Bilan historique et intellectuel sur les effets de la prédication wahhabite depuis son fondateur Mohammed ibn Abdel Wahhâb (1703-1792)

Mohammed Ibn Abdel Wahhâb (1703-1792) était né au sein d’une famille savante dans la péninsule arabique. Son père et son frère Sulayman étaient des savants hanbalites, affiliés aussi au tasawwûf, et appréciaient aussi beaucoup Ibn Taymiyya selon ce qui est rapporté. Si au début, Mohammed Ibn Abdel Wahhâb n’était pas trop polémiste, il se radicalisera au fur et à mesure, jusqu’à se prétendre mujtahid, et remettra en cause ensuite les enseignements traditionnels répandus dans l’ensemble du monde musulman. Il est rapporté que son propre père fit une mise en garde contre lui, annonçant que son fils Mohammed sèmera la fitna. Son frère Sulaymân, s’opposa vigoureusement aux innovations blâmables et au fanatisme de Mohammed Ibn Abdel Wahhâb, ce qui lui vaudra bien des problèmes. Il le réfuta même dans un célèbre ouvrage intitulé : “Fasl ul khitâb fi r-raddî ‘alâ Mohammed ibn Abdul Wahhâb” (Le discours clair pour répliquer à Mohammed ibn abdel Wahhâb), dans lequel il s’appuie sur le Qur’ân, la Sunnah et même sur Ibn Taymiyya pour réfuter les positions isolées et fanatiques de son frère Mohammed Ibn Abdel Wahhâb.

Si sur certaines questions, les historiens et savants ont divergé sur quelle était sa réelle position, c’est parce que dans ses écrits et discours, il se contredisait selon les besoins de sa prédication, afin de ne pas se mettre à dos de grands savants. Ainsi, il prétendait ne pas faire le takfir de masse, mais il le fit à plusieurs reprises. Il prétendait enseigner le tawhîd du Qur’ân, du Prophète et la ‘aqida des salafs, mais les contredisait sur bien des points.
En matière d’éthique, il ne respectait pas les limites sacrées fixées par Allâh, puisqu’il a ordonné le massacre de nombreux musulmans, y compris des femmes et des enfants.

Le contexte de son époque était trouble, car cela correspondait, il est vrai, dans certaines régions et au sein de certaines populations, à un relâchement des mœurs et à des déviances doctrinales populaires (dans les milieux peu instruits, cela pouvait consister à adorer des objets matériels, à invoquer ou à sacrifier des animaux pour des saints décédés ou des défunts vertueux, etc.). Mais ce qu’il ne faut pas oublier, c’est que même à l’époque des salafs, ces déviances et relâchements existaient aussi, mais que pour autant, ils ne se sont pas mis à massacrer tout le monde ou à faire le takfir de masse, ni à confondre les pratiques légiférées avec les déviances ou abus de certaines pratiques.

Il est ainsi clair qu’il avait des problèmes psychologiques, une tendance au fanatisme manifeste, et qu’il ne suivait ni l’éthique musulmane, ni la compréhension des salafs dans la ‘aqida. S’il n’a pas tout inventé de toute pièce, il a remixé plein d’éléments disparates et hétéroclites du passé, pour en faire sa propre idéologie. Si on lui doit bien toutefois une réfutation claire de l’idolâtrie grossière (adoration des êtres humains, des anges ou des idoles en bois ou en pierre), – mais ce qui fut le cas aussi de tous les savants musulmans avant lui et à son époque -, il confondait cependant le Tawhîd avec des choses qu’il incluait dans le shirk. En effet, le tawassûl légiféré qui consiste à demander à un pieux (qu’il soit vivant ou défunt cela ne change rien à la question du tawhîd) d’invoquer Allâh pour nos besoins, était pour lui, – surtout quand il s’agissait d’un défunt près de sa tombe -, de shirk, là où cela relève du Tawhîd, et fut pratiqué par des compagnons et des disciples de compagnons. De même pour le tabarrûk (recherche de bénédictions), ou le fait de porter sur soi des objets contenant des invocations prophétiques ou des versets du Qur’ân.

