Le Wahhabisme et la question de l’alliance et du désaveu (al walâ’ wa al barâ’)

La question de l’alliance et du désaveu (al walâ’ wa al-barâ’) est fondamentale dans l’Islam, car elle se rattache aux critères nécessaires pour distinguer, dans les actes, ce qui distingue ceux qui prennent le parti d’Allâh et de Son Messager, et ceux qui s’y opposent. Elle n’est donc pas une question nouvelle apparue avec le wahhabisme, mais elle est intrinsèquement liée à l’Islam, tout comme le principe du takfir. Tout groupe qui se distingue par certaines caractéristiques comporte un critère de discrimination (distinction) pour exprimer les nuances et les différences, à la fois conceptuelles et pratiques, qui séparent les différents groupes. Et cela s’opère dans la vie de tous les jours ; un « vrai européen blanc » n’est pas un « noir africain », « une femme n’est pas un homme », « un humain n’est pas un oiseau », « un pacifiste n’est pas un génocidaire ». Les mots ont donc un sens et sont porteurs de concepts et de données qui permettent de comparer, assimiler, distinguer ou d’opposer différentes catégories issues du mental. Les scientifiques « excommunient » ou « marginalisent » ceux qu’ils considèrent comme des « pseudo-scientifiques » ou des « charlatans » par exemple, et il en va de même avec les polémiques liées aux « patriotes », « nationalistes », « laïcs », etc.

Là où le Wahhabisme a innové, c’est dans sa compréhension et de son rajout de conditions fondamentales, là où le Qur’ân, la Sunnah et l’élite des salafs ne l’ont pas fait. De même, les implications politico-juridiques de leur compréhension posent aussi de sérieux problèmes, puisque faisant couler le sang de pratiquement tous leurs opposants, peu importe qu’ils soient musulmans ou non, pieux ou non, savants ou non. Tout en méconnaissant plusieurs aspects du Tawhîd, et en considérant comme du shirk (idolâtrie) ce qui ne l’est pas, ils ont appliqué le takfir (excommunication) sur des musulmans qui n’ont fait que respecter l’Islam sans annuler leur foi monothéiste (tawhîd), à l’instar de ceux qui ont pratiqué le tawassul ou le tabarruk légiférés, ceux qui se sont défendus contre leur folie meurtrière et leurs déviances doctrinales. On citera d’ailleurs l’opposition frontale entre Mohammed ibn Abdel Wahhâb (le fondateur du Wahhabisme), – qui a rejeté la science des savants hanbalites de son époque pour devenir un autodidacte -, et son propre frère Sulayman Ibn Abdel Wahhâb, – un savant hanbalite reconnu -, qui réfuta d’ailleurs les déviances et erreurs de son frère, en usant des versets du Qur’ân, des ahadiths de la Sunnah, des paroles des salafs et même des enseignements d’Ibn Taymiyya et de Ibn al-Qayyim.

Mohammed ibn Abdel Wahhâb prétendait, – face à la critique – dans Fatâwâ wa Masâ’il (4/7) que : « Et parmi les mensonges et calomnies, il y a qu’ils prétendent que nous procédons à une excommunication généralisée […] ».

Cependant, dans sa vision des choses, on lit que Mohammed ibn Abdel Wahhâb a dit : « Et je vous le dis en ce qui me concerne, et je le jure par Allâh, Celui à part qui il n’y a pas de vrai dieu, que j’étudiais la science, et ceux qui me connaissaient étaient convaincu que j’avais de la science, alors qu’en fait à l’époque j’ignorais encore ce que veut dire «Il n’y a pas de véritable divinité autre qu’Allâh» et je ne savais pas ce qu’est la religion de l’Islam, jusqu’à ce qu’Allâh me fit grâce de ce bien. De même pour mes professeurs, pas un d’entre eux ne connaissait cela ». (Mohammed Ibn Abdel Wahhâb, Rasâ’il As-Shakhsya, pp.186, 187). Selon lui, dans sa région et aux alentours, il était seul à avoir compris le Tawhîd, tous les autres ne le connaissaient pas et étaient donc des « idolâtres », et c’est autour de sa personne qu’il fit l’alliance et le désaveu. Or affirmer ce qu’il a dit, revient à prétendre connaitre le Ghayb (l’Invisible) sans qu’Allâh ne l’en eût informé, ce qui peut s’apparenter clairement à du shirk !

Or dans les faits, les savants hanbalites du Najd, étudiaient le Qur’ân, la Sunnah, le fiqh hanbalite et même pour certains d’entre eux, les ouvrages de Ibn Taymiyya. De même pour les savants hanafites, malikites, shafiites et autres qui étudiaient le Qur’ân, la Sunnah et les ouvrages de fiqh et de ‘aqida. Au départ, il reconnaissait la science des savants, puis d’un coup, en raison de sa mauvaise compréhension, il changea d’avis et disait qu’ils n’étaient pas de vrais savants et qu’ils ne connaissaient pas le tawhîd. Sa parole peut être réfutée d’ailleurs par le hadîth prophétique rapporté par Muslim dans son Sahîh : « Celui qui dit que les gens sont perdus est le plus perdu d’entre eux ». C’est d’ailleurs une mentalité typique des différents mouvements khawarij qui sont apparus à travers l’histoire.

Et dans la pratique, son disciple Husayn Ibn Ghannâm à travers son livre Târîkh Najd (Histoire du Najd) relate plusieurs événements où son maître (Mohammed ibn Abdel Wahhâb) fit le takfir de masse. On peut notamment y lire ce qui suit, tel que cité par le wahhabite Madhat Âl Farâj dans son Fath ul ‘Aliyy Il Hamîd, lorsque le Shaykh Sulaymân Ibn ‘Abdel Wahhâb (son frère, un savant hanbalite) et les habitants de sa ville refusèrent de joindre la secte fondée par son frère : « Au mois de shawwâl de l’année 1165, les habitants de Huraymilâ apostasièrent, accompagnés de leur juge Sulaymân Ibn ‘Abd Il Wahhâb, le frère de Mohammed Ibn ‘Abd Il Wahhâb » (voir aussi shamela.ws/browse.php/book-11324/page-7#page-7).

Or les habitants et son frère étaient musulmans, et le réfutaient à partir du Qur’ân, de la Sunnah, du fiqh hanbalite, des écrits d’Ibn Taymiyya et des exégèses sunnites. Mais pour justifier son projet politique, il nommait ses opposants « apostats, ennemis de l’islam et du tawhîd ».

Le Shaykh Ibn Taymiyya a dit pourtant dans Majmû al fatawâ (20/164) : « Il ne revient à personne d’imposer à la Ummah (communauté islamique) un homme et d’appeler à son chemin et d’allier et se désavouer en fonction de cette personne sauf s’il s’agit du prophète. Et il n’est pas permis d’imposer une parole et de s’allier et se désavouer sur cette parole sauf s’il s’agit de la parole d’Allâh et de Son Messager ou du consensus de la communauté. Plutôt, ceci fait partie des actes des gens d’innovations (blâmables) qui élèvent une personne ou une parole et divisent la communauté (musulmane) en s’alliant sur cette parole et en se désavouant en fonction de cette alliance ».

Mais pour en revenir à la notion fondamentale dont il est question ici, citons quelques versets liés à l’alliance et au désaveu :

« Ni les Juifs, ni les Chrétiens ne seront jamais satisfaits de toi, jusqu’à ce que tu suives leur religion. – Dis : « Certes, c’est la direction d’Allâh qui est la vraie direction ». Mais si tu suis leurs passions après ce que tu as reçu de science, tu n’auras contre Allâh ni protecteur ni secoureur » (Qur’ân 2, 120).

