La dignité des non-musulmans de leur vivant et en tant que défunt selon l’Islam

   Reconnaitre la dignité et les qualités des non-musulmans fait aussi partie de l’Islam, comme l’indique le Qur’ân : « Et nous avons (honoré et) donné à chaque être humain une dignité. Nous les transportons sur terre et sur mer et Nous leur donnons de bonnes choses comme nourriture. Nous les avons nettement préférés à plusieurs de Nos créatures » (Qur’ân 17, 70). Raison pour laquelle un jour : « Un convoi funéraire passa près du Prophète Muhammad, alors il s’est levé. Quelqu’un a dit : « C’est le convoi funéraire d’un juif ». Le Prophète a dit : « Ne s’agit-il pas d’une âme ? » »[1]. Dans d’autres versions, outre le respect qui est dû à toute âme humaine (puisque créée par Allâh), cette attitude respectueuse englobe aussi le respect envers Celui (c’est-à-dire Allâh) qui a créé cette personne ainsi que les Anges assignés à cette fonction (retirer l’âme du défunt) mais ici le Prophète (ﷺ) a signifié la dignité de l’âme humaine en soi, même si la personne n’était pas musulmane. Assister aux rites funéraires des Gens du Livre par exemple est permis (puisque que des compagnons assistèrent à l’enterrement de plusieurs non-musulmans parmi les Gens du Livre), de même pour les idolâtres puisque des Compagnons ont enterré leurs proches non-musulmans (comme ‘Alî avec son père, qui selon une tradition prophétique était mort en tant que non-musulman, et le Prophète autorisa à ‘Alî d’enterrer dignement son père, – qui était l’oncle du Prophète -). Si Allâh ordonne la bienfaisance et la courtoisie envers ses proches (et parents non-musulmans surtout) de leur vivant, l’analogie s’applique (sauf interdiction explicite) pour les accompagner lors de leurs dernières demeures : « Adorez Allâh et ne Lui donnez aucun associé. Agissez avec bonté envers vos père et mère, les proches, les orphelins, les pauvres, le proche voisin, le voisin lointain, le collègue et le voyageur, et les esclaves en votre possession, car Allâh n’aime pas, en vérité, le présomptueux, l’arrogant » (Qur’ân 4, 36) sans restriction de religion même envers les non-proches, même si l’accent a été mis aussi surtout envers les proches-parents : « Et ton Seigneur a décrété : « N’adorez que Lui et faites preuve de bonté envers les père et mère : si l’un d’eux ou tous 2 doivent atteindre la vieillesse auprès de toi, alors ne leur dit point « ouf » et ne leur manque pas de respect, mais adresse-leur des paroles affectueuses, et par miséricorde, abaisse pour eux l’aile de l’humilité, et dis : « Seigneur ! Fais-leur à tous 2 miséricorde comme ils m’ont élevé tout petit » » (Qur’ân 17, 23-24) et « « Nous avons commandé à l’être humain la bienfaisance envers ses père et mère; sa mère l’a porté [subissant pour lui] peine sur peine: son sevrage a lieu à 2 ans ».  Sois reconnaissant envers Moi ainsi qu’envers tes parents. Vers Moi est la destination. Et si tous 2 te forcent à M’associer ce dont tu n’as aucune connaissance, alors, ne leur obéis pas en cela ; mais sois avec eux ici-bas de bonne compagnie en te comportant avec eux d’une manière convenable. Et suis le sentier de celui qui se tourne vers Moi. Vers Moi, ensuite, est votre retour, et alors Je vous informerai de ce que vous faisiez » » (Qur’ân 31, 14-15).

