Depuis le 18e siècle, la communauté musulmane dans son ensemble a été secouée et éprouvée par le wahhabisme, qui est une idéologie apparue au 18e siècle, à une époque où le monde musulman connaissait une certaine décadence civilisationnelle et intellectuelle – mais pas encore totale et généralisée -. Il faut distinguer toutefois le wahhabisme najdite (qui prend essentiellement ses références des écrits de Mohammed Ibn Abdel Wahhâb et non pas d’autres références, et contenant déjà cette tendance au takfirisme, au sectarisme et aux confusions doctrinales et juridiques diverses, et ce bien que la forte opposition à l’autorité ottomane sera le fait plutôt de ses successeurs directs), du salafisme, qui, bien qu’en prenant ses racines idéologiques et méthodologiques du wahhabisme najdite, est toutefois plus mesuré dans le takfir, peut puiser dans d’autres références (soit contemporaines de Mohammed Ibn Abdel Wahhâb, soit plus ancienne) avec certains savants réellement érudits et respectueux malgré de profonds désaccords avec les sunnites traditionnels et les autres courants de l’Islam. Et il y a le salafisme moderniste issu de la « Nahda », où des figures réformistes et plutôt « rationalistes » (influencés considérablement par les superstitions et les idéologies occidentales de leur temps) ont tenté une approche (assez superficielle) nouvelle pour réformer les conceptions religieuses mais teintées d’une forte méconnaissance des contradictions et dérives de la modernité et une mauvaise méthodologie dans l’interprétation des sources, comme Muhammad Abduh et Jamal ad-Dîn al-Afghani (avec des liens troubles avec la franc-maçonnerie dégénérée et spéculative) pour ne citer que les plus connus.
Le Shaykh Ibrâhîm Ar-Râwî Ar-Rifâʿî (1860 – 1946), de son nom complet Ibrâhîm Ibn Muhammad Ibn ʿAbd Allâh Ibn Ahmad Ibn Rajab Ibn ʿAbd Al-Qâdir Ar-Râwî Ar-Rifâʿî Al-Hussaynî – un descendant du Prophète Muhammad (ﷺ) -, fut un savant gnostique du Tasawwuf, un juriste shafi’ite, théologien, exégète, muhaddith et Shaykh de la Tarîqa Rifâʿiyyah en Irak et un éducateur pour les aspirants à la voie de l’au-delà. Il vécut au service des musulmans et laissa à la postérité des ouvrages bénéfiques. Auteur de plusieurs ouvrages, mentionnons celui-ci : Al-Awrâq Al-Baghdâdiyyah fil-Hawâdith An-Najdiyyah, Épître de Baghdâd au sujet des événements de Najd, imprimé en 1926 à Baghdâd dans lequel il expose les discordes et les crimes perpétrés au Najd par les groupes armés wahhabites.
Comme le rapporte al-Bukharî dans son Sahîh n°7094 ainsi qu’At-Tirmidhî dans ses Sunân n°3953 sous l’autorité de Ibn ‘Umar que le Prophète (ﷺ) a dit : « Ô Allâh ! Accorde Tes bénédictions sur notre Shâm ! Ô Allâh ! Accorde Tes bénédictions sur notre Yémen. Les gens ont dit : « Et aussi sur notre Najd ». (Il répéta ces invocations une 2ème fois), – et je pense que la 3ème fois, le Prophète (ﷺ) a dit : « Là (au Najd) est le lieu des tremblements de terre et des afflictions et de là sortira la corne (ou le fer de lance) de Shaytân ». Si certains savants ont voulu identifier le « Najd » à l’Irak comme l’imâm al-Khattâbi comme l’a mentionné Ibn Hajar dans son Fath ul Bârî’ (47/13) : « Nous trouvons concernant la direction de l’Est, et concernant celui qui est à Médine, que son Najd, était la région de l’Irak et ses alentours, c’est cela le Najd des gens de Médine … », mais cela n’est pas exact – et Allâh sait mieux -, puisque ces personnes-là étaient des Arabes issus de la péninsule arabique et non pas d’Irak – qui était déjà désigné par d’autres termes que « Najd ».
D’ailleurs, le Najd se situe bien à l’Est de Médine lorsque l’on prend une carte géographique, et les savants salafis eux-mêmes en Arabie se désignent comme étant les savants du « Najd » et se caractérisent par leurs déviances et leur fanatisme en matière de religion depuis l’avènement du wahhabisme dans le Najd. S’il est exact que d’autres contrées ont vu émerger l’apparition de certaines sectes ou déviances, du point de vue historique et islamique, le Najd saoudien eut un impact majeur et dévastateur pour le monde musulman. Par ailleurs, les savants hanbalites du Najd – y compris les tayyimiyyens parmi eux – ont identifié la prédication de Mohammed Ibn Abdel Wahhâb à cette fitna annoncée par le Prophète Muhammad et à ce type particulier des khawarij, et ce, bien que les disciples de Mohammed Ibn Abdel Wahhâb furent plus radicaux et fanatiques que lui. Ce sont des centaines de savants de renom qui ont critiqué et réfuté ce mouvement et sa prédication à leur époque, comme par exemple le propre frère de Mohammed Ibn Abdel Wahhâb, Sulaymân, ainsi que des savants hanbalites et malikites divers – pas forcément taymiyyiens – comme le savant et Muftî Ibn Humayd al Hanbalî (m.1295 H) et son grand-père Muhammad, le Shaykh Muhammad Ibn Fayrûz, le Shaykh Uthmān Ibn Sanad al Basrî al Mâlikî, le Shaykh ‘Abdullâh Ibn Ahmad Ibn ‘Abdullâh Ibn Suhaym, le Shaykh Sulaymân Ibn Suhaym al Hanbalî (m. 1181 H), le Muftî Marî Ibn Yûsuf al Karmî al Hanbalî (m.1033 H), le Shaykh ‘Abd al Hayy Ibn al Imâd al Hanbalî (m.1089 H) et bien d’autres ont réfuté, directement ou indirectement, les déviances et ont dénoncé les dérives et actes relevant de l’égarement et de l’horreur, commis par le fondateur du wahhabisme et ses disciples issus des premières générations. Que ce soit dans le fiqh, la ‘aqida, la politique, le tasawwuf et autres, ils ont proposé de très belles et bonnes réfutations de façon générale, malgré quelques points perfectibles ou qui ne sont pas propres aux wahhabis.
Il s’agit donc bien de la région de la péninsule arabique dont la capitale est Riyad, se trouvant à l’Est de Médine.
Le Shaykh Ibn Taymiyya dans son Bayan talbis bayan al-jahmiyya (1/17-23) dit d’ailleurs ceci : « Il a été rapporté d’une manière récurrente « tawatûr » que le Prophète a informé que la discorde et la source de la mécréance proviendront de l’Est c’est-à-dire de l’Est de Médine comme la région de Najd et ce qui est l’Est du Najd (…). Et il n’y a pas de doute que c’est de ceux-là que s’est produit l’apostasie et d’autres sortes de mécréance, de Musaylimah al Kadhdhab (le menteur) et ceux qui l’ont suivi, de Tulayhah al-Asadî et ceux qui l’ont suivi et de « Sajah » et ceux qui l’ont suivi ». Il faut donc analyser la chose et voir quels ont été les fruits de la wahhabiyya najdiyya – qui était un courant fort différent de la wahhabiyya/salafiyya du sous-continent indien à plus d’un titre -. Et là, même s’il y a quelques points positifs que nous énumérerons plus loin, le bilan est globalement catastrophique et terrible : ignorance, fanatisme, troubles majeurs, trahisons, apostasie, confusions permanentes, absence de spiritualité et d’intelligence dans le fiqh, rupture majeure avec l’Islam traditionnel et civilisationnel, et de multiples courants radicaux et terroristes – même si manipulés et financés parfois par les puissances non-musulmanes – qui ont semé le chaos dans le monde musulman et qui ont Sali l’honneur des musulmans et l’image de l’Islam. Le monde musulman ne s’est guère redressé avec le wahhabisme, mais a été plongé dans une succession d’épreuves terribles, qui ont eu une répercussion sur pratiquement l’ensemble des musulmans, encore de nos jours.
Si les salafis ont raison de rappeler les « principes » et notions islamiques que le Qur’ân et la Sunnah évoquent comme l’importance de prendre le Qur’ân et la Sunnah comme sources de l’Islam, la nécessité du Tawhid, le danger et la gravité du shirk, la notion du takfir qui est parfois nécessaire, la mise en garde contre la bid’a, le principe de l’alliance et du désaveu (Al-wala’ wal-bara’), – et en cela c’est ce que disent et expliquent aussi les savants sunnites traditionnels du passé comme de notre époque, et ce conformément à la Parole divine -, le problème se situe plutôt dans leur mauvaise compréhension et définition erronée de ces notions et principes, au point où ils ignorent ce qui relève du shirk et ce qui relève du Tawhîd, et ont du mal à distinguer ce qui est halal du haram, et le haram du shirk. Certains font toutefois la distinction (à juste titre) entre un acte annulatif de l’Islam (dont un acte qui peut s’apparenter à la mécréance ou à l’idolâtrie – bien qu’on parlera plutôt ici d’intention et de doctrine, car l’idolâtrie dépend avant tout de la doctrine et de l’intention, tandis que la mécréance relève plutôt d’un acte manifeste qui a été établi sur des preuves) et le fait de déclarer untel mécréant (kafir) ou idolâtre (mushrik) et d’en faire le takfir (accusation d’apostasie). Un acte annulatif de l’islam n’implique en effet pas nécessairement d’être mécréant ou idolâtre, car il faut en établir la preuve, voir le contexte, connaitre l’intention et la finalité de la personne, savoir si elle fut sous la contrainte ou en état mental de démence, etc.