« Or, ils ne cesseront de vous combattre jusqu’à, s’ils peuvent, vous détourner de votre religion. Et ceux parmi vous qui adjureront leur religion et mourront Kafir (mécréants), vaines seront pour eux leurs actions dans la vie immédiate et la vie future. Voilà les gens du Feu : ils y demeureront indéfiniment » (Qur’ân 2, 217).

« Que les croyants ne prennent pas, pour alliés, des Kafirin (mécréants), au lieu des croyants. Quiconque le fait contredit la religion (agrée) d’Allâh, à moins que vous ne cherchiez à vous protéger d’eux » (Qur’ân 3, 28).

« Ô les croyants ! Si vous obéissez à ceux qui ne croient pas (les mécréants), ils vous feront retourner en arrière. Et vous reviendrez perdants. Mais c’est Allâh votre Maître. Il est meilleur des secoureurs » (Qur’ân 3, 149-150).

« O Les croyants ! Quiconque parmi vous apostasie de sa religion… Allâh va faire venir un peuple qu’Il aime et qui L’aime, modeste envers les croyants et fier et puissant envers les mécréants, qui luttent dans le sentier d’Allâh, ne craignant le blâme d’aucun blâmeur. Telle est la Grâce d’Allâh. Il la donne à qui Il veut. Allâh est Tout-Englobant et Omniscient. Vous n’avez d’autres alliés qu’Allâh, Son messager, et les croyants qui accomplissent la Salât, s’acquittent de la Zakât, et s’inclinent (devant Allâh). Et quiconque prend pour alliés Allâh, Son messager et les croyants, [réussira] car c’est le parti d’Allâh qui sera victorieux. Ô les croyants ! N’adoptez pas pour alliés ceux qui prennent en raillerie et jeu votre religion, parmi ceux à qui le Livre fut donné avant vous et parmi les mécréants. Et craignez Allâh si vous êtes croyants » (Qur’ân 5, 54-57).

« Ô vous qui croyez ! Ne prenez point Mes ennemis et les vôtres pour alliés ! » (Qur’ân 60, 1).

Une parole de l’imâm Ahmad à ce sujet, rapportée par l’imam Al-Istakhrî dans Tabaqat Al-Hanabilah : « Al warâ’ est une bid’a (innovation), et al barâ est une bid’a », pas dans le sens d’un désaveu de ce principe, mais contre la compréhension erronée de certains. Et l’imâm Ahmad détaille sa position dans Kitab as-Sunnah. Concernant la notion de walî, elle a 21 sens différents (parmi lesquels : protecteur, maitre, allié, …), et l’imâm Al-Zubaydî explique que chaque fois que la notion est rapportée dans un verset ou un hadith, elle est liée aux éléments du contexte et ne peut être appliquée de façon générale.

Le concept en lui-même découle donc des différents versets qurâniques et de ahadiths. Le problème relève de sa compréhension, où en effet, celle de Mohammed Ibn Abdel Wahhab contredit même celle du Shaykh Ibn Taymiyya par exemple. Et chez beaucoup de najdites contemporains, ce concept est compris comme étant une attitude hostile et agressive à tous les mécréants ou à tous les « égarés » de l’islam (selon leur grille de lecture), alors que le Qur’ân et la Sunnah intègrent de nombreuses nuances et étendent le principe de bonté et de bienveillance, – sans que cela n’implique une adhésion ou une justification licite à leurs croyances anti-islamiques -, aux non-musulmans qui ne prennent pas part à la guerre ouverte contre Allâh, Son Messager et la communauté de Muhammad, – ‘alayhî salât wa salâm ! -.

Ils citent parfois des paroles sorties de leur contexte, notamment celle de As-Shawkânî (qui avait adhéré au wahhabisme avant de renier le wahhabisme pour revenir à l’Islam classique), avec sa parole se trouvant dans le chapitre de son Nayl al-Awtâr qui parle d’accepter et d’offrir des cadeaux à des non-musulmans. Il dit en effet que la bonté pieuse (al-birr), le lien (al-sillah) et l’excellence/bienfaisance (al-ihsân) vis-à-vis du non-musulman (mécréant) n’implique pas (et ne doit pas impliquer) l’amour envers ses croyances erronées ou les actes blâmables qu’il pourrait commettre, à l’instar des péchés, – qu’il ne faut pas aimer et cautionner -, commis par des musulmans.

Ibn Kathîr, quant à lui, dans son tafsîr, dira qu’il est permis d’offrir des cadeaux à des non-musulmans qui ne combattent pas les musulmans.

Il est dit dans Al-Fatawa al-Hindiyya (5/347-348), l’un des ouvrages de référence de l’école Hanafite : « L’Imâm Muhammad (qu’Allâh lui fasse miséricorde) a enregistré des narrations (en apparence) contradictoires dans son al-Siyar al-Kabir, certains indiquant que le Messager d’Allâh a accepté des cadeaux provenant de non-Musulmans, tandis que d’autres indiquent le contraire, par conséquent, il est nécessaire de concilier entre ces narrations qui sont (en apparence) contradictoires …

Concernant cette narration dans laquelle le Messager d’Allâh n’avait semble-t-il pas accepté le cadeau provenant d’un non-Musulman, le Faqih Abu Ja’far al-Hindawani a déclaré que si le Messager d’Allâh avait agi ainsi, c’est qu’il pensait que la personne qui lui donnait le cadeau s’imaginait que la lutte entreprise par le Messager d’Allâh avait pour but l’acquisition de la richesse et non pas l’élévation de la Parole d’Allâh. Par conséquent, même aujourd’hui il demeure interdit d’accepter un cadeau d’un tel individu. Quant à la narration dans laquelle le Messager d’Allâh avait accepté le cadeau d’un non-Musulman, il avait agi ainsi car il pensait que la personne donnant le cadeau reconnaissait que le Messager d’Allâh luttait pour l’Islam et l’élévation de la parole d’Allâh et non pour un gain matérialiste. En conséquence de quoi, encore aujourd’hui, il demeure autorisé d’accepter le cadeau d’un tel individu. Certains savants (Hanafi) ont concilié d’une autre manière (les récits apparemment contradictoires), en déclarant que si le Messager d’Allâh n’avait pas accepté un cadeau provenant d’un non-Musulman c’est parce qu’il pensait qu’en acceptant son cadeau, cela affaiblirait sa solidarité, qu’il perdrait le respect et aurait ensuite à adoucir son approche. Tandis qu’il aurait accepté le cadeau d’une personne s’il ne craignait pas les choses précitées ».

Selon ce recueil de fiqh hanafite, il indique qu’il n’y a rien de mal à accepter et/ou à donner un cadeau à un non-Musulman à condition de n’avoir aucune crainte pour sa foi. Le mufti hanafite ibn Adam al-Kawthari dans sa fatwa La Jurisprudence (Fiqh) des relations entre les Musulmans et les non-Musulmans, nous explque que le Messager d’Allâh (‘alayhî salât wa salâm) n’acceptait pas le cadeau des non-Musulmans lorsqu’il craignait que ce soit néfaste pour les Musulmans tandis qu’il les acceptait lorsqu’il n’avait pas cette crainte. Au contraire, quand il existe certains avantages à donner et à accepter des cadeaux, tels que l’espoir d’une acceptation de l’Islam, il convient de donner et d’accepter des cadeaux. Si l’on craint pour sa foi, alors on ne doit ni donner ni recevoir de cadeau. En ce qui concerne le don et l’acceptation de cadeaux pendant la période des fêtes religieuses des non-Musulmans, comme les fêtes Noël, de Diwali, etc, c’est permis, car cela n’est pas en soi un acte religieux, mais une coutume sociale. L’intention de donner des cadeaux n’est pas de respecter la fête religieuse, mais plutôt de faire preuve de respect et de courtoisie envers celui à qui le cadeau est donné, comme le souligne l’Imam Ashraf Ali al-Tahanawi (qu’Allâh lui fasse miséricorde) dans son célèbre Imdad al-Fatawa, 3/482. Par conséquent, il est permis de donner et de recevoir des cadeaux pendant la période des fêtes de fin d’année, avec l’intention de permettre au non-Musulman de se rapprocher de l’Islam, à condition que deux conditions soient remplies :

a) Le cadeau ne doit pas être donné dans l’intention de célébrer une fête non-Musulmane, mais plutôt de faire preuve de courtoisie envers un autre être humain,

b) Le cadeau ne doit pas être quelque chose qui est relié à la fête religieuse non-Musulmane, comme un arbre de Noël.


