Ceci est un résumé du parcours intellectuel et spirituel qu’Allâh a accordé à l’un de Ses serviteurs, en espérant que cela puisse être profitable aux âmes sincères qui sont à Sa recherche.
Depuis qu’Allâh a manifesté Sa Grâce sur ma personne par le don de l’Islam et de sa pratique, toute mon existence s’en est trouvée bouleversée, sans doute à tout jamais.
Durant ma jeunesse, Il m’avait attiré à la lecture, et je dévorais, de mes 6 ans à mes 12 ans, des livres sur l’histoire antique et médiévale, sur les empires grecs et perses, sur l’Égypte antique, et le Moyen-âge européen. Mon attention se portait aussi sur la philosophie, les civilisations, la géographie – au point de connaitre par cœur les capitales de la plupart des pays du monde de l’époque, ainsi que sur les mathématiques et les calculs (en remportant les tournois scolaires sur la rapidité d’exécutions de calculs). J’aimais beaucoup lire les dictionnaires, les ouvrages de biologie, de botanique et ceux qui étaient consacrés à l’étude des dinosaures. Avec mon père, en plus des cours d’algèbres, je m’intéressais aussi à la géopolitique, en regardant avec lui les informations, certains reportages ou même Les Guignols (sur Canal +). Avec ma mère, c’était surtout l’éducation morale et religieuse – en nous lisant des passages des Textes religieux (y compris bibliques). Avec mon grand-père maternel, après le petit déjeuner et 2 dessins animés, il nous (ses petits-enfants) donnait des cours de littérature, de dictée et de mathématiques, puis parfois un peu d’Histoire, de religion ou des anecdotes sur son enfance, sa jeunesse et sa vie d’adulte. Avec ma tante, c’était des cours et des discussions autour de son métier (la médecine), la santé, les firmes pharmaceutiques, la chimie, les plantes et la biologie, ainsi que sur l’éthique et sa personnalité profondément religieuse.
Quand je ne jouais pas au ping pong avec mon père ou des membres de ma famille, ou lorsque je ne jouais pas au football avec mes amis, je m’isolais pour lire des livres, et c’était des moments inoubliables, tout comme je me souviens aussi des nombreuses occasions où certains jeux vidéo (après l’époque des jeux de société en famille, tout aussi mémorables et agréables) comme la saga des Final Fantasy (à l’époque où ils étaient produit par Squaresoft uniquement) m’ont émerveillé, que ce soit les fois où je jouais seul, coupé du monde extérieur, ou alors en compagnie de mon frère ou de ma sœur, ou encore de certains amis proches ! De pareils moments furent nombreux durant mon enfance, de même que toutes les fois où je rentrais de l’école en courant pour être sûr de ne pas rater les dessins animés qui me faisaient tant rêver, avec le plaisir d’une collation pour accompagner ces instants où plus rien d’autre ne comptait à ce moment-là.
Puis à l’école publique – l’équivalent du collège -, mon goût pour la lecture a quelque peu diminué, je me concentrais bien plus sur le sport (gym, foot, basket, natation, badminton, ping pong, …), les grands films de l’époque (Gladiator, Troie, le Seigneur des anneaux, Harry Potter, …), les jeux vidéo et les arts-martiaux. Suivant les cours du cursus que j’avais choisi (avec les matières communes dans les sciences, en plus de l’étude du latin), je les étudiais sans trop de passion, n’y voyant là aucune profondeur ni aucune implication métaphysique. Les livres qu’ils nous imposaient à lire n’étaient pas très passionnants, et j’eu une période se situant entre l’agnosticisme et le déisme. De l’Islam, je n’en avais, à cette époque, qu’une connaissance superficielle et limitée (de ce que mon père et des amis m’avaient transmis), ne faisant moi-même aucune recherche approfondie dans le domaine. Mais vers mes 15 ans, des débats avec des amis chrétiens, ou avec des internautes athées (voire athégristes) m’ont poussé à me remettre en question. Finalement, Allâh m’a permis de rencontrer des amis d’origine turque, musulmans pratiquants mais partageant les mêmes centres d’intérêt que moi à l’époque : jeux vidéo, sports et mangas/animés. Avec eux, je me suis donc intéressé à l’Islam de mon côté, surtout qu’ils m’aient enseigné les bases de la prière, comment faire les ablutions majeures et mineures, la Sûrate al-Fatiha et le fait de m’éloigner de quelques interdictions religieuses dont il était difficile pour les jeunes de l’époque de s’en préserver comme la fornication, l’alcool, le tabac, etc. Avec l’Islam, Allâh m’a redonné le goût de la lecture, des discussions riches et profondes, la volonté de m’améliorer et de confronter mes points de vue à ceux des autres, surtout des non-religieux. J’ai alors multiplié les lectures (religions comparées, philosophie, épistémologie et philosophie des sciences, physique, astrophysique, neurosciences, biologie, histoire des sciences, les sciences islamiques, géopolitique, économie, psychologie, sociologie, histoire, etc.), les échanges et les rencontres avec des spécialistes et militants actifs des différentes communautés. Bien que du côté de la famille paternelle, le courant suivi était celui de l’Islam shiite – mais de façon « minimaliste » sans aucune haine des Califes bien-guidés (que certains ne connaissaient même pas), c’est vers des auteurs exceptionnels « sunnites » qu’Allâh m’a orienté, notamment René Guénon, Martin Lings, Titus Burckhardt, Frithjof Schuon, Seyyed Hossein Nasr (qui est plutôt une sorte de pont entre le sunnisme et le shiisme, lui-même ayant grandi entre la tradition shiite de son pays et la tradition sûfie/sunnite à laquelle son père l’initia), Al-Qushayrî, Abû Hâmid al-Ghazâlî, Rûmî, Ibn ‘Arabî, Ahmad Ar-Rifâ’î, Ahmad Zarrûq, Al-Darqawî, Ibn ‘Ajiba, le Shaykh Ahmad al-Alawî et l’émir ‘Abd al Qâdir. Allâh exauça mes prières à travers la lecture de ces êtres d’exception, car ils sont ceux, qui, par Sa Grâce, tous les doutes ainsi que les incompréhensions qui découlaient des débats que j’avais avec des non-religieux (parfois hostiles à la Religion et même à l’idée de Dieu) ont été dissipés, jusqu’à me rapprocher de l’Amour du Divin et de l’amour de Ses Saints.
En parallèle des études « profanes » que je poursuivais (langues, littérature et sciences informatiques : logique, programmation, infographie, analyse des bases de données, technologie, webmastering, physique, mathématiques et accessoirement de la biologie et de la chimie), je me formais aussi aux sciences islamiques (dans un institut, ainsi qu’en autodidacte et également en compagnie de professeurs, docteurs et étudiants en islamologie et dans les sciences islamiques de façon privée) et me passionnais durant mon temps libre, à la philosophie, à l’art sacré et à la métaphysique. J’échangeais aussi beaucoup avec mes professeurs non-religieux – qui étaient à la fois pétris de préjugés mais aussi émerveillés et passionnés par nos discussions (ils découvraient des choses et des auteurs/écrits dont ils n’avaient auparavant jamais entendu parler) -. Ils étaient même souvent « perdus » ou déstabilisés, quand ils étaient incapables de débattre (ou plutôt, ils n’avaient plus d’arguments à nous soumettre) avec notre groupe de « jeunes » (dans la classe), sur des sujets comme l’athéisme, le matérialisme, l’évolutionnisme, Darwin et le néodarwinisme, la théologie, la philosophie, l’astrophysique, l’histoire des sciences, l’épistémologie, le freudisme, la métaphysique, etc,
Pendant plus de 10 ans, je débattais régulièrement avec toutes sortes de personne et de groupes intercommunautaires (comme les chrétiens, juifs, athées, bouddhistes, sikhs, hindous, agnostiques, déistes, marxistes, progressistes, identitaires, etc.) et intracommunautaires (sunnites, salafistes, shiites, alévis, zaydites, ibadites, mutazilites, réformistes, modernistes, « musulmans laïcs », « pérénnialistes », etc.), mais ce qui me comblait réellement c’était ma lecture des grands maîtres spirituels (l’imâm Ja’far as-Sâdiq, les frères Ghazâlî, Rûmî, Ibn ‘Arabî, Ibn Atâ’Llâh as-Sakandarî, Ibn Ajibâ, Al-Haddâd, junayd, Al-Jilânî Al-Qushayrî, As-Sulâmî, Al-Kharâqânî, Al-Bistâmî, et tant d’autres) et les moments que je passais avec certains frères très proches avec qui on traversait et partageait de nombreuses épreuves et expériences intenses et riches (en émotions et en rebondissements). Je pensais encore que je devais sauver le monde entier pour qu’ils aient l’opportunité d’embrasser l’Islam comme je l’avais fait. Mais après plusieurs années de da’wah intensive – qui a certes aussi porté ses fruits -, Allâh m’a fait prendre conscience du fait que notre but n’était pas de guider tout le monde, puisque même le Sceau des Prophètes – Muhammad (ﷺ) – n’avait pas cette fonction,- Allâh rappelle que c’est Lui uniquement qui guide les âmes (« Tu [Muhammad] ne diriges pas celui que tu aimes : mais c’est Allâh qui guide qui Il veut. Il connaît mieux cependant les bien-guidés » Qur’ân 28, 56) bien qu’il soit un guide à suivre en tant que modèle et que son intercession auprès d’Allâh soit importante et comporte des bénédictions mais c’est Allâh qui gère tout par Sa Permission et non pas le Prophète -. Allâh nous a commandé cependant qu’il fallait avant tout s’éduquer et se purifier spirituellement et moralement, nous rapprocher de Lui, accomplir de bonnes œuvres, être de bons « ambassadeurs » de l’Islam à tous les niveaux (en tant que fils, élève, employé, mari, père, voisin, enseignant, citoyen, scientifique, paysan, commerçant, etc.), et défendre l’Islam par le savoir, l’exemplarité, le bon comportement, la sagesse et les bons conseils, sans trop faire de prosélytisme – ce qui peut rebuter beaucoup de personnes -, tout en réfutant ceux qui s’en prennent injustement à l’Islam et à la communauté musulmane. Par expérience, le bon comportement et le fait de s’éloigner des vices et des activités qui avilissent l’âme, cela attire les gens éprouvés ou sincères qui aspirent à plus d’authenticité, et à une vie dénuée d’hypocrisie et d’illusions comme celle que la société moderne leur impose. Ils s’interrogent alors sur les causes de la « beauté intérieure » et de la bonté d’âme qui émanent de ceux qui aspirent à Allâh, qui semblent heureux malgré leur « pauvreté » ou se contenant des choses simples de la vie, et qui préfèrent la méditation et la lecture aux fêtes de débauche. Aussi, certains musulmans ont été en quelque sorte « induits en erreur », par le fait que certaines autorités leur ont dit que tous les non-musulmans iraient en enfer, – y compris leurs proches – ce qui les avait naturellement bouleversés.