Si l’on met de côté le fanatisme (de base) du wahhabisme, – dont certains wahhabites et salafis ont été préservés par la Grâce divine grâce à leur fitra ou d’autres lectures (références non-wahhabites) – et ses déviances et confusions, il faut noter toutefois que, en dépit de la superficialité de cette approche et de leurs discours, cela a permis, au sein d’une population ignorante, de renouer avec certaines notions islamiques fondamentales, ainsi qu’avec les rites islamiques. Néanmoins, comme nous souhaitons le bien aux autres, il faut leur indiquer les erreurs et confusions engendrées par le wahhabisme, et leur indiquer de meilleurs conseils, leur donner de meilleures références, et vouloir pour eux, la meilleure compréhension possible des Textes, et de cultiver la sagesse et la connaissance bénéfique.
Sur le tawassul et le tabarruk que certains considèrent comme étant du shirk ou a minima comme étant de la bid’a, alors que ce sont des actes institués en Islam (entre la simple permission et la recommandation) tout à fait conformes au Tawhîd pour ceux qui ont une bonne ‘aqida[1]. Le fait de s’allier militairement avec des non-musulmans est aussi permis tant que cela n’implique pas de commettre le shirk ou de cautionner le kufr ni de causer de l’injustice ou instituer la tyrannie et que cela ne vise donc pas à rabaisser la Parole divine et à s’en prendre aux croyants pour leur pratique religieuse et leurs nobles valeurs en tant que telles.
Chaque jour pratiquement, ils polémiquent et accusent des musulmans d’avoir commis du shirk alors que ce n’est pas toujours du shirk, et cela car leur compréhension du shirk est trop étriquée, et ne correspond pas à la définition qurânique et à la tradition prophétique, ni à ce qu’ont écrit nos imams comme Mâlik, Ahmad, Abû Hanifa, Abû Hâmid al-Ghazâlî, Ibn Hajar al-Haytamî, etc. Ce qui a été fait (parmi ce qu’ils condamnent) peut relever tout au plus du harâm et non pas du shirk (si leur intention n’était pas d’adorer autre qu’Allâh) car rien dans leurs accusations ne permet de penser qu’ils (les personnes accusées) ont considéré la représentation/statue comme une divinité ou comme une chose à être adorée en même temps qu’Allâh, ou de prier cette représentation au lieu d’Allâh, ou de lui attribuer un Attribut propre à Allâh. Même chose pour les amulettes ou la main de Fatma, tout dépend de l’intention et de l’aqida à ce sujet. Souvent, ils se basent sur un hadith dont ils ignorent le contexte et les conditions pour en tirer une règle. Par exemple ce hadîth rapporté par Ahmad du Messager d’Allâh (ﷺ) : « Quiconque porte une amulette (tamimah) aura associé quelque chose à Allâh ». Mais comme l’explique le savant Ibn Athir dans Al Nihayah fi gharib al hadith wal athar (1/197-198) sur la tamimah ce sont : « Des petits sachets en cuir que les arabes accrochaient à leurs enfants pour les protéger du mauvais œil selon ce qu’ils pensaient. L’Islam a mis fin à cette pratique (…). Quiconque porte une amulette (tamimah) aura associé quelque chose à Allâh » comme s’ils croyaient que ces amulettes amenaient la guérison complète. Allâh a déclaré cela comme étant de l’association car ils voulaient par ces amulettes repousser les décrets écrits. Ils voulaient donc repousser le mal sans l’aide d’Allâh qui est Le Seul à les repousser ».
L’Islam autorise toutefois l’amulette qui aura été faite avec des formules conformes à l’Islam comme les invocations tirées du Qur’ân, de la Sunnah ou des paroles des awliya’ et des salihîn qui sont conformes à l’Islam. Le Qur’ân comme le Messager d’Allâh (ﷺ) ont permis de se soigner avec ce qui ne comporte pas du shirk ni des choses toxiques ou néfastes pour la santé (mentale, corporelle et spirituelle).
Le traditionniste, juriste et ascète du Salaf Ibn Abî Shayba (159 – 235 H) a relaté plusieurs récits à ce sujet dans son célèbre Musannaf au chapitre portant sur les amulettes :
Selon Ibn ‘Umar, le Messager d’Allâh (ﷺ) a dit : « Si l’un d’entre vous est apeuré pendant la nuit, qu’il dise : « je demande la protection d’Allâh par Ses paroles Complètes contre Sa Rigueur, ainsi que Sa correction, du mal provenant de Ses serviteurs et du mal des shayatin et ce à quoi ils assistent ». ‘Abdullâh enseigna ces paroles à ses enfants qui atteignaient le discernement. Quant à ceux qui n’étaient pas clairvoyants, il le leur écrivait et le leur faisait porter ».
Selon Abû ‘Ismah : « j’ai interrogé Sa’id Ibn Musayyib sur l’amulette et il dit : « il n’y a aucun mal si c’est dans du cuir pour le protéger ».
D’après Isma’il Ibn Muslim : « Ibn Sirin ne voyait pas de mal à faire (un ta’wiz) avec du Qur’ân ».
Selon ‘Ata ibn Abi Rabah, à propos de la femme réglée portant un ta’wiz : « S’il se trouve dans un sachet de cuir, qu’elle l’enlève. Mais s’il se trouve dans son bijou en argent, qu’elle le laisse si elle veut ou non ».
Pour l’imâm Mâlik et son école, l’avis retenu est la licéité comme cela est rapporté par exemple par Al ‘Utbiyah avec Al bayan wat Tahsil (1/438) : « L’imâm Mâlik fut interrogé sur ce qu’on accroche de versets qurâniques aux cous des femmes alors qu’elles ont leurs règles. Il dit : « je ne vois pas de mal à cela si c’est mis dans un étui en fer ou en cuir qui a été cousu. Il en est de même pour les enfants, je ne vois pas de mal à cela ». J’ai dit (à savoir Ashhab) : « Que dis-tu si cela est accroché à la femme sans rien pour le protéger ? » Il répondit : « Je ne vois pas que l’on doive faire cela. Il n’est pas correct de faire ainsi ». Il lui fut dit : « Vois-tu si on écrivait quelque chose pour une femme enceinte pour le lui accrocher ? » Il dit : « J’espère qu’il n’y a pas de mal à cela s’il s’agit du Qur’ân ou d’une invocation d’Allâh connue. Quant à ce qu’on ne connaît pas, ou bien une écriture en hébreu et tout ce qu’on ignore, je ne l’approuve pas ».
Comme cela est rapporté dans le Sharh Zarrûq ‘ala al Risalah (p. 1093) du Shaykh malikite Ahmad Zarrûq : « Quant aux amulettes, Ibn Rushd a rapporté 4 positions entre son interdiction et sa permission et le mashhur est le rapport de Ashhab. La permission est donc générale et catégorique et peut porter une amulette le malade ou le bien portant, la personne en état de janabah, la femme réglée ou en lochies et même les animaux. Il faudra cependant le mettre dans un étui pour le protéger ».
Et pour l’imâm al-Nafrawî dans Al Fawakih al dawanî (2/341) avec les commentaires du Shaykh Ibn Abi Zayd al Qayrawanî : « [Et il n’y a pas de mal d’user d’un talisman] c’est-à-dire une amulette connue parmi les gens sous le nom de Hirz [accroché] au cou de la personne ou à son bras [où se trouve] certains Noms ou des versets [du Qur’ân]. Il se peut que cette amulette soit accrochée aussi à des animaux et il est permis de la porter, même pour une femme menstruée ou en état de janabah et même si l’amulette comporte beaucoup de versets du Qur’ân tant que cela est protégé. Si ce n’est pas protégé, cela ne sera pas permis sauf s’il y a peu du Qur’ân comme un verset ou quelque chose de ce genre ».
Toutefois il ne faut pas se leurrer, beaucoup d’ignorants de nos jours qui ignorent le Tawhîd, et ce bien qu’ils croient globalement en Allâh, invoquent ou sacrifient parfois pour autre qu’Allâh, et croient que les amulettes ont une protection d’elles-mêmes, et tendent à oublier que c’est Allâh qui protège et qui guérit, même à travers les médicaments (car il se peut que ceux-ci n’apportent pas la guérison comme on peut souvent le constater) bien que ce soient là des causes secondes avec une certaine « opérativité » mais qui dépendent toujours du Divin en tant qu’Agent causateur de toutes les choses et causes créées et physiques. Le même principe s’applique pour ce qui symbolise la « main de Fatma », comme l’écrivait un frère sur son blog : « Certaines sciences traditionnelles sont complètement étrangères à nos mentalités modernes ; soit, elles sont ignorées, soit, elles sont réutilisées par des ignorants comme « arts divinatoires » totalement dépourvus de valeur doctrinale ; leur manipulation, en tant que résidus, ouvre la porte à toutes les influences les plus négatives et s’avère donc être une pratique dangereuse et prohibée.