La question qu’il faut maintenant se poser, c’est de savoir ce qu’il faut entendre par « l’alliance et le désaveu » ? Est-ce une hostilité et un combat contre tous les mécréants ? Faut-il détester tous les mécréants en soi ? La réponse est évidemment que non.

L’Imâm hanbalite Umar ibn Alî ibn Adil (775-880 H) a dit dans son Tafsîr al-Lubâb fî Ulûm al-Kitâb :
« L’alliance avec l’infidèle (mécréant, non-musulman) se divise en 3 parties :

Premièrement : Se satisfaire de sa mécréance, la soutenir et s’allier à lui pour elle, alors celui (qui fait cela) est un infidèle parce qu’il est satisfait de sa mécréance et qu’il la soutient.

Deuxièmement : Se socialiser avec eux (et les traiter) gentiment avec ses actions apparentes. Cela n’est pas interdit.

Troisièmement : L’alliance dans le sens de s’incliner vers eux, de les aider et de les soutenir, soit à cause d’un lien, soit par amour, tout en croyant que leur religion est fausse. Alors cela est interdit mais ne fait pas de vous un infidèle (…) ».
Pour le dernier point, il s’agit d’une alliance militaire sans nécessité et qui ne défend pas les intérêts de la nation musulmane et de tous les citoyens (non-musulmans en terres d’Islam) et opprimés de la terre.

Cela réfute une croyance adoptée par Mohammed Ibn Abdel Wahhâb à propos de l’alliance et du désaveu, où pour lui toute alliance avec un kafir est considérée comme un acte annulatif de l’Islam, ce qui contredit le Qur’ân, la Sunnah, la Sîrah et l’intellect.

L’imâm al-Râghib al-Isfahânî (m. 502 H/1109) dans son Tafsîr dit : « Il fut dit : « L’amour (mawaddat) interdit [vis-à-vis des non-musulmans] est l’amour religieux et non pas l’amour bénéfique ou passionnel. Car, si l’amour que nous avons à leur égard est dû au bénéfice qu’ils nous apportent, alors nous aimons le bénéfice à l’instar de notre amour pour le dhimmî qui nous aide à repousser les idolâtres ».

On trouve en effet dans le Qur’ân ceci : « Nous t’avons (Muhammad) seulement envoyé comme miséricorde aux mondes » (Qur’ân 21, 107).

« En vérité, il est venu à vous un Prophète pris parmi vous ; le mal que vous commettez lui est douloureux ; il est celui qui veut toujours votre bien ; envers les croyants il est bon et miséricordieux » (Qur’ân 9, 128).

« Par une miséricorde d’Allâh, tu as été doux envers eux ; si tu avais été rude et dur de cœur, ils auraient fui loin de toi. Pardonne-leur donc, et implore pour eux le pardon (d’Allâh). Et consulte-les à propos des affaires ; puis une fois que tu t’es décidé, confie-toi donc à Allâh, Allâh aime, en vérité, ceux qui Lui font confiance » (Qur’ân 3, 159).

A l’égard des non-musulmans : « Tu (Muhammad) ne guides pas celui que tu aimes : mais c’est Allâh qui guide qui Il veut… » (Qu’rân 28, 56). Il est donc permis d’avoir un amour naturel envers des proches non-musulmans ou des non-musulmans en qui nous voyons du bien. Malgré son attachement à l’idolâtrie, son oncle Abû Tâlib fut très aimé et apprécié du Prophète pour ses qualités morales.

La mécréance des non-musulmans respectueux ne l’avait donc pas empêché de leur manifester de l’amour ou de la bonté : « Et vraiment, tu (Muhammad) es selon un caractère (et une moralité) incomparable (et éminent) » (Qur’ân 68, 4).

En parlant des mécréants qui avaient lancé les hostilités contre le Prophète et sa communauté (verset 25), Allâh dit : « Muhammad est le Messager d’Allâh. Et ceux qui sont avec lui sont rigoureux envers les dénégateurs (belliqueux), pleins d’Amour rayonnant entre eux (les croyants). Tu les vois s’inclinant, se prosternant : ils recherchent ardemment une faveur et une satisfaction d’Allâh. La marque sur leurs visages résulte de la trace laissée par la prosternation. Telle est l’analogie les concernant dans la Torah. Dans l’Evangile, l’analogie les concernant est celle d’une semence qui pousse. Alors, elle se renforce, puis s’épaissit, puis se tient en équilibre sur sa tige : elle émerveille les semeurs tandis qu’elle exaspère les dénégateurs (belliqueux). Allâh a promis un recouvrement et une rétribution sans commune mesure à ceux qui ont mis en œuvre le Dépôt confié (la foi) et accompli les œuvres intègres » (Qur’ân 48, 29).

Selon le Qur’ân, le désaveu doctrinal est total à l’égard de toutes les croyances et les actes contredisant les principes et doctrines islamiques. Mais ce désaveu ne doit pas s’accompagner de haine envers les non-musulmans qui manifestent une attitude respectueuse. Et le désaveu qui doit être suivi par une attitude ferme et puissante concerne les non-musulmans qui combattent les musulmans, tout en laissant la porte ouverte aux possibilités de pardon et sans jamais faillir au principe de justice.

Nous retrouvons ces 3 axes et attitudes dans le Qur’ân :

1) le « pourquoi » : « Comment donc ! Quand ils triomphent de vous, ils ne respectent à votre égard, ni parenté ni pacte conclu. Ils vous satisfont de leurs bouches, tandis que leurs cœurs se refusent ; et la plupart d’entre eux sont des pervers. Ils troquent à vil prix les versets d’Allâh (le Qur’ân) et obstruent Son chemin. Ce qu’ils font est très mauvais ! Ils ne respectent, à l’égard d’un croyant, ni parenté ni pacte conclu. Et ceux-là sont les transgresseurs. Mais s’ils se repentent, accomplissent la Ṣalât et acquittent la Zakât, ils deviendront vos frères en religion. Nous exposons intelligiblement les versets pour des gens qui savent. Et si, après le pacte, ils violent leurs serments et attaquent votre religion, combattez alors les chefs de la mécréance – car, ils ne tiennent aucun serment – peut-être cesseront-ils (de s’en prendre à vous) ? Ne combattrez-vous pas des gens qui ont violé leurs serments, qui ont voulu bannir le Messager et alors que ce sont eux qui vous ont attaqués les premiers ? Les redoutiez-vous ? C’est Allâh qui est plus digne de votre crainte si vous êtes croyants ! » (Qur’ân 9, 8-13).
« Combattez dans le sentier d’Allâh ceux qui vous combattent, et ne transgressez (n’agressez) pas. Certes. Allâh n’aime pas les agresseurs/transgresseurs ! » (Qur’ân 2, 190).
« Autorisation est donnée à ceux qui sont attaqués (de se défendre) – parce que vraiment ils sont lésés ; et Allâh est certes Capable de les secourir, ceux qui ont été expulsés de leurs demeures, – contre toute justice, simplement parce qu’ils disaient : « Allâh est notre Seigneur » -. Si Allâh ne repoussait pas les gens les uns par les autres, les ermitages seraient démolis, ainsi que les églises, les synagogues et les mosquées où le nom d’Allâh est beaucoup invoqué. Allâh soutient, certes, ceux qui soutiennent (Sa Religion) » (Qur’ân 22, 39-40).

