Les dérives et les impostures dans le monde francophone « spirituel » au sein de la communauté musulmane

Face à l’échec du wahhabisme (ou plus généralement d’une vision « moraliste » ou rigoriste) comme du sécularisme et de l’orientalisme pour apaiser et élever spirituellement les âmes et les consciences, d’une part, et satisfaire l’intellect d’autre part, beaucoup de gens ont saisi l’importance et la nécessité de s’orienter vers une voie spirituelle pour combler le vide intérieur qui les habitait, et se préserver de la folie et des superstitions de la modernité. Néanmoins, comme le capitalisme et le consumérisme règnent dans nos sociétés matérielles, un certain nombre de personnes y ont trouvé le « bon filon », pour exploiter la crédulité ou la souffrance des gens peu avertis dans ce domaine. Certains charlatans, peut-être sincères à l’origine, ont finalement succombé au culte de l’ego, à l’appât du gain ou aux pressions populaires ou politiques pour adapter leur discours – afin de ne pas disparaitre du champ médiatique et virtuel -, aux caprices et aux « tendances » de mode du moment. D’autres y mêlent, par naïveté parfois, des croyances new-âge, ou délaissent les fondements même de la Voie spirituelle, à savoir l’exotérisme. D’autres encore passent leur temps à enseigner des sciences traditionnelles (ésotériques) à l’origine, mais en les détournant de leurs principes et de leurs fonctions initiales, et alors même qu’elles étaient destinées à des disciples avancés et non pas aux gens de la masse, comme la science des lettres ou l’ennéagramme, de peur que des gens malveillants ne les détournent pour tendre vers des finalités blâmables voire clairement idolâtriques, comme on peut le constater aujourd’hui, tout en organisant des activités mixtes où les règles islamiques de pudeur et de décence ne sont pas respectées, et où on y voit des gens peu sérieux ou même pervers, en profiter pour commettre des dérives lors des rencontres mixtes « pseudo-spirituelles », où la drague, le harcèlement ou les propos déplacés – voire pire encore – se déroulent sans que cela ne soit réprouvé par les organisateurs, le tout pour faire de l’argent ou exercer une sorte d’emprise idéologique sur les victimes.

Il est malheureusement un fait tragique, que dans la communauté musulmane francophone, les politiques refusent de voir des musulmans cultivés, éclairés, indépendants et très élevés spirituellement, d’où leurs promotions d’un certain nombre de charlatans qui investissent, sur leur demande, les plateaux télévisés ou qui prennent le commandement des organisations musulmanes. Cependant, beaucoup de Musulmans, surtout à l’heure des réseaux sociaux, ne sont plus dupes, et reprochent à leurs instances, des discours à la fois inadaptés à leurs besoins, déconnectés des réalités et leur complaisance à l’égard des mesures liberticides et injustes imposées par l’État aux musulmans, en bafouant leurs droits fondamentaux, en les diabolisant au quotidien, et en les déshumanisant à chaque fois qu’ils réclament un peu de respect et la protection de leurs libertés fondamentales. Dès lors, les jeunes se tournent vers les réseaux sociaux, où les maîtres et les personnes qualifiées sur les plans intellectuel et spirituel sont rarement présents, ou du moins, n’y sont pas très actifs puisque passant leur temps à éduquer leurs disciples, à aider les gens dans le besoin, à s’instruire et à transmettre la science aux autres. Les réseaux sociaux forment donc une niche idéale pour tous les charlatans, sectaires et autodidactes en quête d’argent facile, de notoriété ou de propagande au service d’une idéologie ou d’un pouvoir politique.

Si les dérives sont déjà fort bien connues et documentées pour un certain nombre de mouvements « musulmans » comme non-musulmans, il nous faut clarifier ici les choses en ce qui concerne le monde dit « sûfi » en francophonie, qui est pollué et intoxiqué par certains charlatans, tout comme cela fut déjà le cas pour les sujets liés à la politique, au droit ou aux enjeux sociétaux. Se faisant, ils salissent le Tasawwuf et détourne les gens d’aspirations nobles et de pratiques opératives sur le plan spirituel. Et à cause de cette décadence – qui touche globalement toutes les institutions publiques et les communautés – certains en viennent à diaboliser le Tasawwuf dans son ensemble (1). Or, rejeter le Tasawwuf en soi reviendrait, par analogie, à rejeter la médecine, la physique, le droit ou la philosophie sous-prétextes que certains de leurs « adeptes » ou « professionnels » se seraient trompés ou se seraient montrés coupables de supercherie, d’escroquerie et/ou de tromperie.

Nous citerons ici le cas d’un conférencier et traducteur « connu » dans le monde francophone, intervenant souvent sur le Tasawwuf (Sûfisme), l’Islam, René Guénon et Ibn ‘Arabî, mais en est parfois venu à déformer complètement le Tasawwuf, l’Islam, l’œuvre de René Guénon (2) et l’œuvre akbarienne, et qui fut rappelé aussi plusieurs fois à l’ordre par des continuateurs qualifiés de l’œuvre de Guénon, que ce soit chez les milieux musulmans « guénoniens » comme « valsaniens ». En privé même, il pouvait se montrer très irrespectueux et agressif, loin de l’adab islamique qui est pourtant le critère de vérité – le furqân – distinguant les vaines prétentions des réalités spirituelles. En se basant sur les nombreux écrits des grands savants de l’Islam, ayant réalisé l’excellence dans l’exotérisme comme dans l’ésotérisme, à l’instar d’Al-Junayd, d’Al-Ghazâlî, d’Al-Jilânî, d’Ahmad Ar-Rifâ’î, d’Ibn ‘Arabî, d’As-Sakandârî, d’Al-Haddâd, d’Al-Darqawî, d’Ibn ‘Ajiba, de l’émir ‘Abd al-Qadir ou encore du Shaykh Ahmad al-Alawî, sont suffisants pour permettre d’identifier les critères distinguant le vrai maitre du charlatan ou d’une personne illusionnée par son ego, ainsi que les devoirs du Maître spirituel envers le disciple, et ceux du disciple envers le Shaykh. L’imâm Abû Hâmid al-Ghazâlî dans Ayyuhâ-l walad (3) ; un texte parlant des devoirs et des critères à respecter dans le cadre du cheminement auprès d’un Shaykh, a abordé la question de façon concise, en argumentant par le Qur’ân, la Sunnah et la parole des Salafs.

