La vision islamique sur les règles en temps de guerre

Si l’Islam suscite autant de polémiques à notre époque, c’est bien en grande partie en raison de l’actualité politico-militaire et des thèses défendues ici et là par des islamophobes comme des extrémistes se réclamant de l’Islam, et qui, tous deux, partagent souvent une même vision biaisée et tronquée des règles islamiques en matière de guerre et de conflits géopolitiques.

Pour analyser ce que dit l’Islam de façon juste et objective, il est donc nécessaire de se référer aux textes du Qur’ân et de la Sunnah purifiée (authentique à tous les niveaux), en prenant en compte le contexte, les règles de jurisprudence et les finalités évoquées dans le Qur’ân.

Et en matière de guerre, voici les règles islamiques qui légifèrent cette dimension de la vie humaine :

– Il est interdit de cibler volontairement les civils musulmans et non-musulmans, et ce sans exception.
– Il est interdit de mener des opérations en dehors du champ de bataille si des civils non-musulmans ou des musulmans (civils ou combattants pour la justice) s’y trouvent, alors qu’il ne s’agit pas d’un endroit fréquenté essentiellement par des combattants ennemis (mercenaires, soldats, etc.).
– Il est interdit de cibler volontairement des mosquées, des églises, des synagogues ou toute autre lieu de culte, à moins que ce lieu de culte soit tenu par des criminels avérés et qui abritent dans ce lieu des armes servant à combattre des musulmans ou des non-musulmans innocents.
– Avec ou sans pacte officiel ou serment, il est interdit de tuer des musulmans ou des non-musulmans qui n’ont pas concrètement levé les armes contre les musulmans, les non-musulmans sous protection musulmane, ou les non-musulmans opprimés injustement.
– Les armes pouvant causer des effets dévastateurs sur la nature et toucher indirectement des civils sont prohibées, telles que les armes nucléaires.
– Même dans le peuple appartenant à un camp ennemi, il n’est pas autorisé d’insulter, voler ou tuer les citoyens (qui ne lèvent pas les armes) non-musulmans ou musulmans qui y vivent.
– Les dommages collatéraux sont regrettables, mais si le bien l’emporte sur les méfaits, cela sera autorisé, tant que le but ne sera pas de cibler volontairement des civils, mais des forces ennemies qui s’y cachent, mais les musulmans doivent tout faire pour éviter la perte de civils, et s’il est possible d’évacuer les civils ou d’attendre que les civils s’éloignent des cibles militaires ennemies, ils doivent attendre et patienter, sauf si leur propre vie est menacée par des frappes imminentes provenant de ces lieux (occupés essentiellement par les forces ennemies).
– Il est interdit d’être injuste envers tout un groupe ou tout un peuple, car il s’y trouve des gens pacifiques ou qui ne lèvent pas les armes, ou qui ont des idées et positions différentes avec d’autres individus appartenant officiellement au même groupe ou peuple. Et s’ils sont respectueux, Allâh interdit de les tuer, de les humilier, de les opprimer ou de leur causer du tort. Bien plus, Allâh exhorte le croyant à se montrer équitable et bienfaisant envers eux.
– La loi du talion ne permet pas de tuer leurs femmes et leurs enfants si les forces ennemies tuent nos enfants et nos femmes. L’Islam permet simplement de combattre ceux qui nous combattent, sans transgresser, c’est-à-dire qu’on ne punit pas tout un peuple pour les méfaits de certains d’entre eux, ni ne pouvons commettre des interdits en soi s’ils en commettent aussi (comme le viol de nos citoyens, abattre inutilement notre bétail ou nos animaux, détruire nos cultures et terres agricoles, imposer le boycott des produits de nécessité à tout un peuple, boire de l’alcool ou leur injecter des produits toxiques, torturer cruellement les prisonniers de guerre, etc.).
– Entre deux maux, les musulmans doivent choisir le moins pire pour la pratique religieuse et la sécurité de leur vie (et celle de leurs proches) et de leurs biens. Entre deux choses positives, ils doivent choisir la meilleure, et cela vaut aussi du point de vue stratégique (politique et militaire), et les musulmans doivent agir de sorte à anticiper les conséquences tragiques ou plus graves qui pourraient survenir en commettant certains types d’action. Le sang des musulmans et des non-musulmans pacifiques doit être préservé au maximum.

De nombreux juristes, depuis l’époque des compagnons, ont respecté et défendu aussi ces avis. D’autres ont tenu des avis divergents, et sont tombés dans l’erreur à ce niveau-là, et il convient de ne pas les suivre dans leurs avis contredisant le Qur’ân, la Sunnah et la compréhension des meilleurs compagnons et successeurs. Tous les points évoqués ci-dessus sont corroborés par les versets du Qur’ân, les ahadiths notoires et les positions de l’élite des salafs qui forment un tout cohérent, et les avis isolés et erronés de certains juristes, s’écartant des Textes qurâniques et de l’éthique prophétique en la matière, ne seront pas pris en considération et ne peuvent nullement servir de preuves légitimes. D’ailleurs, ceux qui ont préconisé des méthodes et des objectifs s’écartant de la vision islamique décrite précédemment, ont mené les musulmans à subir des conséquences tragiques et les ont plongé dans des situations encore plus humiliantes, cruelles et insupportables qu’auparavant, comme le montrent d’ailleurs l’actualité de notre époque (Chine, Inde, Birmanie, Syrie, Palestine, Irak, Tchéchénie, Somalie, Libye, etc.), et ce, en dépit de leurs éventuelles bonnes intentions de combattre les tyrans et les envahisseurs, mais selon des mauvaises méthodes, une mauvaise compréhension, et en dénaturant les préceptes islamiques de façon inconsciente, et en finissant par commettre des crimes et des grands péchés condamnés fermement par l’Islâm.

En méditant attentivement sur le Qur’ân, on s’aperçoit qu’Allâh enjoint aux croyants d’éviter la guerre autant que possible et d’opter pour des solutions pacifiques et diplomatiques. Mais le cas échéant, Il enjoint aux musulmans de préparer la guerre sur tous les plans : moral, social, économique, politique, spirituel, technique, religieux, etc., car une guerre exige de puiser dans toutes les ressources humaines disponibles, et de s’orienter à l’unisson vers les mêmes objectifs et selon des méthodes communes. C’est un appel à fois au pragmatisme et au réalisme, tout en visant la solution idéale pour la société, sans verser dans la cruauté, l’injustice et les transgressions sans limites, et en évitant le plus possible que des non-combattants soient mêlés aux horreurs de la guerre. Et si le camp ennemi capitule ou renonce à la guerre, les musulmans doivent alors tendre aussi à la fin de la guerre, et à trouver une solution pacifique tant que les nations musulmanes seront en sécurité.

Nous avons discuté par ailleurs de ces points avec des daeshites (des partisans de Daesh), et plusieurs d’entre eux ne reconnaissaient pas les preuves religieuses à ce sujet, préférant suivre leurs passions et justifier leurs crimes et péchés, en allant à l’encontre des principes religieux. Ceux qui ont préféré suivre leurs passions mais sans dire que leurs passions étaient licites et sans dire que les préceptes islamiques (contredisant leurs passions) étaient faux, ont commis de grands péchés mais pas de la mécréance. Cependant, ceux qui ont rendu licite (religieusement parlant) leurs crimes et leurs péchés, ont commis de la mécréance, car ils ont rendu licite leurs passions et ont rendu caduque les interdictions, obligations et recommandations islamiques.


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