Sachant que même les savants hanbalites du Najd, et tous les savants sunnites du monde entier, enseignaient aux gens les traités théologiques et juridiques traditionnels et faisant office de références depuis de nombreux siècles, et conformes globalement à la voie des salafs, qu’est-ce qui caractérisait la prédication de Mohammed ibn Abdel Wahhâb, au point qu’il dise : « Et je vous le dis en ce qui me concerne, et je le jure par Allâh, Celui à par qui il n’y a pas de vrai dieu, que j’étudiais la science, et ceux qui me connaissaient étaient convaincu que j’avais de la science, alors qu’en fait à l’époque j’ignorais encore ce que veut dire « Il n’y a pas de véritable divinité autre qu’Allâh » et je ne savais pas ce qu’est la religion de l’Islam, jusqu’à ce qu’Allâh me fit grâce de ce bien. De même pour mes professeurs, pas un d’entre eux ne connaissait cela. Et si quelqu’un parmi les savants de al Arid (région du Najd) clame qu’il connaissait le sens de « la ilaha illa Allah » ou a connu le sens de l’Islam avant ce temps ou clame que l’un de ses professeurs connaissait cela (le sens de la profession de foi) alors il a menti et a dit de la fausseté et a trompé les gens et s’est loué lui-même de quelque chose qu’il ne possède pas ». (Mohammed Ibn Abdel wahhâb, “Rasâ’il As-Shakhsya” pp.186, 187).
Or, il ne connaissait pas la totalité des savants de sa région, ce qui implique qu’il prétendait connaitre l’Invisible (Al-Ghayb) sans qu’Allâh ne lui dévoile cette information, ce qui constitue, selon l’Islam et même selon sa propre idéologie, un acte annulatif de l’Islam et une sorte de shirk (puisque s’attribuant un Attribut spécifique à Allâh : la Connaissance du Ghayb en soi). Par ailleurs, il est aussi connu que beaucoup de savants du Najd étaient hanbalites et même taymiyyiens pour certains, ils connaissaient ainsi les traités théologiques classiques de même que les ouvrages de jurisprudence. Ils étudiaient donc le sunnisme classique, remontant aux salafs dans leur compréhension du Tawhîd et des fondements de la religion, même si certaines querelles ou divergences sectaires, sur des questions secondaires, pouvaient toujours exister. Nous disons donc que c’est Mohammed Ibn Abdel Wahhâb qui a contredit les ahl ul sunnah wa al-jama’ah, qui n’a pas compris le Tawhîd orthodoxe ni les fondements de l’Islam sur certaines questions, ni n’a suivi le Messager d’Allâh (‘alayhî salât wa salâm) dans son comportement et dans sa vision holistique d’Allâh et de Sa Création.
Sa déclaration montre donc bien qu’il ne considérait pas les savants hanbalites (ou autres) de sa région comme des musulmans, quand bien même ils professaient le Tawhîd, n’adorant qu’Allâh, reconnaissant le Prophète Muhammad, priant Allâh, jeûnant pour Allâh, adhérant aux 5 piliers de l’Islam, aux 6 piliers de la Foi, à la sacralité intégrale du Qur’ân et à l’excellence de la voie prophétique. Pire même, dans une lettre, il dira même que les idolâtres parmi les quraysh à l’époque du Prophète étaient moins égarés que les musulmans (savants et gens de la masse) de son époque. Et il s’agit là d’une abomination manifeste et d’une injustice flagrante de sa part. De cet aveu, on en tire la conséquence qu’il faisait bien le takfir de tous les savants et gens de la masse, non seulement de sa région, mais aussi de toutes les régions qui enseignaient aussi les traités théologiques et juridiques classiques, puisque n’étant pas « approuvés » par Mohammed Ibn Abdel Wahhâb.

Difficile de dire s’il était sincère dans sa démarche, tout en étant « fou » et fanatique, ou s’il n’était intéressé en réalité que par le pouvoir politique, car s’étant associé avec un chef de tribu qui n’était pas connu pour sa science ou sa piété, et avec qui il avait conclu des pactes ne respectant pas les préceptes islamiques en la matière.

Le frère de Mohammed Ibn Abdel Wahhâb, Sulaymân, relata dans son livre “Al-Sawa’iq Al-Ilahiyyah” en page 5, à propos des adeptes de son frère : « Et aujourd’hui nous voilà affligés par ceux qui s’associent au Qur’ân et à la Sunnah (la tradition du prophète), qui prétendent élaborer des règles à partir de ces sources, alors qu’ils font fi des avis divergents des savants et refusent le dialogue avec ces hommes de science. Mais le pire, c’est qu’ils imposent aux autres leurs propres règles, qualifiant quiconque ne suivant pas leur voie de mécréant ».

Il continue ailleurs dans un autre de ces ouvrages nommé “Al-Ra’d ala al-Wahabia” : « Actuellement, les gens sont harcelés par quelqu’un qui prétend suivre le Saint Qur’ân et la Sunnah et qui ose déduire (directement) de leurs enseignements en ne prêtant aucune attention à quelque opposition que ce soit. Parce que quiconque s’oppose à lui, il l’appelle un hérétique bien qu’il ne possède lui-même aucune des qualifications des savants mujtahidîn et, je le jure par Allâh, pas même un dixième de l’une de ces qualifications. Néanmoins, ses enseignements ont attiré beaucoup de simples d’esprit. À Allâh nous appartenons et à Lui nous reviendrons ».

Son frère est même allé jusqu’à réfuter complètement son idéologie dans son “Fassl Al Khitab fil rad âla Mohammed Ibn Abdel Wahhâb” (le Discours tranchant/clair dans la réfutation de Mohammed Ibn Abdel Wahhâb). Les motivations de Sulaymân étaient purement religieuses, car il ne recherchait ni le pouvoir, ni ne se confrontait à une famille rivale ou à un autre clan, mais à son propre frère. Il est donc difficile de le taxer de parti pris ou de malhonnête, et il était aussi une personne de science (un savant), reconnue pour sa piété.

Dans son recueil de biographies de savants Hanbalites intitulé “As-Suhub al-Wâbilah ‘alâ Darâ’ih Al-Hanâbilah” (pp. 275-276), le Shaykh Ibn Humayd Al-Hanbali An-Najdi mentionne la biographie du Shaykh ‘Abdel-Wahhâb [Le père de Mohammed ibn ‘Abdel-Wahhâb, le fondateur de la mouvance wahhabite] dans laquelle il dit : « Il a étudié la jurisprudence auprès de son père, l’auteur du célèbre livre Al-Mançak, ainsi qu’auprès d’autres professeurs, et il a acquis de la science. Il a composé des ouvrages bien écrits traitant de certaines questions juridiques. Il est mort en l’an 1153 de l’Hégire ».