Mais peu importe l’issue à cette question – celle du Pardon divin pour tous les êtres selon différentes modalités (comme l’ont exprimé à un certain nombre de grands maîtres spirituels anciens et contemporains (1)) ou celle du Pardon divin uniquement pour certaines catégories de personne (comme l’ont exprimé aussi d’éminents théologiens) -, Allâh nous informe qu’Il est le Juste et qu’Il est le Seul Juge, et dont Son Jugement est justice, sagesse et miséricorde, et que le fait qu’à la fin des temps, beaucoup de gens quitteront la Religion sera un des signes de la fin de notre cycle. Cela implique d’une part que nous devons nous concentrer sur Lui et sur notre propre réalisation spirituelle, puis simplement transmettre Son Message de façon excellente et irréprochable, et que tout le reste ne dépend que de Lui. A force de vouloir sauver maladroitement tout le monde à tout prix, on se perd en chemin, on « vulgarise » et déforme la religion, on se noie dans l’angoisse et le pessimisme, et on oublie parfois qu’Allâh est le Plus miséricordieux des miséricordieux, tout comme Il est aussi le Juste et le Sage par excellence, et que s’en remettre à Lui dissipe nos angoisses et nos doutes. Que votre amour et votre inquiétude pour vos proches pécheurs (parmi les musulmans) ou non-musulmans ne vous poussent pas à désespérer de Sa Miséricorde – ou à en avoir une conception limitée et réductrice – car Elle embrasse pourtant toute chose (cf. Qur’ân 7, 156) (2). Mais que cela vous conduise plutôt à multiplier vos invocations et vos bonnes actions à leur égard, – en souhaitant leur guidée et leur bonheur (auprès d’Allâh) -, à donner le meilleur de vous-mêmes, et à vous en remettre constamment en Lui ! Nous avons aussi la conviction que, s’il existe encore des vérités dans les autres formes traditionnelles (religions), celle qui réunit tout le bien, toutes les vertus et les moyens d’accéder à la Vérité inaltérable et pure, est contenue dans l’Islam à travers le Qur’ân et la Sunnah purifiée, et suivie par les plus éminents des Compagnons et des Saints. De même, du point de vue exotérique, nous savons aussi que tous les non-musulmans n’ont pas le même statut, ni le même degré d’injustice ou d’infidélité, et que certains bénéficieront « d’excuses » auprès de leur Seigneur, mais en tant que musulmans, nous ne pouvons aucunement conforter les gens dans l’infidélité, la tyrannie, l’oppression, les péchés, la débauche, les pratiques néfastes pour leur santé et la société, ou encore l’indifférence à l’égard d’Allâh et de la Voie bénie de Son Messager Muhammad (ﷺ) car l’Islam dispose de spécificités qui lui sont propres, ainsi que d’une fonction universelle et salvatrice en cette fin de cycle, et d’une singularité qui rend l’Islam unique et « supérieur », si bien que si l’on doit souhaiter le meilleur pour toute l’Humanité, c’est donc vers l’Islam qu’il faut les diriger, sans contrainte ni harcèlement évidemment.
Il y a 2 confusions majeures aussi qu’il faut clarifier, car elles polluent l’esprit et entrainent des conséquences très graves, même d’un point de vue uniquement exotérique. La première, est que pour certaines personnes se réclamant de l’Islam, les Juifs, les Chrétiens, les Bouddhistes, les Hindous, les Zoroastriens, les Taoïstes et toute autre communauté religieuse traditionnelle fondée sur les notions d’Absolu (Dieu), de spiritualité opérative, de prophétie, de Révélations/livres, de morale, etc., ne sont pas des mécréants mais simplement des croyants. Or en Islam, leur statut juridique est défini extérieurement par le Qur’ân, et est mécréant toute personne ne professant pas l’Islam ici-bas. Cela ne veut pas dire pour autant qu’ils ne sont pas croyants selon leur propre définition à eux, mais Allâh évoque plusieurs types de mécréance dans le Qur’ân et non pas uniquement dans son sens linguistique (est mécréant celui qui a connu, entendu, compris et eu accès à la vérité tout en la dissimulant ou en la rejetant en connaissance de cause, mais aussi tout non-musulman ne professant pas l’Islam. Cependant, il y a plusieurs catégories en leur sein : les associateurs (qui ne se réfèrent à aucune Révélation réellement divine et ne se rattachant donc à aucun Prophète envoyé par Allâh) parmi les idolâtres et les athées par exemple, les négateurs endurcis et criminels parmi les associateurs (idolâtres, athées, etc.), les Gens du Livre pieux et fidèles, les hypocrites et injustes parmi les Gens du Livre, etc. Sont considérés, dans le Qur’ân, comme étant croyants, uniquement ceux qui ont suivi fidèlement les Révélations et prophètes qui leurs étaient envoyés avant l’apparition terrestre du Prophète Muhammad (ﷺ) et de son Message céleste parmi les anciennes communautés, et ceux qui, après l’apparition terrestre du Prophète Muhammad (ﷺ), l’ont reconnu et suivi dans son Message.
De là découlent aussi certaines choses importantes, comme l’interdiction, islamiquement parlant, de considérer toutes les religions dans leur forme actuelle comme étant identiques, relatives ou égales en tous points, ou comme religions totalement agrées par Allâh, – et qu’embrasser le Christianisme ou le Bouddhisme serait pareil ou tout aussi valable (théologiquement parlant) que d’embrasser l’islam -, ce qui est faux, tout comme le fait que certains renient le caractère universel ou supérieur de l’Islam sur les autres traditions spirituelles, malgré les points communs et les vérités qui peuvent exister encore en leur sein.
L’autre confusion, est celle des personnes musulmanes se revendiquant de l’orthodoxie islamique, qui jugent à la place d’Allâh en pensant que toute personne non-musulmane ira forcément au Feu, mais cela est réfuté catégoriquement par Allâh dans Son Livre, prenant l’exemple notamment des ignorants parmi les Gens du Livre qui décrétaient qui irait au Paradis et qui n’irait pas, à la place du Jugement divin. Si la mécréance est associée au Feu, et la Foi au Paradis, Allâh peut très bien pardonner ou prendre en compte des excuses en lien avec des circonstances particulières. Cette croyance est une déviance très grave, pouvant s’apparenter au shirk et au kufr si la personne prétend pouvoir juger à la place d’Allâh, d’autant plus qu’une affirmation de principe et général (par exemple : tels péchés conduisent au Feu, la mécréance conduit au Feu, etc.) n’exclut pas les exceptions et les dérogations, et que cela n’est pas un sens absolu. Allâh dit qu’Il pardonne à qui Il veut, mais aussi que les mécréants, les injustes, les criminels, etc. sont destinés en principe au Feu, mais que toutefois Sa Miséricorde et Son Pardon peuvent embrasser tous les êtres, à titre individuel. On peut donc dire que la mécréance, le meurtre, le calomnie, etc. conduisent au feu en tant que tel, mais pas qu’Allâh leur interdirait formellement Son Pardon, ni que tel individu précis ne sera jamais pardonné, car Allâh affirme le contraire, et comme l’ont expliqué des savants comme Ibn Taymiyya, les seules personnes dont on sait leur place dans le Feu, sont ceux qui sont mentionnés explicitement dans le Qur’ân, et ils sont connus.
Il est donc nécessaire de distinguer la question du statut juridique ici-bas (tout non-musulman est mécréant jusqu’à preuve du contraire), du salut post-mortem et/ou du Pardon divin, car l’un n’implique pas nécessairement l’autre. Aussi, nous devons garder à l’esprit que l’on sera traité par Allâh selon l’opinion que l’on a de Lui, c’est-à-dire que celui qui aspire à Sa Miséricorde, à Son Pardon, qui souhaite Sa Paix et Sa Douceur, sera traité de cette façon s’Il le veut, comme nous l’apprend le célèbre hadith qudsî rapporté par Bukhâri et Muslim dans leur Sahîh, ainsi qu’Ibn Mâjah et At-Tirmidhî dans leur Sunân et An-Nawawî dans son recueil des 40 ahadiths (n°15) : « Allâh – exalté soit-Il – a dit : « Je suis conforme à l’opinion que Mon Serviteur se fait de Moi… » ». Dans d’autres variantes de ce hadith, le Discours divin continue ainsi : « Alors qu’il pense de Moi ce qu’il veut », ou encore : « Alors qu’il ait une bonne opinion de Moi ».
De même, la Religion, c’est la simplicité, revenir à l’essentiel et faire le bien, comme le dit ce hadîth : « J’ai été envoyé avec la hanîfiyya samha » (la hanîfiyya désigne le monothéisme abrahamique pur), de ce fait l’Islam est une religion facile (samha), c’est à dire simple, conformément au verset qurânique (22/78) : « Il ne vous a imposé aucune gêne dans la religion ; la religion de votre père Ibrâhîm ».
Et comme le rapporte le hadîth du Sahîh Muslim (n°1907) et du Sahîh al-Bukharî (n°6689) : « Les actes ne valent que par leur intention ».
Aussi, ne pensons pas que nous soyons seuls, et même si nous fautons beaucoup, les Anges, les Prophètes, les Saints, les Vertueux et nos proches pieux qui sont décédés invoquent Allâh pour nous, et toute bonne action accomplie sera valorisée et prise en compte par le Très-Haut :
« Quiconque viendra avec le bien aura 10 fois autant ; et quiconque viendra avec le mal ne sera rétribué que par son équivalent. Et on ne leur fera aucune injustice » (Qur’ân 6, 160).
« Ô vous qui croyez! Inclinez-vous, prosternez-vous, adorez votre Seigneur, et faites le bien. Peut-être réussirez vous ! » (Qur’ân 22, 77).
« Dis : « Ô Mes serviteurs qui avez commis des excès à votre propre détriment, ne désespérez pas de la miséricorde d’Allâh. Car Allâh pardonne tous les péchés. Oui, c’est Lui le Pardonneur, le Très Miséricordieux ». Et revenez repentant à votre Seigneur » (Qur’ân 39, 53-54).
Et selon le hadith rapporté par Bukharî et Muslim dans leur Sahîh ainsi que par An-Nawawî dans son Riyâd as-Salihîn (n°11) : « Certes Allâh a écrit les bonnes comme les mauvaises actions, puis Il les expliqua : « Quiconque a donc l’intention d’accomplir une bonne action et ne la fait pas se la verra comptée comme une bonne action à part entière. S’il l’accomplit après avoir eu l’intention de la faire, Allâh multipliera cette bonne action en la comptant de 10 à 700 fois plus ou encore davantage. Et quiconque pense à commettre un péché puis s’en abstient, Allâh lui comptera une bonne action à part entière. S’il la commet après y avoir songé, Allâh la lui inscrira comme étant une seule mauvaise action ».
Al-Bazzâr dans son Musnad rapporte selon une chaîne de transmission dont les maillons sont des narrateurs du Sahîh, d’après Ibn Mas`ûd, un hadith attribué au Prophète (ﷺ) selon lequel : « Ma vie est un bien pour vous, vous y faites des choses nouvelles et il vous arrive des choses nouvelles, puis lorsque je décèderai, mon décès sera un bien pour vous car vos œuvres me seront exposées, si j’y vois quelque bien, je louerai Allâh, et si j’y vois quelque mal, j’implorerai le pardon pour vous ».
L’imâm Ahmad, Ibn Mandah et Al-Hâkim At-Tirmidhî dans Nawâdir Al-Usûl rapportent le hadîth suivant : « Vos œuvres sont exposées à vos proches et à vos familles qui sont décédés. S’ils y voient quelque bien, ils s’en réjouissent, et s’il en est autrement, ils disent : « Allâh, ne les fais pas mourir avant de les avoir guidés comme tu nous as guidés » ». At-Tayâlisî rapporte un hadîth similaire dans son Musnad. Al-Hâkim At-Tirmidhî dans Nawâdir Al-Usûl rapporte aussi le hadith suivant : « Les œuvres sont exposées devant Allâh les lundis et les jeudis, et exposées devant les Prophètes et les pieux les vendredis. Ils se réjouissent alors des bonnes œuvres ».