Ainsi la légitime défense est autorisée, avec la volonté de secourir les opprimés (musulmans ou non) et de protéger les différents lieux de culte dédiés à l’adoration du Divin même si certaines conceptions ont sombré dans l’idolâtrie inconsciemment.


2) le « comment (ensemble des méthodes) » :

« (…) et chassez-les d’où ils vous ont chassés : la fitna (engendrant le chaos, la corruption, la répression et la tyrannie) est plus grave que le meurtre. Mais ne les combattez pas près de la Mosquée sacrée avant qu’ils ne vous y aient combattus. S’ils vous y combattent, combattez-les donc. Telle est la rétribution des mécréants » (Qur’ân 2, 191).
« Lorsque vous rencontrez (au combat) ceux qui ont mécru frappez-en les cous. Puis, quand vous les avez dominés, enchaînez-les solidement. Ensuite, c’est soit la libération gratuite, soit la rançon, jusqu’à ce que la guerre dépose ses fardeaux. Il en est ainsi, car si Allâh voulait, Il se vengerait Lui-même contre eux, mais c’est pour vous éprouver les uns par les autres. Et ceux qui seront tués dans le chemin d’Allâh, Il ne rendra jamais vaines leurs actions » (Qur’ân 47, 4).


3) « Les exceptions » :
 
« (…) ceux qui ne vous ont pas combattu pour la religion ou expulsé de vos demeures » (Qur’ân 60,8).
« À l’exception des associateurs avec lesquels vous avez conclu un pacte, puis ils ne vous ont manqué en rien, et n’ont soutenu personne [à lutter] contre vous : respectez pleinement le pacte conclu avec eux jusqu’au terme convenu. Allâh aime les pieux » (Qur’ân 9, 4).
« Et si l’un des associateurs te demande asile, accorde-le lui, afin qu’il entende la parole d’Allâh, puis fais-le parvenir à son lieu de sécurité. Car ce sont des gens qui ne savent pas » (Qur’ân 9, 6),
« tant qu’ils sont droits envers vous, soyez droits envers eux, car Allâh aime les pieux » (Qur’ân 9, 7). « …excepté ceux qui se joignent à un groupe avec lequel vous avez conclu une alliance, ou ceux qui viennent chez vous, le cœur serré d’avoir à vous combattre ou à combattre leur propre tribu » (Qur’ân 4, 90).

Si on prend en compte la totalité des versets, on se rend compte que les seules motivations légitimes de la guerre concernent la défense des opprimés qui se font massacrer par une puissance tyrannique et injuste, pour se défendre en cas d’attaques, ou pour retourner victorieusement là d’où des injustes nous ont chassé, mais c’est tout. De même, il y a l’interdiction de combattre ceux qui ont fini par déposer les armes (parmi les combattants et les chefs politico-militaires), ceux qui n’ont pas soutenu des injustes, ceux qui n’ont pas pris clairement les armes contre nous et ceux qui n’ont pas voulu nous expulser de nos demeures légitimes.

La guerre en islam ne peut donc pas être légitimée par le simple fait de la mécréance d’une personne car cela est strictement interdit par le Qur’ân en différents endroits. Cela signifie d’une part que tuer un non-musulman pacifique est interdit, et le faire relève du grand péché. Ensuite, que même avec les non-musulmans, le croyant qui aspire à la piété doit se montrer bienveillant, équitable et bienfaisant à son égard (et même lui offrir des cadeaux licites comme le faisait le Prophète Muhammad, et comme le rappelle Ibn Kathir dans son tafsîr), et enfin, que même le combattant non-musulman qui dépose les armes et désire être conduit en lieu sûr, sa volonté doit être scrupuleusement respectée par les musulmans. Et contrairement à l’erreur commise par certains exégètes, aucun de ses versets n’est abrogé selon le Qur’ân ou la Sunnah mutawatir, car tous sont valables et se complètent pour traiter les différents contextes et les situations diverses comportant des conditions et des nuances distinctes et multiples. En effet, nulle part dans le Qur’ân, dans les versets relatifs à la guerre par exemple, il n’est fait mention d’une quelconque abrogation. Si en temps de faiblesse et d’incapacité militaire, – ce qui peut arriver encore à notre époque -, les musulmans sont incapables de faire cesser l’injustice par la force militaire ou politique, ils doivent patienter et ruser pour échapper à leurs persécutions/persécuteurs, mais s’ils en ont les moyens, sans semer le chaos et sans tuer les non-combattants parmi eux ou parmi leurs ennemis, alors le Qur’ân leur donne le droit de se défendre afin de faire cesser l’injustice et l’oppression. Par ailleurs, les données historiques bien établies confirment le contexte historique et le discours qûranique, ainsi que les grandes lignes de la Sirah et de la Sunnah (contrairement à certains récits isolés qui sont en même temps contradictoires avec le Qur’ân et les données historiques).

Cela est aussi corroboré par la Sunnah, où nous pouvons trouver ceci, où lors du sermon d’adieu du Prophète, il dit : « Vous informerais-je au sujet du croyant (mû’min) ?
C’est celui que les gens ne craignent pas quant à leurs biens et leurs propres personnes.
Et le musulman, c’est celui dont les musulmans sont épargnés (du mal) de sa main et de sa langue.
Et le (véritable) combattant (al mujâhid) est celui qui lutte contre son ego.
Et l’émigré (al muhâjir) est celui qui délaisse (quitte) les fautes et les péchés »
. (Hadîth rapporté par Ahmad dans son Musnad).

D’autres paroles prophétiques enseignent que : « Par Celui qui détient mon âme en Son Pouvoir, Allâh n’octroie Sa Miséricorde qu’aux miséricordieux ». On lui dit : « Messager d’Allâh, nous pratiquons tous la miséricorde ». Il (‘alayhî salât wa salâm) répondit : « Il ne s’agit pas de miséricorde envers vos compagnons, mais de miséricorde envers tous les êtres humains ». (Hadîth rapporté dans le Musnad de Abû Ya’lâ n°4258, par Al Bayhaqî dans Shu’ab al îmân n°11060).

« Efforce-toi de n’avoir que de belles paroles et répands la paix » (Hadîth rapporté par Ibn Hibbân dans son Sahîh, n°490).

« La meilleure oeuvre après la foi en Allâh, est l’amour bienveillant envers les gens » (Hadîth rapporté par At-Tabarânî, et cité par Tayeb Chouiref dans Les enseignements spirituels du Prophète, vol. 1, p. 51, hadîth n°7, et le sens de ce hadith est général).

 « Il faut pratiquer la bienveillance et prendre garde à ne pas être violent ou indécent » (Hadîth rapporté par al-Bukharî, et cité par Tayeb Chouiref dans son ouvrage Les enseignements spirituels du Prophète, vol. 1, p. 51, hadîth n°8).