Parmi ces sciences authentiquement traditionnelles qui fleurissaient en Islam, on trouve la chirologie (ilm el-kaff) (que les faussaires ont réduit à une vulgaire et trouble lecture des lignes de la main) qui traite de la science physiologique et de son fondement spirituel rattaché directement à la science des Noms divins –et des nombres-.
C’est ainsi que comme tout ce qui compose la création, la main n’est pas un hasard.
Les doigts sont composé de 14 phalanges, 28 pour les deux, correspondant aux 28 lettres de l’alphabet ( hurûf ) ; « la disposition des lignes principales trace dans la main gauche le nombre 81 et dans la main droite le nombre 18, soit au total 99, le nombre des Noms divins ». (1)
Sa forme est une représentation du Nom « Allah » :
L’auriculaire correspond à l’Alif
L’annulaire au premier lam,
Le majeur et l’index au second lam, qui est double
Le pouce au H (qui régulièrement doit être tracé sous sa forme « ouverte »)
Et c’est la raison principale de l’usage de la main comme symbole si répandu en Islam.
« On peut comprendre par là, la signification de cette parole du Sifr Seyidna Ayüb (Livre de Job, XXXVII, 7) « Il a mis un sceau (khâtim) dans la main de tout homme afin que tous puissent connaître Son œuvre » ; et nous ajouterons que ceci n’est pas sans rapport avec le rôle essentiel de la main dans les rites de bénédiction et de consécration », (2) influx spirituel (barakah) sanctifiant et protecteur.
Une raison secondaire à l’usage de la main se réfère au nombre 5, centre des neuf premiers nombres, d’où le nom de Khoms (5), qui est le véritable nom de sa représentation symbolique.
– L’islam est basé sur 5 piliers de même que les 5 doigts sont unis et soumis à l’unité de la main.
– Le musulman accomplit 5 prières par jour.
– Dans la demeure de Fatima (d’où le nom Fatma) vivaient 5 personnes : le Prophète Muhammad (ﷺ) (son père), Fatima elle-même, ‘Alî son mari et leurs 2 enfants, Hassân et Hussayn. Se réunissant sous le même drap, Muhammad (ﷺ) leva sa main droite et pria en même temps que l’Archange Gabriel (Jibrîl) apparut. Ce serait la raison de cet autre nom qu’on donne à ce symbole : la main de Fatma.
(1) et (2) voir René Guenon « Aperçu sur l’ésotérisme islamique et le Taoïsme », p. 70, Gallimard »[2].
D’ailleurs dans le Tafsîr At-tashîl li’ulûm at-tanzîl de Ibn Juzay al-Gharntati al-Kalbi al-Andalûsi concernant la Sûrah al-Falaq, il dit que la main qu’on brandit en face d’une personne dont on craint le mauvais oeil ou l’envie, représente les 5 versets de la Sûrah du Qur’ân n°113 « Al-Falaq », dite Sûrah protectrice.
Ce qui prouve la permission de se soigner ou de porter ce genre de choses, tant que l’on se préserve du shirk et de ce qui relève en soi du shirk (y compris dans les paroles, invocations, les symboles et les écrits), il y a ces 2 ahadiths rapportés par Muslim dans son Sahîh n°2200 selon ‘Awf ibn Malik al Ashja’î : « Nous faisions la ruqya pendant la jahiliyyah. Nous dîmes : « Ô Messager d’Allâh, comment vois-tu cela ? » Il dit : « présentez-moi vos (façons de faire la) ruqya. Il n’y a pas de mal dans la ruqya tant qu’il n’y a pas d’idolâtrie (et de mal) ».
Toujours dans le Sahîh Muslim n°2199, selon Jabir le Messager d’Allâh(ﷺ) a dit : « Je n’y vois pas de mal. Celui qui peut faire du bien à son frère, qu’il le fasse ».
Et il est certain que durant la période pré-islamique – avant la Révélation du Qur’ân et les enseignements prophétiques – que leurs moyens de faire la ruqya ne se basaient pas sur les formules qurâniques ou prophétiques.
Quant à Shaytân, il faut savoir que son procédé est d’inverser les symboles – à l’origine traditionnelle et religieuse -, d’en détourner les sens et les finalités, et d’inverser les priorités et les relations entre les créatures et le Créateur, puis de les détourner de Son Rappel et de la purification de l’âme. Beaucoup de symboles et de rites étaient ainsi tournés vers le Créateur, puis par des insufflations sataniques et par l’ignorance, ont été détournés pour dériver vers des cultes idolâtres ou sataniques.
De même, ils accusent de shirk sur la base de simples paroles ou expressions ambigües. Et même si l’on ne doit pas justifier les paroles qui sont en apparence très graves ou contraires au Tawhid, il faut voir surtout le contexte, l’intention et la signification voulue des expressions en question. Par exemple, lorsqu’une personne dit « ce footballeur joue comme un dieu » ; ce n’est pas pour défendre ce genre de tweet ou de propos – qu’il ne faut pas approuver et « liker » car c’est malaisant pour un musulman -, mais dans de nombreux pays occidentaux, c’est une expression métaphorique désignant le fait qu’une personne excelle dans son domaine -, ils savent très bien que ce n’est pas vraiment Dieu, mais plutôt un « Don » de Dieu (même des athées emploient ce type d’expression), mais c’est une expression qu’il faut évidemment éviter pour nous, et qu’il faut aussi leur expliquer quand l’occasion s’offre à nous. Il faut donc simplement dire – surtout aux musulmans – qu’il faut éviter ce genre d’expressions au contenu blâmable, car il faut être précis et mettre en pratique l’adab qui consiste à préserver le Tawhîd et à ne pas qualifier une créature au-delà de son propre statut (de créature).
Même pour le fait de prier dans un autre lieu de culte, beaucoup considèrent cela comme du shirk ou comme étant harâm, alors que cela a été autorisé par les Compagnons et des savants des 4 écoles. L’imâm hanbalite Mansûr Al-Buhûtî a dit dans son Sharh Muntaha Al-Iradat : « Il n’est pas détestable de prier dans une synagogue ou une église même si des représentations d’êtres humains s’y trouvent ».
L’imâm hanbalite Muhammad Al-Khalwati a dit dans son annotation du Muntaha Al-Iradat : « Il n’est pas du tout détestable de prier dans une synagogue ou une église qu’il y ait des représentations humaines ou pas ». Cela, probablement s’il n’y a pas de mosquée à proximité, et si les autres lieux de culte sont un minimum propres, wa Allâhu a’lam. Cela peut être justifié non seulement par le verset du Qur’ân suivant : « Si Allâh ne repoussait pas les gens les uns par les autres, les ermitages seraient démolis, ainsi que les églises, les synagogues et les mosquées où le nom d’Allâh est beaucoup invoqué. Allâh soutient, certes, ceux qui soutiennent (Sa Religion). Allâh est assurément Fort et Puissant » (Qur’ân 22, 40), mais aussi car aucune interdiction formelle n’est évoquée dans le Qur’ân ou la Sunnah authentique. Il y a aussi le précédent avec ‘Umar ibn al-Khattâb, dont le patriarche à Jérusalem lui avait proposé de venir prier dans l’église, mais il refusa par peur que les Musulmans interprètent cela comme étant une indication d’en faire une mosquée alors que cette église était toujours en fonction.