Quant à Al-Bayhaqî, il rapporte dans Shu`ab Al-Îmân le hadîth suivant : « Craignez Allâh vis-à-vis de vos frères décédés. Vos œuvres leur sont en effet exposées ». De même, Ibn Al-Qayyim rapporte dans Ar-Rûh un hadîth démontrant que les morts ont connaissance de ce qui advient aux vivants.
Cet autre hadîth aussi montre l’importance de visiter les défunts là où ils sont enterrés, d’invoquer pour eux, de les saluer, et de respecter leur sacralité même après leur décès terrestre : « Chaque fois qu’un homme rend visite à la tombe de son frère [ou de sa sœur] et s’assoit auprès de lui (ou d’elle), ce dernier l’apprécie et lui retourne les salutations jusqu’à ce qu’il s’en aille » (rapporté notamment par Ibn al-Qayyîm dans Ar-Rûh qui l’estime sahîh, une voie selon ‘Aîsha et une variante proche selon ‘Ibn Abbâs, tout comme Ibn `Abd Al-Barr dit qui la juge authentique ainsi par `Abd Al-Haqq, l’auteur des Ahkâm). De même que cet autre hadith : « Tout homme qui passe par une tombe et salue son habitant, il lui rend le salut même s’il ne le connaît pas » (rapporté notamment par Ibn al-Qayyîm dans Ar-Rûh qui l’estime sahîh).
Ibn al-Mubârak dans son Kitâb az-Zûhd d’après Abû Ayyûb Al-Ansârî rapporte que : « Lorsque l’âme du croyant est extirpée, elle est accueillie par les gens de la miséricorde parmi les Serviteurs d’Allâh comme l’on accueillerait un porteur de bonnes nouvelles. Ils vont vers lui et l’interrogent puis se disent mutuellement : « Attendez que votre frère se repose car il vient de traverser une épreuve difficile ». Puis, ils vont vers lui et l’interrogent « Qu’a fait untel ? Qu’est devenue untelle ? S’est-elle mariée ? » » etc. ».
Et soyez rassurer, car tout cela est vrai, – non seulement textuellement et rationnellement parlant (possible), mais cela, nous sommes nombreux à l’avoir expérimenté, confirmant ainsi de nombreux ahadiths en la matière, dont celui-ci dans lequel le Messager d’Allâh (ﷺ) a dit : « A l’approche de l’Heure, les rêves d’un croyant ne manqueront presque jamais de se réaliser, et le plus véridique d’entre eux dans les rêves sera le plus véridique d’entre eux dans la parole. Le rêve d’un musulman est un aspect (ou partie) parmi les 46 aspects (parties) de la prophétie, et les rêves sont de 3 sortes : (1) le rêve véridique qui est une bonne annonce d’Allâh ; (2) les rêves dans lesquels le Shaytân terrifie quelqu’un [et mieux vaut ne pas en parler ou y prêter attention] ; (3) et les rêves psychologiques qui arrivent à la personne elle-même. (…) » (Rapporté par at-Tirmidhî dans ses Sunân n°2270 selon Abû Hurayra, chaîne sahîh). Nous avons rencontré et conversé avec des défunts, d’autres nous ont fait l’annonce des décès imminents de certains proches – et cela s’est produit comme indiqué dans leurs annonces (à l’état d’éveil comme à travers les songes spirituels) ou d’autres types d’annonce encore qui se sont produits.
Dès lors, Il fait naître dans le cœur des « amoureux », l’amour de Son Essence et leur fait goûter à plusieurs de Ses Noms par les états qu’Il nous fait traverser, y compris les situations de richesse et de pauvreté, de compagnie et de solitude, d’amour et d’indifférence. Il nous fait aimer Ses Prophètes, Ses Rapprochés, les gens de bien et la Vertu, et nous place au service de Sa communauté, même si pour ma pauvre personne, j’étais (et le suis encore) – par mes péchés et mes manquements – loin du rang éminent de Ses Rapprochés qui ont tant fait pour Ses créatures et qui ont été proches de Lui ! Il a fait jaillir l’amour en moi jusqu’à mon cœur en soit débordé, effaçant mes peines et mes douleurs, – les aléas de la vie sont parfois très difficiles à supporter par moment mais Son Amour dissipe tout le reste ! -. L’aimer, c’est aussi vouloir, dans les règles de la bienséance, vouloir le bien pour les autres et manifester sa compassion à toutes les âmes dans le besoin et dans la tourmente. Si la colère et la haine – dans leur aspect profane – sont de terribles défauts, la « Sainte colère » a sa raison d’être, à savoir la défense de la Vérité (par la sagesse et la douceur en général, mais aussi par la fermeté quand cela l’exige), de la justice, des opprimés et des gens de bien qui sont calomniés ou persécutés. De même, la calomnie et la persécution contre des personnes appartenant à des groupes opposés (et même blâmables) à ceux que j’aime, sont des lignes rouges, car la calomnie et l’oppression ne rendent pas le monde meilleur, et engendre un voile supplémentaire qui les sépare du Vrai et de la Paix.
Dénigrer les autres communautés ne fait que renforcer leur haine et les fractures intercommunautaires, – ce qu’Allâh nous a interdit de faire -, alors que la meilleure preuve de l’Islam sont ses fruits en termes d’adab, de sagesse et d’akhlaq qui se manifestent chez Ses Rapprochés et les gens de la vertu -. Par contre, dans le cadre d’un débat, il faut leur montrer l’inanité de leurs thèses, leur communiquer les bons arguments – adaptés à leur niveau de compréhension et de sensibilité – sans toutefois jamais contrevenir aux principes et finalités de la Religion, et leur montrer que ce qu’ils nous reprochent sont soit la conséquence de leur myopie intellectuelle, soit existent plutôt dans leurs propres textes de référence (qu’ils soient « religieux » ou non).
On ne peut pas parler de la « maladie » de l’Islam comme l’ont fait certains penseurs, mais plutôt du « fanatisme » et de l’ignorance de certains musulmans, qui sont encore voilés des trésors spirituels de leur propre patrimoine, et qui se perdent dans des débats, des divergences futiles (sur des pratiques culturelles qui sont obsolètes ou par définition circonstancielles et non pas universelles) ou des détails secondaires quand l’essentiel de l’Islam est clair et accessible à tous, et que nous bénéficions des plus grands maîtres spirituels que l’Humanité ait produite – Loué soit-Il ! -. Les fondements de la doctrine (‘aqida), du fiqh dans ce qui est nécessaire (pour prier, jeûner, faire le hajj, verser la zakah, sur les droits de l’épouse/époux, ceux des parents, des enfants, du voisinage, les règles alimentaires, les interdictions claires et majeures, etc.) s’étudient très rapidement et certains traités en parlent magnifiquement bien (voir notamment les ouvrages de l’imâm Abû Hâmid al-Ghazâlî et son Ihyâ’, les ouvrages de l’imâm ‘AbdAllâh Ibn `Alawî Al-Haddâd, le matn d’Ibn Ashir commenté et traduit par Tarik Bengarai sous le titre L’essentiel de la religion musulmane – Tawhîd, fiqh et spiritualité, les ouvrages de fiqh traduit et commenté par le Shaykh Corentin Pabiot dont Précis de Fiqh Malikite – Les pratiques cultuelles (‘ibâdât), Qu’est-ce que la bid’a et Les Quatre écoles de droit sunnites, ainsi que ses ouvrages de ‘aqida et d’histoire des courants de l’islam : Le sunnisme, des origines à la constitution des écoles et La ‘Aqîda Tahâwiyya (La Profession De Foi Des Gens De La Sunna) de l’imâm At-Tahawî, et pour le fiqh hanafite il y a L’explication judicieuse de l’imâm Hassân ibn ‘Ammâr Al-Shurunbulâli) mais en dehors de cela, c’est la relation spirituelle avec Allâh qu’il faut renforcer, la compréhension du Qur’ân, s’abreuver aux enseignements prophétiques en lien avec le Qur’ân et la sagesse, acquérir les nobles caractères et l’adab envers Ses créatures, honorer Ses bien-aimés, connaitre les nobles Compagnons (dont Salmân al-Farisî, Bilâl al-Habashi, Abû Dharr, Abû ad-Dardâ’, Mû’adh Ibn Jabal, Ibn ‘Abbâs, Ibn Mas’ûd, An-Nu’aymân Ibn ‘Amr, Zayd Ibn Thabit, …) et membres des Ahl ul Bayt (dont la famille alide) ainsi que les grandes figures savantes et saintes de la Religion. Contempler et observer Sa Création, voyager, cultiver la sagesse et la connaissance bénéfique, s’abstenir de causer du tort aux gens, et d’être plutôt au service du Bien et de l’Humanité en faisant preuve de bonté, d’indulgence, de générosité, de compassion et de bons conseils, sans jamais céder au fanatisme, à l’oppression, à l’injustice ou à l’hypocrisie.
En lisant les biographies sur le Prophète Muhammad (ﷺ) – surtout celle de Martin Lings -, des Califes bien-guidés (Abû Bakr, ‘Umar, ‘Uthmân, ‘Alî et son fils Al-Hassân) et de l’entourage féminin prophétique (Khadija, ‘Aisha, Zaynab, Fâtima, Umm Salama, …) -, mon amour pour Lui et Ses bien-aimés n’a fait que s’intensifier, et c’est là que j’ai compris que tous les « Saint(e)s » qui ont fasciné l’Humanité, n’ont fait que suivre leurs traces et s’imprégner de la Lumière prophétique, car il personnifiait toutes les vertus et les sagesses. Leurs exemples fortifient la foi, tracent notre route et augmentent notre désir de les suivre par Amour pour Lui.
En rencontrant des âmes nobles de la résistance face à l’oppression, dans différentes régions du monde ensanglantées, notamment du monde musulman, j’ai compris qu’en Occident, les gens ne discutaient souvent pour rien dire, et malgré leurs vaines prétentions d’être « supérieur aux autres », ils étaient très loin d’avoir cette noblesse d’âme, cette virilité spirituelle, cette piété, ce courage et cette détermination à tout sacrifier pour Lui et pour la sécurité de leurs familles et de leur nation. C’est aussi à ce moment qu’Allâh m’enseigna la modestie et l’humilité, car après des années de lecture en tous genres, cette érudition n’avait rien de glorieux ou de « supérieur » à leur vision du monde, à leur personnalité et à leur relation sincère et modeste avec le Divin. La Sagesse ne s’obtient que par la bienveillance, les bonnes oeuvres et le cheminement sincère à Lui. Les joutes verbales et les postures que certains essayent d’adopter sur les réseaux sociaux pour impressionner leurs « contacts », tout cela est vain et n’est que duperie. Les personnes sincères et actives sont souvent inconnues et sont presque constamment sur le terrain, et par Allâh, ils font beaucoup plus de bien que tous les blablateurs/euses réunis.
Le virtuel a ses bons côtés, mais il engendre aussi trop de frustrations, de haine et de déception, y compris par certains membres de la Communauté. Mais par Allâh, les âmes nobles existent et il suffit de voyager pour être amené à les rencontrer et à voir qu’il y a toute une vie bénie et splendide en dehors des apparences trompeuses et des polémiques incessantes des réseaux sociaux et de l’hypocrisie de nombreux contacts – qui se plaignent sans arrêt tout en étant de ceux qui plongent la communauté vers le bas et qui empoisonnent la vie des autres -.