Par rapport aux différentes dérives de ce conférencier, énumérons 15 réponses pour dissiper les points problématiques de son discours polémiste.

1) Il n’a pas de culture historique ni une bonne maîtrise de l’histoire et d’une méthodologie sérieuse dans le domaine.

2) Il reprend à son compte des thèses orientalistes – reprises aveuglément – par des courants modernistes alors que ces thèses n’ont soit aucun fondement historique, soit qui ont déjà été réfutées.

3) Sa mentalité manichéenne et takfiri quand on le contredit le disqualifie sur le plan spirituel.

4) Ses liens troubles avec la franc-maçonnerie et ses attaques contre l’exotérisme sont suspects.

5) Il y a une totale incohérence entre ses vidéos YouTube où il joue le sage et ses interventions sur les réseaux sociaux où on dirait un adolescent en pleine crise d’identité et de révolte hystérique, pensant avoir tout compris mieux que tout le monde.

6) Jouer sur la fibre émotionnelle et victimaire en sortant des récits apocryphes ou déformés pour attaquer l’ensemble d’un patrimoine islamique est le propre des charlatans.

7) Qu’il y ait des savants incompétents, attirés par l’argent et ayant menti pour le compte de certains dirigeants oppresseurs c’est une vérité qui a été admise par tous les savants intègres qui constituent justement le socle de notre patrimoine, savants ayant courageusement défendu la Vérité et le sunnisme traditionnel face aux oppresseurs qui les avaient emprisonnés, exilés ou tués pour cela. Or, il occulte totalement ce fait.

8) L’Islam traditionnel (exotérique comme ésotérique et historique) a donc parfaitement été préservé (4) des déformations et altérations politiques ou idéologiques, puisque c’est la tradition notoire qui s’est transmise partout, en conformité avec le Qur’ân et les différentes traces historiques et archéologiques qui confirment les fondements de l’Islam traditionnel.

9) Sur les questions juridiques et théologiques secondaires par contre, les différentes sensibilités psychologiques et doctrinaires, de même que les contingentes historiques, peuvent se discuter et les divergences qui n’impactent pas les fondamentaux de l’Islam doivent se discuter calmement et avec rigueur.

10) Les grands noms qu’il cite comme Al-Junayd, Ibn ‘Arabî, Al-Ghazâlî, Hassân al-Basrî, etc. sont aux antipodes de sa démarche, puisque, s’il est bien vrai qu’ils ont critiqué les savants déviants ou à la mentalité psychorigide, ils ont eux-mêmes insisté sur le respect de l’exotérisme, le refus d’embrouiller l’esprit des musulmans de la masse par des polémiques stériles, le refus de parler de ce que l’on ne maitrise pas, et ont démontré à travers le Qur’ân, la Sunnah, l’intellect et l’initiation spirituelle la sacralité des Sahaba et des Ahl ul Bayt – puisqu’ils ont reçu l’agrément, la protection et la guidance d’Allâh de façon générale dans le Qur’ân et du Prophète Muhammad (ﷺ) dans la Sunnah (5), même s’ils ont pu commettre des péchés, divergé entre eux, etc. et qu’ils ne sont donc pas infaillibles. On leur doit le respect, de même qu’à leurs disciples cheminant sur la Voie de la piété et qui ont passé leur vie à apprendre et transmettre la science.

11) Mépriser et diaboliser à ce point le passé – en réaction à une idéalisation naïve de certaines personnes – en dit long sur les troubles psychologiques d’une personne.

12) Il dit que les récits indiquant que des Compagnons comme ‘Umar et d’autres aient pu demander à Ibn ‘Abbâs (qui était un adolescent à cette époque) des explications sur certains versets est impossible. Or, le Qur’ân comme la Sunnah indiquent que la sagesse ne dépend pas de l’âge, et que même des enfants peuvent être plus purs ou être dotés d’une sagesse ou de réflexions qui peuvent éclairer des problématiques aux adultes. Par ailleurs, le Qur’ân étant une Parole inépuisable, on peut très bien connaitre une dizaine d’explications liées à un verset, tout en bénéficiant des méditations émanant de grands maîtres ou d’autres Sahaba, approfondissant ainsi notre connaissance de Sa Parole. Il est aussi notoire, par de nombreux ahadiths et récits authentiques, qu’Ibn ‘Abbâs jouissait d’une haute considération sur le plan de la connaissance auprès des Compagnons, et ce notamment à la suite d’une invocation prophétique en faveur d’Ibn ‘Abbâs pour qu’Allah lui accorde la sagesse et la science utile en lien avec les sciences sacrées et celles de la Révélation.

13) Pour mener sa « croisade », il n’hésite pas à chercher le soutien des pires sectaires ou d’ignorants qui appuieront ses propos, dont des gens qui idolâtrent l’Occident moderne et crachent – ouvertement ou non – sur l’Islam, les musulmans et leur patrimoine civilisationnel d’exception (avec aussi son lot d’épreuves, d’excès, etc.).

14) Prétendre suivre le Qur’ân, la Sunnah et l’enseignement des maîtres alors qu’il s’oppose à des principes qurâniques et prophétiques très clairs, et qu’il abonde dans les thèses soutenues par des ennemis ou des négateurs de la Tradition prophétique, du Modèle Muhammadien, des injonctions qurâniques et de la Voie spirituelle des maîtres sûfis (musulmans).

15) Son comportement en public (quand il n’y a aucun contradicteur) est complètement opposé à son attitude face à la divergence ou aux débats, où il se transforme souvent en takfiri, avec des propos agressifs, méprisants et injurieux, refusant de dompter son ego, et incapable de reconnaitre ses erreurs (factuelles), ses dérives ou ses propres limites dans le champ des sujets qu’il aborde, sans en avoir les capacités. Or, on reconnait une personne qualifiée, au fait que son intérieur soit conforme à son extérieur, et que face à l’adversité, son attitude reste noble, gardant un adab (une discipline fondée sur les convenances éthiques et spirituelles) en toute circonstance, comme chez les maîtres ou ustadh que nous avons pu connaitre, où en privé comme en public, leur maitrise de soi était irréprochable, ne jouant pas de « double jeu ».