Puis suite à cela il dit : « Et il est le père de Mohammed [Ibn Abdel Wahhâb], le fondateur du mouvement dont les étincelles se sont répandues dans tous les horizons, mais il y a une grande différence entre eux. Mohammed n’a montré sa prédication qu’après la mort de son père. Quelques-uns de ceux que j’ai rencontré m’ont informé d’après les gens de science qui vivaient à la même époque que ce Shaykh ‘Abdel Wahhâb, était en colère après son fils Mohammed (Ibn Abdel Wahhâb), pour la raison qu’il ne voulait pas s’occuper d’apprendre le Fiqh (jurisprudence) comme ses aïeuls, et il pressentait que quelque chose de blâmable allait survenir de lui, alors il disait aux gens : « Qu’est-ce que vous allez voir comme mal de la part de Mohammed ! » et il s’est passé ce qui s’est passé conformément à la prédestination de Allâh.
Egalement, son [autre] fils Sulaymân, le frère de Mohammed [Ibn ‘Abdel Wahhâb], était lui aussi opposé à sa prédication. Et il l’a réfuté de belle manière, par des versets (âyah) et des traditions (âthâr), car celui qu’il réfutait (Mohammed Ibn ‘Abdel-Wahhâb) n’acceptait rien d’autre, et ne faisait attention à la parole d’aucun Savant, parmi les anciens ou les contemporains, quel qu’il soit, sauf Ibn Taymiyya et son élève Ibn Al-Qayyim, car il considérait leurs paroles comme des textes n’acceptant aucune interprétation. Et il se contentait de ça parmi les gens, même si leurs propos étaient autres que ce qu’il comprenait.
Et le Shaykh Sulaymân a nommé sa réfutation à l’encontre de son frère “Faslu l-Khitâb fi r-radd ‘ala Mohammed Ibn Abdel-Wahhâb » (le Discours tranchant dans la réfutation de Mohammed Ibn Abdel Wahhâb).
Et Allâh l’a préservé de son mal et de sa ruse [provenant de Mohammed Ibn ‘Abdel-Wahhâb], malgré cette terrible tyrannie qui a horrifié même les habitants des contrées lointaines. Car ce qu’il (Mohammed Ibn ‘Abdel Wahhâb) faisait quand quelqu’un le contredisait et le réfutait et qu’il était dans l’incapacité de le tuer au grand jour, il envoyait quelqu’un pour le tuer dans son lit ou dans le marché, de nuit, parce qu’il considérait mécréants tous ceux qui étaient en désaccord avec lui et il rendait licite son assassinat.
On dit qu’il y avait un fou dans un village, qui avait pour habitude de frapper quiconque lui faisait face, même s’il était armé. Alors Mohammed [Ibn ‘Abdel Wahhâb] a ordonné qu’on donne à ce fou une épée et qu’on le fasse entré dans la Mosquée où se trouvait seul son frère le Shaykh Sulaymân, alors on le fît entrer, et quand le Shaykh Sulaymân l’a vu il a eu peur de lui. Mais le fou jeta son épée et se mit à dire : « Ô Sulaymân n’ait crainte, tu fais partie des gens protégés », et il s’est mis à répéter ça plusieurs fois. Il n’y a aucun doute que ceci une Karâmah (prodige)… »
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Il avait donc étudié le fiqh dans son enfance, mais sans avoir atteint un haut degré dans ce domaine (ni aucun autre d’ailleurs), il remit en question la science islamique traditionnelle, abandonnant ce qu’il avait appris de bien auparavant. Ses partisans parmi ses successeurs aiment occulter ces mauvaises choses, puis exagérer dans leurs éloges à son égard, et le considérer comme un « shaykh ul islam » alors qu’il ne possède aucune caractéristique avec les grands savants de la Sunnah du passé, ni même avec des personnalités comme Ibn Taymiyya et Ibn al-Qayyim, qui étaient plus cultivés que lui tout en étant bien moins fanatiques. De même, dans leurs chroniques, ou même chez les wahhabites contemporains, ils falsifient l’histoire et font passer tous les non-wahhabites de l’époque de Mohammed Ibn Abdel Wahhâb comme étant des ignorants pervers et injustes, baignant dans l’idolâtrie la plus grossière qui soit, alors que la réalité est toute autre.

Le Najdite ‘Abd ar Rahman ibn Qâssim a dit dans “Ad Durar as Saniyah” (9/293) :

« Quiconque ne jette pas l’anathème sur les idolâtres de l’empire Ottoman et les adorateurs de tombes comme les habitants de la Mecque et tous les autres qui ont adoré les saints et qui se sont éloignés du monothéisme pour embrasser l’idolâtrie

[shirk]

et qui ont altéré la Sunnah du Messager d’Allâh par les innovations alors il est mécréant comme eux. Même s’il déteste leur religion, qu’il les déteste et qu’il aime l’islam et les musulmans. Car quiconque ne déclare pas mécréant l’idolâtre ne croit pas en la véracité du Qur’ân, car le Qur’ân déclare mécréant les polythéistes, et ordonne de les excommunier, les prendre pour ennemis et les combattre ».

Dans le même ouvrage (10/429) il dit : « Abd Allah ibn ‘Abd al Latif fut questionné concernant celui qui ne jette pas l’anathème sur l’Empire Ottoman, choisi de leur faire allégeance et s’engage à combattre avec eux ? Et un autre qui ne dit rien de tout cela, mais qui au contraire considère cet état et ceux qui les aident comme étant des musulmans rebelles, et ne permet d’agir envers eux que ce qu’il est permis de faire avec les musulmans rebelles ; et que le butin pris aux populations arabes (dans la péninsule arabique) est illicite ?

Il a répondu :

« Celui qui n’aura pas connu la mécréance de l’Empire Ottoman, et ne fait pas la différence entre eux et les musulmans injustes, alors il n’aura pas connu la signification de “La ilaha illa Allah”. Et, si en plus il croit que l’état est islamique, alors cela est encore pire. Ceci est le doute de la mécréance de celui qui a mécru en Allâh et Lui a attribué un associé. Et, en ce qui concerne celui qui les incite ou les aide, quel que soit l’aide, contre les musulmans (ndt : najdites wahhabites), alors ceci est une apostasie claire » ».

Quant à nous, nous disons que c’est le Najdite ‘Abd Ar-Rahman ibn Qâssim qui n’a pas compris le tawhîd, qui a contredit la religion et la voie du Messager d’Allâh, qui a manqué de clairvoyance, qui a sombré dans l’injustice et qui a commis de nombreuses innovations religieuses d’ordre blâmable.