Bien que les Wahhabites parlent souvent du Tawhîd et du Shirk, ils n’en ont cependant pas une bonne compréhension, et propagent des innovations blâmables à ce sujet. Ils pensent en effet que les idolâtres arabes de l’époque pré-islamique lorsque le Prophète (ﷺ) avait commencé sa prédication. Ibn Taymiyya et Mohammed Ibn Abdel Wahhab (allant encore plus loin) ont affirmé faussement qu’ils avaient conscience du Tawhîd, et qu’ils étaient sur le Tawhid en partie, et qu’ils étaient mieux que les Musulmans qui tombaient dans l’idolâtrie selon la mauvaise compréhension de M. Ibn Abdel Wahhab, ce qui est une aberration totale, puisque les Musulmans reconnaissent l’Unicité d’Allâh, Son Prophète, les piliers de l’Islam et de la foi, et manifestaient leur amour pour l’Islam, et ne combattaient ni Allâh ni Son Messager ni les croyants, et ce quand bien même certains pouvaient tomber par ignorance dans une forme de culte idolâtre concernant certains défunts (en les invoquant directement et non pas seulement en procédant au tawassul légiféré, consistant à leur demander d’intercéder pour nous auprès d’Allâh seul), ce qui n’était pas du tout comparable avec les idolâtres qui croyaient en plusieurs divinités, dont certains rejetaient le Jugement Dernier, le Paradis ou l’Enfer, qui ne priaient pas et ne jeûnaient pas, qui ne donnaient pas la charité ni ne prenaient soin des veuves et des orphelins, et qui combattaient ouvertement Allâh et Son Messager. Par ailleurs tous les idolâtres ne croyaient pas en la même chose, certains rejetant l’idée du Dieu unique ou du Créateur unique, du Jugement dernier, du monde céleste, etc. tandis que d’autres y croyaient mais y rajoutaient des divinités secondaires et sacrifiaient ou priaient pour d’autres qu’Allâh. Dire qu’ils avaient un type de tawhîd mais pas les autres est une innovation puisqu’est muwahhid (celui qui se conforme au Tawhîd) celui qui rejette toute forme d’idolâtrie et qui a conscience du Tawhîd dans sa vision, sa doctrine et ses actes, c’est donc un tout, comme l’indique la Shahada qui consiste à renier toute forme d’idolâtrie pour ne confirmer que l’Unicité et l’Absoluité du Divin (Allâh). En se basant sur des écrits d’Ibn Taymiyya et de Mohammed ibn Abdel Wahhâb (principalement ce qui est contenu dans Ad-Durâr as-Saniyyah, qui contient ses propos ainsi que ceux de ses successeurs, un recueil rempli de mensonges, d’aberrations, d’erreurs, de confusions et de sectarisme), le Shaykh Abû Sulayman (Corentin Pabiot), dans sa traduction de la La ‘aqida tahawiyya : la profession de foi des gens de la Sunna (aux éditions Maison Ennour, 2015, pp. 19-21 ; nous avons cependant pris la liberté d’apporter des références supplémentaires entre crochets et de modifier la façon de retranscrire certains termes et certains noms, sans jamais trahir le texte original) dit à ce sujet : « Établir une distinction entre tawhîd ar-rububiyya et tawhîd al ulûhiyya, est une innovation blâmable. Ibn Taymiyya est le premier homme à avoir divisé le tawhid en 3 catégories : unicité seigneuriale ; unicité divine (ou unicité d’adoration) ; et unicité des Noms et des Attributs divins. Aucun Docteur de l’Islâm, Ancien ou Moderne ne l’avait fait avant lui.
Professer « l’unicité seigneuriale », c’est croire que Dieu est le Seul Créateur, le Seul Pourvoyeur, le Seul Agent, et qu’aucun associé ne participe à Son oeuvre ; professer « l’unicité d’adoration », c’est vouer à Dieu un culte exclusif et sans partage ; enfin professer « l’unicité des Noms et des Attributs divins », c’est affirmer l’existence de ces Noms et de ces Attributs tels qu’ils conviennent à Dieu et tels qu’ils ont été rapportés dans les Textes. Or, selon Ibn Taymiyya, la ligne de partage entre l’islâm et le non-islâm passe par l’unicité d’adoration, la seule à même de faire sortir du kufr, de l’incroyance. En effet, nous dit-il, on peut très bien admettre l’unicité seigneuriale tout en demeurant infidèle. On en veut pour preuve le Qur’ân : {Dis : « Qui donc vous procure la nourriture du ciel et de la terre ? Qui dispose de l’ouïe et de la vue ? Qui fait sortir le vivant du mort ? Qui fait sortir le mort du vivant ? Qui dirige toute chose avec attention ? » Ils répondent : « C’est Dieu ». Dis : « Ne le craindrez-vous pas ? »} Surate 10, verset 31.
Sauf que les associateurs aiment leurs associés « comme on aime Dieu » : {Il est des hommes qui prennent en dehors de Dieu des idoles qu’ils aiment à l’égal de Dieu} Surate 2, verset 165.
Donc ce qui fait entrer en Islâm, c’est l’unicité d’adoration. Elle est la coupure fatidique qui sépare l’Islam et l’infidélité.
Ibn Taymiyya distingue en général 2 sortes de tawhid, mais, comme souvent chez lui, sa terminologie est hésitante : parfois, il en compte 3.
Plus tard, Mohammed Ibn ‘Abd-Al-Wahhab, éponyme de la secte wahhabite, développera cette thèse en des termes plus graves et plus extrêmes encore : « Les infidèles que le Prophète a combattus, tués, dont il a pillé les richesses et rendu licites les femmes, croyaient en la seigneurie divine, faisaient l’aumône, le pèlerinage, rendaient le culte et s’abstenaient des choses interdites, parce qu’ils craignaient. Pourtant, cela ne les a pas fait entrer en Islâm et n’a pas rendu leur sang et biens illicites… ». Il ajoute que le Prophète (ﷺ) a combattu les Juifs et les Chrétiens qui reconnaissaient qu’« il n’est de dieu que Dieu ».
Poussée à l’extrême, la distinction débouche sur le fanatisme : « Celui qui connait le tawhid et n’agit pas en conséquence est un infidèle, obstiné comme Pharaon et Iblis ! ». Et celui qui innocente le coupable d’un tel acte, qu’il s’agisse des Anciens ou des « impies de notre époque », est lui-même un infidèle. Ils sont tous coupables de la « grande impiété », c’est à dire, de l’associationnisme [l’idolâtrie].
On réfutera cela en disant que « l’unicité seigneuriale » est identique à « l’unicité d’adoration » et qu’il n’y a aucune raison de diviser le tawhid en 2 ou 3 parties distinctes. Professer l’unicité de Dieu, c’est aussi bien croire que Dieu est le seul Créateur, le seul Pourvoyeur, le seul Agent, que vouer à Dieu un culte exclusif et sans partage [en raison justement du fait qu’Il soit le Seul réel Pourvoyeur, Créateur, Agent, etc.].
Dieu dit dans le Qur’ân : {Ne suis-je pas votre Seigneur (rabb) ?} Surate 7, verset 172.
Or, celui qui reconnait la seigneurie de Dieu prend en même temps l’engagement de L’adorer, car le rabb, le Seigneur, n’est rien d’autre que l’ilâh, la Divinité. En outre, il est dit dans le hadith qu’au moment de la mort, les Anges interrogent la personne décédée en lui demandant : « qui est ton Seigneur (Rabb) ? », et non : « Qui est ton Dieu (ilâh) ». [hadîth rapporté par Abû Dawûd dans ses Sunân n°4753, et rapporté de façon sommaire par al-Bukharî et Muslim dans leur Sahîh].
Qui plus est, les Docteurs sunnites s’accordent à dire qu’il n’est pas permis de qualifier de muwahhid (partisan de l’unicité divine) quiconque rejetterait les pratiques de l’Islâm. Reconnaître la Seigneurie de Dieu tout en refusant de Lui vouer un culte exclusif, ce n’est pas être un mauvais partisan de l’unicité divine, mais c’est être mécréant, voilà tout. Preuve en est, le verset coranique suivant : {N’est-ce pas à Dieu qu’est dû le culte pur ? Ceux qui, en dehors de Lui, se sont donné des maîtres [disent] : « Nous ne les adorons que pour qu’ils nous rapprochent intimement de Dieu ». En vérité, Dieu [dans la vie future] tranchera le différend qui les oppose. Dieu ne guide point le menteur, le mécréant invétéré} Surate 9, verset 3.
La raison démonstrative de ce verset, c’est que Dieu qualifie clairement les associateurs de menteurs et de mécréants ; dès lors, comment les qualifier de muwahhid qui professent l’Unicité Seigneuriale après cela, comme l’affirme Ibn Taymiyya ?
S’agissant ensuite du verset qurânique : {Dis : « Qui donc vous procure la nourriture du ciel et de la terre ? Qui dispose de l’ouïe et de la vue ? Qui fait sortir le vivant du mort ? Qui dirige toute chose avec attention ? » Ils répondent : « C’est Dieu ». Dis : « Ne craindrez-vous pas ? »} sourate 10, verset 31.
Il ne signifie nullement que les assiociants (associateurs) professaient « l’Unicité Seigneuriale de Dieu ». En réalité, ces gens tenaient ces propos uniquement pour contredire le Prophète (ﷺ). En effet, lorsque celui-ci leur eut prouvé que Dieu existait, qu’il n’y avait d’autre dieu que Lui, et qu’il leur demanda de renier les idoles devant lesquelles ils se prosternaient en dehors de Dieu, ils se trouvèrent dans un embarra manifeste. Ils dirent alors en réponse à la question du Prophète (ﷺ) : « Qui donc a créé les cieux et la terre ? », C’est Allâh », prétendant par là qu’ils adoraient ces idoles uniquement pour qu’elles les rapprochent davantage de Lui. C’était évidemment un mensonge de leur part, car en réalité ils ne croyaient aucunement en la Réalité de Dieu, Créateur des cieux et de la terre.
Ce qui le prouve, c’est que Dieu leur a ordonné de méditer sur la création des cieux et de la terre afin qu’ils sachent qui en est le Créateur et qu’ils se soumettent, Dieu dit : {Ne regardent-ils pas comment les chameaux furent créés, comment le ciel fut élevé, comment les montagnes furent érigées, comment la terre fut nivelée ?} Surate 88, versets 17-20.
Si vraiment les associants avaient regardé Dieu comme le Créateur des cieux, de la terre et de ce qu’ils contiennent, quel intérêt avait le Seigneur à leur demander de méditer sur les chameaux et la façon dont ils furent créés, sur les montagnes et la manière dont elles furent dressées, sur la terre comme elle fut nivelée, sur les cieux comme ils furent élevés ?