Aussi, à partir du moment où l’on prend position, ou qu’une personne accroit sa notoriété, celle-ci n’échappera pas à la critique ou même à la calomnie – dont beaucoup en ont déjà fait l’amère expérience -, mais cela est aussi une épreuve afin de savoir si la Vérité et la justice triompheront toujours dans nos cœurs et nos actes et pas seulement sur notre langue -. Par ce biais, Allâh nous éloigne des hypocrites et des personnes malveillantes qui n’étaient pas dans nos vies pour les bonnes raisons (et cela, en dépit de certains échanges ou moments agréables et intéressants que l’on a pu passer ensemble). Les personnes sincères viendront toujours vers vous pour avoir votre version des faits ou vous interroger avant de vous juger catégoriquement. Le véritable visage des gens ressort en cas de désaccords, de projets communs ou de situations pénibles qui nous poussent à bout, et alors tout devient plus clair ; ceux qui sont esclaves de leur ego et qui cherchent à humilier les autres quitte à les calomnier, et ceux qui cherchent le bien et la concorde. L’épreuve est telle une épée qui distingue l’ivraie du bon grain. Que les calomnies et les critiques des uns et des autres, ne vous atteignent pas, et ne vous empêchent surtout pas de continuer à rechercher Sa Face et à vous investir dans de nobles actions et projets dans Son Sentier. Ce bas-monde est la demeure de l’épreuve et des éprouvés, mais la félicité et la pleine satisfaction seront pour la Demeure céleste, même si ici-bas Il nous prodigue déjà de nombreux Bienfaits et Signes qui illuminent l’âme et notre existence.
L’imâm as-Shafi’î a dit : « Il n’existe aucune voie qui permette d’échapper à la critique des gens. Suis donc scrupuleusement ce qui t’est bénéfique ». (Rapporté par Ad-Dhahâbî dans Siyâr a’lam an-Nubalâ’ 42/10). Voilà un précieux conseil pour les gens doués d’intelligence !
Celui qui persévère dans la droiture et l’aspiration à la justice, sera souvent trahi ou critiqué par ceux qui sont motivés par autre chose que les nobles idéaux. D’autres, qui sont sincères mais trop têtus ou mal informés, dépasseront les bornes, et il vaut mieux alors délaisser la polémique et s’en remettre à Allâh – car nos différends seront tranchés par Lui le Jour du Jugement -.
En ces temps troubles, voici quelques conseils de lecture qui seront profitables sur beaucoup de plans :
– Le Mémorial des Saints (éd. Albouraq, édition complète comportant toutes les biographies contrairement aux autres éditions) de l’imâm Farid ud-Dîn Attâr
– Le cantique des oiseaux de l’imâm Farid ud-Dîn Attâr (avec un bon commentaire concernant les passages subtils sur le plan métaphysique)
– Sagesses et confidences de l’imâm Ibn ‘Atâ’Allâh (édition bilingue chez Albouraq).
– Les enseignements spirituels du Prophète (éd. Tasnîm en un seul tome, 2021) de Tayeb Chouiref
– Revivifier la spiritualité de l’Islam – La vie et l’enseignement d’al-‘Arabî al-Darqâwî (éd. Tasnim, 2022) de Tayeb Chouiref
– Le Livre des Haltes (Kitâb al-Mawâqif) de l’émir Abd al-Qâdir
– Sagesses Divines (de Ibn ‘Arabî) traduit par Tayeb Chouiref (éd. Tasnîm, 2021).
– Futuwah: Traité de chevalerie soufie (de l’iimâm As-Sulâmî, le maître d’Al-Qushayrî et d’Al-Bayhaqî) par Faouzi Skali
– La lumière éclatante de la vie du Prophète Muhammad (ﷺ) et les merveilles de son enseignement (éd. Hanif, 2022) de Dawûd Salmân
Après avoir parcouru de nombreuses expériences, étudié de nombreux courants de pensée, les civilisations traditionnelles et le monde moderne, je ne vis plus noble, plus profond, plus élévateur, plus beau, plus puissant, plus splendide et plus cohérent que l’Islam et les héritiers des Prophètes que sont les Saint(e) et Rapproché(e)s d’Allâh, surtout en notre ère de grande tromperie, ils sont ceux qui nous dévoilent Sa Lumière dans cette période tellement sombre et obscure.
C’est ainsi que je souhaite quitter ce bas-monde, en compagnie de Sa Présence, et de celle de Ses bien-aimés, ainsi que des gens sincères, bienveillants et humbles malgré mes nombreux défauts car il faut être conscient de ses imperfections pour être capable de se purifier si l’on veut se rapprocher du Très-Haut, mais Allâh dans Sa Miséricorde, nous a aussi promis de nous réunir avec ceux que l’on aimait indépendamment de notre degré spirituel -. Vraiment, Ses bénédictions accompagnent ceux qui font aimer Allâh et qui se tiennent loin de la bassesse morale, et ce peu importe leur statut social. Si on trouve des personnes d’exception parmi les universitaires et autres érudits, les personnes les plus marquantes et spirituelles qu’Il a mis sur mon chemin étaient souvent des êtres sans grande prétention sociale ou universitaire. Beaucoup d’intellectuels remarquables évoluent d’ailleurs en dehors des cursus « officiels » des universités.
Encore une fois, si j’ai pu blesser qui que ce soit, manquer à mes devoirs et aux convenances qui s’imposent au croyant sincère, alors je vous présente mes excuses, et demande à Allâh Son Pardon, et qu’Il vous accorde une généreuse compensation pour le préjudice subi !
Qu’Allâh nous pardonne, nous éloigne du blâmable, qu’Il nous fasse mourir sur Son Amour et sur la Voie droite, et qu’Il nous accorde une bonne fin !
Notes :
(1) L’émir ‘Abd al-Qâdir dans son Kitâb al-Mawâqîf (n°205) par exemple, dédie à cette question tout une halte, en citant des versets du Qur’ân, des ahadiths (dont certains sont authentiques et bons tandis que d’autres sont faibles dans leur chaîne de transmission), l’avis de plusieurs Compagnons et Savants parmi les khalafs qui étaient de l’avis que même pour les non-musulmans qui passeront par le feu, que le châtiment/correction connaitra une fin pour eux, après que la période (succession de plusieurs générations connaissant une fin) de correction (appliquée avant tout à leur ego) en raison de leurs crimes divers. Il dit notamment : « Quant aux héritiers achevés (al-waratha al-kummal), ils ont part eux aussi à cette victoire éclatante qu’Allâh – exalté soit-Il – a accordée à son Envoyé – sur lui la grâce et la paix. Certains (dont Muhyî al-Dîn al-Hâtimî, ‘Abd al-Karîm al-Jîlî, le pôle ‘Ali Wafâ et d’autres – qu’Allâh accorde à tous Son Agrément) ont parlé de l’universalité de la Miséricorde [divine] et de la félicité éternelle qui finira par englober même ceux qui ont été précipités dans le feu (lequel n’est qu’un support de manifestation de la Science divine). Et qu’on n’aille pas s’imaginer que cette doctrine est exclusivement professée par les « gens du dévoilement » (ahl al-kashf), et que de tels propos viennent contredire le consensus de la communauté [sur la perpétuité du châtiment], car nous allons le voir, [même chez les docteurs de la Loi] il n’y a pas unanimité en la matière. Sharaf al-Dîn al-Munâwî, rapporte ces propos du traditionniste et shaykh al-Islâm Ibn Taymiyya : « Certaines traditions prophétiques venant de transmetteurs [aussi fiables] qu’Ibn ‘Umar, Ibn Mas’ûd, Abû Sa’îd [al-Khudrî] et bien d’autres encore tendent à indiquer qu’en dernier ressort, toutes les créatures seront sauvées du feu, que celui-ci serait anéanti et avec lui, les tourments qui y sont infligés. De son côté, ‘Abd ibn Hamîd nous rapporte la tradition suivante par 2 chaînes de transmetteurs tous fiables : « Quand bien même les gens du feu y demeureraient aussi longtemps qu’il y a de grains de sable dans un tas immense, viendra cependant un jour où ils en sortiront ». De nombreux imâms ont fait usage de ce hadîth sans jamais remettre en cause sa validité (…) ».
L’exégète et théologien Abd al-Razzâq al-Qâshânî dans son Tafsîr commente aussi des versets du Qur’ân en ce sens, notamment en parlant des communautés chrétiennes et juives au Paradis, mais dont les degrés supérieurs sont accordés à la Communauté muhammadienne avant tout.
Concernant les développements doctrinaux au sujet de cette épineuse question, voir Ibn Taymiyya et Ibn al-Qayyim dans leurs différents écrits tels que Voir qâla bi fanâ’ il-janna wa an-nâr, wa Bayân ul-aqwâl fî dhâlik (p. 52), Mukhtassar as-Sawâ’iq il-mursala (p. 364), Hâdi-l-arwâh (p. 504 et pp.643-646), Shifâ’ ul-‘alîl (pp. 646-654) où leur argumentation est évoquée.
Ibn al Qayyim dans Hâdi-l-arwâh (p. 528) conclut finalement en disant : « Si on me demande : « Où donc vous arrêtez-vous au sujet de cette question, qui est plus importante que ce monde lui-même ? Je dirai : « Je m’arrête à ce sujet à (ce que contient) la Parole d’Allâh, Béni et Elevé : « Ton Seigneur est faiseur de ce qu’Il veut ». C’est là que s’est arrêté le Chef des Croyants Alî ibn Abî Tâlib (qu’Allâh l’agrée) : il a parlé de l’admission des Gens du Paradis au Paradis, et des Gens de l’Enfer en Enfer, ainsi que ce que ceux-ci et ceux-là y vivront, puis a dit : « Ensuite Allâh fera ce qu’Il veut ». C’est même plutôt là que toutes les créatures s’arrêtent. Ce que nous avons dit au sujet de cette question, et même au sujet de tout ce que contient (mon) livre (que voici), et qui est correct, cela provient de la faveur d’Allâh, Pur et Elevé, et c’est Lui qui m’en a fait la faveur. Et ce que nous avons dit d’erroné, cela provient de moi et du Shaytan ; Allâh et Son Messager en sont innocents. Et Allâh est auprès de la langue, du coeur et de l’intention de chaque personne qui prononce des paroles. Allâh sait mieux ».
De même, selon une parole attribuée à l’imâm ‘Alî : « Quand bien même les gens du feu seront pardonnés, n’auraient-ils par raté le privilège de faire le bien ici-bas ? » (ropos rapporté entre autres par l’imâm Al-Haddâd dans an-Nasaih al-Diniyyah wal-Wasaya al-Imaniyyah).
Allâh dit : « Et le jour où Il les rassemblera tous : « Ô communauté des jinns, vous avez trop abusé des humains ». Et leurs alliés parmi les humains diront : « Ô notre Seigneur, nous avons profité les uns des autres, et nous avons atteint le terme que Tu avais fixé pour nous » Il leur dira : « l’Enfer est votre demeure, pour y rester indéfiniment, sauf si Allâh en décide autrement » Vraiment ton Seigneur est Sage et Omniscient » (Qur’ân 6, 128). Les versets qui suivent précisent qu’il s’agit là de jinns et humains injustes (qui avaient commis du kufr) qui connaissaient la vérité manifestée par les prophètes, mais qui avaient décidé de ne pas les suivre.
« Ceux qui sont damnés seront dans le Feu où ils ont des soupirs et des sanglots. Pour y demeurer indéfiniment tant que dureront les cieux et la terre – à moins que ton Seigneur décide autrement – car ton Seigneur fait absolument tout ce qu’Il veut. Et quant aux bienheureux, ils seront au Paradis, pour y demeurer indéfiniment tant que dureront les cieux et la terre – à moins que ton Seigneur n’en décide autrement – c’est là un don qui n’est jamais interrompu » (Qur’ân 11, 106-108).