Durant la plus grande partie de l’existence de l’empire ottoman, l’Islam était le socle et le coeur de la constitution, les plus grands sultans ottomans se référaient à l’Islam et défendaient la cause de l’Islam, même si, tout comme pour les anciens califes et dirigeants (arabes ou non-arabes), certaines pratiques étaient culturelles ou certaines pratiques découlaient d’un avis juridique erroné ou contesté par d’autres juristes. Qu’il y ait eu des sultans ottomans déviants sur certains points, nous en convenons bien, tout comme cela a existé (et bien pire encore) chez les omeyyades, les abbassides et d’autres nations. Mais nous ne pouvons pas tous les placer au même niveau car beaucoup étaient orthodoxes au sens large, prenant leur science des ouvrages de référence (Al-Bayhaqî, Al-Ghazâlî, Abû Hanifa, At-Tahawî, As-Shafi’î, Al-Maturidî, An-Nawawî, Ibn Hajar al ‘Asqalânî, etc.) et chez des savants musulmans bien formés dans les sciences islamiques ainsi que d’autres sciences (logique, mathématiques, astronomie, médecine, …).

Quant au tawassul légiféré, cela est attesté dans le Qur’ân et la Sunnah, et fut pratiqué par des sahaba et leurs disciples (cf. Ad-Dhahâbî, Ibn Kathîr, Al-Bayhaqî, Al-Qurtubî, Ibn Hajar al ‘Asqalânî et bien d’autres qui ont authentifié ces récits). Quiconque rejette la licéité du tawassul légiféré, en connaissance de cause, a commis un acte annulatif de l’Islam. Sa pratique, sur le plan juridique et cultuel, est autorisée et même recommandée chez de nombreux salafs, et les turcs ottomans n’ont fait que suivre cette pratique héritée des salafs.
Quant à ceux qui ont sombré dans le tawassul shirki et déviant, cela relève du cas par cas, et il n’est aucunement autorisé de faire du takfir de masse puisqu’il faut s’assurer de l’intention, du crédo et de la finalité de chaque personne qui pratiquerait ou non le tawassul dans une nation donnée. Et le takfir de masse est le propre des khawarij.

En fait comme l’explique Sulaymân Ibn ‘Abd al Wahhâb (le frère du fondateur du wahhabisme, qui fut un ardent opposant à son idéologie) dans sa lettre, les Najdites rendaient apostats tous les musulmans de la terre à cause de cela. Le fait de “douter” de la mécréance de personnes les fait sortir eux aussi de l’Islâm selon eux (or la question centrale est de savoir déjà si oui ou non, la personne qu’ils ont rendu mécréante est réellement mécréante ou non).
 Et As-Shawkânî a rapporté dans la biographie de Ghâlib Ibn Musa’îd le gouverneur de la Mecque qui a combattu ‘Abd al ‘Azîz ibn Sa’ûd, que ce dernier considérait celui qui n’entrait pas dans son état en abandonnant les autres émirs, comme sortis de l’Islâm, et qu’il versait le sang de celui qui n’assistait pas à la prière en commun et que les tribus arabes se sont soumises à lui de peur.

Le Najdite Mohammed ibn Ahmad Bâshmîl a dit dans son “Kayfa Nafhamu at Tawhîd” (p. 12)  :

« Abû Jahl et Abû Lahab avaient plus d’Unicité en Allah et avaient une foi plus pure que ces musulmans qui disent qu’il n’y a pas d’autre divinité excepté Allâh et que Muhammad est le Messager d’Allâh ».

Ils sont exactement comme le Prophète ﷺ les a décrit … Ils lisent le Livre sans le comprendre, extirpent des jugements illusoires, prononcent (faussement) les paroles les plus belles mais y donnent un sens contraire à la pureté de l’Islam, et transpercent leur religion comme la flèche transperce sa cible…

Quant à nous, nous disons que son livre contient plein de confusions et d’erreurs relatives au Tawhîd et à l’Islam. L’auteur a sombré dans les déviances et les excès en tous genres, et ne saurait donc être pris comme référence. Que ce soit selon le Qur’ân, la Sunnah, la Sirah et l’histoire, il est connu que Abû Jahl et Abû Lahab étaient des idolâtres, ne reconnaissant même pas l’Unicité Divine dans la Divinité et la Seigneurie, sans même parler des actes d’adoration. Dès lors, quiconque sait qu’une personne qui reconnait la réalité d’Allâh et le fait qu’Il soit le Seul Créateur de tout ce qui existe, qui reconnait la prophétie de Muhammad et qui considère la Parole Divine comme étant sacrée et infaillible et qui reconnait les 5 piliers de l’islam et les 6 piliers de la foi, et enfin, n’a jamais combattu Allâh et Son Messager, vaut certainement mieux qu’une personne qui a renié le Droit d’Allâh et Son Unicité, qui a combattu et mécru au Message apporté par Muhammad, et qui a causé du tort à sa communauté.



Des ahadiths nous apprennent donc, que, à un moment (ou à plusieurs moments) de l’histoire, des troubles émergeront du Najd (d’autres ahadiths parleront aussi d’autres troubles émanant de l’Irak).

« Il sortira de Najd des gens qui ne comprennent du Qur’ân que l’extérieur, le sens du Qur’ân ne parviendra pas à leur “cœur”” » (Sahîh al-Bukharî).

« Du Najd se lèvera la corne du Satan » (Sahîh al- Bukharî n°558, p. 108, le livre de la prière pour obtenir la pluie dans « le sommaire du sahih al-bukhârî », Tome I, par l’Imâm Zayn ad-Dîn Ahmad ibn Abdul-Latif A-Zubaydî).