Enfin, on n’a jamais entendu que le Prophète (ﷺ) avait établi une différence entre le tawhid ar-rubûbiyya et le tawhid ulûhiyya, lui qui attendait seulement les convertis qu’ils attestassent qu’« il n’est de dieu que Dieu et que Muhammad est son Prophète ». Établir une distinction entre les 2 types de tawhid est donc une innovation blâmable (bid’a) ».
Bien qu’Ibn Taymiyya ait innové dans la façon d’expliquer mais aussi dans la compréhension du Tawhîd, ce qu’il dit reste globalement correct (exceptés quelques points qui peuvent engendrer des conséquences fâcheuses chez les faibles d’esprit) concernant les principes du tawhîd dans ses 3 axes majeurs, à savoir l’Unicité de l’adoration de Dieu, de la Seigneurie et de Ses Attributs, mais ses 3 axes sont compris implicitement dans le fait même qu’Il soit Dieu (Divin), et les implications qui découlent de son raisonnement erroné, peuvent engendrer des confusions, des erreurs et des innovations blâmables, comme on peut le voir chez Mohammed ibn Abdel Wahhâb et ses partisans. C’est là qu’on voit les contradictions chez les salafistes : accepter ou refuser arbitrairement les innovations…généralement refusant les bonnes innovations (ne contredisant pas les principes et finalités de la Religion) et acceptant les mauvaises innovations (qui altèrent la Religion et l’éthique).
En somme, beaucoup d’actes qu’ils considèrent (en général) comme étant des innovations blâmables comme le dhikr collectif [3], réciter le Qur’ân pour les défunts, la hadra modérée, bâtir des tombes ou des mausolées (sans y adjoindre de choses harâm ou de culte idolâtre), etc. sont autorisés en Islam, par ses principes comme par des textes issus du Qur’ân, de la Sunnah et la pratique de nombreux Salafs. Alors qu’ils prétendent les suivre, ils les contredisent souvent sans le savoir.
Chez les salafis, dans ce qui leur est spécifique et problématique, l’absence de silsila spirituelle et de chaine de transmission des sciences remontant jusqu’au Prophète par les Compagnons, et le fait qu’ils n’étudient pas la logique et/ou le ‘ilm ul kalam, on décèle le manque de baraka, de cohérence, de perspicacité et de profondeur intellectuelle et spirituelle, que ce soit dans leurs déviances ou erreurs liées à la’ aqida, au Tafsir, au Hadith, au Fiqh ou aux autres aspects de la religion et de l’existence. En effet, leur chaine de transmission remonte tout au plus à Mohammed ibn Abdel Wahhab qui avait opéré une rupture avec l’Islam traditionnel, et qui avait répandu de nombreuses erreurs et confusions en plus d’un certain fanatisme.
On constate également, dans ces 4 tendances – salafisme/wahhabisme, rafidisme (shiisme extrémiste/sectaire), réformisme de type moderniste et coranisme – pourtant opposées les unes aux autres, les mêmes dérives, à savoir une approche très superficielle, sectaire et binaire de la Religion, un rejet ou un éloignement de ses dimensions spirituelles, intellectuelles et éthiques, – ainsi qu’une limitation terrible de la Miséricorde divine qui englobe pourtant toute chose et plus encore les croyants sincères malgré leurs divergences – au profit d’une lecture sectaire défendue « exclusivement » par leur groupe, beaucoup de haine et de rejet envers tout ce qui les dépasse intellectuellement et spirituellement, et une lecture excessivement binaire, superficielle, sectaire et partielle de l’ensemble du patrimoine islamique.
Or, à cause de ces tendances déviantes, beaucoup de Musulmans et de non-Musulmans en ont souffert – est-ce un hasard si les ennemis de l’Islam et les puissances impérialistes ont soutenu et/ou financé ces différents courants ? – et de nombreuses générations contemporaines chez les musulmans, sont passées à côté des plus grandes figures musulmanes, réunissant la Loi divine (Sharî’ah) et la Voie spirituelle (Haqiqa), la piété religieuse et l’intelligence, l’héritage prophétique et alide et celle des plus éminents Compagnons, le savoir religieux et les sciences physiques et naturelles, l’orthodoxie et la sagesse, la fermeté sur les principes et l’approche universelle et universaliste (sans verser pour autant dans le sentimentalisme, le relativisme ou le syncrétisme, etc.). Par ailleurs, le salafisme comme le rafidisme et les autres tendances mentionnées précédemment, ne sélectionnent toujours, dans leur vision identitaire, que ce qui conforte leurs positions sectaires, en ne prenant que les avis les plus éloignés ou les plus durs – sans réelle nécessité – des anciens savants (alors que certains parmi eux les ont même abandonné pour adopter d’autres avis plus souples et plus en phase avec la spiritualité et l’éthique exigées et encouragées dans le Qur’ân et la Sunnah). Parmi les sommités de l’Islam, qui ont souvent été occultées totalement ou partiellement, et dont les musulmans de la masse n’ont pas entendu réellement parler – si ce n’est en mal (par des rumeurs et des calomnies) – il y a nos maîtres comme Al-Junayd et Sahl al-Tustarî, Dhû-l-Nûn Misrî et Al-Hâkim at-Tirmidhî, Abû Ja’far At Tahâwî, Al-Kindi, Abû Yazid al-Bistâmî, Abû al-Hassân al-Kharaqânî, Abû Hayyân al-Tawhîdî, Abû ‘Alî al-Farisî, Al-Baqillânî, Abû-l Mansûr al-Baghdâdî, Abû-l-Qassîm Al-Qushayrî et Abd ar-Rahmân As-Sulâmî, Ibn Hibbân, Abû Nu’aym al-Isbahânî, les frères Al-Ghazâlî (Ahmad et Abû Hâmid), Nizâmi, Sâdi Shirazi, Hafez Shirazi, Qutb ad-Dîn Shirazi, Nûr ad-Dîn Abd ar-Rahmân Jami, Farid ud-Dîn Attâr et Jalâl ud-Dîn Rûmî, Shaykh al-Akbar Ibn ‘Arabî et Sadr ud-Dîn Al-Qunawî, ‘Abd ar-Razzâq Al-Qashânî et Najm ud-Dîn Kubrâ, Fakhr ud-Dîn Râzî, Abû Alî Daqqaq et Al-Hujwirî, Al-Karabâdhî, Nûruddîn Abdurrahmân Isfarâyinî, Ruzbehan al-Biqli, Abû Bakr al-Kalabadhî, Ayn-al Qudât Hamadhanî (élève d’Ahmad al-Ghazâlî, il fut juge à l’âge de 13 ans, et formé dans le fiqh, la logique, la théologie/’aqida, le hadith, le tafsîr et le Qur’ân, la philosophie, la poésie, la langue arabe, les mathématiques, etc. et fut aussi l’élève du Sûfi, philosophe, théologien, réciteur du Qur’ân, astronome et mathématicien Umar Khayyâm), ‘Umar Khayyâm et Nasr ud-Dîn Tûsî (qui sera influencé par la suite par le Tasawwuf), Ibn Sina, Al-Birûnî et Zayn ud-Din Sayyei Isma‘il ibn Hussayn Jurjânî (1040 – 1136), les Sûfis et Pôles spirituels de leur époque les imâms Abd al-Qâdir Al-Jilânî et Ahmad ar-Rifâ’î (qui étaient des descendants du Prophète (ﷺ)),As-Shatibî et Al-Juwayni, Zakariyya al-Ansârî et ‘Abd al-Wahhâb as-Sha’rânî, As-Sayyid as-Sharif ‘Alî Ibn Muhammad Al-Jurjânî (740 H/1339 – 816 H/1413-4, descendant du Prophète (ﷺ) ; formé dans le fiqh, la ‘aqida, le Hadith, la métaphysique, la logique, la philosophie, le Tafsir et le Qur’ân, la grammaire, la rhétorique et la langue arabe, les ussûl ad-Dîn, le Tasawwuf, l’astronomie, la chimie et d’autres sciences), Ibn ‘Asâkir, Ibn Al-Athîr, Abû al-Najib Suhrawardi, Shahab ud-Dîn Abû Hafs ‘Umar Suhrawardi (qui descend du Calife Abû Bakr as-Siddiq, et qui devint une autorité dans le fiqh shafiite et hanbalite, ainsi que dans les autres sciences islamiques au point d’être qualifié de Shaykh ul-Islâm sous le calife abbasside Al-Nasir), Al-Zamakhshari, Abû ‘Abdullâh Al Qudâ’î, As-Safadî, Al-`Izz Ibn `Abd As-Salâm et Ibn Daqîq Al-`Îd, les philosophes gnostiques de l’école ishraqiyya comme Shams al-Din Muhammad ibn Mahmud Shahrazuri, Shahab al-Din Yahya ibn Habash Suhrawardi, les grands gnostiques shiites mais influencés (ou rattachés au Tasawwuf) comme le Shaykh Baha’ al-din al-‘Amili (bien qu’élevé dans la tradition shiite et ayant atteint le degré de Shaykh ul Islam à Ispahan sous l’empire perse Safavide shiite, ce savant polymathe – astronome, architecte, logicien, philosophe, théologien, juriste et exégète, mathématicien et spécialiste du Tafsîr, de la langue arabe, de la Tradition et du Hadith, lorsqu’il fréquenta les cercles sûfis, se rattacha à eux et fut initié dans les turuq Nurbakhshi et Ni’matullâhi et dans son ouvrage Resāla fi’l-waḥda al-wojūdīya, il désignait les Süfis comme étant les vrais croyants car ils ont atteint la vérité et la réalisation spirituelle par l’expérience ; mais il sera fortement critiqué par le célèbre savant shiite Al-Majlisi qui était très opposé au Tasawwuf et à la philosophie), Mullâh Sadra et Haydar Amoli (qui seront influencés par Ibn ‘Arabî et son école spirituelle), Ahmad Ibn Atâ’Llâh As-Sakandarî et Ahmad Zarrûq et d’autres, puis, plus tard encore, des maîtres comme ‘Abdullâh Ibn
‘Alawî Al-Haddâd, Ibn Abidîn (l’autorité hanafite) et Murtadâ Az-Zubaydî al-Hussayni (grande autorité dans le fiqh et le tafsir, le Hadith et la langue arabe, la métaphysique et le Tasawwuf, la logique et la ‘aqida, …), Shah Waliyullah et Ahmad Sirhindi, Ibn ‘Ajiba et Muhammad Al-Darqawî, Shaykh Ahmadou Bamba, Shaykh Ahmad al-Alawi, l’émir Abd al-Qâdir Al Jazairi, Shaykh Muhammad Badr Ad-Dîn Al-Hassânî, Shaykh Muhammad Anwar Shâh Al-Kashmîrî, Mahmûd al-Alûsî, Shaykh Mustafa Sabri Effendi, Saîd Nursi, Izmirli Ismail Hakkı, Mustafâ Sâdiq Ar-Râfi`î, Shaykh Muhammad Al-Khidr Hussayn, Shaykh Muhammad Abû Zahrah, etc.
