que du fait qu’il passait ses nuits à prier et à lire le Qur’ân, qui sont aussi des lumières pour le croyant.

(2) C’est ce que lui ont reproché un certain nombre de personnes. Or, tout d’abord mettre ses proches n’est pas un péché en soi si cela permet de bien administrer l’empire, ensuite sur la totalité des gouverneurs et responsables sous son règne, même pas la moitié n’était des membres de sa famille. Toutefois, certains opportunistes et hypocrites se sont retournés contre ‘Uthmân et ont alimenté la fitna. Des shiites lui feront le même reproche alors que pour eux, seuls des ahl ul bayt doivent être califes et proches du pouvoir, ce qui est incohérent. (3) Le jour où le Prophète passa un pacte de fidélité et l’allégeance avec ses compagnons, ‘Uthmân était absent en raison d’une mission importante que le Prophète lui avait confié, et c’est pourquoi le Prophète étendit le bras en son nom pour sceller leur engagement, car connaissant les qualités d’Uthmân et la sincérité de sa foi.


[1] Hadîth rapporté par Ahmad.

[2] Hadîth rapporté par At-Tirmidhî dans ses Sunân.


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