Citons aussi ce passage qurânique, qui fut l’un des derniers révélés concernant les relations avec les non-musulmans (après la totalité, ou la quasi-totalité des versets relatifs à la guerre) :

« Il se peut qu’Allâh établisse de l’amitié entre vous et ceux d’entre eux dont vous avez été les ennemis. Et Allâh est Omnipotent et Allâh est Pardonneur et Très Miséricordieux.
Allâh ne vous défend pas d’être bienfaisants et équitables envers ceux qui ne vous ont pas combattus pour la religion et ne vous ont pas chassés de vos demeures. Car Allâh aime les équitables.
Allâh vous défend seulement de prendre pour alliés ceux qui vous ont combattus pour la religion, chassés de vos demeures et ont aidé à votre expulsion. Et ceux qui les prennent pour alliés sont les injustes »
(Qur’ân 60, 7-9). Plusieurs exégètes citent ce hadîth comme étant en lien avec ce verset, où la mère d’Asmâ bint Abû Bakr qui était toujours non-musulmane en l’an 630 (soit environ 2 ans avant la mort du Prophète, à la fin de la période médinoise), sa mère (qui vivait au milieu de gens faisant la guerre au Prophète, à Abû Bakr et à ses propres enfants !) vint la voir à Médine. Asmâ, embarrassée, demanda conseil au Prophète Muhammad : « « Ô Messager d’Allâh, ma mère mécréante est venue me voir. Puis-je la recevoir et entretenir des (bonnes) relations avec elle malgré sa mécréance ? ». Ce à quoi le Prophète répondit : « Oui, sois bonne avec ta mère » » (hadîth rapporté par Muslim et al-Bukharî dans leur Sahîh).

Que dire alors qu’il s’agissait non seulement d’une femme mécréante, vivant dans le camp ennemi, ne s’en désavouant pas clairement, mais qui ne levait pas les armes elle-même contre les musulmans ? Le Prophète dit à Asmâ de maintenir de bons rapports avec elle (pas d’insulte, pas d’agression, pas de meurtre, pas de tromperie, pas de vol), d’être respectueuse et bienfaisante avec sa mère. N’est-ce pas là le summum de la justice et de la bonté ?

Ce verset n’interdit donc pas de prendre pour alliés politiques ou professionnels, des non-musulmans qui tiennent leurs engagements et qui ne participent pas à combattre les musulmans.

Allâh dit dans le Qur’ân : « …et soyez équitables, car Allâh aime les équitables » (Qur’ân 49, 9).

Il dit aussi : « Ô les croyants ! Soyez stricts (dans vos devoirs) envers Allâh et soyez des témoins équitables. Et que la haine pour un peuple ne vous incite pas à être injustes. Pratiquez l’équité : cela est plus proche de la piété. Et prenez garde à Allâh. Car Allâh est certes Parfaitement Connaisseur de ce que vous faites » (Qur’ân 5, 8).

L’exégète Al-Qurtûbî dit dans son tafsîr Tafsîr al-Qurtûbî (5/8) : « Ce verset montre que la mécréance du mécréant ne l’empêche pas d’être traité avec justice ! ».

L’imâm ‘Alî (‘alayhî salâm) a dit : « Si un musulman tue un chrétien alors il sera exécuté (par l’Etat) pour cela » (cité dans Kitâb al-Umm, 7/339).

Ibn Rajâb al-Hanbalî a dit dans son Jâmi’ al-‘Ulûm wa al-Hikam (p. 14) : « Abû Hanifa et un groupe de juristes de Kufa ont dit que le Musulman devrait être exécuté pour avoir tué (injustement) un mécréant ».

En effet, l’éthique du musulman a été enseigné aussi dans ce hadîth prophétique : « Le Musulman est celui dont les gens sont épargnés du mal de sa langue et de sa main et le croyant est celui dont les gens ont confiance en ce qui concerne leur vie et leur biens matériels » (Rapporté par An-Nasâ’î dans ses Sunân, n°4995).

Qu’en est-il de l’alliance politico-militaire ?

Comme nous l’avons déjà cité, le Qur’ân n’interdit pas des alliances politiques avec des non-musulmans respectueux en temps normal. Sinon cela n’est pas autorisé mais cela devient excusé si leur puissance est telle que l’on craint de sérieuses représailles (cf. Qur’ân).

Dans la Sunnah on trouve également des récits à ce sujet. S’il n’y a pas de nécessité, alors c’est ce hadîth qui prévaut, où d’après ‘Aîsha (qu’Allâh l’agrée), le Messager d’Allâh (‘alayhî salât wa salâm) sortit pour Badr, et un idolâtre qui était connu pour sa bravoure et son courage, l’a rencontré. Il dit alors : « Je suis venu pour vous suivre et prendre une part du butin. Il demanda au Messager d’Allâh (‘alayhî salât wa salâm) de l’accompagner dans ce combat, alors le Messager d’Allâh (‘alayhî salât wa salâm) lui demanda : « Crois-tu en Allâh et en Son Messager? ». Il dit « non ».
Alors le Messager d’Allâh (‘alayhî salât wa salâm) lui dit :
« Vas-t’en, nous ne demandons jamais l’aide d’un idolâtre ». Puis, cet homme les rattrapa encore à deux reprises, avec la même requête mais chaque fois le Messager d’Allâh le renvoya, jusqu’à ce qu’il finit par dire « Oui je crois en Allâh et en Son Messager ». Alors le Messager d’Allâh dit « Alors en avant! » (Hadîth rapporté par Muslim dans son Sahîh). D’autres hadiths allant dans ce sens existent aussi.

Sur la base de ce hadîth, de nombreux savants ont interdit le fait de s’allier avec des idolâtres, surtout si leur aide n’est pas indispensable pour remporter la victoire sur d’autres mécréants (mais qui eux sont hostiles à l’islam et aux musulmans), car ceux qui n’inspirent pas confiance ne doivent pas être sollicités, car il n’est pas sûr qu’ils ne viennent pas pour découvrir les secrets des musulmans ou pour les tuer ou trahir par derrière, et ils n’inspirent donc pas confiance lors du combat. Il n’est alors pas logiquement souhaitable de demander leur aide.


Mais par-contre, dans une autre situation, s’il y a une nécessité circonstancielle, alors cela devient permis, à condition que les idolâtres en question soient dignes de confiance par rapport aux affaires des musulmans. Al-Bayhaqî rapporte que As-Shâfi`î a déclaré : « Le hadith dans lequel Mâlik a rapporté que le Prophète (‘alayhî salât wa salâm) a refusé de demander l’aide des idolâtres dans la bataille fut à l’occasion de la bataille de Badr. Toutefois, dans la bataille de Khaybar, deux ans après la bataille de Badr, le Prophète a demandé l’aide des Juifs de Banû Qaynuqâ`. Et dans la bataille de Hunayn, qui a eu lieu en l’an 8 H., il a demandé l’aide de Safwân ibn Umayyah alors qu’il était idolâtre. Donc, le hadith rapporté par Mâlik indique que le Prophète était libre de choisir entre la recherche de l’aide des idolâtres ou de refuser leur aide, au même titre qu’il pouvait refuser l’aide d’un musulman dans des cas précis, alors les deux hadiths ne sera pas contradictoires. Si, toutefois, il [le hadith rapporté par Mâlik] indique que le Prophète a refusé la participation de cet homme dans la bataille parce que ce dernier était un idolâtre, la réponse serait que ce hadith a été abrogé par les autres hadiths qui montrent qu’il a demandé leur aide plus tard. Il est permis de solliciter l’aide des idolâtres pour lutter contre d’autres idolâtres s’ils sont prêts à aider. Il n’est pas permis de leur donner une part du butin, car il n’a pas été authentiquement rapporté que le Prophète a agi ainsi. As-Shâfi`î a dit : « Il aurait refusé  de laisser l’idolâtre participé à la bataille de Badr en espérant qu’il embrasse l’Islam ». Il a également ajouté : « Il est permis au dirigeant musulman de refuser un idolâtre ou de lui donner la permission [dans cette situation] » ».

