L’Islam et la paix avec les Gens du Livre et les autres non-Musulmans – Et analyse à propos du Dhimmi et du Mu’âhid

Les polémiques islamophobes étant assez nombreuses à notre époque, et les confusions étant toujours aussi répandues, il nous parait opportun d’aborder cette problématique afin de clarifier les choses du point de vue de l’Islam et de ses principes, plutôt que du point de vue des divergences au sein des orientalistes comme des juristes musulmans (pas toujours en phase avec les principes et finalités de l’Islam par ailleurs).

En Islam, les non-musulmans sont divisés en différentes catégories, selon leurs différences spécifiques.

De façon générale, tout non-musulman est « kâfir » (litt. Celui qui dissimule ou enfoui quelque chose – ici la vérité – sous terre), qui juridiquement s’applique à tous les non-musulmans, qui ne professent donc pas l’islam et qui ne s’y rattachent pas, même s’ils en reconnaissent la vérité ou la validité pour certains d’entre eux (notamment parmi les Juifs, les Chrétiens, les Bouddhistes, Hindous, et d’autres que nous avons connu, et qui disaient reconnaitre l’Islam comme une vraie Religion d’origine divine, et le Prophète Muhammad ﷺ comme véritable envoyé de Dieu et du « Ciel »). Les idolâtres parmi les non-musulmans sont certes des kufâr (pluriel de kâfir) mais aussi des mushrikîn (mushrik au singulier). Il y a également « Les Gens/Familles du Livre » (Ahl ul Kitâb) qui englobent en premier lieu les Juifs et les Chrétiens, mais qui théologiquement, doivent inclure aussi toutes les autres communautés religieuses détentrices d’une Révélation (fixée ensuite dans des corpus écrits ou liturgiques), reconnaissant le Principe absolu et créateur tout en désavouant l’idolâtrie, le symbole du mal qu’il faut combattre et désavouer (incarné dans la figure du Shaytân, le diable), le principe de la prophétie, les doctrines sur le Jour du Jugement dernier, du Paradis, de l’Enfer, du Destin (ou de la Prédestination), des Révélations, des Anges, ainsi que les rites fondamentaux (comme la prière, le jeûne, le pèlerinage, etc.), et l’importance de faire le bien et de se préserver du mal (meurtre, vol, adultère, etc.), et seulement sur ces critères, les communautés ayant suivi de vrais prophètes, même si leurs conceptions religieuses ont été altérées et corrompues au fil du temps, peuvent être considérés à l’origine comme des « Ahl ul Kitâb), et ces critères correspondent bien au Zoroastrisme, à l’Hindouisme, au Bouddhisme, etc. Bien que les théologiens musulmans aient divergé pour savoir s’ils faisaient partie des Ahl ul Kitâb ou non (un hadith du Prophète rapporté par Mâlik dans Al-Muwattâ’ dit : « Agissez avec les Zoroastriens comme avec les (autres) Gens du Livre », sous-entendu comme avec ceux que vous connaissez déjà bien, bien que d’autres l’aient interprété comme signifiant qu’ils n’étaient pas des Ahl ul Kitâb).

Il est rapporté dans plusieurs sources, et notamment par Mâlik dans Al-Muwattâ’ n°618, que sous l’autorité des califes bien-guidés (Abû Bakr, ‘Umar, ‘Uthmân et ‘Alî), qu’en dehors des Juifs et des Chrétiens, les citoyens parmi les Sabéens, Zoroastriens, Hindous, Bouddhistes, et idolâtres ont été inclus parmi les Dhimmis, leur protection étant ainsi assurée au sein des terres d’Islâm, avec toutefois l’interdiction de demeurer de façon permanente au Hijaz (région englobant les 2 plus grandes villes saintes de l’Islam que sont la Mecque et Médine) qui est donc une exception de la règle générale (qui les autorise à résider en terres d’Islam) de garder leur religion, de préserver leurs biens et lieux de culte, etc. Cette pratique d’inclure les autres communautés religieuses (en dehors des Juifs et Chrétiens) n’était pas réellement un « ijtihâd » de leur part, mais relevait plutôt de la préservation et continuation d’une pratique instituée par le Prophète ﷺ : « Le Prophète prit la Jyzia des Zoroastriens de la région de Hajar » (1) et « Le Prophète a pris la Jyzia des Zoroastriens du Bahreïn, et (puis) ‘Umar l’a pris des Zoroastriens de la Perse, et (puis) ‘Uthmân l’a pris des Perses (parmi les Zoroastriens) » (2), c’est-à-dire qu’ils étaient des Dhimmis dont la vie, le sang, les biens et la religion étaient protégés moralement, politiquement et juridiquement par l’État islamique et les citoyens musulmans, en échange de la jyzia (forme de taxe/impôt, équivalent à la Zakât que doivent payer les Musulmans en tant qu’obligation religieuse) parmi ceux qui étaient en capacité de la verser, et ils n’étaient pas obligés de participer militairement à la défense de la Nation.