   ‘Abd al-Razzâq dans son Musannaf (n°9694) a rapporté que : « Al-Sha’bi a rapporté que : « Umm al-Harith bint Abi Rabi’ah est décédée et c’était une femme chrétienne. Ses funérailles étaient accompagnées des compagnons du Prophète (). Sufyan al-Thawri a déclaré dans certaines narrations : « Il leur a été commandé de marcher devant elle » ». L’imâm Al-Nawawi a dit dans Rawḍat al-Ṭâlibîn (2/116) : « Nos érudits ont dit qu’il n’est pas déconseillé pour un musulman de suivre le cortège funèbre d’un parent qui est un incroyant… Il est plutôt recommandé (d’en profiter aussi dans ces moments-là) de penser à la mort, à ce qui vient après, à notre passage dans ce monde, etc. ». An-Nasâ’î dans ses Sunân (n°1999 et 2000) et Abû Dawûd dans ses Sûnan (n°3175) avec une chaîne sahîh selon l’imâm ‘Alî rapportent le hadîth disant que ‘Alî avait enterré son père (non-musulman selon un avis répandu), et que le Prophète (ﷺ) y avait assisté, se tenant aux funérailles jusqu’à ce que le corps soit placé dans la tombe : « Le Messager d’Allâh s’est levé, puis il s’est assis ». Néanmoins, ce qui a été interdit à l’unanimité des savants pieux et clairvoyants, est qu’il ne faut pas pratiquer des rites spécifiquement non-musulmans ou laisser penser sciemment et ouvertement que l’on s’associe avec une chose relevant de la mécréance, de l’idolâtrie, de la turpitude, du blâmable et des choses illicites (comme la consommation d’alcool ou de drogue). De même, si le non-musulman n’était pas connu pour avoir combattu les croyants ou dénigrer Allâh et Son Messager, un avis permet d’invoquer la Miséricorde divine pour eux avec la conviction que seul Allâh décidera et fera ce qu’Il veut, – Allâh l’interdisant seulement dans le Qur’ân pour ceux qui ont sciemment refusé la Vérité alors que le Prophète Ibrâhîm était parmi eux, en plus de l’avoir dénigré et combattu pour sa foi -, mais l’autre avis l’interdit dans tous les cas dès qu’il n’existe aucune preuve que la personne soit morte sur/avec la foi musulmane. Le Qur’ân relate la parole du Prophète Issâ (Jésus) quand Allâh évoque les chrétiens qui se sont trompés en le divinisant (commettant donc ici, du « kufr » inconsciemment) : « Si Tu les corriges, ils sont Tes serviteurs. Et si Tu leur pardonnes, c’est Toi le Puissant, le Sage » (Qur’ân 5, 118), il s’agit donc d’une possibilité, à la fois textuelle, spirituelle et rationnelle, et tout croyant doit s’en remettre exclusivement à Allâh, et ce, en dépit de la divergence des exégètes sur le plan exotérique. Cela vaut toutefois pour le non-musulman qui reconnait la Réalité Divine et qui a conscience qu’Il est le Créateur, Celui qui détient la Miséricorde et qui est la Source de toute subsistance, – car il n’y a pire injustice et ingratitude, sur le plan métaphysique, que l’ingratitude et l’ignorance à l’égard du Divin, principe de toute chose et de glorifier son propre ego au point d’en faire une pseudo-divinité -. Ainsi, chrétiens, juifs, déistes, zoroastriens, hindous, bouddhistes et tout autres non-musulmans sincères qui reconnaissent le Divin et aspirent à Sa Miséricorde, il peut être cohérent et légitime, de notre part de demander à Allâh de leur faire Miséricorde si cela correspond à Sa Volonté d’autant plus s’ils faisaient partie des gens bienfaisants et sincères qui n’ont pas rejeté en toute connaissance de cause Son dernier Messager, mais quant à ceux qui ont renié ouvertement Allâh (le Divin) et Ses Bienfaits, combattu les croyants tout en se moquant de Ses Prophètes ou de Ses Livres, il est donc absurde de demander Sa Miséricorde pour eux alors qu’ils ne L’ont jamais recherché jusqu’à preuve du contraire, bien qu’Allâh puisse aussi leur pardonner dans Son bon Droit et qu’il est parfois très difficile à vivre pour le croyant qui a des proches faisant partie des « ennemis déclarés » du Divin, de la Sagesse et des croyants, mais ayant aussi pu manifester des qualités qu’Allâh leur avait octroyé, d’imaginer la gravité de leur sort post-mortem, mais Allâh est le Juste, le Puissant, le Sage et le Tout-Miséricordieux, et c’est sur cela qu’il faut s’accrocher et espérer, sans se torturer l’esprit, sachant qu’Allâh accorde aux croyants sincères d’intercéder en faveur de ses proches et qu’Il est enclin à agréer toute demande sincère ne s’opposant pas à Sa Justice. Celui qui aura adoré Son Créateur Le trouvera dans la Grâce et la Miséricorde, mais celui qui aura adoré autre qu’Allâh ne trouvera que le néant de leurs oeuvres, puisque les idoles n’oeuvrent pas et ne sont d’aucun secours, mais Allâh se manifestera tout de même à eux par Son Nom Al-Haqq (le Vrai) et selon un degré de Sa Miséricorde comme Il le dit : « Ma Grâce et Ma Miséricorde comprennent toutes les choses » (Qur’ân 7, 156), comme le souligne aussi l’émir, théologien, maître spirituel et exégète ‘Abd al-Qâdir al-Jazaîri dans son Kitâb al-Mawaqîf.