Historiquement, cela se produisit avec l’apparition du wahhabisme à l’époque « moderne », puisqu’étant un rationalisme déviant (rejetant la spiritualité et la métaphysique), tout en refusant la rationalité dans de nombreuses questions sociales, juridiques et théologiques, ils pillèrent la Mecque et Médine, saccagèrent plusieurs villes musulmanes, massacrèrent des milliers de musulmans (dont des enfants), déformaient ou occultaient des préceptes islamiques, faisaient le takfir, avaient souvent une conception grossière, superficielle et corporelle d’Allâh, prétendaient connaitre le « cœur » et les doctrines de tous les gens dans différentes contrées, – commettant ainsi une autre forme de shirk -, prétendaient pour beaucoup d’entre eux qui étaient destinés au « Feu de l’enfer » là où seul Allâh le sait (en l’absence de textes catégoriques mentionnant des noms précis pour nous, nous ne pouvons pas le savoir de manière catégorique), ils ont rendu licite le fait de tuer les musulmans (y compris les savants et vertueux parmi eux), les non-musulmans pacifiques et quiconque s’opposerait à leur fanatisme. Par la suite, à notre époque, le mal s’est propagé jusqu’à semer le chaos dans la plupart des pays musulmans, éloignant les gens de l’Islam, tuant des croyants, commettant des attentats suicides aveuglément, semant les troubles, détruisant les mosquées, et faisant le jeu des ennemis du monde musulman qui en profitent pour renforcer leur domination, dégoûter les gens de l’Islam et des musulmans, ils ont considéré des pratiques blâmables comme étant des pratiques louables, et inversement, ils ont qualifié d’innovations blâmables des pratiques louables ou légiférées en Islam (dhikr collectif et à voix haute, réciter le Qur’ân pour les défunts, faire le tabarrûk et le tawassûl toujours en ne visant qu’Allâh seul dans les intercessions et recherches de bénédictions licites, etc.).
Le Prophète les a décrit comme étant des khawarij qui pratiqueront des actes d’adoration, qui se réclameront du Qur’ân et qui feront mine d’appeler à l’Islam et aux bonnes doctrines, mais qu’à côté de cela, ils commettront de grands péchés (meurtre d’innocents), qu’ils ne comprendront pas le Qur’ân en profondeur, et qu’ils commettront des actes abominables dont certains les feraient ou feront même sortir de la religion. Les khawarij ont plusieurs caractéristiques selon les époques, mais c’est avant tout une mentalité plutôt qu’une vision doctrinale immuable et fixe. Les khawarij s’empressent de faire le takfir des autres, souvent en considérant des péchés ou même des actes autorisés par l’Islam comme étant des actes annulatifs de l’Islam. Ils sont agressifs dans leur attitude, méprisent les autres, refusent d’aider des gens s’ils n’ont pas la même mentalité ou vision qu’eux, ils sèment le chaos et font preuve de violence. Ils s’éloignent des savants vertueux et pensent tout connaitre mieux que les savants vertueux, les leaders clairvoyants, les maîtres spirituels et les juristes avisés. Ils manquent de patience, méconnaissent les règles de fiqh, pensent atteindre l’idéal et l’excellence en très peu de temps sans faire preuve d’indulgence, de clairvoyance, de sagesse, de douceur ou de pédagogie. A différentes époques, cette mentalité-ci a gagné certains groupes temporairement, aussi bien en milieu shiite que sunnite ou autre, mais des savants véridiques de chaque obédience ont toujours dénoncé leurs agissements et démontré leur éloignement de la vérité et de la sagesse islamique.
Le wahhabisme regroupe aussi bien les khawarij/kharijites/ghulat (extrémistes), que les murji/murjites (laxistes), que les rigoristes qui se trouvent entre les deux, c’est-à-dire généralement des gens à la mentalité rigide et aux propos superficiels, mais qui s’abstiennent de faire le takfir de masse, et qui se rangent du côté des gouverneurs, peu importe qu’ils soient mécréants ou pervers/injustes tout en se disant « musulmans ». Tous puisent leurs références dans le wahhabisme, certains étant plus cohérents que d’autres dans leur vision wahhabite.
Par ailleurs, les wahhabites/salafistes divergent entre eux aussi sur plusieurs questions (secondaires et importantes), et certains ne sont que « partiellement » wahhabites, puisque puisant aussi dans d’autres sources (sunnites classiques par exemple), en adoptant ainsi des positions théologiques ou juridiques qui ne sont pas véhiculées par les références du wahhabisme.
Lorsque l’on compare les savants de tendance wahhabite/salafi, avec les savants sunnites traditionnels, l’on constate que ceux qui suivent la Sunnah du Prophète dans tous les aspects, qui adoptent un bon comportement, qui suivent la doctrine de l’élite des salafs, qui connaissent le mieux l’exégèse qurânique, le fiqh (ses fondements, ses subtilités et ses divergences), la logique, les règles et les sciences du hadîth, l’histoire, l’éthique, la spiritualité (tasawwûf) et les fondements de la religion, sont les sunnites traditionnels. Les prédicateurs et savants wahhabites n’atteignent pas leur niveau en piété et en science, sauf quelques rares exceptions, mais jamais face à l’élite des ahl al Sunnah.

En résumé, nous pouvons dire que parmi les points positifs, il y a le rappel de certains préceptes islamiques, la réfutation de l’idolâtrie grossière et de certaines innovations blâmables.
Mais parmi les points négatifs, il y a la mentalité fanatique, la violence injustifiée, l’agressivité, le meurtre d’innocents (musulmans et non-musulmans) et donc le non-respect de la sacralité de la vie humaine, une ignorance des règles juridiques et des points doctrinaux remontant aux salafs et conformes au Qur’ân et à la Sunnah purifiée, le rejet de la spiritualité et de certaines réalités spirituelles, la confusion entre le Tawhîd et le shirk sur certains points, une tendance à l’anthropomorphisation d’Allâh – ce qui relève d’une forme de shirk et de kufr -, un éloignement du noble comportement prophétique -, l’absence d’éducation spirituelle, la division au sein de la Ummah, un mauvais caractère, une ignorance ou un rejet des divergences juridiques et théologiques acceptables parmi les ahl ul Sunnah, le takfir de masse s’apparentant à un acte annulatif de l’Islam puisque pensant inconsciemment qu’ils ont la connaissance de l’Invisible en soi (sans aucune confirmation ou indication de la part d’Allâh), etc.