Les non-Musulmans qui possèdent donc une Révélation divine (et un « Livre ») dont l’origine est considérée comme réellement Divine, avec les fondements doctrinaux, moraux, éthiques et rituels déjà évoqués auparavant, et ce jusqu’à l’arrivée de l’Islam Muhammadien et du Prophète Muhammad (ﷺ) qui scelle et clôt le cycle de la prophétie, peuvent être logiquement et théologiquement inclus parmi les « Ahl ul Kitâb » (Gens/Famille du Livre révélé) même si certaines communautés se sont profondément éloignées au fil du temps des enseignements authentiques de leurs Prophètes et Messagers, au point même de tomber parfois dans le shirk (idolâtrie), même si pas de façon aussi grave, intense et grossière que les autres idolâtres . Mais les autres, qui ne se réfèrent pas à une Révélation transmise et apportée par un Prophète ou un Messager d’Allâh, ceux-là sont alors simplement appelés les « mushrikîn » (idolâtres, associateurs).

Quoi qu’il en soit, cette distinction théologique n’implique pas de lourdes différences dans la façon d’interagir avec eux dans la pratique, sur les plans politique, éthique et social : gens du Livre ou simples idolâtres, le bon comportement à leur égard est une obligation en Islam. Les seules différences, selon les textes islamiques, sont que les idolâtres n’auront aucun lieu de culte officiellement reconnu pour leurs croyances ou cérémonies (impliquant une glorification d’idoles) – mais ils peuvent le faire dans leurs maisons ou bâtiments privés qui leurs sont propres -, de même que les Musulmans ne pourront pas manger de leurs viandes, contrairement à la viande provenant de l’abattage rituel des Gens du Livre, pour peu que cela se fasse de façon propre et au Nom de Dieu -. Mais en cas de nécessité – pour survivre -, cette interdiction sera levée en guise d’exception si l’on craint de mourir de faim.

Peu importe nos désaccords aussi profonds soient-ils entre les différentes communautés religieuses, politiques ou philosophiques, le Qur’ân interdit d’exercer la violence uniquement pour cela, mais plutôt qu’il faut leur répondre avec sagesse et accomplir simplement de bonnes oeuvres en faisant le bien :

« Si Allâh l’avait voulu, il aurait fait de vous une seule communauté. Mais Il voulait vous éprouver en ce qu’Il vous a donné, alors rivalisez (entre vous) dans le bien et dans les bonnes oeuvres » (Qur’ân 5, 48).

« A chacun une orientation vers laquelle il se tourne. Rivalisez donc dans les bonnes œuvres. Où que vous soyez, Allâh vous ramènera tous vers Lui, car Allâh est, certes Omnipotent » (Qur’ân 2, 148).

« Certes, ceux qui ont cru, les Juifs, les Sabéens, les Chrétiens, les Zoroastriens et ceux qui donnent à Allâh des associés, Allâh tranchera entre eux le jour du Jugement, car Allâh est certes témoin de toute chose » (Qur’ân 22, 17).

‪De façon générale, le Qur’ân enjoint les Musulmans à cultiver la sagesse, la courtoisie et la bienveillance envers tous les non-Musulmans et Musulmans : « Par la sagesse et la bonne exhortation appelle (les gens) au sentier de ton Seigneur. Et discute avec eux de la meilleure façon. Car c’est ton Seigneur qui connaît le mieux celui qui s’égare de Son sentier et c’est Lui qui connaît le mieux ceux qui sont bien guidés » (Qur’ân 16, 125).

« O humains ! Nous vous avons créés d’un mâle et d’une femelle, et Nous avons fait de vous des nations et des tribus, pour que vous vous entre-connaissiez. Le plus noble d’entre vous, auprès d’Allâh, est le plus pieux. Allâh est certes Omniscient et Grand Connaisseur » (Qur’ân 49, 13).