   Ceci étant dit, chaque être humain a reçu le Souffle divin en lui, sacralisant sa vie et lui donnant ainsi une dignité. Leur vie est donc sacrée, en principe, selon le Qur’ân : « N’attentez pas à la vie humaine qu’Allâh a rendu et déclaré sacrée, sauf pour une cause juste et à bon droit » (Qur’ân 6, 151).

   L’imâm As-Sarakhsi écrit dans Ussûl (2/334) : « Comme Allâh l’Exalté a créé l’humanité pour qu’il porte Son dépôt de confiance, Il les a honorés avec (la) raison et l’inviolabilité sacrée afin d’être responsable des devoirs et des droits qu’Allâh placés sur eux. Puis Il leur a accordé la sacralité, la liberté et les droits de propriété pour qu’ils continuent à exercer leurs dépôts. Par conséquent, cette liberté, cette sacralité et ce droit de propriété sont accordés à une personne au moment de sa naissance ; que ce soit pour ceux qui sont capables de discernement et ceux qui ne le sont pas sont égaux à cet égard, de même l’inviolabilité sacrée (de sa personne) est établie à la naissance, qu’ils soient sains d’esprit ou non ».

  Le Shaykh Ibrahima Niass a écrit dans son Tafsîr : « Allâh a fait des humains des frères (et sœurs). Et il est de 2 sortes de fraternité :

– une fraternité à l’image des Prophètes Mûsa (Moïse) et Harûn (Aaron).

– une fraternité à l’image des Prophètes Yusuf et ses frères. 

Et chacun de nous doit œuvrer pour être avec son frère tels que Mûsa (Moïse) et Harûn (Aaron). Car Mûsa, quand Allâh l’a envoyé [comme prophète], il a sollicité d’Allâh la prophétie pour son frère.

« Harûn mon frère, accrois par lui ma force ! Et associe-le à ma mission » (Qur’ân 20, 30/32). Et Allâh accepta sa demande, en ce sens Allâh dit : « Nous allons, par ton frère, fortifier ton bras et vous donner des arguments irréfutables ; ils ne sauront vous atteindre, grâce à Nos Signes. Vous 2 et ceux qui vous suivrons seront les vainqueurs » (Qur’ân 28, 35) ».

   De la même manière, notre prochain ou notre frère biologique est de 2 sortes, notre semblable en humanité s’il ne partage pas notre foi ou nos aspirations, – et alors Allâh demande de les respecter et de les préserver de tout mal émanant de notre bouche ou de nos mains (et il est recommandé de leur manifester de la bienfaisance et de bons conseils pour les inciter à choisir la meilleure des voies, et il est aussi autorisé d’invoquer Allâh évidemment pour qu’Il les guide ou qu’Il leur accorde une bonne issue ou une bonne santé en cas d’épreuves ou de maladies) -, ou alors il est notre frère/sœur en Islam, et alors Allâh nous impose non seulement la même chose, mais aussi les droits qui incombent aux musulmans (faire la prière mortuaire en cas de décès, invoquer la Miséricorde divine en cas de décès, le rappeler sagement à l’ordre en cas de péché ou de faute, de ne leur offrir que ce qui est islamiquement licite, etc.).

« Et quant à ceux qui croient (en Allâh) et font de bonnes œuvres, Nous leur effacerons leurs méfaits, et Nous les rétribuerons de la meilleure récompense pour ce qu’ils auront accompli. Et Nous avons enjoint à l’être humain d’être bon et bienfaisant envers ses père et mère, et « si ceux-ci te forcent à M’associer (à commettre de l’idolâtrie), ce dont tu n’as aucun savoir, alors ne leur obéis pas en cela (faire le shirk ou un acte répréhensible et mauvais) ». Vers Moi est votre retour, et alors Je vous informerai de ce que vous faisiez. Et quant à ceux qui croient et font de bonnes œuvres, Nous les ferons certainement entrer parmi les gens de bien » (Qur’ân 29, 7-9). Traiter avec bonté et courtoisie ses parents, même non-musulmans, – et ce même s’ils incitent leurs enfants à commettre du shirk – fait partie d’une prescription divine qu’il convient d’observer consciencieusement. Et envers les non-musulmans qui n’ont aucun lien de parenté avec nous, Allâh dit, – parmi les derniers versets révélés en la matière vers la fin de la période médinoise (vers l’an 630) :  « Il se peut qu’Allâh établisse de l’amitié entre vous et ceux d’entre eux dont vous avez été les ennemis. Et Allâh est Omnipotent et Allâh est Pardonneur et Très Miséricordieux. Allâh ne vous défend pas d’être bienfaisants et équitables envers ceux qui ne vous ont pas combattus pour la religion et ne vous ont pas chassés de vos demeures. Car Allâh aime les équitables. Allâh vous interdit seulement de prendre pour alliés ceux qui vous ont combattus pour la religion, chassés de vos demeures et ont aidé à votre expulsion. Et ceux qui les prennent pour alliés sont les injustes » (Qur’ân 60, 7-9).