Même constat évidemment pour les éminents imâms des Ahl ul Bayt comme ‘Alî Zayn ul Abidîn, Muhammad Al-Bâqir, Ja’far As-Sâdiq, Zayd Ibn ‘Alî, Mûsâ al-Kadhîm, ‘Alî al-Ridha et les autres (qui étaient proches aussi – où en étaient eux-mêmes membres pour certains d’entre eux – de la famille et des descendants d’Abû Bakr et de ‘Umar), qui ont soit été calomniés et déformés par les shiites extrémistes, soit occultés ou négligés par de nombreux wahhabites.
Ces savants – que nous avons mentionné – ont baigné (pour la plupart ; les autres ayant tout de même apporté une belle et bonne contribution sur différents plans) dans la Lumière du Qur’ân et de la Sunnah, du Tasawwuf et de l’éthique, tout en cultivant la sagesse et en incarnant les hautes valeurs de l’Islam et la quintessence de la Connaissance bénéfique et profitable. Ils étaient loin du takfirisme et du sectarisme, et étaient des esprits raffinés et brillants de leur époque – surtout depuis le moment où ils se sont enracinés dans la Voie spirituelle -, délaissant les futilités et les mauvaises manières, ainsi que les péchés et les mauvaises pratiques.
Quant aux savants du passé, certains avis juridiques que certains peuvent juger étranges ou inadaptés de nos jours (influencés par les idéologies modernes, leur mode de vie actuel et leur culture), étaient liés en réalité aux conditions de vie de l’époque – et donc justifiés et adaptés pour leur temps -, ce qui n’est plus le cas dans les pays actuels où les conditions de vie et mentalités ont changé, et leurs héritiers actuels sont d’ailleurs partisans d’un fiqh fidèle aux principes de la Religion et adapté aux besoins et conditions de l’époque.
Parfois, ils (les références salafistes et modernistes, qui sont les 2 faces du réformisme moderne) prennent aussi des avis anciens – mais seulement ceux qui sont erronés, discutables ou faisant l’objet de divergences ou des positions sur lesquelles les anciens ulamas sont parfois revenus – de savants faisant autorité dans l’exotérisme mais qui n’ont pas atteint le plus haut niveau dans le Tasawwuf (du moins au moment où les avis « étranges », « durs » ou erronés ont été prononcés) bien qu’étant clairement initiés comme Qâdî ‘Iyyâd, Abû ‘Abdullâh Al-Qurtûbî (1214 – 1273), Al-Baghawî, An-Nawawî, Ibn Kathîr, Ibn Hajar al ‘Asqalânî, Ibn al-Qayyim, Al-Bayhaqî, Ibn al-Jawzî, Ibn Taymiyya, Ibn Qudama al-Maqdisî, Ibn Hajar al-Haytamî, As-Suyûtî, etc. qui étaient des savants pieux et dont beaucoup de leurs oeuvres sont profitables mais où leurs premiers ouvrages en général (servant souvent de références pour nos contemporains) sont parfois teintés de sectarisme, de partisanisme infondé, de déductions erronées ou superficielles dans certains sujets de ‘aqida, de fiqh ou même sur certaines questions liées au Tasawwuf, et qui contredisent la position des grands maîtres. Cependant, lorsqu’ils se sont adonnés plus intensément et profondément au Tasawwuf, ils ont révisé plusieurs de leurs positions, et ont donné la prééminence à la spiritualité et à l’éthique plutôt qu’aux avis superficiels, contestés ou erronés dans le fiqh – le Fiqh noble devant être en parfait accord avec le Qur’ân, la Sunnah et l’éthique islamique tout en répondant aux besoins des gens -, et où de toute façon, les quelques avis « étranges » ou « isolés » qu’ils avaient défendu, ont rarement (ou jamais) été mis en pratique par les musulmans de la masse ou parmi les autres grands savants ou maîtres de leur époque. Par ailleurs, bien que ces savants anciens, – sunnites traditionnalistes ou leurs équivalents parmi les mutazilites, les ibadites, les zaydites ou les shiites, reposent sur des ussûl, des avis souvent plus nuancés et qu’ils vivaient en phase avec leur temps – tandis que la vision de certains qui prétendent les suivre de nos jours est plus superficielle que la leur et transposent tels quels des fatawa qui étaient contextuelles et circonstancielles à leur époque ou qui étaient conditionnées par des règles que nombre de contemporains ignorent aujourd’hui, n’en étaient pas moins affectés parfois par des biais idéologiques, des erreurs ou un esprit trop partisan manquant de rigueur intellectuelle et de sagesse.
Et même parmi les contemporains, certains ont été occultés ou négligés malgré leur piété et leur immense science comme Shaykh Muhammad At-Tâhir Ibn `Âshûr (m. 1973), Shaykh Ibrahim Niasse at-Tijanî (m. 1975), Shaykh `Abd Al-Halîm Mahmud al-Hussayni (m. 1978), Shaykh Ibrâhîm Al-Yaqûbî (m. 1985), Shaykh Ahmad Mashhûr Al-Haddâd al-Hussaynî (m. 1995), Shaykh Muhammad Zakî Ibrâhîm al-Hussaynî (m. 1998), Shaykh `Abd Al-Hamîd Kishk (m. 1996), Shaykh Sayyîd Muhammad Al Alawî al-Malikî al-Makkî al-Hassânî (m. 2004), Shaykh `Atiyyah Saqr (m. 2006), Shaykh Al-Habîb `Abd Al-Qâdir As-Saqqâf (m. 2010), Shaykh Rajâb Dîb (m. 2016), Shaykh Abû al Asfar ‘Alî Muhammad al-Balkhi (grand savant et saint d’Afghanistan – Sûfi naqshbandi, m. 2018), Shaykh Muhammad Salîm al-Is’irdî (logicien, juriste shafiite, parlait arabe, turc, persan et le turc, décédé le 12 juin 2020), Shaykh Mahmûd Efendi An-Naqshbandi (m. 2022), Shaykh Al-Habîb `Umar Ibn Hafîdh al-Hussaynî, Shaykh Sayyid Habib Kazim al-Saqqaf al-Hussaynî, Dr. Ali al-Omari, Dr. Hamza al-Bakri, et tant d’autres. Et évidemment, il y a aussi les autres grands maîtres qui ont enseigné directement à leurs disciples mais sans écrire d’eux-mêmes d’ouvrages ou de traités.
Ainsi que les métaphysiciens de notre époque comme René Guénon, Titus Burckhardt, Michel Vâlsan, Charles-André Gilis, Martin Lings, Tage Lindbom, Seyyed Hossein Nasr, Hamza Benaïssa, Jean-Louis Michon, Muhammad Hasan Askari ainsi que Frithjof Schuon (malgré certaines de ses positions). De même pour certains intellectuels et académiciens musulmans comme Ismail al-Farûqi Muhammad Iqbal, Mustafa Mahmud, Taha Abderrahman, Muzaffar Iqbal, Ali Shariati, Malek Bennabi, Dr. Asad Q. Ahmed, Alija Izetbegović, Muhammad Hamidullah, Fuat Sezgin, Denis Gril, Maurice Gloton, Michel Chodkiewicz et sa fille Claude Addas, la célèbre Eva de Vitray-Meyerovitch, Muhammad Asad, etc.