 Et en particulier ici avec les Gens du Livre : « Et ne discutez que de la meilleure façon avec les gens du Livre, sauf ceux d’entre eux qui sont injustes. Et dites : « Nous croyons en ce qu’on a fait descendre vers nous et descendre vers vous, tandis que notre Dieu et votre Dieu est le même, et c’est à Lui que nous nous soumettons » (Qur’ân 29, 46).

Et spécifiquement ici, même envers des tyrans qui prétendent à la divinité, et qui sont donc les pires idolâtres qui soient, allusion ici au Pharaon tyrannique à l’époque du Prophète Mûsâ (Moïse) : « Dites-lui une parole douce et parlez-lui gentiment » (Qur’ân 20, 44).

Quelqu’un récita devant Yahyâ ibn Mu’âdh (un salaf) le passage qurânique suivant (qui évoque l’injonction divine adressée à Mûsa (‘alayhî salâm) et à son frère Hârun (‘alayhî salâm) quant à la façon de s’adresser à Pharaon) : « Dites-lui une parole douce et parlez-lui gentiment » (Qur’ân 20, 44). Il (Yahyâ) se mit à pleurer et dit : « Ô Mon Seigneur ! Telle est Ta Bienveillance envers celui qui dit (pourtant) : « Je suis le (seul) Dieu ! » (c’était là la prétention de Pharaon, du point de vue de son individualité). Comment peut (alors) être Ta Bienveillance envers celui qui dit : « Tu es le (Seul) Dieu ! » (c’est-à-dire envers nous tous qui croyons en Allâh et qui affirmons Son Unicité) ? » » (3).

  Le Compagnon ‘Ibn Umar (proche du Prophète ﷺ et fils du Calife bien-guidé ‘Umar Ibn al-Khattâb) a dit : « Nous saluons avec la Paix (le Salâm) quiconque nous rencontrons (Musulmans comme non-Musulmans) ». (4)

Le savant Ibn ‘Abd al-Barr rapporta dans al-Tamhid (17/91) : « Il est rapporté par Ibn Mas’ûd, Abû Ad-Darda et Fadalah ibn ‘Ubayd qu’ils initiaient la salutation de Paix avec les citoyens non-musulmans. Ibn Mas’ûd a écrit un jour à un homme parmi les gens du Livre et il a dit : « Que la Paix soit sur vous » ». Muhammad ibn Ka’b a dit : « Quant à moi, je ne vois aucun mal à les saluer d’abord avec la paix (as-Salâm) ». On lui demanda : « Pourquoi donc ? ». Ibn Ka’b a dit : « Allâh a dit : « Pardonnez-leur et dites des paroles de paix, car ils le sauront bientôt » (Qur’ân 43, 89) ».

Allâh dit, sans restriction de religion, de sexe, d’âge, de race, de couleur de peau, de statut social, d’apparence, etc. : « Adorez Allâh et ne Lui donnez aucun associé. Agissez avec bonté, bienfaisance et bienveillance envers vos père et mère, les proches, les orphelins, les pauvres, le proche voisin, le voisin lointain, le collègue et le voyageur, et les serviteurs/employés qui sont sous votre responsabilité, car Allâh n’aime pas, en vérité, le présomptueux, l’arrogant » (Qur’ân 4, 36).

Ces versets montrent clairement que la règle générale dans les relations intercommunautaires, que ce soit envers les Gens du Livre ou envers les autres non-Musulmans, est de leur manifester de la bonté, du respect, de la bienveillance, de la paix, de la maitrise de soi et de la patience (y compris envers ceux qui sont têtus ou trop enfoncés dans leur ignorance ou leur hostilité – tant qu’ils ne lèvent pas les armes contre l’État, les Musulmans ou les autres non-Musulmans).

Ensuite, du point de vue politique lorsque des Musulmans possèdent un État islamique ou vivent dans des pays gérés par un système politique, il y a plusieurs catégories parmi les non-Musulmans. Celles du dhimmi (lié à la dhimma), du mu’âhid, du harbi (le non-musulman qui est un combattant, militaire ou politicien directement impliqués dans une guerre contre les Musulmans et les dhimmis) et du simple non-musulman, qui n’est ni un harbi (ennemi combattant) ni un dhimmi ou un mu’âhid lié par un pacte de sécurité, de protection, de citoyenneté, etc.