De même, An-Nawawî a dit dans son Sharh du Sahîh de Muslim (12/198-199) : « Le hadith rapporté sur l’autorité de `Aîsha (qu’Allâh soit satisfait d’elle), selon lequel le Prophète (‘alayhî salât wa salâm) sortit pour Badr et que quand il eut atteint Harrat Al-Wabarah, – c’est ainsi que nous l’avons orthographié, avec un “a” diacritique devant le “b”, et c’est ainsi que Al-Qâdî l’a relaté de tous les rapporteurs de Muslim – Il dit : (et certains l’ont orthographié sans aucun signe diacritique devant le “b”, et c’est un endroit qui se trouve à quatre miles de Médine). Les propos du Prophète sont les suivants : Rentre, je ne demanderai jamais le secours d’un idolâtre. Selon un autre Hadith, le Prophète a demandé l’aide de Safwân ibn Umayyah avant que ce dernier n’ait embrassé l’Islam. Un groupe de savants a fondé son argumentation sur le premier hadith dans sa généralité.
De même, As-Shâfi`î et d’autres savants ont dit qu’il est permis de solliciter l’aide des mécréants si ces derniers offrent de bons conseils aux musulmans et si cela est indispensable, sinon ce recours est Makruh (répréhensible sans être illicite). Les deux hadiths sont interprétés dans ce sens. Toutefois, si un mécréant reçoit la permission de participer [au combat aux côté des musulmans], il ne devrait pas recevoir une part du butin. Et Allâh sait mieux !
 ».

Le savant Ibn Hubayra a déclaré dans son livre Al-Ifsâh `an Ma`ani As-Sihâh (2/286) : « Les savants avaient des vues différentes concernant le fait de rechercher l’aide des idolâtres pour lutter contre les ennemis : Ainsi, Mâlik et Ahmad ont soutenu qu’il n’est jamais permis de solliciter l’aide des idolâtres. Toutefois, Mâlik a ajouté qu’il est permis de solliciter leur aide s’ils sont des serviteurs des musulmans. Abû Hanîfa a dit qu’il est permis de demander leur aide dans l’absolu s’ils sont sous la loi islamique, sinon il est Makrûh de les utiliser.
Et As-Shâfi`î a dit qu’il est permis de solliciter l’aide des mécréants  mais à deux conditions : premièrement, que les musulmans soient peu nombreux alors que les idolâtres  sont en grand nombre. Deuxièmement, que les idolâtres aient de bonnes opinions sur l’Islam et qu’ils y soient enclins. Il n’y a pas de mal à prendre leur avis, mais ils ne devraient pas recevoir une part du butin. Toutefois, Ahmad dit, dans un de ses deux récits, qu’il est permis de leur donner une part de butin. As-Shâfi`î a dit : « s’ils sont embauchés, ils devraient être payés de l’argent qui n’a pas de propriétaire. Il a également dit qu’ils devraient leur être administré des butins ». Ibn Hubayra continue en disant : « Je pense que cette affaire devrait être traitée exactement de la même façon que le cas de Jizyah (capitation : taxe exigé des non-musulmans vivant dans un Etat islamique en contre-partie de leurs droits et de leurs protections contre des envahisseurs) et de Kharâj (taxe sur les terres agricoles) ».

C’est aussi l’avis qu’a adopté par exemple Ibn Al-Qayyim dans Zad Al-Ma’ad ainsi qu’un groupe de gens de science : « Parmi cela : avoir recours aux idolâtres digne de confiance dans le combat est autorisé, en cas de nécessité. L’avantage étant qu’il lui est plus facile de se mélanger à l’ennemi et de lui soutirer des renseignements. Ceci est permis en cas d’extrême nécessité, car Al Zuhrî rapporte le Prophète – Paix et Salut sur lui – a eu recours à certains Juifs durant la bataille de Khaybar qui eut lieu durant l’année 9 de l’Hégire. De même, Safwân participa à la bataille de Hunayn, alors qu’il était idolâtre. Comme exemple d’extrême nécessité : si les mécréants sont en plus grand nombre et qu’on les craint, à condition qu’ils choisissent les bonnes décisions concernant les musulmans. Sinon, s’il n’y a pas de nécessité, il est interdit de s’aider d’un mécréant, car on ne peut être à l’abri de sa ruse et de son mal, de part sa nature ».

Un groupe d’ulémas a jugé qu’il était permis de solliciter l’aide des mécréants dans la lutte contre d’autres idolâtres si cela est nécessaire ou indispensable. Ils ont fondé leur argumentation sur des preuves dont la Parole d’Allâh dans la Sûrate Al-An`âm (Les bestiaux) : « Alors qu’Il vous a détaillé ce qu’Il vous a interdit, à moins que vous ne soyez contraints d’y recourir ».
Ils ont également utilisé l’opinion qui a été diffusée par Al-Hâzimî d’après d’As-Shâfi’î (qu’Allâh lui fasse miséricorde) et qui a déjà été mentionné comme élément de preuve. Al-Hâzimî (qu’Allâh lui fasse miséricorde) a signalé qu’un groupe de savants a autorisé de solliciter le secours des mécréants non-hostiles, sous deux conditions déjà énoncées précédemment.
Un autre hadîth cité comme preuve a été signalé par Ahmad et Abû Dawûd sur l’autorité de Dhu Makhmar qui a dit qu’il avait entendu le Messager d’Allâh (‘alayhî salât wa salâm) dire : « Vous allez faire un traité de paix avec les Romains et, ensemble, vous envahirez un ennemi au-delà de Rome. Vous serez victorieux et prendrez du butin… ». Le fait que le Prophète (‘alayhî salât wa salâm) n’ait pas désapprouvé cela a été considéré comme une approbation de cette alliance. Ce hadith montre que ce recours est admissible lorsque cela est nécessaire comme indiqué ci-dessus. 

Le Shaykh Ibn Taymiyya a dit dans son livre Al-Muharar fi Al-Fiqh (2/171) : « Il n’est pas permis de solliciter l’aide des idolâtres sauf en cas de nécessité, si l’armée musulmane passe en force en se joignant à l’armée des idolâtres, s’ils ont, ensemble, formé un front puissant contre l’ennemi, et si les idolâtres tiennent de bonnes opinions sur l’Islam, cela sera permis, sinon cela ne le sera pas ».

De même, Al-Muwaffaq a déclaré dans Al-mukni’ (1/492) : « Il n’est pas permis de solliciter l’aide des idolâtres, sauf lorsque cela est vraiment nécessaire » .

Ibn Qudama Al Maqdissi dit dans Al-Mughni (8/414-415) : « « Il n’est pas permis de solliciter l’aide des idolâtres ». Ibn Al-Mundhîr, Al-Jawzajânî et un groupe de savants ont tenu le même avis. Toutefois, Ahmad a enregistré un hadith qui indique la licité de la recherche de leur aide. L’avis d’Al-Kharaqî est qu’il est permis de demander leur aide en cas de besoin. C’est aussi l’avis de As-Shâfi`î en vertu du hadith qui est rapporté par Az-Zûhrî tel que mentionné ci-dessus et de la narration du hadith de Safwân ibn ‘Omayya. L’idolâtre dont l’aide est demandée doit avoir une bonne opinion à l’égard des musulmans, sinon il n’est pas permis de demander son aide, car si l’aide d’un musulman qui affaiblit le moral des musulmans et les décourage n’est pas permise, l’aide du mécréant l’est encore moins ».

Après avoir cité les hadiths relatifs à la licité et l’interdiction du fait de chercher l’aide des idolâtres, Al-Hafiz a dit dans son livre At-Talkhis : « Le terrain d’entente entre le Hadith de `Aîsha, le Hadith de Safwân ibn ‘Umayya et le Hadith Mursal (un hadith sans compagnon du prophète dans la chaîne de narration) de Az-Zuhrî est représenté dans les points suivants qui ont été transmis par Al-Bayhaqî de l’opinion d’ As-Shâfi`î : Le Prophète (‘alayhî salât wa salâm) a estimé que l’homme allait embrasser l’Islam. Il le renvoya en espérant qu’il accepterait l’Islam et il a eu raison. Toutefois, cette vision est contestable compte tenu du fait que le libellé du Hadith indique la généralité, sous la forme d’une expression indéfinie niée. Cela pourrait signifier que la question devrait être soumise à l’imam, mais ce point de vue est également discutable. Donc, il pourrait aussi signifier que la recherche de l’aide des idolâtres a été d’abord interdite mais cette interdiction a été levée par la concession. Cette opinion est la plus proche de l’exactitude, et elle a été adoptée par As-Shâfi`î ».