« Vraiment, la Géhenne (l’Enfer) se tiendra en embuscade, lieu de retour pour les transgresseurs (excessifs), séjournant des âges en elle (ahqâban) » (Qur’ân 78, 21-23).
En parlant de gens qui avaient divinisé Jésus (‘alayhî salâm) et sa mère Maryam (‘alayhâ salâm), Allâh dit : « « Ô Jésus (Issâ) le fils de Marie (Maryam) ! Est-ce toi qui as dit aux humains : prenez-moi et ma mère comme deux divinités (idoles) en dehors d’Allâh ? ». Il dit : « Immersion insondable en Toi ! Je ne dis pas ce qui ne m’apparait pas être vérité ! Si je l’avais dit, Tu l’aurais su. Tu sais ce qui est en moi (en mon âme) et je ne sais pas ce qui est en Toi. Vraiment, Toi, l’infiniment Connaisseur des mystères ! Je ne leur ai dit que ce que Tu m’as ordonné à ce sujet : « Adorez Allâh, mon Enseigneur et votre Enseigneur ! Or, je me suis trouvé témoin à leur égard tant que j’ai continué à être parmi eux. Alors, quand Tu m’as rappelé, Tu as été leur Vigile. Toi, Témoin sur toute chose ! Si Tu les corriges (châties), ce sont Tes serviteurs. Et si Tu leur pardonnes, Tu es, en vérité, le Tout-Puissant, le Sage ! ». Voici le Jour où, aux véridiques profite leur véridicité. A eux des Jardins sous lesquels coulent des ruisseaux. Ils y demeurent pour toujours. Allâh est satisfait d’eux et ils sont satisfaits de Lui. Voilà la réussite sans commune mesure ! ». A Allâh la Royauté des cieux et sur la terre, et ce qui est en eux ! Lui, Puissant sur toute chose » (Qur’ân 5, 116-120). C’est ainsi que la Sûrate 5 se clôture. Il est question ici de ceux qui ont commis le shirk (idolâtrie), et de ceux qui ont été véridiques, Allâh affirme que ceux qui ont commis l’idolâtrie alors qu’ils n’avaient pas d’excuse pourront être corrigés comme être pardonnés, car Allâh est Puissant et Maître de et sur toute chose. Quant aux véridiques, Il leur promet le Paradis et Ses « trésors célestes » sans interruption. Il n’est pas non plus question ici, même dans le cadre d’une correction post-mortem, d’un « temps indéfini » dans la correction.
« Ils prétendent : Le feu ne nous touchera qu’un nombre limité de jours. Réponds : Auriez-vous donc passé un pacte avec Allâh ? Or, Allâh ne violera jamais Son pacte ! Ou bien dites-vous d’Allâh ce dont vous n’avez aucune connaissance ? Il n’en est point ainsi, bien au contraire, et celui qui aura commis un mal et que ses fautes cerneront… ceux-là sont les hôtes du Feu et ils y demeureront indéfiniment. Et quant à ceux qui auront cru et œuvré en bien… ceux-là sont les hôtes du Paradis et ils y demeureront indéfiniment » (Qur’ân 2, 80-82).
« Allâh fait ce qu’Il veut » (Qur’ân 3, 40).
« [Et les gens du Livre disent à leurs coreligionnaires]: « Ne croyez que ceux qui suivent votre religion…». Dis: « La vraie direction est la direction d’Allâh » – [et ils disent encore : « Vous ne devez ni approuver ni reconnaître] que quelqu’un d’autre que vous puisse recevoir comme ce que vous avez reçu de sorte qu’ils (les musulmans) ne puissent argumenter contre vous auprès de votre Seigneur ». Dis-[leur] : « En vérité, la grâce est en la « main » d’Allâh. Il la donne à qui Il veut. La grâce d’Allâh est immense et Il est Omniscient. Il réserve à qui Il veut sa miséricorde » (Qur’ân 3, 73).
« A Allâh appartient tout ce qui est dans les cieux et sur la terre. Il pardonne à qui Il veut, et Il châtie qui Il veut… Et Allâh est Pardonneur et Miséricordieux » (Qur’ân 3, 129).
« Ma Miséricorde (et Mon Amour Rayonnant) embrassent et englobent toute chose » (Qur’ân 7, 156).
Il y a donc une Miséricorde universelle pour tous les êtres, et une Miséricorde spécifique réservée à Ses adorateurs bienfaisants : « Je la prescrirai (Ma Miséricorde ; davantage) à ceux qui (Me) craignent, acquittent la Zakât, et ont foi en Nos signes, Ceux qui suivent le Messager, le Prophète illettré qu’ils trouvent écrit (mentionné) chez eux dans la Torah et l’Evangile. Il leur ordonne le convenable, leur défend le blâmable, leur rend licites les bonnes choses, leur interdit les mauvaises, et leur ôte le fardeau et les jougs qui étaient sur eux. Ceux qui croiront en lui, le soutiendront, lui porteront secours et suivront la lumière descendue avec lui ; ceux-là seront les gagnants. Dis : « Ô humains ! Je suis pour vous tous le Messager d’Allâh, à Qui appartient la royauté des cieux et de la terre. Pas de divinité à part Lui. Il donne la vie et Il donne la mort. Croyez donc en Allâh, en Son messager, le Prophète illettré qui croit en Allâh et en Ses paroles. Et suivez-le afin que vous soyez bien guidés » (Qur’ân 7, 156-158).
Ibn Al-Qayyim a dit dans Bada’i Al-Fawa’id : « « Ar-Rahmân » fait référence à un Attribut qui existe en Lui, Transcendant soit-Il, et « Ar-Rahîm » réfère à Son interaction avec les bénéficiaires de la miséricorde. Si tu veux comprendre cela, médite attentivement Ses paroles : « Il est Miséricordieux (rahiman) envers les croyants » (Qur’ân 33, 43).
« Le Tout-Miséricordieux (Ar-Rahmân) s’est « istawâ » (établi) sur Le Trône » (Qur’ân 20, 5).
À aucun moment il n’est mentionné qu’Il est « Rahmân » avec eux. Cela prouve que « Ar-Rahmân » réfère à Celui qui est décrit par la miséricorde alors que « Ar-Rahîm » est Celui qui fait preuve de miséricorde ».
Il y a donc d’une part une Miséricorde universelle, qui embrasse toute chose, les humains (incroyants et croyants), les animaux et les plantes, ici-bas comme dans l’Au-delà, qui leur a donné vie, subsistance, grâces et bénédictions. Et d’autre part, il y a Sa Miséricorde particulière (Ar-Rahîm) qui n’est accordée qu’à certaines de Ses créatures, dont les croyants qui ont œuvré dans le bien et se sont maintenus dans Son Sentier et dans Son Rappel. Par ailleurs, le Nom Ar-Rahmân (Le Tout-Miséricordieux, le Tout-Rayonnant d’Amour), est un nom spécifique à Allâh, et nul être autre que Lui ne peut le porter, et ce contrairement à d’autres noms qui sont communiqués à Ses êtres selon une modalité et un degré qui leurs sont propres mais inférieurs, sachant que Seul Allâh possède la perfection en propre. Le nom ar-Rahim peut se manifester en effet chez des êtres pourvus de miséricorde, tandis que Celui qui embrasse tout par Sa Miséricorde ne peut être qu’Allâh, et donc Ar-Rahmân ne convient qu’à Lui seul. Cela est prouvé par d’autres versets du Qur’ân, dont ceux-ci :
« Dis : « Invoquez Allâh, ou invoquez le Tout-Miséricordieux (le Tout-Rayonnant d’Amour). Quel que soit le nom par lequel vous L’appelez, Il a les plus beaux Noms » » (Qur’ân 17, 110).
« Et demande à ceux de Nos messagers que Nous avons envoyés avant toi, si Nous avons institué, en dehors du Tout-Miséricordieux (le Tout-Rayonnant d’Amour), des divinités (illusoires) à adorer ? » (Qur’ân 43, 45).
L’imâm At-Tabarî dans son Tafsîr affirme également que le Nom Ar-Rahmân englobe toute la Création (par Son Nom ; Le Tout-Rayonnant d’Amour, Le Tout-Miséricordieux) tandis que Son Nom Ar-Rahîm est un Amour, une Miséricorde, et une Bienveillance qui ne concernent que Ses serviteurs croyants. Il cite en effet des traditions puis les commente dans son Tafsîr dans le chapitre dédié à la Basmala : « Al-‘Arzamî : « Ar-Rahmân exprime et manifeste la miséricorde envers toutes les créatures, et Ar-Rahîm exprime et manifeste la miséricorde envers les croyants ».
Abû Sa’îd al-Khudrî rapporte que le Messager d’Allâh a dit : « Jésus, le fils de Maryam, a dit : « Ar-Rahmân est le Miséricordieux dans l’au-delà ainsi que dans ce monde (terrestre) ; Ar-Râhîm est le Miséricordieux dans l’autre monde ».
Il n’y a aucune raison de supposer que l’une de ces interprétations est plus correcte que l’autre. Allâh, en tant qu’Ar-Rahmân, englobe et embrasse toutes Ses créatures dans une Miséricorde générale, alors que, en tant qu’Ar-Rahîm, Il dirige Sa Miséricorde spécifique vers certaines de Ses créatures, soit dans chaque état, soit dans certains seulement, soit dans ce monde, soit dans l’autre (l’Au-delà) ou dans les deux (…). Notre Seigneur, exaltée est Sa louange, est Rahmân envers toutes Ses créatures dans ce monde et dans l’autre, et Il est Rahîm spécifiquement envers Ses croyants dans ce monde et dans l’autre. Il est Rahmân dans ce monde comme nous l’avons déjà mentionné, et comme Il L’a Lui-même dit : « Si vous comptez les Bienfaits et les Bénédictions d’Allâh, vous ne pourrez jamais les dénombrer (totalement) » (Qur’ân 14, 34 et 16, 18). Et Il est Rahmân dans l’autre monde (l’Au-delà) par Son traitement équitable pour tous avec Sa Justice et Son Jugement (sans faille) : Il ne fait pas pencher injustement la balance contre une seule de Ses créatures – aucune créature ne sera ainsi lésée injustement – même par le poids d’un grain de poussière [par quoi que ce soit donc]. Chaque âme reçoit pleinement ce qu’elle mérite. Et nous avons déjà décrit cette part (et dimension) de Sa Miséricorde pour laquelle Il distingue les croyants de ce monde, par laquelle Il est Rahîm pour eux en cela, comme Il – Exaltée soit Sa mention – l’a dit : « Il est Très-Miséricordieux (Rahîm) envers les croyants » (Qur’ân 33, 43) ».
Quant au verset souvent cité par ceux qui pensent qu’aucune possibilité de « salvation » n’existerait pour les non-musulmans de façon générale : « Et la demande de pardon que Ibrâhîm (Abraham) fit en faveur de son père n’était due qu’à une promesse qu’il lui avait faite. Puis, lorsqu’il lui devint clair qu’il était un ennemi d’Allâh, il se désavoua de lui (son père) » (Qur’ân 9, 114). Soulignons que ce qui est intéressant ici, est qu’Allâh précise le mécréant qui s’affiche clairement comme un ennemi d’Allâh et de ce qu’Il a révélé, donc pas le mécréant pacifique ou ignorant concernant l’Islam et les musulmans. Par ailleurs dans la Sûrah n°3 Al-Imrân, Allâh distingue clairement entre les pieux et les bienfaisants parmi les Gens du Livre, des hypocrites, des criminels et de ceux qui falsifient sciemment leur Livre sacré, qui détournent les gens de la Vérité et du Sentier divin (la justice, la piété, la bienfaisance, etc.).