  La dhimma (pacte de protection dans le cadre de la citoyenneté)) peut être vue aujourd’hui comme un pacte de citoyenneté et de protection pour le non-musulman qui réside de façon permanente en terres d’Islam.  

  Quant aux mu’ahidîn, il s’agit d’une catégorie plus large, incluant aussi les citoyens non-musulmans qui ne résident pas en terres d’Islam mais qui bénéficient cependant aussi d’un pacte de protection et de citoyenneté avec les musulmans de par les relations pacifiques ou de non-hostilité entre le pays musulman et les pays non-musulmans, et s’appliquant ici notamment à l’ensemble des pays signataires de l’ONU. Le mu’âhid doit donc être protégé, que ce soit dans le cadre de sa visite dans le monde musulman (tourisme, travail, commerce, visite familiale, etc.) ou que ce soit les Musulmans qui visitent ou résident dans le pays non-musulmans où vivent les non-Musulmans parmi les mu’ahidîn.

Les différentes « terres » (pays et nations), sont classées, selon le droit musulman (fiqh), puisant dans le Qur’ân et la vie du Prophète (ﷺ), en 3 grandes catégories. La 1ère qui est celle de « dâr al islâm » (terre/demeure d’islâm, le pays est considéré comme musulman), la 2ème qui est celle de « dâr al harb » (terre/demeure de la guerre ou de l’hostilité) et la 3ème qui est celle de « dâr us-Salâm » ou de « dâr al ‘ahd » c’est-à-dire la terre/demeure/nation de la paix ou de la sécurité, des pays non-musulmans qui ne persécutent pas les Musulmans sur leur territoire et qui ne font pas extérieurement la guerre aux pays musulmans. Dans la Sîrah an-Nabawiyya, nous pouvons voir l’existence de ces 3 catégories. La 1ère avec l’État islamique fondé dans la région de Médine, sous l’autorité du Prophète (ﷺ) – et donc la dâr al islâm. La 2e, avec la Mecque sous la domination des idolâtres qurayshites qui persécutaient les Musulmans à la Mecque et faisaient extérieurement la guerre aux Musulmans de Médine et des environs. Et la 3e avec la terre d’Abyssinie, où le Négus accorda sa protection aux Musulmans, et qui se convertira lui-même à l’Islam plus tard, bien que l’Abyssinie, en ce temps-là, demeurait chrétienne. Et puis une 4e catégorie, qui est un peu celle de la 3e mais sans que cela soit « concrétisé » du point de vue politique, où les nations non-musulmanes éloignées étaient neutres et ne se souhaitaient pas leur faire la guerre. A ce sujet, le Prophète (ﷺ) dit de laisser les autres nations tranquilles et en paix tant qu’elles laissaient les Musulmans en paix : « Laissez en paix les Éthiopiens tant qu’ils vous laissent en paix, et laissez en paix les Mongols aussi longtemps qu’ils vous laissent tranquille ». (5)

  Si la personne non-musulmane est un citoyen lié par un pacte de citoyenneté, de traité ou d’un pays avec lequel nous ne sommes pas officiellement en guerre, et qu’elle est maltraitée, agressée ou tuée par un « musulman », ce dernier se rendra coupable d’un immense péché qui a suscité clairement le désaveu du Prophète (ﷺ), qui a dit : « Quiconque agresse, maltraite ou fait du tort à un non-musulman protégé par une alliance ou un traité (mu’âhid), viole ses droits, lui impose plus de travail qu’il ne peut en faire ou lui prend quelque chose sans son consentement, je serai son adversaire le Jour de la Résurrection » (6) et « Quiconque tue un citoyen non-musulman (mu’ahîd) ne sentira pas l’odeur du Paradis – alors même que son odeur se perçoit sur une distance de 40 ans (de marche) » (7). Et de nos jours tous les pays signataires de l’ONU impliquent de facto que tous les non-musulmans pacifiques sont liés aux musulmans par un pacte ou un traité.

  Les ahadiths concernent donc le fait de moralement ne pas s’en prendre aux non-musulmans, et aux autorités musulmanes, leurs obligations juridiques, sociales, militaires et politiques d’assurer leurs droits et leur protection contre toute forme d’injustice, d’oppression, d’humiliation, d’agression ou de persécution, comme l’ont expliqué aussi d’anciens juristes comme Al-Qarâfî, Al-Buhuti ou Ibn ‘Abidin.