Contredire à ce point le Qur’ân, la Sunnah et la sagesse de nos maîtres spirituels ne peut conduire qu’à des dérives et des déviances condamnables et préjudiciables pour les musulmans, quand bien même l’individu se réclamerait de l’Islam, du Tasawwuf, du Qur’ân, de la Sunnah ou des maîtres spirituels.

Le Qur’ân, qui est la Révélation divine, exhorte les croyants à cheminer, à fréquenter les croyants sincères, les pieux, les justes, les véridiques. les rapprochés et les bienfaisants, et donc les maîtres qui méditent et mettent en pratique Sa Parole, et suivent donc la Sunnah (de nombreux versets insistent sur l’importance de suivre la Sunnah, et d’autres versets impliquent, par nécessité et déduction, de se référer à la Sagesse et aux informations historiques transmises dans la Sirah, les ahadiths authentiques, la science et la connaissance des maîtres, qui sont autant d’injonctions qurâniques), de même que les termes élogieux et respectueux utilisés à l’égard des Sahaba, des Ahl ul Bayt et des mères des croyants, font que cette vénération (et non pas idolâtrie) fait partie de la foi.

Le Qur’ân donne comme critères en tant que preuves de guidance, des gens qui ont acquis les fondements de la ‘aqida et du fiqh, la connaissance des grands préceptes de l’islam, ainsi que la réalisation des nobles vertus, de la connaissance spirituelle et des qualités morales comme la piété, la générosité, la pondération, la bienveillance, la maitrise de soi, le refus de polémiquer ou d’embrouiller les musulmans avec des choses dont ils n’ont pas besoin ou qui risqueraient de perturber leur relation avec Allâh et la bonne entente envers leur famille ou leur communauté. Les maîtres ne clarifiaient (avec sagesse, science et clairvoyance) les problématiques que quand cela s’avérait nécessaire, et pas du tout en tant que polémistes, blablateurs ou semeurs de fitna.

Quelques conseils aux Musulmans

Méfiez-vous de ceux qui appellent à la haine ou à la polémique de façon générale, qui sortent des récits faibles ou inventés pour diaboliser et noircir le tableau outre mesure, en cherchant à dénigrer ceux qui ont transmis Son Message, à travers sa famille (et ses épouses), ses Compagnons, leurs disciples et les Saints de la Communauté. Ceux qui n’ont pas beaucoup de culture historique ni aucune méthodologie, piochent aveuglément et bricolent, en délaissant les récits les plus authentiques, en ignorant les débats techniques des spécialistes et les faiblesses de certains récits – en occultant ou ignorant les autres variantes plus complètes et plus authentiques -, et par ce biais, ils trompent les croyants tout en pervertissant leur propre cœur, car nul ne demeure indemne – dans son âme, son corps et dans son esprit – après avoir porté atteinte à l’honneur de Ses Envoyés, de leurs compagnons et de leurs familles, ni de Ses Rapprochés parmi les Saint(e)s, les croyant(e)s et les gens opprimés et innocents de manière générale.