Quant aux gens du Livre, Allâh rappelle ceci : « Mais ils ne sont pas tous pareils. Il est, parmi les gens du Livre, une communauté droite qui, aux heures de la nuit, récite les versets d’Allâh (la Révélation qui leur avait été manifestée à leur époque) en se prosternant. Ils croient en Allâh et au Jour dernier, ordonnent le convenable, interdisent le blâmable et concourent aux bonnes œuvres. Ceux-là sont parmi les gens de bien. Et quelque bien qu’ils fassent, il ne leur sera pas dénié. Car Allâh connaît bien les pieux (Muttaqin) » (Qur’ân 3, 113-115).
« Il y a certes, parmi les gens du Livre ceux qui croient en Allâh et en ce qu’on a fait descendre vers vous et en ce qu’on a fait descendre vers eux. Ils sont humbles envers Allâh, et ne vendent point les versets d’Allâh à vil prix. Voilà ceux dont la récompense est auprès de leur Seigneur. En vérité, Allâh est prompt à faire les comptes » (Qur’ân 3, 199).
« S’ils avaient appliqué la Torah et l’Evangile et ce qui est descendu sur eux de la part de leur Seigneur, ils auraient certainement joui de ce qui est au-dessus d’eux et de ce qui est sous leurs pieds. Il y a parmi eux un groupe qui agit avec droiture ; mais pour beaucoup d’entre eux, comme est mauvais ce qu’ils font ! » (Qur’ân 5, 66). L’histoire et l’actualité démontrent la véracité de ce verset, à savoir que parmi les Gens du Livre, beaucoup agirent avec perfidie et injustice, tandis que d’autres faisaient honneur à leur religion, et agirent avec droiture et piété, suscitant ainsi l’admiration et le respect pour leurs actes et leur personnalité.
« Certes, ceux qui ont cru, ceux qui se sont judaïsés, les Nazaréens, et les sabéens, quiconque a cru en Allâh au Jour dernier et agit avec intégrité (droiture et piété, accomplissant de bonnes oeuvres), sera récompensé par son Seigneur ; il n’éprouvera aucune crainte et il ne sera jamais affligé » (Qur’ân 2, 62).
« Ceux qui ont cru, ceux qui se sont judaïsés, les Sabéens, et les Chrétiens, ceux parmi eux qui croient en Allâh, au Jour dernier et qui agissent avec intégrité (droiture et piété, accomplissant de bonnes oeuvres), nulle crainte sur eux, et ils ne seront point affligés » (Qur’ân 5, 69).
Les deux précédents versets font l’objet de divergences. Pour les uns, ils ne concernent que les croyants sincères des autres communautés avant l’avènement de l’Islam muhammadien, tandis que pour les autres, cela peut encore concerner les gens du Livre de notre époque, parmi ceux qui sont sincères et pieux dans leur engagement avec Allâh, et qui ne rejettent pas sciemment l’Islam (le Qur’ân et le Prophète Muhammad) et qui ont encore une certaine conscience du Tawhîd malgré leurs sévères déviances doctrinales et/ou cultuelles. Le contexte des versets et la structure linguistique permettent en effet de donner un certain appui à cette interprétation, wa Allâhu a’lam. D’ailleurs, le verset qui suit (Qur’ân 5, 70) précise : « Nous avons certes conclu l’Alliance avec les enfants d’Israîl et Nous avons envoyé des Messagers jusqu’à eux, Chaque fois qu’un messager est venu à eux, avec ce qu’ils ne désiraient point, ils accusaient certains de mensonge et en tuaient d’autres ».
Mais Allâh précise de toute façon ceci : « Certes, ceux qui ont cru, les Juifs, les Sabéens, les Nazaréens, les Mages (zoroastriens) et ceux qui donnent à Allâh des associés, Allâh tranchera entre eux le jour du Jugement, car Allâh est certes témoin de toute chose » (Qur’ân 22, 17).
« A chacun une orientation vers laquelle il se tourne. Rivalisez donc dans les bonnes œuvres. Où que vous soyez, Allâh vous ramènera tous vers Lui, car Allâh est, certes Omnipotent » (Qur’ân 2, 148).
« Et sur toi (Muhammad) Nous avons fait descendre le Livre avec la vérité, pour confirmer le Livre qui était là avant lui et pour prévaloir sur lui. Juge donc parmi eux d’après ce qu’Allâh a fait descendre. Ne suis pas leurs passions, loin de la vérité qui t’est venue. A chacun de vous Nous avons assigné une législation et un plan à suivre. Si Allâh avait voulu, certes Il aurait fait de vous tous une seule communauté. Mais Il veut vous éprouver en ce qu’Il vous donne. Concurrencez donc dans les bonnes cœvres. C’est vers Allâh qu’est votre retour à tous ; alors Il vous informera de ce en quoi vous divergiez » (Qur’ân 5, 48).
« O humains ! Nous vous avons créés d’un mâle et d’une femelle, et Nous avons fait de vous des nations et des tribus, pour que vous vous entre-connaissiez. Le plus noble d’entre vous, auprès d’Allâh, est le plus pieux. Allâh est certes Omniscient et Grand Connaisseur » (Qur’ân 49, 13).
Au final, c’est Allâh qui tranchera et jugera nos différends, mais il nous est demandé simplement de placer notre confiance en Lui, de L’adorer, d’agir avec droiture et bonté, et d’accomplir les bonnes œuvres. Allâh se chargera du reste, selon Son bon vouloir, en toute sagesse et en toute justice.
Rejeter la Vérité quand elle se manifeste, c’est être privé d’une partie de Ses Bénédictions et de Ses Grâces, et c’est manquer d’adab envers Allâh et Ses Bienfaits envers nous, car la Vérité libère, et elle comporte lumières et grâces sanctifiantes pour l’âme. Concernant l’avis selon lequel la Miséricorde divine englobera aussi les (ou des) incroyants, il y a l’idée de « fanâ’ an-nâr » – reprise notamment par Ibn Taymiyya et Ibn al-Qayyîm qui va dans le sens des ahadîths enseignant que le Paradis est le lieu de la manifestation de la Miséricorde divine (comme Don ininterrompu) en lien avec l’essence, et le Feu (lieu de la manifestation de) la Rigueur divine en lien avec « l’accident », ainsi que le hadîth authentique « Ma Miséricorde (et Mon Amour rayonnant) dépassent (surpassent, englobent, dominent et précèdent) Ma Rigueur (Colère) » (Rapporté notamment par Al-Bukharî dans son Sahîh n°3194, 7404 et 7453, par Muslim dans son Sahîh n°2751, par An-Nawawî dans Riyâd As-Salihîn n°419 qui relate les différentes variantes, par Ibn Mâjah dans ses Sunân n°189 et 4295, par At-Tirmidhî dans ses Sunân n°3543 et d’autres).
Le Prophète Muhammad (ﷺ) a dit : « Le Qur’ân possède un (aspect/dimension) extérieur, un (aspect/dimension) intérieur, [Il] détermine des principes et ouvre sur l’universel ». (Rapporté par At-Tabarânî, ainsi que par l’auteur du Tâj al-tafâsîr et par al-Hindî dans Kanz al-Ummal n°3086).
(2) Passer le Salâm à un non-musulman vivant est permis selon l’Islam et plusieurs Compagnons et Tabi’in, et aucune règle ne l’interdit pour le non-musulman (défunt, près de sa tombe) dont on sait qu’il n’a pas été un ennemi de l’Islam.
« Les serviteurs du Tout-Miséricordieux sont ceux qui marchent humblement sur terre, et qui, lorsque les ignorants s’adressent à eux, disent : « Paix » » (Qur’ân 25, 63). L’Imâm Ibn ‘Abd al-Barr a dit dans son At-Tamhîd (17/91) : « Il est rapporté d’Ibn Mas’ûd, Abû ad-Dardâ’ et Fadalah Ibn ‘Ubayd qu’ils prenaient l’initiative de passer le salâm aux citoyens non-musulmans (Ahl ul dhimma). Ibn Mas’ûd a un jour écrit a quelqu’un des gens du Livre et il a dit : salâm ‘alayk (paix sur toi) ».
Toujours dans le même ouvrage (17/92) : « Muhammad ibn Ka’b a dit : « Quant à moi, je ne vois aucun mal à les saluer d’abord avec la paix (as-Salâm) ». On lui demanda : « Pourquoi donc ? ». Ibn Ka’b a dit : « Allâh a dit : « Pardonnez-leur et dites des paroles de paix, car ils le sauront bientôt » (Qur’ân 43, 89) ». Al-Qurtûbî a relaté dans son Tafsîr al-Jâmi’ li-Aḥkâm al-Qur’ân (19/41) : « Il a été dit à Sufyân Ibn ‘Uyayna : « Donnez-vous la permission de saluer un incroyant avec la paix (le Salâm) ? Sufyân a dit : « Oui, car Allâh a dit : « Allâh ne vous interdit pas de ceux qui ne vous combattent pas dans la religion ni ne vous expulse de vos maisons que vous soyez juste et généreux envers eux. En vérité, Allâh aime ceux qui sont généreux et équitables » (60, 8). Sufyân a ajouté : « Allâh a dit : « Il vous est venu le meilleur exemple en Ibrâhîm » (60, 4) et « Ibrâhîm a dit à son père (non-musulman) : Que la paix soit sur vous » (19, 47) » ».
C’est-à-dire que selon Sufyân Ibn ‘Uyayna (107 H/725 – 198 H/814), un salaf fondateur d’une école juridique et compagnon de Sufyân at-Thawrî, ne voyait pas du tout ce verset comme étant abrogé, et que la règle générale était la paix avec les citoyens non-musulmans, dans les relations sociales et familiales comme dans les salutations.
Cependant Al-Qurtûbî cite le hadith de Abû Hurayra qui l’interdit (en disant que c’est général) et que le hadith de Ussâma Ibn Zayd qui l’autorise – le Prophète (ﷺ) ayant passé le salâm général à un groupe où des musulmans étaient mélangés avec des juifs et des idolâtres – serait spécifique selon eux) suivant en cela At-Tabarî qui n’y voyait pas de contradiction. Or, c’est plutôt l’inverse, quoi que cela dépend de la situation, à savoir que la règle générale est celle de la permission, et que l’interdiction est spécifique – le hadîth l’interdisant parlant d’un contexte où des individus non-musulmans souhaitaient la mort (sur) du Prophète (ﷺ) et des croyants musulmans et qu’il fallait que les musulmans agissent avec dignité et « fierté » (en levant la tête sans se laisser marcher sur les pieds ou être humiliés, même en marchant dans une rue étroite).
Le Shaykh Ibn al-Qayyim dans Zâd al-Ma’âd (2/388) a dit : « Un groupe d’érudits a déclaré qu’il est permis d’initier le salut de paix avec des non-musulmans si cela sert un objectif ou un besoin bénéfique, ou s’il craint d’être blessé par eux, ou s’il a des relations familiales avec eux, ou pour une autre raison pour laquelle elle est requise. Cela a été rapporté par Ibrahim al-Nakhâ’î et ‘Alqamah ».