Il est donc un devoir de les protéger quand on en a les moyens, en plus évidemment de l’interdiction de ne pas les tuer ni les agresser.

L’interdiction morale de tuer des non-Musulmans pacifiques est signifier dans plusieurs versets du Qur’ân et ahadiths, où parmi les plus grands péchés, il y a ceux d’attaquer les gens qui ne les ont pas combattus, ceux qui attaquent les mosquées (et les autres lieux de culte) et les personnes qui s’y trouvent, etc.

« Combattez dans le sentier d’Allâh ceux qui vous combattent, et ne transgressez pas. Certes. Allâh n’aime pas les transgresseurs (et les agresseurs) » (Qur’ân 2, 190).

At-Tabarî dans son Tafsîr (2/190) commente en rapportant l’avis de Ibn ‘Abbâs qui dit : « Ne tuez ni femmes, ni enfants, ni vieillards, ni quiconque vient à vous avec la paix et qui retient sa main de vous combattre, car si vous faisiez cela, vous auriez certainement transgressé » ainsi que l’avis de ‘Umar Ibn ‘Abd al-‘Azîz : « Cela fait référence aux femmes, aux enfants et à quiconque ne vous fait pas la guerre parmi eux (les non-musulmans) ».

« Quiconque a tué un être humain non coupable de meurtre ou de sédition sur la Terre est considéré comme ayant tué l’humanité tout entière ; et quiconque a sauvé la vie d’un seul être humain est considéré comme ayant sauvé la vie de l’humanité tout entière ! » (Qur’ân 5, 32).

« Et, sauf en droit, ne tuez point la vie qu’Allâh a rendu sacrée. Quiconque est tué injustement, alors Nous avons donné pouvoir à son proche [parent] » (Qur’ân 17, 33).

« Et nous avons (honoré et) donné à chaque être humain une dignité. Nous les transportons sur terre et sur mer et Nous leur donnons de bonnes choses comme nourriture. Nous les avons nettement privilégiés à plusieurs de Nos créatures » (Qur’ân 17, 70)

« S’ils s’écartent de vous sans avoir eu à vous combattre, et s’ils vous proposent la paix, alors Allâh n’établira pour vous aucun recours (hostile) contre eux » (Qur’ân 4, 90).

 « Et s’ils inclinent à la Paix, incline vers celle-ci (toi aussi) et place ta confiance en Allâh, car c’est Lui l’Audient, l’Omniscient. Et s’ils veulent te tromper, alors Allâh te suffira. C’est Lui qui t’a soutenu par Son secours, ainsi que par (l’assistance) des croyants » (Qur’ân 8, 61-62).

« Il se peut qu’Allâh établisse de l’amitié entre vous et ceux d’entre eux dont vous avez été les ennemis. Et Allâh est Omnipotent et Allâh est Pardonneur, Très-Miséricordieux et Rayonnant d’Amour. Allâh ne vous défend pas d’être bienfaisants, bienveillants, bons, généreux et équitables envers ceux qui ne vous ont pas combattus pour la Religion et ne vous ont pas chassés de vos demeures. Car Allâh aime les équitables et les justes. Allâh vous interdit seulement de prendre pour alliés ceux qui vous ont combattus pour la Religion, chassés de vos demeures et ont aidé à votre expulsion. Et ceux qui les prennent pour alliés sont les injustes » (Qur’ân 60, 7-9). Ce verset explique implicitement (par déduction) qu’il est interdit de tuer ou d’opprimer des gens (Musulmans et non-Musulmans) qui n’ont pas combattu les Musulmans ou contribué activement à les chasser de leurs demeures ou pays, tout en enjoignant explicitement les Musulmans à leur témoigner de la bonté, de la bienveillance et de la générosité – au-delà de la simple justice – envers les non-Musulmans pacifiques, qu’ils aient ou non un pacte de paix ou de sécurité.