Avant la Révélation, le Prophète Muhammad (‘alayhî salât wa salâm) participa à la ratification d’un traité appelé « le pacte des vertueux » (hilf al-fudhûl), qui avait comme objectif de soutenir les opprimés. Dans la version la plus authentique de ce récit, le Prophète aurait dit plus tard (après la Révélation) à ce sujet : « J’ai assisté au pacte des parfumés (hilf al-mutayibîne ) avec mes oncles alors que je n’étais qu’un jeune homme, et je ne l’enfreindrai pas même pour des chamelles rouges » (rapporté par Ibn Hibbân dans son Sahîh 10/216 n°4373, par Ahmad dans son Musnad 1/193 n°1676, les deux ont été jugés authentique selon Arna’ût, rapporté aussi par Al-Hâkim, dans son Al Mustadrak 2/220 n°2870).

Une autre version de ce hadîth (mais comportant une faiblesse dans la chaine bien que l’énoncé ne contient aucune anomalie) dit : « J’ai assisté au pacte des Banî Hâchim, de Zuhra et de Tayim, et je ne serai pas réjoui de l’enfreindre même en échange de chamelles rouges ; et si on m’y invitait aujourd’hui, j’y répondrai afin d’ordonner le convenable, d’interdire le blâmable et de prendre de l’injuste pour le rendre à l’opprimé » (rapporté par Al-Bazzâr, 3/235 n°1024, Musnad AbdRahmân Ibn `Awf ; par Al-Haythâmî dans Majma` A-Zawâ’id 7/370 n°12122 (kitâb al-fitân) qui estime que le transmetteur Dhirâr Ibn Sard est faible).

Il y a deux explications au fait que le hadîth emploie Hilf Al-Mutayibîne plutôt que Hilf Al-Fudhûl. La première est qu’il s’agit de deux pactes différents, et bien que Le Messager (sas) n’ait pas assisté au pacte des parfumés qui eu lieu avant sa naissance, le hadîth a employé le même nom car les tribus qui ont assisté à Hilf Al-Fudhûl sont les mêmes que celles qui ont assisté à Hilf Al-Mutayibîne. Le seconde explication est qu’il s’agit du même pacte, il fut nommé également le pacte des parfumés, car on raconte que les membres plongèrent leurs mains dans une écuelle de parfum pour prêter serment.

En ce qui concerne le fait de s’allier avec des non-musulmans pour combattre des musulmans, cela est strictement interdit si ce sont des musulmans qui ne menacent pas la vie des musulmans ou de l’Etat légitime, et si cela est fait avec l’intention de combattre les croyants en raison de leur islamité, et de rabaisser la Parole d’Allâh, cela est de la mécréance, sinon non. Dans les références wahhabites, cette nuance fondamentale est occultée, et c’est ainsi qu’ils font le takfir injustifié de masse, contredisant ainsi la Parole Divine et les savants du salaf. En effet, si un groupe terroriste se réclamant de l’Islam, s’en prend aux musulmans sans distinction, sème la terreur et le chaos dans les pays musulmans, mais que les forces musulmanes n’ont pas les moyens de les combattre efficacement, la nécessité exige de demander de l’aide à des non-musulmans à condition que cela n’exige pas, des musulmans et des autorités en terres de l’Islam, de renoncer à leur foi ou d’autoriser des crimes de masse en terres d’Islam.

Le Qur’ân dit en effet : « Et si deux groupes de croyants se combattent, faites la conciliation entre eux. Si l’un d’eux se rebelle contre l’autre, combattez le groupe qui se rebelle, jusqu’à ce qu’il se conforme à l’ordre d’Allâh. Puis, s’il s’y conforme, réconciliez-les avec justice et soyez équitables car Allah aime les équitables » (Qur’ân 49, 9).

« Celui qui tue un croyant intentionnellement [alors qu’il ne se trouve pas dans le droit de le faire, comme de la légitime défense], sa rétribution sera la Géhenne dans laquelle il demeurera indéfiniment » (Qur’ân 4, 93).

Muslim rapporte dans son Sahîh les récits prophétiques suivants :

« Notre protection est acquise à ceux que tu protèges, Umm Hânî’ », elle était la cousine du Prophète et la sœur d’Alî, et accorda sa protection à un infidèle qui ne représentait plus une menace pou les musulmans.

« Le serviteur ne cesse d’être dans une situation aisée en matière de religion tant qu’il ne s’est pas entaché les mains d’un sang interdit ».

« Celui qui sort de ma communauté contre ma communauté, tuant son pieux et son pervers, n’épargnant ni le croyant, ni celui sous le pacte conventionnel islamique de protection (résidents non-musulmans), celui-là ne fait plus partie de moi ». Par « pervers », il s’agit du musulman qui n’accomplit pas ou plus les obligations religieuses (telles que la prière) par faiblesse ou par paresse et qui n’est pas d’une bonne moralité.

Allâh dit dans le Qur’ân : « C’est pourquoi Nous avons prescrit pour les Enfants d’Israël que quiconque tuerait une personne non coupable d’un meurtre ou d’une corruption sur la terre, c’est comme s’il avait tué tous les hommes. Et quiconque lui fait don de la vie, c’est comme s’il faisait don de la vie à tous les hommes. En effet Nos messagers sont venus à eux avec les preuves. Et puis voilà, qu’en dépit de cela, beaucoup d’entre eux se mettent à commettre des excès sur la terre. La récompense de ceux qui font la guerre contre Allâh et Son messager, et qui s’efforcent de semer la corruption (chaos, sédition) sur la terre, c’est qu’ils soient tués, ou crucifiés, ou que soient coupées leur main et leur jambe opposées, ou qu’ils soient expulsés du pays. Ce sera pour eux l’ignominie ici-bas ; et dans l’au-delà, il y aura pour eux une énorme correction, excepté ceux qui se sont repentis avant de tomber en votre pouvoir : sachez qu’alors, Allâh est Pardonneur et Miséricordieux » (Qur’ân 5, 32-34). Bien que cet enseignement ait été institué aussi pour les Enfants d’Israël à l’époque, il fait toujours autorité et n’a pas été abrogé, et Allâh précise qu’il s’agit d’une loi des différents messagers et qu’elle n’est donc pas spécifique qu’aux enfants d’Israël. Ensuite, Allâh condamne fermement ceux qui sèment le chaos et la corruption sur terre (les terroristes), ceux qui mènent la guerre ouverte contre Allâh et Son Messager, etc. Dans cette situation, les combattre est alors nécessaire, mais s’il suffit de les capturer, de les expulser ou de leur amputer un membre pour que les terroristes et criminels cessent leurs crimes, alors il n’y a nul besoin de les tuer. Quant aux criminels et terroristes qui se repentent et se rendent avant d’avoir été capturés, ils seront pardonnés le Jour du Jugement, et les autorités légales pourront choisir le pardon ou une punition moins sévère.

Ibn Taymiyya dit dans As-Sârim (p. 104) : « Le principe originel (« al-asl ») est que la vie de l’humain est protégée : celui-ci ne peut être tué que pour une raison juste », conformément aux versets du Qur’ân. Cependant dans cet ouvrage il contredit parfois ce principe en se basant sur des récits inventés et faibles issus de la Sirah d’Ibn Ishaq notamment.