L’imâm Ibn Hajar a dit dans Fatḥ al-Bârî (11/40) : « Un groupe d’érudits a déclaré qu’il est permis d’initier le salut de paix (Salâm) avec des non-musulmans ».
Allâh a dit : « Lorsque vous êtes accueilli avec une salutation, saluez d’une façon meilleure ; ou bien rendez-la (simplement de la même manière). En vérité, Allâh tient compte de toutes choses » (Qur’ân 4, 86) et « Quand ils sont entrés chez (le Prophète) Ibrâhîm et ont dit : « Nous te saluons avec la salutation de la paix ». Il répondit : « Je vous salue avec la paix, visiteurs inconnus » (Qur’ân 51, 25). L’exégète Ibn Kathir a rapporté dans son Tafsîr (4/86) : « Hassân al-Basri, qu’Allâh lui fasse miséricorde, a dit : Saluer avec la salutation de la paix est volontaire, mais y répondre est obligatoire ». Puis Ibn Kathîr dit : « Cette déclaration est l’opinion unanime des savants, que répondre à la salutation de la paix est une obligation pour quiconque est accueilli avec la paix. C’est un péché de ne pas le faire, car cela contredit le commandement d’Alâah quand Il a dit : « Lorsque vous êtes accueilli avec une salutation, saluez d’une façon meilleure ; ou bien rendez-la (simplement de la même manière) » (Qur’ân 4, 86).
Tout cela est conforme au Qur’ân et au Nom divin As-Salâm (qui est général), qui ne peut en aucun cas être abrogé ou limité par des interprétations faibles ou douteuses.
Cela est conforme aussi à la Sunnah, comme dans le hadîth rapporté par At-Tirmidhî dans ses Sunân (n°2485 avec une chaine sahîh) que d’après ‘Abdallâh Ibn Salam : « Lorsque le Prophète (ﷺ) venait d’arriver à Médine, les gens se sont précipités vers lui et j’étais parmi ceux qui sont allés vers lui. Lorsque j’ai médité sur son visage j’ai vu qu’il ne s’agissait pas du visage d’un menteur. La première chose que j’ai entendu de ses paroles est : « Ô les gens ! Propagez la paix (le salâm), offrez à manger (aux gens), liez (et préservez) les liens de parenté et priez la nuit pendant que les gens dorment, vous rentrerez dans le Paradis en paix ». A ce moment-là, il y avait encore des non-musulmans (juifs et idolâtres notamment) à Médine.
Ibn Hibbân relate quant à lui un autre hadith dans son Sahîh (n°6801 et 6802) et At-Tabarânî dans Al-Mu’jam Al-Kabîr (n°17823), où s’adressant à ses compagnons qui seront encore en vie après sa mort et qui conquerront de nouvelles contrées, le Messager d’Allâh (ﷺ) leur dit : « Il se peut que vous fassiez la conquête de grandes cités après mon départ (vers l’Au-delà) et que vous vous asseyiez ensemble dans leurs marchés. Si cela arrive, retournez les salutations de paix, baissez vos regards (par chasteté et pudeur), guidez les aveugles et assistez les opprimés ».
Ibn Mâjah dans ses Sunân (n°3694, sahîh) relate également un hadîth selon ‘Abdullah Ibn ‘Amr dans lequel le Prophète (ﷺ) a dit : « Adorez le Tout Miséricordieux (Allâh) et répandez la paix ».
Le Prophète Muhammad (ﷺ) a dit : « Le Qur’ân possède un (aspect/dimension) extérieur, un (aspect/dimension) intérieur, [Il] détermine des principes et ouvre sur l’universel ».
(Rapporté par At-Tabarânî, ainsi que par l’auteur du Tâj al-tafâsîr et par al-Hindî dans Kanz al-Ummal n°3086).
« Allâh appelle à la demeure de la paix et guide qui Il veut vers un droit chemin » (Qur’ân 10, 25).
On rapporte aussi l’avis de la permission de prier pour un non-musulman (qui n’a pas été un ennemi de l’Islam ni de la Foi en général) de plusieurs savants de renom, dont, parmi les Shafi’ites d’al-Khatîb al-Shirbînî (m. 977 H), al-Qalyûbî (m. 1069 H), al-Shibrâmullasï (m. 1087 H), al-Barmâwî (m. 1106 H), al-Jamâl (m. 1204 H), al-Bajîrmî (m. 1221H) et d’autres, soit aussi bien avant l’avènement du monde moderne que jusqu’à aujourd’hui.
L’unanimité invoquée par certains savants du passé n’était pas absolue, et il s’agissait plutôt d’un avis (majoritaire selon les régions et les époques) de précaution et de prudence (en invoquant aussi des versets du Qur’ân interprétés dans leur sens), mais pas d’un consensus réel.
Tant qu’ils sont encore en vie, l’avis majoritaire est que cela est évidemment permis selon le Qur’ân et la Sunnah. L’imâm An-Nawawî dit dans al-Adhkar qu’il est permis de prier pour que les non-musulmans soient guidés à l’Islam (dans la meilleure des voies), pour leur bien-être, la santé et les autres choses bénéfiques et utiles, en raison du hadith d’Anas Ibn Mâlik relatant que : « Le Prophète demanda de l’eau à une personne, et un Juif lui en donna, alors le Prophète lui dit : « Qu’Allâh te rende beau », de sorte que l’homme ne voit pas les cheveux gris jusqu’à sa mort ».
Concernant les Hanafites, il y a la position suivante rapportée notamment par le Shaykh Faraz Rabbani dans sa fatwa Can We Pray for Non-Muslims Who Passed Away? du 23 mai 2011 (https://seekersguidance.org/answers/hanafi-fiqh/can-we-pray-for-non-muslims-who-passed-away/) : « Quant à faire du’a (pour les non-musulmans défunts) qu’Allâh leur donne ce qui est le mieux pour eux, ou ce qu’ils méritent, même après la mort, tout en reléguant leurs affaires à Allâh, il n’y a rien de mal à cela ».
Il ne s’agit pas d’une du’a cependant visant à demander à Allah qu’Il pardonne leur mécréance – mais qu’Il leur accorde ce qui convient le mieux pour eux ou ce qu’ils méritent de la part du Seigneur des mondes, tout en remettant leur affaire et leur sort à Allâh. Par contre il rappelle aussi l’avis majoritaire voulant que les non-musulmans n’ayant pas connu l’existence de l’Islam (ses piliers, Sa Révélation, ses valeurs, etc.) ne seront pas punis pour une chose qu’ils ignoraient. D’autres savants, comme l’imâm Abû Hâmid al-Ghazâlî dans son Faysal al-tafriqah, précise que cela peut aussi concerner ceux qui n’ont connu l’Islam que par un prisme déformant jusqu’à ses piliers et ses finalités. L’Imâm Abû `Abd Allâh al-Sanûsî dans son Sharḥ al-Muqaddimah d’al-Sanûsî a commenté : « Ce que je crois c’est qu’al-Ghazâlî a simplement mentionné dans al-Tafriqah une excuse pour les femmes, les simplets et la vie de ceux dont les terres sont éloignées des terres d’Islâm et de ceux dont l’invitation du Prophète n’a pas du tout atteint, ou bien d’une manière distordue ; tandis que ceux dont les terres sont proches de celles des musulmans ou pour qui l’invitation du Prophète leur a été transmis dans sa forme correcte et sont capables d’accéder à ses connaissances par le biais des musulmans, al-Ghazâlî témoigne de leur mécréance et le fait qu’ils n’aient aucune excuse légitime lors du Jugement de l’au-delà. Al-Ghazâlî est ainsi loin des opinions des innovateurs qui s’opposent au consensus des gens de vérité et Allâh le plus grand, sait mieux », et cela concernant l’aspect exotérique de la Loi et de la question.
Al-Ghazâlî dit en effet dans son Faysal al-tafriqa bayna al-islâm wa-l-zandaqa (pp.39-41) : « J’affirme donc l’incroyance, c’est taxer de mensonge le Messager (takdibu al-rasul), qu’Allâh le bénisse, au sujet de quelque chose qu’il a révélé (fi shay’in mimma ja’a bihi) ; au contraire, la foi est l’attestation de véridicité au sujet de tout ce qu’il a révélé (al-imân tasdiquhu fi jami’i ma ja’a bihi). Par conséquent, le Juif et le Chrétien sont incroyants parce qu’ils accusent le Messager, qu’Allâh le bénisse, de mensonge (…) L’incroyance est définie par un statut légal (hukm shar`i) comme l’esclavage et la liberté, par exemple ; statut dont la signification est de rendre licite la mise à mort du coupable (ibahatu al-dami) ; elle expose aussi au châtiment du feu indéfiniment. La définition de l’incroyance est donc légale ; soit à l’aide d’un texte juridique, soit par raisonnement analogique à partir d’un texte. Or, des textes juridiques concernant les Juifs et les Chrétiens existent (sur leur mécréance) ». Et dans son Kitâb at-Tawba (4/30) par rapport aux non-musulmans qui seront excusés le Jour du Jugement : « (…) il s’agit probablement (yushbihu) des aliénés (majanîn), des jeunes enfants de mécréants/non-musulmans (al-sabyan min al-kuffâr), des invalides (ma`tuhin) et de ceux à qui n’est pas parvenu l’appel à l’Islâm (ad-da`wa) dans les contrées reculées, ayant vécu « simplement » (comme des simplets), incultes, n’ayant ni connaissance (ma`rifa), ni reniement (juhud), ni acte d’obéissance (ta`a), ni acte de désobéissance (jinayya) qui les éloigne. Ils ne sont ni des gens du Paradis, ni des gens de l’Enfer. Au contraire, ils se situent entre le Paradis et l’Enfer, à une station placée entre les 2 stations que la Loi désigne par al-A`raf ».
Enfin, As-Suyûtî dans son ouvrage sur les parents du Prophète, cite aussi les ahadiths stipulant que les enfants prépubères, les handicapés, les aveugles et les déments seront excusés aussi. Par exemple ces ahadiths : « 4 (catégories) feront l’objet d’un examen au Jour du Jugement : le sourd, l’aliéné, le vieillard sénile et celui décédé durant la Fatra. Le sourd dira : « Seigneur, certes l’Islâm est venu, mais je n’entendais absolument rien ». L’aliéné dira : « Seigneur, certes l’Islâm est venu, mais les enfants se jouaient de moi en me souillant avec de la fiente ». Le vieillard dira : « Seigneur, certes l’Islâm est venu, mais je ne comprenais plus rien ». Celui qui est décédé durant la Fatra dira : « Seigneur, aucun de Tes Messagers n’est venu à moi ». Chacun devra alors jurer qu’il obéira à tout ce qu’il lui sera ordonné. Allâh leur fera alors savoir qu’Il leur ordonne d’entrer en Enfer ! À ceux qui auront obéi, ses flammes seront fraîches et salutaires. Quant à ceux qui s’y seront refusés, ils y seront conduits de force ». (Rapporté par As-Suyûtî dans Masalik al-Hunafa, Ahmad dans son Musnad, Al-Bayhaqî dans Al I’tiqad, Ibn Kathîr dans son Tafsîr 5/58 qui dit que plusieurs ahadiths à ce sujet sont sahîh et bons et que les faibles sont soutenus par les ceux qui sont sahîh, par Ishaq ibn Rahwiyah et d’autres, sous l’autorité de Aswad Ibn Sarî’ notamment. Al-Bazzâr dans son Musnad en cite aussi d’après Anas et Abû Sâ’îd, et At-Tabarânî d’après Mû’adh Ibn Jabal).