De même, beaucoup se cachent derrière un principe de vérité mais avec ignorance ou avec de mauvaise intention, comme « l’Esprit doit primer sur la forme », or atteindre le noyau (l’esprit) ne peut se faire que par une conformité et une bonne compréhension de l’écorce (forme), et la Forme muhammadienne ne peut jamais être abrogée, puisqu’elle est le support par excellence de la Bénédiction divine, et donc de la réalisation spirituelle. Ils confondent souvent par ailleurs transcender les formes traditionnelles (sans les abolir) avec la croyance dans le relativisme des formes traditionnelles – comme si elles se valaient sur le même plan en tous points – ou pire encore avec le syncrétisme. Beaucoup de ces faux prétendants méprisent inconsciemment les Prophètes et les plus grands Saints, qui tout en ayant parfait leur adab et nobles caractères, se conformaient pleinement à la forme traditionnelle (ici l’Islam). Les doctrines répandues sont parfois fausses ou grandement altérées au sein des différentes traditions, certains rites adoptés n’ont pas été institués par la Révélation ou alors ne sont plus opératifs, et certaines communautés, de façon générale mais pas nécessairement absolues, ont perdu la Bénédiction et le rattachement initiatique les reliant aux Prophètes et aux revivificateurs de chaque Tradition. Si « l’Esprit souffle où Il veut » (cf. « Telle est la Grâce d’Allâh qu’Il donne à qui Il veut. Et Allâh est le Détenteur de l’énorme grâce » Qur’ân 57, 21), cela ne doit pas constituer une excuse de part et d’autre ; c’est-à-dire d’une part chez certains exotéristes obtus qui veulent exclure certaines créatures (ne partageant pas leur religion ou leur credo religieux au sein d’une même communauté) de la Miséricorde divine ou de Son Pardon alors qu’Allâh a dit : « Ils ont dit : « Nul n’entrera au Paradis à moins d’être Juif ou Chrétien ». Tel est leur souhait chimérique. Dis : « Apportez vos preuves si vous êtes véridiques ! ». Assurément, quiconque soumet son âme à Allâh et fait le bien (en accomplissant de bonnes œuvres) aura sa rétribution auprès de son Seigneur, et pour eux, nulle crainte, et ils ne seront point attristés. Et les Juifs disent : « Les Chrétiens ne tiennent sur rien » ; et les Chrétiens disent : « Les Juifs ne tiennent sur rien », alors qu’ils lisent le Livre (de la Révélation) ! De même pour ceux qui ne savent rien et qui tiennent un langage semblable au leur. Eh bien, Allâh jugera sur ce quoi ils s’opposent, au Jour de la Résurrection. Qui est plus injuste que celui qui empêche que dans les mosquées d’Allâh [les endroits sacralisés où l’on prie et où l’on se prosterne pour Allâh], on mentionne Son Nom, et qui s’efforce à les détruire ? De tels gens ne devraient y entrer qu’apeurés. Pour eux, ignominie ici-bas, et dans l’au-delà une énorme correction » (Qur’ân 2, 111-114), « Certes, ceux qui ont cru, ceux qui se sont judaïsés, les Chrétiens, et les Sabéens, quiconque d’entre eux a cru en Allâh, au Jour dernier et accompli de bonnes œuvres, sera récompensé par son Seigneur; il n’éprouvera aucune crainte et il ne sera jamais affligé » (Qur’ân 2, 62), « {Et (parmi) les Juifs (il y en a qui) disent : « La main d’Allâh est fermée ». Que leurs propres mains soient fermées, et maudits (privés de Bénédictions) soient-ils pour l’avoir dit (par pur orgueil) ! Au contraire, Ses deux mains sont largement ouvertes : Il distribue Ses dons comme Il veut. Et certes, ce qui a été descendu vers toi de la part de ton Seigneur va faire beaucoup croître parmi eux la rébellion et la mécréance. Nous avons jeté parmi eux l’inimité et la haine (conséquences de leurs propres méfaits) jusqu’au Jour de la Résurrection. Toutes les fois qu’ils allument un feu pour la guerre, Allâh l’éteint. Et ils s’efforcent de semer le désordre et la corruption sur la terre, alors qu’Allâh réprouve les semeurs de désordre. Si les gens du Livre avaient la foi et la piété, Nous leur aurions certainement effacé leurs méfaits et les aurions certainement introduits dans les Jardins du délice » (Qur’ân 5, 64-65), tandis que d’autres, parmi les Gens du Livre, pratiquaient la piété, se montraient humbles et généreux : « Mais ils ne sont pas tous pareils. Il est, parmi les gens du Livre, une communauté droite qui, aux heures de la nuit, récite les versets d’Allâh en se prosternant. Ils croient en Allâh et au Jour dernier, ordonnent le convenable, interdisent le blâmable et concourent aux bonnes œuvres. Ceux-là sont parmi les gens de bien. Et quelque bien qu’ils fassent, il ne leur sera pas dénié. Car Allah connaît bien les pieux (Muttaqin) » (Qur’ân 3, 113-115) ; « Il y a certes, parmi les gens du Livre ceux qui croient en Allâh et en ce qu’on a fait descendre vers vous et en ce qu’on a fait descendre vers eux. Ils sont humbles envers Allâh, et ne vendent point les versets d’Allâh à vil prix. Voilà ceux dont la récompense est auprès de leur Seigneur. En vérité, Allâh est prompt à faire les comptes » (Qur’ân 3, 199), « Ceux à qui nous avons donné le Livre, le reconnaissent comme ils reconnaissent leurs enfants. Or une partie d’entre eux cache la vérité, alors qu’ils la savent ! La vérité vient de ton Seigneur. Ne sois donc pas de ceux qui doutent. A chacun une orientation vers laquelle il se tourne. Rivalisez donc dans les bonnes oeuvres. Où que vous soyez, Allâh vous ramènera tous vers Lui, car Allâh est, certes Omnipotent » (Qur’ân 2, 146-148) et à l’égard de chaque créature, Allâh demeure Miséricordieux : « Allâh est le meilleur gardien, et Il est Le plus Miséricordieux des miséricordieux » (Qur’ân 12, 64) et « Et Ma miséricorde embrasse (englobe, dépasse) toute chose » (Qur’ân 7, 156), ainsi que Pardonneur pour ceux qui L’invoquent et se repentent : « Ô Mes serviteurs qui avez commis des excès à votre propre détriment, ne désespérez pas de la miséricorde d’Allâh. Car Allâh pardonne tous les péchés. Oui, c’est Lui le Pardonneur, le Très Miséricordieux ». Et revenez repentant à votre Seigneur » (Qur’ân 39, 53-54). Et d’autre part, chez ceux qui amoindrissent ou abolissent la nécessité de suivre la dernière Révélation divine et la Voie Muhammadienne à travers la Tradition du Prophète Muhammad (ﷺ), ou qui placent toutes les Formes traditionnelles au même niveau, alors que ce n’est pas le cas, bien qu’il puisse subsister évidemment des vérités, des valeurs communes, des gens d’une certaine piété et des sages dans les autres communautés. Quant au Pardon divin, Allâh seul peut s’arroger ce droit-là, mais en aucun cas il est autorisé de décréter qui sera pardonné ou non sur le plan exotérique, de façon individuelle, car sur le plan exotérique, le Pardon divin s’obtient que par des efforts actifs du serviteur, contrairement à la Miséricorde universelle divine qui s’applique à tous (contrairement à la Miséricorde particulière réservée aux croyants et à ceux qui accomplissent les bonnes œuvres) : « Certes, Allâh ne pardonne pas qu’on Lui donne quelques associés (idoles). En dehors de cela, Il pardonne à qui Il veut » (Qur’ân 4, 116) et « Aujourd’hui J’ai parachevé pour vous votre religion, J’ai complété (et totalisé) Mon bienfait sur vous et J’ai agrée pour vous l’islam comme religion » (Qur’ân 5, 3), et même pour les dénégateurs et les criminels parmi les gens de l’Enfer, Allâh peut leur accorder une porte de sortie selon Sa Justice, Sa Sagesse et Sa Miséricorde, au bout d’un « laps de temps » : « Ceux qui sont damnés seront dans le Feu où ils ont des soupirs et des sanglots. Pour y demeurer indéfiniment tant que dureront les cieux et la terre – à moins que ton Seigneur décide autrement – car ton Seigneur fait absolument tout ce qu’Il veut » (Qur’ân 11, 106).