Le Qur’ân dit en effet que : « Dis : « Venez, je vais réciter ce que votre Seigneur vous a interdit : ne Lui associez rien ; et soyez bienfaisants envers vos père et mère. Ne tuez pas vos enfants pour cause de pauvreté. Nous vous nourrissons tout comme eux. N’approchez pas des turpitudes (actes abominables) ouvertement, ou en cachette. Et ne tuez pas, sans nécessité de droit, la vie (l’individu) qu’Allâh a déclaré sacrée. Voilà ce qu’[Allâh] vous a recommandé de faire ; peut-être comprendrez-vous » (Qur’ân 6, 151). Et comme cela a déjà été évoqué dans l’autre verset, toute vie humaine (musulmane et non-musulmane) est sacrée par essence selon le Qur’ân, et le meurtre est donc interdit, sauf dans le cas d’un combat sur un champ de bataille, d’un leader ennemi qui appelle à la guerre ou d’un criminel qui a tué injustement un être innocent et qui est puni en vertu de la loi du talion. Certains exégètes ont voulu restreindre le sens du passage « vie humaine » aux musulmans seulement, alors que rien dans le verset ne permet de restreindre la portée générale du terme s’adressant aux âmes vivantes. Ils n’ont apporté aucune preuve et ont contredit à la fois le sens explicite du verset (or rien n’est laissé au hasard par Allâh dans le choix des mots et des nuances), les autres principes qurâniques, la tradition prophétique et l’avis de nombreux autres exégètes et juristes. Pour restreindre la portée de ce verset, il aurait fallu que les mots employés se réfèrent explicitement aux termes de « muslim » (musulman) ou « mu’mîn » (croyant musulman qui fait aussi preuve de bonté pieuse), or il n’en est rien.

Ainsi, les extrémistes qui sèment le chaos et la terreur doivent être combattus selon l’Islam. Attention toutefois aux fausses accusations dont sont friands les hypocrites, les tyrans et les injustes du monde moderne, qui opèrent des amalgames visant à faire passer des résistants légitimes pour des « terroristes/extrémistes ».

L’Islam n’encourage pas l’anarchie ou la terreur contre les civils, mais enjoint simplement la lutte contre les combattants ennemis qui refusent la voie de la paix, et encourage les musulmans à les dissuader d’attaquer à travers des dispositifs d’ordre dissuasif comme la démonstration de force ou les parades militaires imposantes, ou à travers des pressions économiques, ou encore par des mises en garde diplomatiques. Et comme l’a rappelé l’imam Al Qurtûbî dans son Tafsir Al-Jâmi’ li-Ahkam ul-Qur’ân : « Et s’ils tuent nos femmes et nos enfants et nous chagrinent par cela, alors il ne nous appartient pas de tuer (les leurs) de la même façon dans le but de leur faire parvenir la peine et la tristesse ». La loi du talion ne s’applique donc pas dans l’injustice. La loi du talion consiste simplement à les combattre s’ils nous combattent, mais en visant uniquement les combattants, et sans commettre de pillages, de destructions des lieux de culte, de meurtres contre les civils, etc., car cela Allâh l’a interdit « pas de transgressions » de même qu’il a été interdit formellement de s’en prendre à leurs civils. Toujours dans son Tafsîr (4/8/49) il dit : « Il est communément reconnu entre les musulmans que personne n’a le droit de mettre en péril la sécurité et l’ordre public lorsque les autorités l’imposent, car c’est en cela où réside l’intérêt de tous ». Dans le même ouvrage, il dira un peu plus loin : « Si l’idolâtre refuse de croire en ton message, conduis-le en un lieu sûr… ». Dans son Tafsîr (4/8/49) il relate également la position de l’imâm Mâlik : « Ce sont des questions épineuses, mais il faut laisser le non-musulman rentrer chez lui en toute sécurité » (4/114). Ibn al-Qâsim déclare : « Pareil pour le commerçant qui descend sur nos côtes, il doit retourner chez lui en sécurité ».

Ibn Kathîr a dit dans son Tafsîr (4/113) par rapport au verset de la Sûrate At-Tawba (sur le fait d’accorder la sécurité aux combattants ennemis qui déposent les armes sur le champ de bataille) : « Même lorsqu’un pays musulman est en guerre avec un autre pays, si des gens viennent dans le pays musulman pour le négoce, le travail, le tourisme, ils resteront protégés par le traité politique passé entre les autorités musulmanes et leurs autorités et auront le droit tant à leur intégrité physique qu’à leurs biens jusqu’à leur retour en toute sécurité ».

Ibn Qudâma al-Maqdisî, le célèbre savant hanbalite a dit dans son Al-Mughnî (13/75) : « Lorsque les autorités donnent la paix, même aux combattants ennemis, il faut la leur accorder du fait qu’il n’est pas du ressort de la foule de décider de telles questions ».

Ceci est l’opinion de At-Thawrî, Awzâ’î, As-Shafi’î, Ishâq, et Ibn al-Qâsim ainsi que de la majorité des savants de l’islam. On a rapporté cela sur le pieux et juste calife ‘Umar Ibn al-Khattâb également.

Ibn Qudâma reprend (13/77) : « La sécurité des non-musulmans doit avoir la même importance que celle des musulmans pour les individus et pour les groupes pour que les musulmans puissent jouir des mêmes droits ». Il dit (13/79) aussi : « si on coupe toute communication avec l’ennemi, il n’y aura plus d’échange ainsi le chaos s’installe et l’intérêt des deux parties se perd à jamais ». Il parle des conflits entre musulmans et non-musulmans.

Pour conclure, Allâh aime toutes Ses créatures originellement (« Sa Miséricorde embrasse toute chose » dit le Qur’ân 7, 56) Ar-Rahmân (« Le Tout-Miséricordieux/le Tout-Rayonnant d’Amour » à l’égard de toute Sa Création) et Ar-Rahîm (« Le Très-Miséricordieux/Le Très-Rayonnant d’Amour » à l’égard de Ses serviteurs qui suivent la Voie qu’Il a tracé).

Néanmoins, Il n’agrée pas les altérations de Sa Création originelle puisque l’être humain est noble à l’état primordial selon le Qur’ân : « Certes, nous avons honoré les fils d’Adam. Nous les avons transports sur terre et sur mer, lui avons attribué de bonne chose comme nourriture et nous les avons nettement préférés sur plusieurs de Nos créatures » (Qur’ân 17, 70), mais ses actes pervertis ou ses idées/pensées malsaines et hérétiques ne sont pas agrées par Allâh. C’est le même souffle vital (émanant d’Allâh) qui anime les croyants et les incroyants. Certains ont ensuite suivi la mécréance plutôt que la religion agréée par Allâh, mais cela ne représente pas une raison suffisante pour les agresser ou les tuer. Comme nous l’avons déjà vu, le Qur’ân n’indique le combat ou la sanction pénale contre des individus, que si ce sont des combattants ennemis qui agressent, ou si ce sont des criminels qui commettent des meurtres ou incitent la société à commettre ouvertement des actes abominables. Mais pour la simple mécréance, et même s’ils incitent par exemple leurs propres enfants à mécroire, Allâh ordonne malgré tout la patience et l’attitude respectueuse à leur égard : « Sois reconnaissant envers Moi ainsi qu’envers tes parents. Vers Moi est la destination. Et si tous deux te forcent à M’associer ce dont tu n’as aucune connaissance, alors ne leur obéis pas (en cela) ; mais comporte-toi avec eux ici-bas de façon convenable » (Qur’ân 31, 15).


Be the first to comment “Le Wahhabisme et la question de l’alliance et du désaveu (al walâ’ wa al barâ’)”