Ils ont ainsi causé la mort de nombreux musulmans, des troubles par milliers depuis l’apparition de leur mouvement, l’apostasie de millions de musulmans, le chaos, les troubles, les persécutions, les exécutions arbitraires et sanglantes, etc. dans les pays musulmans ainsi que dans certains pays non-musulmans.

Concernant l’approche doctrinale orthodoxe (asharisme traditionnel, atharisme et maturidisme), la plupart des wahhabites l’ont combattu et dénaturé, pour imposer ensuite leur croyance déviante en la matière. Les écoles théologiques sunnites classiques et orthodoxes (asharisme, atharisme et maturidisme) sont conformes au Qur’ân et à la voie des éminents salafs, en commençant par l’imâm ‘Alî, notre maître Abû Bakr, notre mère (des croyants) Umm Salamâ, Zayn ul Abidîn, l’imâm Zayd ibn ‘Alî, Jâ’far As-Sâdiq, Abû Hanifa, Ahmad Ibn Hanbal, As-Shafi’î, Mâlik ibn Anâs, Abû Jâ’far At-Tahawî, Ibn Jarîr At-Tabarî, Al-Harith al-Muhasibî, Sûfyan at-Thawrî et bien d’autres, qui étaient tous des connaisseurs du Qur’ân, de la Sunnah (des ahadiths), de la langue arabe, de la rhétorique et de la logique.
En effet, Allâh étant le Créateur des cieux et de la Terre, des corps physiques, de la matière, du temps et de l’espace, Il ne peut que transcender Sa Création et n’est donc pas soumis à une localisation créée, et prétendre le contraire ne peut mener qu’à confondre Allâh avec Ses créatures, et Lui attribuer des choses spécifiques aux créatures, ce qui relève du shirk et du kufr, bien que certains égarés ne concèdent pas ces implications (qui en découlent naturellement), ce qui a mené des savants à leur donner l’excuse de l’ignorance afin de ne pas les faire sortir de l’Islam. Or, en restreignant Allâh par Sa Création, cela implique (bien qu’ils n’en ont pas vraiment conscience) qu’Il dépend d’une chose créée dont Il est le Créateur, qu’Il est donc limité par Sa Création, ce qui constitue du shirk.

Sur le plan civilisationnel, leur prédication ne possède pas les capacités et les ressources intellectuelles nécessaires pour refonder une brillante civilisation islamique puisque le wahhabisme combat consciemment ou inconsciemment selon les cas, la recherche scientifique, l’art islamique, la spiritualité, la souplesse et l’intelligence dans le fiqh, la doctrine métaphysique du Tawhîd, mais a contrario, impose le sectarisme, le consumérisme (pour combler le vide spirituel), des croyances déviantes, une méfiance et une haine contre tous les échanges intellectuels s’opposant à leur conception étroite de l’Islam et du monde. Non seulement le wahhabisme s’est révélé incapable de participer à l’amélioration des conditions de vie des humains de notre époque, mais il a grandement contribué au chaos mondial et à renforcer des problèmes divers, souvent avec la complaisance et la complicité de gouvernements injustes et corrompus, aussi bien dans le monde arabe que dans le monde occidental (pays démocratiques). Aussi paradoxal que cela puisse paraitre, le wahhabisme a été le déclencheur et l’instrumentalisation politique ayant conduit des millions de musulmans à apostasier de l’Islam, des millions de non-musulmans à détester l’Islam et à combattre les musulmans, et à renforcer ainsi l’athéisme, la sécularisation ou le shiisme duodécimain, surtout dans sa tendance extrémiste, dans le monde musulman et ailleurs.

Tout comme les plus extrémistes des shiites duodécimains, ils sèment la division, sont très agressifs et légitiment le sang de leurs opposants ou des musulmans de la masse qui n’adhèrent pas à leur idéologie, suite à leur takfir de masse.

‘Abdullâh Ibn ‘Umar relate : « L’Envoyé d’Allâh (‘alayhî salât wa salâm) a dit : « Celui qui dit à son frère (en religion) : « ô infidèle/mécréant/incrédule ! », c’est que l’un des deux en est bien un ». (Hadîth rapporté par Mâlik dans son Muwattâ’, Livre 56 « Des paroles de la médisance et de la dévotion » n°1844 ; al-Bukharî et Muslim dans leur Sahîh rapportent un hadith similaire).

Yahya Ibn Sa’îd a rapporté que le Prophète Jésus (‘Issâ), – ‘alayhî salâm -, ayant rencontré en route un cochon, lui dit : « Va en paix ». On lui dit : « Dis-tu cela à un cochon ! ». Jésus répondit : « Je crains que ma langue ne s’habitue à la prononciation de mauvaises paroles » (Hadîth rapporté par Mâlik dans son Muwattâ’, Livre 56 « Des paroles de la médisance et de la dévotion » n°1847).

Le Prophète Muhammad (‘alayhî salât wa salâm) a dit : « Si tu entends une personne dire « les gens ont péri » sur le ton du mépris et de l’arrogance », alors c’est lui qui est le pire d’entre eux » (Hadîth rapporté par Muslim dans son Sahîh au chapitre « Al-Birru wa As-sila » 139/2623, par Mâlik dans son Muwattâ’ au chapitre « Al-kalâm » 751/2).

Le Prophète Muhammad (‘alayhî salât wa salâm) a dit : « Les gens du Paradis sont (parmi ceux qui ont été ainsi ici-bas) des personnes simples (modestes), douces, joviales et avenantes » (Hadîth rapporté par Mâlik dans son Muwattâ’).