Certains de ses faux-prétendants donc, se montrent très laxistes sur le plan religieux – étant finalement soumis à leur ego et illusionnés par la modernité malgré leur désaveu apparent -, sont doux et indulgents envers les dénégateurs ou des criminels notoires qui partagent cependant (extérieurement du moins) leur vision des choses, mais se montrent outrageusement méprisants et durs envers les croyants qui ne partagent pas leur vision sur tous les points, qu’ils soient aussi des cheminants sur la Voie spirituelle ou des croyants se limitant à une vision purement exotérique de la Religion. Il y a là une sorte de parodie de la Tradition voire d’inversion aussi, ce qu’ils reprochaient pourtant à leurs détracteurs ou aux « wahhabites ». La Forme islamique a la précellence et l’autorité traditionnelle, et comme l’a expliqué le Shaykh al-Akbar, l’Islam est comme le Soleil qui éclaire les étoiles (les anciennes communautés religieuses et leur lois), d’où une certaine « abrogation », puisque le Soleil éclaire les étoiles et synthétise toutes les vérités et les « aspects universels » des étoiles, tout en étant adapté à toutes les époques jusqu’à la fin des temps (le dernier cycle de notre présente humanité), là où les « étoiles » sont visibles (comme lumières) pour un temps. Enfin, ces faux-prétendants sont souvent condescendants et se noient dans des spéculations philosophiques plus que dans une pratique opérative de la Tradition, se montrant plus prompts à critiquer les autres plutôt qu’à œuvrer dans le bien, faire des veillées et des retraites spirituelles, méditer profondément le Qur’ân, atteindre les plus hautes stations spirituelles, aider leur prochain, cheminer auprès des fuqara et des awliyâ’ et passer leur nuit dans la prière et la contemplation. On y observe aussi très peu d’humilité et d’introspection, et parfois même une inquiétante instabilité mentale et émotionnelle, ce qui s’identifie à une sorte d’atrophie ou de déchéance malgré un savoir théorique qui peut être par ailleurs très pertinent sur bien des points (6), mais rendu vain si cela ne les pousse pas à purifier leur âme et à se rapprocher d’Allâh autrement que par de vaines discussions théoriques. Enfin, si on juge un arbre à ses fruits, alors suivre la Voie spirituelle et orthodoxe des grands maîtres est une preuve éclatante de la Lumière divine qui guide les cheminants, qui combinent avec excellence l’apprentissage des sciences islamiques traditionnelles, la gnose spirituelle (ou ésotérisme) et l’adab exemplaire, abreuvés à la lumière prophétique. La Forme traditionnelle ne s’abolit dans la conscience que chez ceux qui sont dans l’état dit du « fanâ’ », c’est-à-dire l’extinction de l’ego et donc de l’individualité, où la « conscience séparative » (celle fonctionnant sur le monde de la dualité : bien/mal, Créateur/créature, Seigneur/serviteur, Foi/mécréance, etc.) laisse place à la « conscience unitive » comme l’a bien expliqué le Shaykh Ahmad Ibn ‘Ajiba dans son Kitâb Mi’raj al-Tashawwuf ila Haqa’iq al-Tasawwuf (et traduit en français par sidi Jean-Louis Michon aux éditions Albouraq) car lorsqu’ils contemplent le Divin sans être conscient de leur propre « moi », la conscience des choses créées « s’éteint » dans cet état, mais lorsqu’ils reviennent à eux-mêmes, les règles et préceptes de la Loi s’opèrent et les concernent, tout comme l’ont indiqué l’ensemble des Prophètes. Or, parmi ceux qui ne suivent pas cela, ou pire qui contestent cette réalité, ils ne sont pas dans le fanâ’, mais restent encore sous l’emprise de leur ego ou de certaines influences psychiques voire shaytanesques.

Il faut plutôt fuir la polémique, lire les livres des grands maîtres pour revivifier la foi, accomplir les bonnes œuvres, glorifier Allâh et appeler Sa Miséricorde et Ses Bénédictions sur les Messagers, leur famille, leurs compagnons et ceux qui les suivent sincèrement, et s’occuper de notre relation à Lui plutôt que de chercher à « réfuter » – souvent dans l’excès ou sans science – les autres, là où notre occupation principale doit être de nous absorber dans Sa Présence, d’aider les gens dans le besoin, de contempler Sa Création, et lorsque la nécessité l’exige, défendre en effet l’honneur de Ses Bien-aimés ou de nos proches, mais pas en cherchant de nous-mêmes les polémiques ou les débats. Puis, pour ceux qui le peuvent, fréquenter les shuyukhs vertueux ou cheminer auprès d’un maître qualifié, afin de ne pas passer son temps à débattre inutilement sur les réseaux sociaux, ou à « scroller » les fils d’actualité sans jamais accomplir de bonnes actions.

Parmi les conférenciers dont nous avons vu globalement du bien, avec de bonnes réflexions et méditations, une véritable science et sagesse mise en action, – tout en étant bien formés dans leurs disciplines respectives, dans la sphère francophone, il y a Tayeb Chouiref, Denis Gril, Sofiane Meziani, Mamadou Madani Daffé, Abdallah Penot, Corentin Pabiot, qui maitrisent en général bien leurs sujets.

Notes :

(1) Le Tasawwuf n’est pas comparable au shiisme ou au wahhabisme, car le Tasawwuf est avant tout une dimension et une science de l’Islam, avant d’être un mouvement adoptant une interprétation particulière de l’Islam, comme le sont les courants comme le shiisme, le mu’tazilisme et le wahhabisme. Par contre, tout comme il existe plusieurs écoles légitimes et orthodoxes de fiqh (droit musulman) et de ‘aqida (théologie), il existe aussi plusieurs types et « écoles » du Tasawwuf, chacune ayant leur particularité. Quant aux dérives ou aux pratiques hétérodoxes, elles ne sont pas inhérentes au Tasawwuf, qui se fonde sur le Qur’ân et la Tradition prophétique (Sunnah). En tant que science et dimension de l’Islam donc, le Tasawwuf est irréprochable, mais en tant que courant, certains adeptes peuvent être dénoncés ou critiqués pour certaines dérives, ou des pratiques jugées hétérodoxes ou douteuses selon les principes même de l’Islam et du Tasawwuf.

(2) L’oeuvre de Guénon est une aide et un tremplin vers le monde traditionnel et spirituel, elle ne doit pas devenir une idéologie ou un mouvement social en tant que tel, ni même ne se présente comme « auto-suffisante », René Guénon lui-même ayant clairement insisté sur ce point. Certains « guénoniens » trahissent souvent la portée et le fondement de son oeuvre, et lui-même serait le premier à se désavouer d’eux. Son œuvre peut être un excellent support pour guider les âmes vers la Voie spirituelle, et éclairer l’intellect de nos contemporains, face aux dérives et aux superstitions de la modernité ou des mouvements et approches « rigoristes » ou « fades » chez les « religieux » privés de la Lumière muhammadienne et de la dimension spirituelle de l’Islam. Comme l’écrivait sidi Jean-Louis Michon (m. 2013), Guénon et son œuvre étaient « un rayon de la lumière céleste projeté dans un monde malade ».

(3) Traduit en français sous le titre Lettre au disciple, édité notamment chez Tasnîm en 2023 par Tayeb Chouiref.