   Et c’est ainsi que l’on peut comprendre la célèbre parole de l’imâm ‘Alî, – rapportée dans le Nahj al Balagha – s’adressant à un gouverneur nommé Mâlik al Ashtar sous son califat qu’il désigna gouverneur d’Egypte en l’an 658 : « (…) Apprends que je t’envoie dans un pays qui a connu avant toi des situations marquées par la justice comme par l’oppression. Les gens critiqueront tes actions de la même manière que tu critiquais celles de tes prédécesseurs et diront de toi ce que tu disais d’eux. On reconnaît les justes par les paroles qu’Allah mettra à leur sujet dans la bouche de ses adorateurs ; fais en sorte que les plus précieux trésors soient les bonnes actions !

Maîtrise tes penchants ; abstiens-toi de ce qui n’est pas licite, car la maîtrise de l’âme s’accomplit en se détournant de ses passions (prendre soin de son âme c’est ne pas lui accorder tout ce qu’elle désire mais c’est l’obliger à supporter ce qu’elle déteste).

Fais que ton cœur soit compatissant, tendre et doux envers les administrés, ne sois pas un fauve qui ne songe qu’à en faire sa proie ; ils sont de 2 sortes : un frère en Allâh (dans l’Islam) ou bien un congénère (ton frère et semblable en Humanité), tous 2 sujets à des lapsus et en butte à des erreurs commises consciemment ou inconsciemment.

Offre-leur ton pardon et ta mansuétude comme tu souhaites qu’Allâh en fasse pour toi. Tu te trouves en position de supérieur à leur égard, comme l’est vis-à-vis de toi celui qui te nomme. Mais Allâh est au-dessus de nous tous.

    Libère les hommes de la rancune qu’ils nourrissent les uns envers les autres, et défais-toi de tout ce qui est à même de t’attirer leur haine en fermant les yeux sur ce qui ne te paraît pas clair. Ne t’empresse pas de donner raison à n’importe quel délateur, car il est, de nature, corrompu, quoique se montrant homme de bonne foi.

Allâh t’a confié la charge de leurs affaires pour t’éprouver. Ne te dresse pas contre les ordres d’Allâh car, face à lui, tu es impuissant et n’es pas à même de te passer de son pardon et de sa miséricorde. Ne regrette jamais un acte de pardon et ne te vante pas d’une sanction que tu auras infligée.

Évite de prendre hâtivement une initiative de ce genre, si la possibilité d’agir autrement s’offre à toi. Ne te dis jamais : « Je suis investi, j’ordonne et on m’obéit » ; car cela pourrit le cœur, affaiblit la foi et précipite les troubles (…) ».

     La justice et l’équité les concernent aussi, comme l’enseigne le Qur’ân : « Ô les croyants ! Soyez stricts (dans vos devoirs) envers Allâh et soyez des témoins équitables. Et que la haine pour un peuple ne vous incite pas à être injustes. Pratiquez l’équité : cela est plus proche de la piété. Et prenez garde à Allâh. Car Allâh est certes Parfaitement Connaisseur de ce que vous faites » (Qur’ân 5, 8).

   Le Qur’ân va même plus loin, et enjoint aux croyants, non seulement de ne pas tuer les non-musulmans innocents et pacifiques, d’être justes et équitables avec eux, mais aussi de leur manifester de la bienveillance et de la bonté à leur égard : « Allâh ne vous défend pas d’être bienfaisants et équitables envers ceux qui ne vous ont pas combattus pour la religion et ne vous ont pas chassés de vos demeures. Allâh vous défend seulement de prendre pour alliés ceux qui vous ont combattus pour la religion, chassés de vos demeures et ont aidé à votre expulsion. Et ceux qui les prennent pour alliés sont les injustes » (Qur’ân 60, 8-9). Ainsi, la sévérité ne concerne que les non-musulmans qui combattent et expulsent les musulmans ou les non-musulmans opprimés de leurs demeures.