Alors qu’ils insultent les musulmans de tous les sobriquets péjoratifs, Allâh interdit même une telle attitude à l’égard des idolâtres : « N’injuriez pas ceux qu’ils invoquent (leurs idoles), en dehors d’Allâh, car par agressivité, ils injurieraient Allâh, dans leur ignorance. De même, Nous avons enjolivé (aux yeux) de chaque communauté sa propre action. Ensuite, c’est vers leur Seigneur que sera leur retour ; et Il les informera de ce qu’ils œuvraient » (Qur’ân 6, 108) ainsi que « Ô vous qui avez cru (les croyants musulmans) ! Qu’un groupe ne se raille pas d’un autre groupe : ceux-ci sont peut-être meilleurs qu’eux. Et que des femmes ne se raillent pas d’autres femmes : celles-ci sont peut-être meilleures qu’elles. Ne vous dénigrez pas et ne vous lancez pas mutuellement des sobriquets (injurieux). Quel vilain mot que « perversion » lorsqu’on a déjà la foi. Et quiconque ne se repent pas… Ceux-là sont les injustes » (Qur’ân 49, 11). Ainsi, le Qur’ân interdit de se moquer des autres groupes ou de les injurier, car cela ne fait pas partie de la noblesse du comportement. Et ceux qui agissent ainsi, sont considérés comme ayant des caractéristiques liées à la perversion et à l’injustice selon le Qur’ân.

« Venez, je vais réciter ce que votre Seigneur vous a interdit : ne Lui associez rien; et soyez bienfaisants envers vos parents. Ne tuez pas vos enfants pour cause de pauvreté. Nous vous pourvoyons tout comme eux. N’approchez pas des ignominies explicitement ou implicitement. Ne tuez pas, injustement, la vie qu’Allâh a faite sacrée. Voilà ce qu’Allâh vous a enjoint ; peut-être comprendrez-vous » (Qur’ân 6, 51).
Ce verset est général et personne ne peut donc en restreindre la portée sans aucune indication explicite du Qur’ân. Les non-musulmans sont aussi des âmes humaines dont la vie est sacrée en soi (ce que dira aussi Ibn Taymiyya).

« Nous avons certes anobli les fils d’Adam, Nous les avons transporté dans la terre comme la mer et nous les pourvoyons de bonnes choses, par conséquent Nous les avons privilégié sur beaucoup de nos créatures » (Qur’ân 17, 70). Les non-musulmans sont aussi des fils d’Adam.

« Et si l’un des non-musulmans te demande asile, accorde-le lui, afin qu’il entende la Parole d’Allâh, puis fais-le parvenir à son lieu de sécurité. Car ce sont des gens qui ne savent pas » (Qur’ân 9, 6). Le contexte de cette Sûrate concernait les idolâtres combattants qui avaient rompu le pacte avec les musulmans, les avaient trahi, persécuté, dénigré et attaqué. Même là, si des combattants ennemis déposent les armes, Allâh exige que les musulmans se comportent avec justice et douceur, les conduisant même jusqu’en lieu sûr, en dehors du champ de bataille, afin de protéger leur vie. Il s’agit de l’un des derniers versets médinois révélés dans ce domaine.

« Allâh ne vous défend pas d’être bienfaisants et équitables envers ceux qui ne vous ont pas combattus pour la religion et ne vous ont pas chassés de vos demeures. Car Dieu aime les équitables » (Qur’ân 60, 8). Figurant parmi les derniers versets révélés à Médine (vers la fin de la vie du Prophète) dans ce domaine, Allâh interdit donc aux musulmans de tuer ou d’être injustes envers les non-musulmans qui n’ont pas combattu les musulmans. Mieux même, Allâh encourage les musulmans à être bienveillant et bienfaisant à leur égard.
Certains exégètes relatent que le cas lié à ce verset était celui de la mère d’Asmâ Bint Abû Bakr (la fille d’Abû Bakr, proche compagnon du Prophète et premier calife après la mort du Prophète), demeurée non-musulmane à ce moment, en l’an 630 (soit peu avant la mort du Prophète, vers la fin de la période médinoise). En l’an 630, sa mère vint la voir à Médine. Asmâ, embarrassée, demanda conseil au Prophète Muhammad : « Ô Messager d’Allâh, ma mère mécréante est venue me voir. Puis-je la recevoir et entretenir des relations avec elle malgré sa mécréance ? », ce à quoi le Prophète répondit : « Oui, sois bonne avec ta mère » (hadîth rapporté par al-Bukharî et Muslim dans leur Sahîh). Or, sa mère était pourtant restée au milieu des combattants ennemis du Prophète à la Mecque (quand elle était encore administrée par les idolâtres qurayshites qui avaient lancé la guerre contre le Prophète et les musulmans). Et même là, le Prophète n’interdit pas seulement de tuer les non-combattants, mais d’être aussi bienfaisant et respectueux envers eux, et surtout envers ses proches parents.

L’exégète et juriste shafiite Ibn Kathîr dit dans son tafsîr (4/113) : « Même lorsqu’un pays musulman est en guerre avec un autre pays, si des gens viennent dans le pays musulman pour le négoce, le travail, le tourisme, ils resteront protégés par le traité politique passé entre les autorités musulmanes et leurs autorités et auront le droit tant à leur intégrité physique qu’à leurs biens jusqu’à leur retour en toute sécurité ».

Ibn Qudâma al-Maqdissî le juriste hanbalite a dit dans son “Al-Mughnî” (13/75) : « Lorsque les autorités donnent la paix, même aux combattants ennemis, il faut la leur accorder du fait qu’il n’est pas du ressort de la foule de décider de telles questions ».
Ceci est l’opinion des salafs comme Sûfyan at-Thawrî, Al-Awzâ’î, As-Shafi’î, Ishâq, et Ibn al-Qâssim ainsi que de la majorité des savants de l’islam. On a rapporté cela sur le Calife ‘Umar Ibn Khattâb également. 

Ibn Qudâma poursuit dans le même ouvrage (13/77) et dit : « La sécurité des non-musulmans doit avoir la même importance que celle des musulmans pour les individus et pour les groupes pour que les musulmans puissent jouir des mêmes droits » et aussi (13/79) : « si on coupe toute communication avec l’ennemi, il n’y aura plus d’échange ainsi le chaos s’installe et l’intérêt des deux parties se perd à jamais ».