(4) Pour une approche à la fois historique, théologique, sociologique, métaphysique et spirituelle de la figure prophétique de Muhammad au sein de l’Islam, voir Le Serviteur de Dieu – La figure de Muhammad en spiritualité musulmane (éd. du Cerf, 2022) de Denis Gril et Francesco Chiabotti, 2 doctorants, historiens, islamologues et connaisseurs de la spiritualité musulmane, comme du Qur’ân, du Hadith et de l’histoire des courants musulmans. Le Qur’ân comme l’histoire musulmane des premières générations, témoignent de la place centrale du Prophète Muhammad – sans jamais le diviniser (dans sa personne et sa dimension corporelle) – dans la dimension spirituelle de la foi musulmane et de la pratique religieuse.

(5) Dès l’instant où le Qur’ân évoque de façon générale les mérites particuliers et les immenses sacrifices que les épouses du Prophète (ﷺ), sa famille au sens large et ses Compagnons ont consenti pour soutenir le Prophète, leur honorabilité et le fait qu’il soit interdit de les dénigrer ou d’attenter à leur honneur sont établies dans le Qur’ân, expliciter dans la Sunnah du Prophète (ﷺ) et confirmer par l’ensemble des plus grands maîtres spirituels. Le Qur’ân comme la Sunnah évoquent aussi d’autre part, des péchés ou erreurs que certains ont pu commettre, tout comme leurs divergences, à l’instar d’une famille dont les membres se disputent parfois, même entre frères et sœurs ou entre cousins, ce qui ne les exclut cependant pas de la famille ni de la communauté, sauf s’ils s’en écartent explicitement ou en reniant tous les principes fondamentaux, ce qui n’est ici pas le cas, pas même pour Mu’awiyya, dont ‘Alî et ses descendants n’ont pas fait le takfir. Ainsi, nous savons, conformément au Qur’ân, à la Sunnah, aux récits authentifiés et aux maitres spirituels, qu’Allâh et Son Messager font fait l’éloge générale des Sahaba et des Ahl ul Bayt malgré le fait qu’ils n’étaient pas infaillibles ou qu’ils aient pu diverger entre eux, et en leur sein, des éloges particuliers ont été adressés à certains membres en particulier, dont les Califes bien-guidés (Abû Bakr, ‘Umar, ‘Uthmân et ‘Alî), ses épouses comme Khadija, ‘Aîsha et Umm Salama notamment, ses cousins comme Al-Zubayr et Ibn ‘Abbâs, ses petits-enfants comme Hassân et Hussayn, et d’autres Compagnons comme Salmân al-Farisi, Bilâl al-Habashî, Ibn ‘Umar, Ibn Mas’ûd, Abû Mûsa Al Ash’ari, Abû Dharr al-Ghifarrî, Mû’adh Ibn Jabal, Abû ad-Dardâ’ et d’autres, qui occupaient un rang particulier des plus éminents au sein des Sahaba, tout comme certains membres des Ahl ul Bayt se distinguent des autres. Quant aux avis isolés de certains Compagnons ne faisant pas partie de l’élite, contredisant fondamentalement le Qur’ân, la Sunnah et la pratique majoritaire des meilleurs des Compagnons, nous ne sommes évidemment pas tenus de les suivre même si le respect de leur personne doit être préservée. Tout cela, qui fait partie de la ‘aqida sunnite, est fondée sur le Qur’ân, la Sunnah, l’intellect, le bon sens, les awliyâ’ et leurs dévoilements spirituels, ainsi que sur les faits historiques et les récits les plus authentiques et transmis de façon notoire, contrairement aux quelques récits apocryphes ou complètement déformés ou décontextualisés sur lesquels se basent un certain nombre de sectes ou de courants peu rigoureux en matière d’authentification historique, de rigueur intellectuelle et de spiritualité. Quant aux conflits lors de « Bataille du chameau » et puis lors de la « Bataille de Siffîn », des erreurs diverses (parfois uniquement stratégiques) ont été commises de part et d’autre – alors qu’il y avait des partisans véridiques et sincère des 2 côtés comme des « partisans » hypocrites et malveillants dans les 2 camps, mais les Compagnons se sont abstenus de se jeter mutuellement l’anathème ou de renier le Qur’ân, mais certains ont transgressé, et la position de ‘Alî lors de la bataille de Siffîn était de les considérer toujours comme leurs frères qui ont transgressé et qui devaient être rappelés à l’ordre, comme l’ont relaté ses descendants, dont l’imâm Zayd Ibn ‘Alî à l’égard de Mu’awiyya et de ses partisans, contrairement aux tyrans au sein des omeyyades qui ont été explicitement dénoncés voire même combattus par une partie de la famille alide et de leurs partisans parmi les sunnites. Et pour ‘Aîsha, Abû Bakr, ‘Umar et ‘Uthmân, ‘Alî et ses descendants les ont tenu en haute estime et ont même scellés leurs liens amicaux et familiaux par des mariages entre les membres de leur famille, surtout qu’ils n’ont jamais levé la main sur les Ahl ul Bayt et qu’ils les ont toujours protégés de leur vivant, et que même pour ‘Aîsha, elle se rendit à la base sur le champ de bataille pour trouver une solution et chercher la justice, puis vit la vision décrite par le Prophète (ﷺ) et décida de faire demi-tour, et demanda pardon à Allâh, et s’excusant auprès d’Alî, puis soutint par la suite ‘Alî dans son combat contre les kharijites. Enfin, comme le dit le Qur’ân, à eux ce qu’ils ont acquis, et à nous ce que nous avons acquis de notre vivant, nous ne serons pas interrogés sur leurs différends ou leurs péchés – alors que nous avons déjà beaucoup à faire avec notre âme – mais il nous incombe demander le Pardon divin sur eux. Parmi les plus belles invocations en faveur des nobles et proches Compagnons du Prophète, il y a celles de l’imâm des Ahl ul Bayt de sa génération, celui qui fut reconnu à l’unanimité des gens de la Sunnah pour sa science et sa piété, l’imâm ‘Alî Zayn ul Abidîn (‘alayhî salâm), – fils de l’imâm Al-Hussayn (‘alayhî salâm), et donc petit-fils de l’imâm ‘Alî (‘alayhî salâm) et arrière-petit fils du noble Messager d’Allâh, Muhammad (ﷺ), surnommé l’imâm As-Sajjâd, né en 38 H et mort en 95 H (il a donc connu son grand-père ‘Alî Ibn Abû Tâlib, mort en 40 H), et était le père des imâms Muhammad al-Bâqir (le père de l’imâm Ja’far as-Sâdiq) et de l’imâm Zayd Ibn ‘Alî. Il fut éduqué par des membres de la famille alide tout comme de la famille d’Abû Bakr dont sa fille Abû Bakr, et fit l’éloge de ‘Aîsha et des Califes bien-guidés. Il dit dans sa Sahîfa Sajjâdiya, par rapport aux compagnons du Prophète Muhammad (ﷺ) : « Ô Allâh, rappelle-Toi avec pardon et bon plaisir les disciples des Messagers, et les gens de la terre qui en ont été témoins sans les avoir vus (alors que les obstinés se sont opposés à eux en criant des mensonges). Ils ont langui pour les envoyés à travers les réalités de la foi, à chaque ère et époque dans laquelle Tu as envoyé un Messager, et mis en place un directeur (guide) pour les gens, de la période d’Adam jusqu’à Muhammad (qu’Allâh le bénisse ainsi que les siens), parmi les imâms de la guidance et les dirigeants des dévots (que la Paix Divine soit sur eux) !

