Réflexion sur la spiritualité, le fiqh et la modernité : les écueils à éviter dans le cheminement

L’absence de spiritualité engendre une hypertrophie du juridique dans une approche limitée à l’apparence extérieure, – et tombant in fine dans le rigorisme le plus abscons et grossier qui soit, et limite également les aspirations spirituelles et empêche ainsi le développement des vertus et de la perspicacité. A contrario, l’ignorance du fiqh dans ce qu’il comporte d’utile et de nécessaire, engendre des fléaux et un laxisme conduisant à la débauche et à la décadence d’une société. Comme l’ont enseigné les grands maîtres, il faut que les gens apprennent les fondements de la ‘aqida et du fiqh, et ensuite, se focaliser sur l’éducation de l’âme afin de se rapprocher d’Allah et de se départir des vices et des mauvaises pensées. Chez les rigoristes, le fiqh ne résout pas les problèmes, et ceux qui suivent leurs passions ne feront rien pour se réformer ni pour atteindre l’idéal prophétique. Ils compensent alors par une focalisation des choses superficielles tout en jugeant les gens sur tout et sur rien, et sans adopter un bon adab. Chez les réformistes qui négligent ou rejettent l’éducation de l’âme, on observe une propension au scientisme, au sécularisme, à l’hystérie, et au matérialisme, adoptant ainsi une approche superficielle des textes, et les pliant aux idéologies en vogue du moment ainsi qu’à leurs passions (changeant selon les types de réformistes) – ou rejetant les textes quand ceux-ci sont difficilement interprétables et conciliables avec leurs postulats et passions.
Nous avons ainsi vu chez beaucoup de réformistes, des interprétations confortant leurs opinions égotiques (pour certains ; rejet de la Salât obligatoire, rejet de la Zakât, approbation de la fornication, autorisation pour les femmes de se marier avec des hommes rejetant le Qur’ân et le Messager d’Allâh alors qu’une lecture attentive et déductive du Qur’ân montre qu’Allâh l’interdit, que la trinité théologique est conforme au Tawhîd au sens large, etc.).

Si les gens de la masse ne se destinent pas à devenir des juristes ou des théologiens, il n’y a nul besoin pour eux d’entamer de longs cursus théologiques et juridiques, se perdant dans d’abondants différends et détails, et pour eux, c’est l’éducation spirituelle qui prime et qui permet véritablement de cultiver les plus beaux traits de caractère et de développer, par Don Divin, une plus grande perspicacité, se passant ainsi des divergences ou développements juridiques, n’étant rendus possibles que par l’apparition des excès et des dérives du comportement, qui n’auraient pas vus le jour si les gens s’étaient déjà convenablement éduqués spirituellement, ne laissant pas cours à leurs passions, à leurs mauvaises pensées ou à leurs pratiques déviantes. Au plus la spiritualité et l’éthique s’amenuisent, au plus les problèmes de comportement apparaissent et se radicalisent, et ce, dans tous les courants (des plus traditionnalistes au plus modernistes, bien que chez les traditionnalistes, en général l’apprentissage de l’adab, – même le plus superficiel – et le fait de s’éloigner de certaines turpitudes, les préservent plus que les autres, de certains fléaux modernes, sauf s’ils ne mettent pas en pratique ce qu’ils ont appris). Par ailleurs, le fiqh fixe les statuts juridiques sur le plan théorique, mais sans éducation spirituelle ou sans sanction juridique (appliquée par l’Etat), cela n’empêchera pas pour autant les individus de transgresser la Loi, soit ouvertement, soit discrètement ou par des moyens détournés.

C’est donc toujours cet équilibre que le croyant doit chercher et atteindre, s’éloignant ainsi de tous les dangers qui guettent son cheminement.

On pourrait résumer tout cela en disant que la religion doit être le fondement et le reflet de l’adab, et que donc, celui qui n’a pas d’adab n’a pas véritablement de religion, et que celui qui néglige l’adab, a négligé la religion.


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