Dans les différends qui opposent les hommes, ce ne sont ni les considérations scientifiques ou raciales, ni les écoles philosophiques ou juridiques, ni ceux qui détiennent momentanément la puissance temporelle qui peuvent trancher et imposer leur point de vue (souvent relatif, subjectif et biaisé) à l’ensemble de l’Humanité, mais ce que nous pouvons clairement saisir de la Volonté divine et de Sa Loi – qui doit s’appliquer indistinctement à tous (musulmans ou non-musulmans, croyants ou incroyants, hommes ou femmes, adultes ou enfants, riches ou pauvres, noirs ou blancs, Arabes ou non-Arabes, gens de grande taille ou de petite taille, personnes en bonne santé ou affaiblies par la maladie), ce qui ne peut d’acquérir que par la connaissance, la sagesse et l’éducation de l’âme, car car comme nous l’a enseigné le Messager d’Allâh (ﷺ) « qui connait son âme véritablement connait son Seigneur » (1), avec les conditions et droits propres à chacun selon leur nature, ainsi qu’avec une certaine tolérance et souplesse pour la liberté de culte, de conscience et de propriété individuelle. La Science comme la Philosophie, peuvent être des outils utiles et pertinents, mais ne sont pas infaillibles en soi, et leurs portes paroles moins encore. De plus, leur règne tout au long des 19e, 20e et 21e siècles ont causé tant de souffrances, de guerres et de destruction et de pollution (environnement, atmosphère, humaine, animale, …) qu’il devient évident qu’avoir fait de la science et de la philosophie moderne des idoles, constitue l’une des pires erreurs et aberrations du monde moderne. C’est le fait de maitriser son égo (son individualité, ses caprices, ses illusions et ses méfaits) qui permet de réaliser la Paix (ici-bas avec soi-même et avec nos semblables, ainsi qu’en pacifiant notre âme dans sa relation avec le Divin afin d’en faire rejaillir la Lumière et Ses Bénédictions), et d’éviter de nombreuses souffrances – qui malgré tout apportent son lot d’enseignements, de sagesses et de réflexions subtiles -.
La Loi (réellement divine), – à ne pas confondre avec des interprétations relevant clairement de l’ijtihad (effort de réflexion, n’impliquant pas une « certitude ») sur lequel reposent de nombreux avis juridiques (dépendant beaucoup des circonstances et conditions liées au temps et au lieu) – est en ce sens universelle, objective, transcendante et immuable concernant les vérités théologiques (dans les fondements), les valeurs (ce qui permet de pratiquer et de « conceptualiser » une éthique et une spiritualité opérative) et les normes morales et sociales. Ses préceptes universels et clairement intelligibles (l’importance et la nécessité des rites, des valeurs morales comme la justice et la générosité, l’interdiction des grands péchés tels que le meurtre, la sorcellerie, le viol, la débauche, l’adultère, le vol, l’agression physique ou verbale, la calomnie, etc.) sont autant de moyens qui permettent d’assurer une certaine sécurité et stabilité dans la société, non seulement par la réalisation intérieure des vertus et le fait d’être animé par de bonnes et nobles intentions et aspirations, mais aussi par l’application de la Loi à l’échelle étatique et collective dans toutes les « valeurs » du « vivre ensemble » qui encadrent les différences religieuses, culturelles, philosophiques et idéologiques. Aucun être humain n’étant ontologiquement et intrinsèquement « supérieur » à un autre, étant lui aussi une créature, existenciée par Allâh et conditionnée par différentes lois et normes, ne peut donc se soustraire à Sa Volonté comme à Sa Loi, et doit se conformer aux principes de justice et de moralité.
Chez les Sages et les Vertueux qui réalisent intérieurement la Loi divine et qui la manifestent aussi extérieurement par les paroles de sagesse, les actes de bienfaisance, la confiance en Lui, les nobles caractères, l’humilité, le sens de la justice et la réalisation de la piété comme de la miséricorde, la Lumière divine se présente par les Bénédictions dont ces êtres réalisés sont le support par excellence. Le Messager d’Allah (ﷺ) a dit en effet : « Là où la parole des gens de l’élite se fait entendre, la Miséricorde du Très-Haut tombe en rosée bienfaisante ; et là où tombe la rosée de la miséricorde céleste, ceux qui parlent comme ceux qui écoutent ne seront pas frustrés de leur part » (2), ce que le Qur’ân résume finalement très bien par cette parole : « Et par l’âme et Celui qui l’a harmonieusement façonnée ; et lui a alors inspiré son immoralité, de même que sa piété ! A réussi, certes celui qui la purifie. Et est perdu, certes, celui qui la corrompt » (Qur’ân 91, 7-10).
Notes :
(1) Rapporté et authentifié par Kashf, notamment par Al-Junayd dans ses Rasâ’îl, Abû Hâmid al-Ghazâlî dans son Ihyâ’, Al-Jilânî dans Sirr al-Asrâr, Ibn ‘Arabî dans ses Futûhât et Jalâl ud-Dîn Rûmî dans son Mathnawî, l’émir Abd al-Qâdir dans ses Mawâqif, le Shaykh Ahmad al-‘Alawî dans Mawâdd al-ghaythiyya l-nâshi’a ‘an al-hikam al-ghawthiyya et beaucoup d’autres. Rapporté aussi par Al-Hâkim at-Tirmidhî dans son Bayân al-farq bayna as-sadr wa al-qalb wa alfû’âd wa al-lubb dans la section 6 Les lumières du cœur au chapitre Le vrai cœur, par As-Suyûtî dans Kitâb al-durar al-muntathira, harf al-mîm, par ‘Ajlûnî dans Kashf al-khafâ’ n° 2532, par Al-Mâwardî dans Adab al-dîn wa l-dunyâ.
(2) Rapporté par Farid ud Din Attar dans l’introduction de son Tadhkirat Al awliya’, et dans la traduction turque de son œuvre, l’auteur affirme aussi le fait qu’il y a au moins 18 000 mondes, et 124 000 prophètes. Ce hadith est rapporté selon une version proche par Abû Nu’aym dans Al-Hilya 7/285 et par Al-Khatîb al-Baghdadi dans Târîkh Baghdâd 4/408 : « Lorsqu’on évoque les gens de bien (fermement enraciné dans la spiritualité et la religion), la Miséricorde divine se manifeste (là où ils sont évoqués) ». La chaine est parfois jugée faible, mais son contenu est vrai, et peut être expérimenté – et nous pouvons le confirmer par l’expérience et l’observation ! -. La lecture même du livre de Farid ud-Dîn Attâr confirme ce hadith.