Ô Allâh n’oublie pas ce qu’ont abandonné pour Toi et en Toi les Compagnons de Muhammad spécifiquement, ceux qui étaient en bonne compagnie, qui ont supporté la bonne épreuve en l’aidant, qui lui ont répondu lorsqu’il leur a fait entendre l’argument de ses messages, qui se sont séparés de leur conjoint et de leurs enfants dans la manifestation de sa parole, qui ont combattu leurs pères et fils (qui se sont opposés violemment à eux) en renforçant sa prophétie, et qui ont remporté la victoire à travers lui, ceux qui ont été enveloppés dans l’affection pour lui, qui « espèrent des bénéfices impérissables » (Qur’ân 35, 29) dans l’amour pour lui, ceux qui ont été laissés par leurs clans lorsqu’ils se sont accrochés à sa prise et qu’ils ont renié leurs proches lorsqu’ils se sont reposés dans l’ombre de sa famille.

Ô Allâh satisfais-les avec Ton bon plaisir pour les créatures qu’ils ont conduites à Toi alors qu’ils étaient avec Ton Messager, appelant à Toi pour Toi.

Montre-leur de la gratitude pour avoir laissé les demeures de leur peuple pour Ton amour et pour être sortis d’une vie riche pour une vie réduite. Et montre de la gratitude pour ceux d’entre eux qui sont devenus les objets d’injustices et que Tu as augmenté dans l’exaltation de Ta religion.

Ô Allâh, donne aussi Ta meilleure récompense à ceux qui ont agi en suivant les compagnons, qui disent : « Seigneur, pardonne-nous ainsi qu’à nos frères qui nous ont devancé dans la foi » (Qur’ân 59, 10), à ceux qui se sont dirigés sur la voie des Compagnons, qui ont poursuivi leur itinéraire, et qui ont progressé avec leur coutume. Aucun doute concernant leur discernement sûr ne les a détournés et aucune incertitude ne les a troublés pour ne pas suivre leurs traces et ne pas être dirigés par la guidance de leur lumière. En tant qu’assistants et défenseurs, ils ont professé leur religion, remporté la guidance à travers leur guidance, se sont accordés avec eux, et ne les ont jamais accusés dans ce qu’ils ont bénéficié d’eux.

Ô Allâh, bénis aussi les partisans, à partir de ce jour de notre époque jusqu’au Jour du Jugement, leurs épouses, leur descendance et ceux d’entre eux qui T’obéissent, avec une bénédiction à travers laquelle Tu les préserveras de la désobéissance à Ton égard, Tu leur feras une place dans les terrains de Ton jardin, Tu les défendras de la duperie de Shaytân, Tu les aideras dans la piété dans laquelle ils recherchent de Toi, Tu les protègeras des événements soudains qui proviennent la nuit et le jour – sauf les événements qui viennent avec un bien – et Tu les inciteras à nouer fermement le lien du bon espoir en Toi, en ce qui est avec Toi, et à s’abstenir de mauvaises pensées, en raison de ce que les mains de Tes serviteurs tiennent. Ainsi, Tu peux les rétablir après T’avoir recherché et pour T’avoir craint, les amener à renoncer à l’abondance de l’immédiat, les faire aimer l’œuvre pour le terme et les pousser à se préparer pour ce qui vient après la mort, alléger pour eux toute détresse qui leur parvient le jour où les âmes quittent les corps, les libérer de ce qui entraine les périls de la tentation et la descente et le séjour indéfini en enfer, et les emmener dans un lieu sûr, le lieu de repos des dévots ».

 « Abû Nuaym rapporte la narration suivante de la part de Muhammad ibn ‘AIî, venant de son père ‘AIî ibn al-Hussayn : « Un jour, des Irakiens étaient assis ensemble et se mirent à dire du mal d’Abû Bakr et de ‘Umar à chaque fois qu’ils parlaient d’eux. Ensuite, ils passaient à ‘Uthmân, et ‘AIî ibn al-Hussayn demanda :

— « Dites-moi, étiez-vous parmi les premiers Muhâjirûn (émigrés), dont le Qur’ân dit ce qui suit : « …ceux qui ont été chassés de leurs demeures et dépouillés de leurs biens, pendant qu’ils recherchaient la grâce et l’amour d’Allâh, combattaient pour le triomphe de Sa Cause et portaient secours à Son Prophète … » (Qur’ân 59, 8) ?

— Non, répondirent-ils.

— Êtes-vous parmi les suivants : « …ceux qui, déjà installés dans le pays et dans la foi, accueillirent les Émigrés avec joie… » (Qur’ân 59, 9) ?

— Non.

— Vous venez d’être témoins par vous-mêmes que vous ne faites pas partie de ces 2 groupes. Je suis, quant à moi, témoin que vous n’appartenez absolument pas au troisième groupe dont Allâh dit : « …ceux qui sont venus après eux, en disant : « Seigneur, pardonne-nous, ainsi qu’à nos frères qui se sont convertis avant nous ! Fais que nos cœurs n’aient jamais de haine contre les croyants ! Seigneur, Tu es plein de bonté et de compassion ! » (Qur’ân 59, 10). À présent, partez d’ici, et qu’Allâh ne vous soutienne pas et ne vous rapproche pas. Vous vous moquez de l’Islam et vous n’y appartenez pas » ». Rapporté par Ibn Kathîr dans al-Bidâya wa an-Nihâya 9/112, par Al-Qurtûbî dans son Tafsîr, par As-Suhaymi dans al-Aqîda fi Ahl al-Bayt p. 236 et d’autres.