Le Messager d’Allâh (ﷺ) a dit : « En vérité, les pires transgresseurs (par rapport aux crimes envers Ses créatures) envers Allâh sont ceux qui tuent dans la mosquée sacrée, ceux qui tuent celui qui ne l’a pas combattu, ou ceux qui tuent avec la vengeance de l’ignorance ». (8)

Le Messager d’Allâh (ﷺ) a dit : « En vérité, le plus tyrannique des êtres humains envers Allâh est celui qui tue ceux qui ne l’ont pas combattu ». (9)

Même en temps de guerre, il y a une éthique à respecter. Le Calife et Compagnon ‘Umar ibn Al-Khattâb (‘alayhî salâm) a dit envers les non-musulmans : « Ne volez pas le butin, ne trahissez pas l’ennemi, ne mutilez pas les morts, ne tuez pas les enfants et craignez Allâh concernant les fermiers qui ne vous font pas la guerre ». (10)

Le Messager d’Allâh (ﷺ) a dit : « Le croyant est amical, familier et avenant, et il n’y a aucune bonté chez celui qui n’est ni amical ni avenant. Les meilleurs d’entre vous sont ceux qui sont les plus utiles et bénéfiques à l’Humanité ». (11)

Le Messager d’Allâh (ﷺ) a dit : « Les personnes les plus aimées d’Allâh sont celles qui sont les plus bénéfiques et utiles aux autres (…) ». (12)

Le Prophète (ﷺ) a dit : « Quiconque a reçu sa part de compassion, de miséricorde et d’amour bienveillant a reçu sa part de bien. Quiconque à qui on refuse sa part de compassion, de miséricorde et d’amour bienveillant a été privé de sa part de bien. Le Jour de la Résurrection, rien ne pèsera plus lourd dans la Balance du croyant que le bon comportement et les bonnes manières. Et Allâh réprouve l’individu indécent et grossier ». (13)

 Le bon comportement, le noble caractère et les bonnes manières ont un statut tellement élevé en Islam, qu’ils sont associés au rang éminemment élevé de la prière (pour Allâh) et du jeûne (pour Allâh), le Prophète (ﷺ) ayant enseigné : « Rien n’est placé sur la balance qui soit plus lourd que le bon comportement, les belles manières et le noble caractère. En effet, la personne qui a un bon comportement et un noble caractère aura atteint le rang de la personne qui jeûne et prie (Allâh) ». (14)

Le Messager d’Allâh (ﷺ) a dit : « Ceux qui sont les plus proches d’Allâh sont ceux qui sont les premiers à propager la paix et à donner les belles salutations (de paix) ». (15)

Le Messager d’Allâh (ﷺ) a dit : « Le fils d’Adam (l’être humain) n’agit pas de meilleure façon qu’avec la prière, la réconciliation entre les gens, le noble caractère et les belles manières ».  (16)

Le Prophète (ﷺ) a dit : « La (véritable) foi retient et empêche (de commettre) les assassinats et les meurtres. Un croyant n’assassine pas (les créatures non-coupables de meurtre ou sans raison impérieuse) ». (17)

Le Messager d’Allâh (ﷺ) a dit : « La religion (voie) la plus chère à Allâh, c’est la religion primordiale et pure, harmonieuse et pleine d’indulgence » (18). Une autre version voisine a été rapportée aussi selon Ibn Mas’ûd, précisant le sens « qui est facile à vivre et à mettre en pratique », c’est-à-dire qui doit être simple, bien vécue, et se comportant avec indulgence et bonté envers les autres, tout en essayant de faire de son mieux dans les actes d’adoration et les bonnes actions sans tomber dans le rigorisme, le fanatisme, l’extrémisme ou en se causant du tort au point de souffrir inutilement (jusqu’à en délaisser la pratique) ou d’en dégoûter les autres.

« Vous êtes la meilleure communauté qu’on ait fait surgir pour l’Humanité, vous ordonnez le convenable, interdisez le blâmable et avez foi en Allâh » (Qur’ân 3, 110). Et Allâh dans plusieurs versets du Qur’ân décrit les qualités de cette « meilleure communauté », à savoir ceux qui excellent dans la justice et la spiritualité, ceux qui cultivent la bonté d’âme, l’amour bienveillant, la compassion, la générosité et la sagesse, ceux qui s’enracinent dans l’humilité, la modestie et le soutien aux opprimés, ceux qui s’opposent aux injustes et à l’injustice, ceux qui élèvent la Parole divine avec intelligence et sagesse, ceux qui cultivent la science utile et la connaissance, ceux qui manifestent une piété intérieure et extérieure avec une noblesse de caractère les éloignant de toute forme de vilénie, de bassesse, de fanatisme, de sauvagerie et d’extrémisme, ceux qui pardonnent et font montre d’indulgence envers les ignorants ou les gens qui les ont traités injustement, ceux qui maitrisent leur ego et purifient leur âme tout en s’adonnant fréquemment à la prière (salât), versent l’aumône (en faisant la charité à ceux qui sont dans le besoin) et s’absorbent dans le Dhikr d’Allâh.