Et sans oublier les nombreuses femmes savantes et intellectuelles, du passé comme d’aujourd’hui, qui ont contribué à enrichir la civilisation islamique et à éduquer nos Saints et nos Savants, et ce jusqu’à nos jours ; femmes mentionnées dans de nombreuses biographies comme celles écrites ou évoquées par An-Nawawî et As-Suyûtî, Ibn Hajar al ‘Asqalânî et Ad-Dhahâbî, Ibn Asâkir et As-Sulâmî, Ibn ‘Arabî et Farid ud-Dîn Attâr, etc.
Beaucoup de choses dépendent finalement du regard et du degré spirituel propre à chacun, des sujets en lien avec l’éthique, la connaissance, et la façon de se comporter envers Allâh et Sa Création, d’où les nombreuses divergences, mais le respect et le suivi des injonctions du Qur’ân et des fondements et finalités de la Tradition, sont les sources de la sagesse et de la réalisation spirituelle, à condition d’en respecter les piliers, les principes, les valeurs et les finalités qui garantissent et préservent la bonne compréhension du Message divin, qui exhortent constamment les croyants à cultiver la compassion et la sagesse, à faire preuve d’indulgence et d’endurance, à rechercher la justice, la piété et l’équité en toute chose.
Il nous faut aussi clarifier certaines confusions dans ces différentes tendances idéologiques et identitaires, car sur le Tawhid et le shirk, le harâm et certains sujets juridiques, ils sont remplis de confusions.
Le shirk, c’est d’associer ou d’attribuer à Allâh, des caractéristiques propres à Ses créatures (comme le début, la fin, les limites, le statut de créature, la soumission au temps, à l’espace et aux limites physiques et psychologiques), ou à l’inverse, d’attribuer à des créatures des Attributs qui sont propres à Allâh comme l’Absoluité, Son Essence divine, Son Attribut d’Eternité et d’Auto-suffisance, l’Omniscience, l’Omnipotence, son Attribut de Créateur, Celui qui guide et qui pardonne les fautes et les absout en soi, etc. Quant à la mécréance, c’est le fait de mécroire au Tawhîd et à Ses Révélations, de renier des versets du Qur’ân ou des ahadiths bien établis dont on sait qu’ils remontent au Prophète (ﷺ) – mais dont on veut rejeter le jugement indépendamment même de leur bonne interprétation -, de rejeter des piliers de l’Islam et de la foi ainsi que ce qui est nécessairement connu de la Religion en termes d’obligations (comme la Salât et la Zakât) pour ceux qui sont concernés par celles-ci, ou de remettre en cause les grands péchés comme le shirk, le meurtre, la sorcellerie, l’adultère, le viol, le pillage et le banditisme, l’injustice et le terrorisme, la calomnie et la maltraitance envers ses parents, enfants, épouses/époux, voisins, etc., ainsi que l’ivresse engendrée par les boissons alcoolisées ou ce qui altère la lucidité comme la prise de drogues et de stupéfiants, etc. Quiconque garde dans son cœur tout cela, se préserve de ce qui fait clairement sortir de l’Islam, et doit veiller ensuite à s’acquitter de ses obligations cultuelles et morales, familiales et sociales, professionnelles et autres. Le Tawhîd, c’est avoir la conscience purifiée et détournée des choses illusoires et des causes secondes, et d’être tourné constamment vers l’Absolu, de L’aimer et de Le reconnaitre dans Son Essence, Ses Attributs et comme Législateur suprême et comme unique objet de notre adoration, et respecter les droits qu’Il a accordé à tous les êtres de Sa Création, en cultivant les qualités qu’Il nous a enjoint de manifester comme la justice, la bonté, la piété, la pondération, la sagesse, la connaissance utile, la modestie, l’équité, la paix, l’amour bienveillant, la générosité, et tout ce qui permet d’élever et de purifier l’âme et l’esprit.
Se prosterner pour autre qu’Allâh par exemple, – un acte qui a été rendu illicite par le Prophète (ﷺ) en tant que tel – par contrainte ou par respect n’est pas du shirk, sauf si cela est perçu comme un acte d’adoration ou de divinisation dans la conscience et la conviction de la personne qui se prosterne.
En clarifiant ce qu’est le shirk et le tawhîd, on peut mieux saisir ce qu’est l’Islam et le goûter dans la pratique, et être plus vigilant et moins angoissé face aux dérives ou aux affirmations des différents groupes ou individus. Enfin, la prière, le dhikr, l’invocation (du’a) et la charité permettent de vivifier la foi, d’éviter certains types de waswas et de doutes malsains et maladifs, et de garder un lien permanent avec Allâh, le Sacré, le spirituel et la bonne moralité.
Notes :
[1] Voir nos articles Le Wahhabisme et le Tabarruk (la recherche des bénédictions à travers des êtres vivants ou des objets particuliers) du 6 mars 2020 https://editions-hanif.com/le-wahhabisme-et-le-tabarruk-la-recherche-des-benedictions-a-travers-des-etres-vivants-ou-des-objets-particuliers/ et Le Wahhabisme et la question du tawassul (l’intercession, l’entremise) et de l’istighatha (demande de secours) du 17 mars 2020 : https://editions-hanif.com/le-wahhabisme-et-la-question-du-tawassul-lintercession-lentremise-et-de-listighatha-demande-de-secours/
[2] Cf. La main, 10 mai 2007 : http://aminour.unblog.fr/2007/05/10/la-main-de-fatma/
[3] L’imâm An-Nawawî dans son Sharh du Sahîh Muslim et l’imâm As-Suyûtî dans son traité Natījatu al-Fikri Fi al-Jahr Fi al-Dhikr – Al-Hawâ Al-Fatâwâ, ont rassemblé des dizaines de ahadiths authentiques et bons sur le sujet, dont :
« Allâh dit : « Je suis conforme à la bonne opinion que se fait de Moi Mon serviteur et Je suis avec lui s’il M’évoque, s’il M’évoque en lui-même Je l’évoquerai en Moi-même, et s’il M’évoque en assemblée, Je l’évoquerai dans une bien meilleure assemblée » (rapporté par al-Bukharî dans son Sahîh selon Abû Hurayra). Le Dhikr fait en assemblée ne peut être qu’à voix haute. Le terme « assemblée » note l’imâm As-Suyûtî, est une précision impliquant le dhikr collectif sinon il n’y aurait eu aucune raison de la préciser.
« Le Messager d’Allâh ﷺ est venu à nous et nous a dit : « Ô vous les gens ! Il y a des escadrons d’anges qui descendent et rejoignent les assemblées de Dhikr sur terre, empressez-vous vers les jardins du paradis » ils dirent : « Et où sont les jardins du paradis ? ». Il dit ﷺ : « Ce sont les assemblées de Dhikr, allez-y matin et soir […] » (rapporté par al-Hâkim dans Al-Mustadrak et par Al-Bazzâr dans son Musnad selon Jâbir).
Le Messager d’Allâh ﷺ sortit un jour et trouva certains Compagnons assis en cercle, Il leur demanda : « Quel sujet vous fait asseoir ainsi ? Ils dirent : Nous nous sommes assis pour nous souvenir (dhikr) d’Allâh, Le louer pour le fait qu’Il nous ait guidés à l’Islâm. Il dit : « Par Allâh, ce n’est que cela, qui vous a fait asseoir ainsi ? Je ne vous traite pas de menteurs, mais sachez que Jibril est venu à moi et m’a informé qu’Allâh évoque vos vertus et vos mérites auprès de Ses anges » (rapporté par Muslim dans son Sahîh et par At-Tirmidhî dans ses Sunân selon Mu’âwiyya).
« ‘Umar effectuait le takbîr fort dans sa tente à Mîna et dès qu’ils l’entendaient, les fidèles qui se trouvaient à l’intérieur de la mosquée et ceux qui étaient au marché l’imitaient jusqu’à ce que Mîna toute entière vibre au son de ces Takbîrs » d’après ‘Ubayd Ibn ‘Umayr.
Le Messager d’Allâh (ﷺ) a dit un jour à un groupe de Compagnons en présence desquels il se trouvait : « Y a-t-il un étranger parmi vous (c’est-à-dire du nombre des gens du Livre) ? » Non, Envoyé d’Allâh, répondirent-ils. Il demanda alors qu’on ferme la porte et leur dit : « Levez les mains et répétez : Lâ ilaha ilâ Allâh (Pas de divinité si ce n’est Allâh) ». Shadddâd ibn Aws raconte : « Nous tînmes donc nos mains levées pendant une heure en disant : Lâ ilaha ilâ Allâh ». Le Prophète ﷺ dit alors : « Ya Allâh, Tu m’as envoyé avec cette parole, me l’as recommandée, m’as promis le Paradis en échange, et en vérité, Tu ne faillis jamais à Ta promesse ! ». Puis il conclut : « Réjouissez-vous, car Allâh – Exalté soit-Il – vous a pardonné ! » (rapporté par Ahmad et Al-Bazzâr dans leur Musnad, par At-Tabarânî avec une bonne chaîne).