« [Il appartient aussi] aux émigrés besogneux qui ont été expulsés de leurs demeures et de leurs biens, tandis qu’ils recherchaient une grâce et un agrément d’Allâh, et qu’ils portaient secours à (la cause d’) Allâh et à Son Messager. Ceux-là sont les véridiques. Il [appartient également] à ceux qui, avant eux, se sont installés dans le pays et dans la foi, qui aiment ceux qui émigrent vers eux, et ne ressentent dans leurs cœurs aucune envie pour ce que [ces immigrés] ont reçu, et qui [les] préfèrent à eux-mêmes, même s’il y a pénurie chez eux. Quiconque se prémunit contre sa propre avarice, ceux-là sont ceux qui réussissent. Et [il appartient également] à ceux qui sont venus après eux en disant : « Seigneur, pardonne-nous, ainsi qu’à nos frères qui nous ont précédés dans la foi ; et ne mets dans nos cœurs aucune rancœur pour ceux qui ont cru. Seigneur, Tu es Compatissant et Très Miséricordieux » (Qur’ân 59, 8-10).

Et pour conclure, citons aussi ce verset : « Voilà une génération bel et bien révolue. A elle ce qu’elle a acquis, et à vous ce que vous avez acquis. On ne vous demandera pas compte de ce qu’ils faisaient » (Qur’ân 2, 134 et Qur’ân 2, 141), le verset 134 s’adresse historiquement aux communautés antérieures – en englobant aussi par universalisation la communauté musulmane – tandis que le verset 141 englobe explicitement aussi la communauté musulmane) ce qui réfute ceux qui font de la polémique ou la critique des Sahaba ou des Ahl ul Bayt une condition de la foi. C’est une maladie de l’âme, que de chercher dans des récits douteux ou déformés, la haine de l’autre, de les calomnier ou de les maudire, alors qu’Allâh a fait l’éloge de ceux qui ont soutenu le Messager de son vivant, puis des croyants vertueux et véridiques, parmi les Saints, les Savants et les autres, qui ont sacrifié leur vie pour Allâh tout en aimant profondément le Messager d’Allâh, sa Famille et ses Compagnons.

(6) Très peu d’entre eux ont étudié les sciences islamiques de façon traditionnelle d’après nos observations, se contentant avant tout d’un savoir livresque insuffisant et lacunaire dans ce domaine, et ne cheminant pas de façon régulière auprès de maîtres qualifiés, d’où leur rejet ou incompréhension d’un certain nombre de récits et doctrines d’ordre traditionnel, ou de certains avis juridiques anciens, qui avaient leur pertinence dans le contexte de l’époque, mais plus forcément dans notre contexte particulier – la fatwa étant par définition contextuelle et dépendant de plusieurs conditions et facteurs pour qu’elle soit appliquée -, mais ils éprouvent souvent du mal à distinguer les différentes notions et tombent finalement dans les mêmes travers que certains exotéristes ou wahhabites, mais pas toujours pour les mêmes raisons. La fatwa en Islam est de 2 types, l’une qui est islamiquement fausse ou erronée, peu importe les contextes et les époques, et l’autre qui est pertinente dans un contexte donné (époque particulière, conditions de vie spécifiques, catégories de personne précises, etc.) mais qui n’a pas vocation à être pratiquée partout de façon identique lorsque les conditions diffèrent, surtout entre une société traditionnelle et une société « moderne » où les mentalités, modes de vie et moyens sont radicalement différents voire opposés. C’est là que les savants qualifiés se distinguent des « savants » rigoristes, car les premiers agissent avec clairvoyance et se réfèrent avant tout aux principes et aux finalités, là où les seconds s’attachent à une « lettre morte » qui peut devenir une transgression même des finalités et principes de la Loi. Le Messager d’Allâh (ﷺ) a dit en ce sens : « Le Qur’ân possède un extérieur, un intérieur, [Il] détermine des principes et ouvre sur l’universel » (Rapporté par At-Tabarânî, ainsi que par l’auteur du Tâj al-tafâsîr et par Al-Hindi dans Kanz ul-Ummal n°3086) et « Combien connaissent les règles religieuses (fiqh) tout en manquant de clairvoyance (laysa bifaqîh) ! » (Rapporté par différents rapporteurs parfois avec quelques petites variantes, comme At-Tabarânî, et Al-Hindi dans Kanz ul-Ummal n°29004). Et comme le dit le Qur’ân : « Dis : je ne fais que suivre (et me conformer à) ce qui m’est révélé de la part de mon Seigneur ; ce sont des visions clairvoyantes de la part de votre Seigneur, guidance et miséricorde pour ceux qui ont la foi » (Qur’ân 90, 12-18) et « Et qui te dira ce qu’est la voie difficile ? C’est délier un joug [affranchir un esclave], ou nourrir, en un jour de famine, un orphelin proche parent, ou un pauvre dans le dénouement. Et c’est être, en outre, de ceux qui croient et s’enjoignent mutuellement l’endurance (dans la droiture et le bien), et s’enjoignent mutuellement la miséricorde. Ceux-là sont les gens de la droite (ceux adhèrent à la Religion de la droiture) » (Qur’ân 90, 12-18). Aussi la notion de Firasa (clairvoyance, perspicacité spirituelle) dans le Qur’ân et la Sunnah comme dans le hadîth rapporté par At-Tirmidhî selon Abû Saîd al-Khudrî : « Méfiez-vous de la firasa (prévoyance : clairvoyance, perspicacité spirituelle) du croyant car il voit par la lumière d’Allâh » (puis il a récité le verset suivant) : « Voilà vraiment des preuves, pour ceux qui savent observer (et perçoivent les choses avec perspicacité et clairvoyance) ! » (Qur’ân 15, 75) », rapporté aussi par une autre voie et variante, à la chaine (isnad) plus forte par At-Tabarânî, As-Sakhawî, Al-Bazzâr dans son Musnad, Ibn al-Qayyim dans son Madarîj as-Salikîn et qui le commente, selon Anas Ibn Mâlik : « Allâh a des serviteurs qui connaissent les gens par intuition (et clairvoyance) ».


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