Et dans un autre hadîth : « Au Jour du Jugement, Allâh réunira les gens nés dans la Fatra, l’aliéné, le sourd-muet et les vieillards décédés avant l’avènement de l’Islam. Un émissaire leur sera envoyé et leur dira : « Entrez dans le Feu ! ». Ils diront : « Comment pourrait-il en être ainsi alors qu’aucun messager n’est venu à nous ? ». Le Prophète Muhammad a dit : « Par Allâh ! S’ils y étaient entrés, ses flammes auraient été fraîches et salutaires ». Un (second) émissaire leur sera envoyé. Il sera alors obéi par ceux d’entre eux (prédestinés) à le faire ». (Rapporté par ‘Abd ar-Razzâq dans son Musannaf, Ibn Jarîr, Ibn Abî Hâtim et Ibn Al Mundhir sous l’autorité Abû Hurayra). Ces ahadiths sont conformes aussi au Qur’ân quand il est dit qu’Allâh ne corrige pas un peuple (ou des individus) tant que les preuves et les avertissements explicites (qu’ils sont capables de comprendre) ne soient clairement parvenus comme dans ce verset par exemple : « …. Et Nous n’avons jamais puni/corrigé un peuple avant de lui avoir envoyé un Messager (pour leur en informer) » (Qur’ân 17, 15).
Concernant l’enterrement des non-musulmans, l’imâm ‘Alî (‘alayhî salâm) alla voir le Prophète (ﷺ) pour lui annoncer la mort d’Abû Tâlib (oncle du Prophète et père d’Alî). Il dit : « Ton oncle paternel (Abû Tâlib), le vieil homme est mort ». Le Prophète lui dit : « Va l’enterrer (décemment) et ne fais rien d’autre jusqu’à ce que tu reviennes me voir. ‘Ali dit : « (mais) il est mort en tant qu’idolâtre ». Mais le Prophète lui dit la même chose [qu’il devait l’enterrer décemment]. ‘Alî dit alors : « Quand je l’ai enterré, je retournais ensuite voir le Prophète et il m’a dit : « (maintenant) procède au ghusl (grandes ablutions) ». Puis il a prié Allâh pour moi, m’offrant des supplications et des invocations que je ne voudrais échanger pour rien d’autre chose à leur place ». (Rapporté par Ahmad dans son Musnad à travers 3 variantes ayant le même sens n°759, n°807 et n°1093 avec une chaine sahîh (l’une des variantes précise « le vieil homme égaré »), par An-Nasâ’î dans ses Sunân n°190 avec une bonne chaine et par d’autres encore). Il existe cependant, chez les shittes aussi, des récits disant qu’il est mort intérieurement en ayant la foi musulmane dans son coeur. Allâh sait mieux ce qu’il en est.
‘Abd al-Razzâq dans son Musannaf (n°9694) a rapporté que : « Al-Sha’bi a rapporté que : « Umm al-Harith bint Abi Rabi’ah est décédée et c’était une femme chrétienne. Ses funérailles étaient accompagnées des compagnons du Prophète (ﷺ). Sufyân al-Thawri a déclaré dans certaines narrations : « Il leur a été commandé de marcher devant elle » ». L’imâm Al-Nawawi a dit dans Rawḍat al-Ṭâlibîn (2/116) : « Nos érudits ont dit qu’il n’est pas déconseillé pour un musulman de suivre le cortège funèbre d’un parent qui est un incroyant… Il est plutôt recommandé (d’en profiter aussi dans ces moments-là) de penser à la mort, à ce qui vient après, à notre passage dans ce monde, etc. ». Et dans son Sharḥ ‘alá Ṣaḥīḥ Muslim (n°958) il dit : « L’opinion préférée d’Al-Mutawalli parmi nos savants est qu’il est recommandé de se tenir debout pour un enterrement. Cette préférence est une injonction en guise d’encouragement, mais la position assise est clairement permise ». Ibn al-Qayyîm dans Aḥkâm Ahl al-Dhimmah (1/432-433) : « Muhammad ibn Musâ a rapporté : « J’ai dit à Abû ‘Abdullâh : « Un musulman peut-il accompagner les funérailles d’un idolâtre ? ». Abû ‘Abdallâh a dit : « Oui ». Abû Tâlib a rapporté : « J’ai interrogé Abû ‘Abdullâh au sujet d’un homme qui meurt en tant que juif et qui a un fils musulman. Que devrait-il faire ? » Abû ‘Abdullâh a dit : « Il devrait monter son animal et marcher devant les funérailles, pas derrière. Quand ils ont l’intention de l’enterrer, qu’il revienne. Telle est l’opinion d’Umar » ». Dans le même ouvrage (1/437) : « Sa’id ibn Jubayr a rapporté : J’ai interrogé Ibn ‘Abbâs au sujet d’un homme dont le père est mort en tant que chrétien. Ibn ‘Abbâs a dit : « Il peut en être témoin et l’enterrer » et juste après (1/438) : « Hassân al-Basrî a dit : « Si tu consoles un citoyen non-musulman (dhimmi), alors dis : « Que rien ne t’assaille si ce n’est le bien. Huraym a rapporté : « J’ai entendu al-Ajlah consoler un chrétien et il a dit : « Vous devez être conscient d’Allâh et être patient ». Mansûr a rapporté : « Ibrahim a dit : « Si tu as l’intention de consoler une personne parmi les gens du Livre, alors dis : « Qu’Allâh augmente ta richesse et tes enfants et prolonge ta vie ». Harb a rapporté : « J’ai dit à Ishaq : « Comment un idolâtre est-il consolé ? ». Ishaq a dit : « Il est dit : Qu’Allâh augmente votre richesse et vos enfants » ».
Al-Bukharî dans son Sahîh (n°1310) rapporte selon Abû Sa`id Al-Khudrî que le Prophète (ﷺ) a dit : « Lorsque vous voyez un cortège funèbre, levez-vous jusqu’à ce qu’il passe ou que le défunt soit placé dans la tombe ». An-Nasâ’î dans ses Sunân (n°1999 et 2000) et Abû Dawûd dans ses Sûnan (n°3175) avec une chaîne sahîh selon l’imâm ‘Alî rapportent le hadîth disant que ‘Alî avait enterré son père (non-musulman selon un avis répandu), et que le Prophète (ﷺ) y avait assisté, se tenant aux funérailles jusqu’à ce que le corps soit placé dans la tombe : « Le Messager d’Allâh s’est levé, puis il s’est assis ».
Al-Bukharî dans son Sahîh (n°1311, 1312 et 1313) rapporte selon Jabir Ibn ‘Abdullâh et ‘Abd ar-Rahmân Ibn Abî Layla : « Sahl Ibn Hunayf et Qays Ibn Sa`d étaient assis dans la ville d’Al-Qadisiyya. Un cortège funèbre passa devant eux et ils se levèrent. On leur a dit que le cortège funèbre était celui d’un des habitants du pays, c’est-à-dire d’un non-croyant, sous la protection des musulmans. Ils ont dit : « Un cortège funèbre est passé devant le Prophète (ﷺ) et il s’est levé. Quand on lui a dit que c’était le cercueil d’un Juif, il a dit : « N’est-ce pas un être vivant (âme créée par Allâh) ? ». Le fait de se lever est motivé par plusieurs raisons selon les commentateurs et autres versions (rapportées notamment par Ahmad et d’autres) dont : le respect pour chaque être vivant créé par Allâh, par respect envers Celui qui a créé la vie et qui décrète la mort – c’est-à-dire Allâh – et par respect envers les Anges qui sont en charge de ces affaires.
Si c’est un proche (mort en non-musulman), il est donc permis de l’enterrer nous-mêmes, et s’il s’agit d’un non-musulman qui était une personne malgré tout intègre ou de moralité acceptable avec qui l’on partageait une relation amicale ou de voisinage, il est permis d’y assister sans toutefois participer clairement aux rites non-islamiques (s’il y en a). Certains maîtres spirituels et muqaddem musulmans autorisent leurs disciples à rendre visite à leurs proches défunts (non-musulmans) par adab (notamment en accompagnant leurs parents non-musulmans) tant que les règles et principes islamiques sont bien respectés. Certains récitent aussi la Sûrah Al-Fatiha ou la Sûrah Ya-sîn dans l’espoir que cela leur soit profitable ou allège leurs peines ou leurs corrections s’ils font partie des gens du Feu, et font aussi parfois une invocation identique ou similaire à celle de Issâ’ (‘alayhî salâm) – mentionné dans le Qur’ân – à l’égard de ceux qui se disent chrétiens mais qui l’ont divinisé – ce qui leur était pourtant strictement interdit et culte dont il s’est lui-même désavoué – : « Ô Allâh, si Tu leur accorde Ton Pardon alors ils sont Tes serviteurs (créatures) et s’Ils méritent Ta correction, alors c’est Toi le Puissant, le Sage, et s’ils méritent l’allègement de leur correction, alors allège-leur les peines et les corrections (en vertu du bien qu’ils m’ont prodigué, et des efforts qu’ils ont déployé dans de bonnes œuvres », cela permet d’apaiser le cœur, d’être bon, de leur témoigner du respect, de s’en remettre à Allâh tout en leur souhaitant le meilleur, sans s’opposer au Décret d’Allâh ni aux convenances qui s’imposent entre nous et Lui.
S’ils méritent Sa Miséricorde, alors on l’accepte et on Lui en rendra grâce, s’Il allège leur châtiment, on sait qu’Il est le Juste et que l’Enfer est composé de différents degrés car tous les mécréants ne sont pas de la même catégorie, et s’ils ne le méritent pas, alors on s’en remet à Allâh et on accepte Son Décret car Il est le Juge et le Maitre de toute chose, et c’est Lui qui décrète ce qui est juste, bon, injuste et mauvais. Et cela ne concerne que l’aspect exotérique des choses, car pour la dimension ésotérique, il s’agit de secrets et de subtilités qu’Il dévoile aux initiés et aux saints, qui se conforment toutefois extérieurement et intérieurement aux convenances spirituelles et qui ne sortent pas de Sa Loi révélée, mais que les gens sachent à quel point Allâh est « Grand » et « Tout-Miséricordieux » et qu’Il ne lèse personne, comme Il le dit dans le Qur’ân : « Vais-je vous le confier comme, auparavant, je vous ai confié son frère ? Mais Allâh est le meilleur gardien, et Il est Le plus Miséricordieux des miséricordieux ! » (Qur’ân 12, 64) et « Mais Toi, Tu es Le plus Miséricordieux des miséricordieux » (Qur’ân 23, 83) ainsi que : « Allâh ne lèse personne, fût-ce du poids d’un atome. S’il est une bonne action, Il la double, et accorde une grosse récompense de Sa part » (Qur’ân 4, 40).
Néanmoins, ce qui a été interdit à l’unanimité des savants pieux et clairvoyants, est qu’il ne faut pas pratiquer des rites spécifiquement non-musulmans ou laisser penser sciemment et ouvertement que l’on s’associe avec une chose relevant de la mécréance, de l’idolâtrie, de la turpitude, du blâmable et des choses illicites (comme la consommation d’alcool ou de drogue). Leur témoigner de la bonté et du respect est autorisé de leur vivant malgré leur mécréance, et rien ne l’interdit (dans le Qur’ân et dans la Sunnah purifiée) après leur mort : « Allâh ne vous interdit pas de ceux qui ne vous combattent pas dans la religion ni ne vous expulse de vos maisons que vous soyez juste, bon et généreux envers eux. En vérité, Allâh aime ceux qui sont généreux et justes » (Qur’ân 60, 8).