Le Messager d’Allâh (ﷺ) a dit : « Le Jour de Qiyâma, Allâh ressuscitera certains groupes de gens dont les visages seront rayonnants de lumière ; ils seront assis sur des chaires de perles et les autres envieront leur sort. Ils ne seront ni des Prophètes, ni des martyrs. ». Un bédouin demanda au Prophète ﷺ : « Décris-nous ces gens que nous puissions les reconnaître ». Il répondit : « Ce seront des gens de différentes tribus et familles, de différentes régions, et qui, pour l’amour d’Allâh, se sont rassemblés (en un lieu) pour faire le Dhikr d’Allâh » d’après Abû ad-Dardâ’.
Le Sahabi Ibn ‘Abbâs a dit : « Effectivement, à l’époque du Prophète les gens prononçaient le Dhikr à voix haute au sortir de la prière (…). Je (Ibbn ‘Abbâs) pouvais savoir quand ils avaient terminé leur prière, car je pouvais alors les entendre faire le Dhikr » (rapporté par Al-Bukharî et Muslim). L’imâm An-Nawawî en commentant ce récit dans son Sharh du Sahîh Muslim (5/84) écrit : « Ceci appuie l’avis de certains de nos prédécesseurs selon qui il est recommandé d’élever la voix en faisant le takbîr et en faisant le dhikr à l’issue des prières prescrites ».
Le Messager d’Allâh (ﷺ) a dit : « Faîtes abondamment le Dhikr d’Allâh jusqu’à ce qu’on vous traite de fou » (rapporté par Al-Bayhaqî dans Shu’ab al-Imân d’après Abû Sa’îd al-Khudrî et par Al-Hâkim dans Al-Mustadrak qui authentifie bien la chaine. Il s’agit ici de celles et ceux qui L’invoquent et L’évoquent dans toutes les occasions, souhaitant toujours rester en Sa Présence et bénéficier de Ses dons et de Ses merveilles, au point parfois d’atteindre un certain état spirituel puissant qui peut sembler « violent » extérieurement pour les non-initiés – à condition de ne pas faussement simuler pareils états comme l’ont expliqué de nombreux savants comme Abû Hanifa, Junayd, Al-Ghazâlî, `Izz al-Din Ibn Abd as-Salâm, Ibn Taymiyya, Ibn al-Qayyîm, Ibn Hajar al-Haytâmî et d’autres par rapport au samâ’ et à la hadra -, et ce, même si les gens pensent que ces gens absorbés en Allâh sont « fous », et ce conformément aux versets du Qur’ân dont ceux-ci :
« Invoque ton Seigneur au fond de toi-même avec humilité et crainte ! Invoque-Le à voix basse, matin et soir, sans jamais te laisser distraire ! » (Qur’ân 7, 205)
« Fais preuve de patience en compagnie de ceux qui invoquent leur Seigneur, matin et soir, recherchant Sa satisfaction ! Ne les quitte pas pour courir après les plaisirs de ce monde ! N’obéis pas à celui dont Nous avons rendu le cœur inattentif à Notre rappel, qui suit ses passions et se complaît dans ses excès ! » (Qur’ân 8, 28).
« Souvenez-vous de Moi et Je Me souviendrai de vous » (Qur’ân 2, 152).
« Ceux qui ont cru et dont les coeurs s’apaisent à l’évocation d’Allâh ; n’est-ce point par l’évocation d’Allâh que les coeurs s’apaisent ? » (Qur’ân 13, 28).
« […] invocateurs/évocateurs souvent d’Allâh et invocatrices/évocatrices, Allâh leur a préparé une absolution et une énorme récompense » (Qur’ân 33, 35).
« En vérité, dans la création des cieux et de la terre, et dans l’alternance de la nuit et du jour, il y a certes des signes pour les doués d’intelligence, qui, debout, assis et couchés sur leurs côtés, invoquent Allâh et méditent sur la création des cieux et de la terre (disant) : « Notre Seigneur ! Tu n’as pas créé cela en vain. Gloire à Toi ! Garde-nous du châtiment du Feu » » (Qur’ân 3, 190-191).
« Le Rappel (souvenir, remémoration, connaissance, méditation, l’évocation, l’invocation) d’Allâh est certes ce qu’il y a de plus grand » (Qur’ân 29, 45).
Il y a donc des moments où le dhikr à voix basse (ou silencieux) est préférable, et d’autres moments, où le dhikr à voix haute et/ou en groupe est plus méritoire.
Quant au récit attribué à Ibn Mas’ûd qui l’aurait interdit, il n’est pas authentique, et de nombreuses narrations authentiques indiquent le contraire, à savoir qu’il l’a autorisé et lui-même mis en pratique. L’imâm `Abd al-Hayy al-Lakhnawi a écrit dans son Sibahat al-Fikr fi’l Jahri bi’l Dhikr (pp. 42-58) à ce sujet : « On peut y réponde de plusieurs façons : Premièrement, alors que cette narration a été mentionnée par un groupe de juristes (fuqaha), on n’en trouve aucune trace dans les livres de Hadith. Plutôt, c’est le contraire qui est attribué de manière authentique à Ibn Mas’ud. L’imâm as-Suyûtî dit dans al-Fikr Natijat que ce récit d’Ibn Mas’ud nécessite une analyse au point de vue de sa chaîne de narrations, et de qui, parmi les maîtres du hadith, l’a transmis dans ses ouvrages, et j’ai vu des preuves qui réfutent qu’il soit imputable à Ibn Mas’ud. Ahmad ibn Hanbal a transmis dans son Kitab al-Zuhd, que Hussayn ibn Muhammad le rapporte, avec sa chaîne, d’Abû Wakil qui a dit : « Ceux qui pensent qu’Abdullâh [Ibn Mas’ud] interdisait le dhikr ! Je ne me suis jamais assis dans une assemblée avec Abdullâh [Ibn Mas`ud] sans qu’il n’y fasse de dhikr ».
Deuxièmement, même si ce récit était fondé, il va à l’encontre des ahadiths prophétiques explicites rigoureusement authentifiés qui autorisent le dhikr à voix haute, tant qu’il n’est pas [pratiqué] excessivement fort. Ces ahadiths ont la préséance [sur cette narration] lorsque leur contenu est en contradiction.
Troisièmement, ce qu’Al-Bazzazi a mentionné dans ses Fatawa. Dans ses Fatawa, al-Bazzazi a déclaré : « S’il [Ibn Mas’ud] les a effectivement fait partir de la mosquée, il est possible que c’était parce qu’ils croyaient que c’était un acte de culte [spécifiquement enjoint], et ainsi enseigner aux gens qu’une telle croyance est une innovation blâmable ».
Il existe également un certain nombre de ahadiths qui permettent le dhikr en groupe, comme le récit d’Abu Hurayra dans al-Bukhari, Muslim, at-Tirmidhi, an-Nasa’i, et Ibn Mâjah, dans lequel le Prophète a dit : « Allâh dit : « Je suis tel que Mon serviteur M’estime. Je suis avec lui chaque fois qu’il Me mentionne (dhikr). S’il Me mentionne en son for intérieur, Je le mentionne en Mon for intérieur et s’il Me mentionne dans une assemblée, Je le mentionne dans une assemblée encore meilleure ».
L’imâm al-Jazari dit dans son Miftah al-Hisn al-Hasin : « Ces ahadiths indiquent la licéité du dhikr en groupe ». L’imâm As-Suyûtî a dit : « Le dhikr collectif ne peut être qu’à voix haute, par conséquent ces ahadiths indiquent sa licéité. (Ensuite l’imâm Lakhnawi cite 39 autres ahadiths démontrant qu’il est permis d’effectuer le dhikr en groupe, puis cite de nombreuses autorités hanafites, comme al-Bazzazi, ‘Abd al-Haqq al-Dahlawi, Khayr al-Din al-Ramli, et d’autres, qui ont autorisé, et poursuit en disant) : Quant au dhikr à haute voix, les ahadiths le permettant sont nombreux, comme le sont les récits [des Compagnons et des premiers Musulmans], et nous n’avons pas trouvé une seule preuve qui stipule clairement que le dhikr à haute voix soit interdit ou détesté. Les experts dans la science du Hadith, les juristes shafi’ites et certains juristes hanafites l’autorisent également ».
Le dhikr en groupe est donc légitimé par le Qur’ân, la Sunnah, les Sahaba et leurs disciples, ainsi que par la majorité – ou la totalité – des savants sûfis, et par de nombreuses autorités juridiques appartenant aux écoles de fiqh (malikisme, hanafisme, hanbalisme, shafiisme, zahirisme, …) dont les positions connues des imâms At-Tahtawi, Ibn ‘Abidin, Al ‘Izz Ibn ‘Abd al-Salâm, An-Nawawi, Ibn Hajar al Haytâmî, le père et fils As-Subki, Ibn Daqîq Al-`Îd, Al-Khalili, Shaykh as-Safarini, Shaykh ‘Abd al-Qadir ‘Isa, Shaykh Abû Qanit as-Sharîf al-Hassani, etc.