   En l’an 630, donc vers la fin de la période médinoise, après que les versets sur les combats eurent été révélés, la mère d’Asmâ bint Abû Bakr qui était toujours non-musulmane en l’an 630 (soit environ 2 ans avant la mort du Prophète, à la fin de la période médinoise), sa mère (qui vivait au milieu de gens faisant la guerre au Prophète, à Abû Bakr et à ses propres enfants !) vint la voir à Médine. Asmâ, embarrassée, demanda conseil au Prophète Muhammad (ﷺ) : « « Ô Messager d’Allâh, ma mère mécréante est venue me voir et elle désire recevoir une récompense (un cadeau) de ma part. Puis-je la recevoir et entretenir des (bonnes) relations avec elle malgré sa mécréance ? ». Ce à quoi le Prophète répondit : « Oui, sois bonne et gentille avec ta mère » »[2].

   Le Prophète Muhammad (ﷺ) en prenant Abû Bakr as-Siddiq par la main, lui dit, à propos d’un groupe idolâtre (la tribu des Banû Shaybân) qui incarnait une qualité que le croyant doit mettre en oeuvre : « Quelle noble qualité que celle-ci, par laquelle Allâh contient la violence des uns et des autres, et par laquelle ils se réconcilient »[3].

   Il ﷺ dit aussi à propos du Négus (alors chrétien), qui dirigeait l’Abyssinie : « Il s’y trouve un roi chez qui personne n’est opprimé, et c’est une terre de justice »[4]. Cela nous informe du fait que, après la foi en Allâh et en ce qu’Il a révélé, et le bon comportement, le Prophète ﷺ cherchait avant tout la justice sociale et politique pour sa communauté, même si le gouvernement ou la terre de résidence, n’étaient pas « musulmans ». Ceci étant dit, le Négus finit par se convertir à l’Islam, mais ne put instaurer politiquement et publiquement la Sharî’ah, faute de soutien populaire et étant empêché par ses « ministres et dignitaires ».

     De même, le Prophète ﷺ reconnut et loua les qualités et l’intelligence de Khalîd ibn al-Walîd alors qu’il était encore idolâtre à l’époque[5].

   Si l’on peut en effet trouver, dans les avis anciens des positions autorisant juridiquement, – mais pas nécessairement moralement – l’agression (avec ou sans homicide) concernant le non-musulman qui vivrait en dar al harb (terre/demeure de guerre), c’est-à-dire dans une nation dont l’hostilité à l’Islam est explicite et avec laquelle il n’existe aucun pacte de paix avec les nations musulmanes, où chaque homme (les femmes et les enfants ne peuvent pas être agressés ou tués même selon cet avis) est un combattant potentiel, surtout au vu du contexte de l’époque, où les hommes étaient enrôlés de force au combat lorsque l’Etat les mobilisait, et cette pratique existe encore aujourd’hui dans certains états non-musulmans. Pour beaucoup de juristes anciens, dans les relations intercommunautaires, ils appliquaient la logique de la réciprocité. Toutefois, la justice morale de l’Islâm impose la justice et la bienfaisance à tous les niveaux, et le combat que contre les criminels et combattants avérés (qui transgressent et agressent sans droit les gens).


[1] Rapporté par Al-Bukharî dans son Sahih n°1312 et par Muslim dans son Sahih n°961 selon Sahl Ibn Hunayf.

[2] Rapporté par Muslim dans son Sahîh n°1003 au Livre de la Zakât et par al-Bukharî dans son Sahîh n°2620 et 2624 au chapitre « Les cadeaux aux idolâtres ». Le passage « elle désire recevoir une récompense (un cadeau) de ma part » n’est évoqué que dans le hadîth n°2624 du Sahîh d’al-Bukharî.

[3] Rapporté par Al-Bayhaqî dans ad-Dalâ’il al-Nubuwwa 2/422-427, par Abû Nu’aym dans ad-Dalâ’il al-Nubuwwa 1/237-242, Ibn Kathîr dans al-Bidâya wa an-Nihâya 3/164-165.

[4] Rapporté par Ahmad dans son Musnad n°18304, par Ibn Hisham dans sa Sîra 164/2, et le récit est authentique.

[5] Rapporté par Ad-Dhahâbî dans Târîkh al-Islâm 1/293.


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