Notes :

(1) Rapporté par At-Tirmidhî dans ses Sunân n°1587 selon Bajalah, sahîh.

(2) Rapporté par At-Tirmidhî dans ses Sunân n°1588 selon Mâlik, hassân.

(3) Rapporté par al Baghawî dans son Tafsîr, ainsi que partiellement cité par al Qurtûbî dans son Tafsîr.

(4) Rapporté par Mâlik dans al-Muwattâ’ n°1793, sahîh.

(5) Rapporté par Abû Dawûd dans ses Sunân n°4302 selon Abî Sukayna avec une bonne chaine et n°4309 selon ‘Abdullâh ibn Amr ibn al-‘As qui relate la partie sur les Abyssiniens, avec une bonne chaine.    

(6) Rapporté par Abû Dawûd dans ses Sunân n°3052 selon Safwan Ibn Sulaym sous l’autorité de nombreux Sahaba, sahîh, Al-Hindi dans Kanz ul ‘Ummâl 4/618, As-Suyûtî dans Al-Jami’ us-Saghîr 1/1210 et d’autres

(7) Rapporté par Al-Bukharî dans son Sahîh n°6914 selon ‘Abdullah Ibn ‘Amr.

(8) Rapporté par Ahmad dans son Musnad n°6643 selon ‘Abdullâh Ibn Amr.

(9) Rapporté par Ahmad dans son Musnad n°15943 selon Abû Shurayh, sahîh.

(10) Rapporté par Sa’îd ibn Mansûr dans ses Sunân n°2466.

(11) Rapporté par At-Tabarânî dans al-Mu’jam al-Awsat n°5937 selon Jabir et Ad-Daraqutnî dans ses Sunân avec une bonne chaine. D’autres ahadiths similaires vont dans le même sens, ou ne rapportent qu’une partie du hadith comme Ahmad dans son Musnad 15/106, Al-Bazzâr dans son Musnad 15/349 et d’autres.

(12) Rapporté par At-Tabarânî dans Al-Mu’jam al-Awsât n°6026 selon ‘Abdullâh Ibn ‘Umar, sahîh.

(13) Rapporté par Al-Bukharî dans Al-Adab al-Mufrad n°464 selon Abû ad-Dardâ’, sahîh, At-Tirmidhî dans ses Sunân n°2002 qui rapporte la fin du hadith, An-Nawawî dans son Riyâd As Salihîn n°625 et d’autres.

(14) Rapporté par At-Tirmidhî dans ses Sunân n°2003 selon Abû ad-Dardâ’, sahîh, Ahmad dans son Musnad n°27517, Abû Dawûd dans ses Sunân n°4799.

(15) Rapporté par Abû Dawûd dans ses Sunân n°5197 selon Abû Umamah, sahîh.

(16) Rapporté par al-Bayhaqî dans Shu’âb al-Imân n°10333 selon Abû Hurayra, sahîh, Al-Bukharî dans Al-Târîkh al-Kabîr 1/63 et d’autres comme Ahmad, Abû Dawûd, Ibn ‘Asâkir, etc.

(17) Rapporté par Abû Dawûd dans ses Sunân n°2769 selon Abû Hurayra, sahîh.

(18) Rapporté par al-Bukhari dans Al-Adab Al-Mufrad n°281 selon Ibn ‘Abbâs dans le Livre sur l’excellence morale et dans le caractère, Ahmad dans son Musnad 5/266 et At-Tabarânî dans son Mu’jam n°7868 selon Abû Umama. Une variante plus courte de Jâbir par Al-Khatib al-Baghdadî dans Târîkh Baghdâd 7/209 et Ibn Al-Najjar dans Dhayl Târîkh Bahghâd 3/5, mais sa chaîne de transmission est ici faible. Une autre variante sous l’autorité de Habib Ibn Abi Thabit, dans un rapport mursal par Ibn Sâ’d dans ses Tabaqât 1/192.


Be the first to comment “L’Islam et la paix avec les Gens du Livre et les autres non-Musulmans – Et analyse à propos du Dhimmi et du Mu’âhid”