Même en l’absence de pacte liant l’autorité musulmane aux nations non-musulmanes, un non-musulman non-combattant ne doit pas être tué ou persécuté. En ce sens, nous avons de nombreuses paroles prophétiques, dont celle-ci :
« Ne tuez pas pas d’innocent, ni femme, ni vieillard, ni enfant, ne brûlez pas d’arbre, n’inondez pas de semences, ne détruisez pas de maisons et craignez Allâh » (Sahîh al-Bukhârî, n°315)

Visiter le monde, explorer Sa Création, rencontrer d’autres peuples (musulmans ou non-musulmans) est une bonne chose, mais cela doit se faire avec piété et justice, car comme le dit Allâh :
« Ô gens Nous vous avons créés à partir d’un homme et d’une femme et Nous avons fait de vous des peuples et des tribus pour échanger, le plus noble parmi vous est le plus pieux » (Qu’ân 49, 13)

« Ô les croyants ! Soyez stricts (dans vos devoirs) envers Allâh et (soyez) des témoins équitables. Et que la haine pour un peuple ne vous incite pas à être injuste. Pratiquez l’équité : cela est plus proche de la piété. Et craignez Allâh. Car Allâh est certes Parfaitement Connaisseur de ce que vous faites » (Qur’ân 5, 8).

« Certes Allâh commande l’équité, la bienfaisance (Al-Ihsân) et l’assistance aux proches. Et il interdit la turpitude, l’acte répréhensible et l’injustice. Il vous exhorte afin que vous vous souveniez » (Qur’ân 16, 90).

« Adorez Allâh et ne Lui donnez point d’associé. Agissez avec bienfaisance (Ihsân) envers vos père et mère, envers les proches, les orphelins, les pauvres, le proche voisin, le voisin lointain, le collègue et le voyageur, et les domestiques (captifs) sous votre charge car Allâh n’aime pas, en vérité, le présomptueux, l’arrogant » (Qur’ân 4, 36). Ce verset possède une portée générale (musulmans et non-musulmans), et est universel, comme l’a aussi précisé l’exégète Al-Qurtûbî dans son Tafsîr.

« Et ne semez pas la corruption sur terre après qu’elle ait été réformée. Et invoquez-Le avec crainte et espoir, car la miséricorde d’Allâh est proche des bienfaisants » (Qur’ân 7, 56).

Cela rejoint les versets du Qur’ân que nous avons déjà mentionné ainsi que des ahadiths, dont celui-ci, où d’après l’Imam Ahmad dans son Musnad, le Messager d’Allâh (‘alayhî salât wa salâm) a dit : « Vous informerais-je au sujet du croyant (mû’min) ?
C’est celui que les gens (non-musulmans et musulmans) ne craignent pas quant à leurs biens et leurs propres personnes (leur vie).
Et le musulman, c’est celui dont les musulmans sont épargnés (du mal) de sa main et de sa langue.
Et le (véritable) combattant (al mujâhid) est celui qui lutte contre son ego.
Et l’émigré (al muhâjir) est celui qui délaisse (quitte) les fautes et les péchés »
.

Même dans les discussions avec les non-musulmans, le respect est de mise :

« Dis : O gens du Livre, venez à une parole commune entre nous et vous : que nous n’adorions qu’Allâh, sans rien Lui associer, et que nous ne prenions point les uns les autres pour seigneurs en dehors de Dieu. Puis, s’ils tournent le dos, dites : Soyez témoins que nous, nous sommes soumis »  (Qur’ân 3, 64)

« et ne dialoguez avec les gens du Livre que de la plus belle façon qui soit, sauf les injustes parmi eux, et dites leur nous croyons en ce qui nous est révélé et ce qui vous est révélé, notre Dieu et le vôtre est l’unique, et nous lui sommes soumis » (Qur’ân 29, 46).

Face à un tyran idolâtre qui réclamait pour lui-même la divinité, Allâh dit au Prophète Mûsa (‘alayhî salâm) de lui parler avec douceur : « Allez vers Pharaon ; il s’est vraiment rebellé. Puis, parlez-lui gentiment (et avec douceur). Peut-être se rappellera-t-il ou (Me) craindra-t-il ? ils dirent : “Ô notre Seigneur, nous craignons qu’il ne nous maltraite indument ou qu’il dépasse les limites”. II dit : “Ne craignez rien. Je suis avec vous : J’entends et Je vois.” » (Qur’ân 20, 40-46).


On voit donc bien que les extrémistes parmi les wahhabites et les rawafidhs (shiites duodécimains de tendance extrémiste) correspondent aux mauvais traits de caractère évoqués par le Prophète, puisqu’ils font le takfir de masse, innovent dans la religion tout en prétendant incarner l’orthodoxie. Or, ils contredisent l’éthique prophétique, parlent de sujets qu’ils ne maitrisent pas, s’écartent de l’orthodoxie, font du mal aux croyants et divisent la communauté en lui imposer de lourdes épreuves et injustices diverses. A l’époque de Mohammed Ibn Abdel Wahhâb, leur langage était déjà dur, sectaire, agressif et insultant, mais de nos jours, les extrémistes parmi eux, sont encore pires, et n’incarnent donc pas du tout les vertus islamiques. Par ailleurs, quand bien même les « non-wahhabites » ou les « non-rawafidhs » seraient égarés, hérétiques ou mécréants/apostats selon eux, – ce qui est souvent faux comme accusations d’ailleurs -, cela ne justifie pas du tout le massacre ou l’oppression à leur égard. En effet, le Qur’ân et le Prophète ont interdit d’humilier, d’insulter, de torturer, d’opprimer ou de tuer les pêcheurs parmi les musulmans (sauf en cas de crime majeur, mais pas pour une hérésie doctrinale), ou même parmi les non-musulmans qui ne combattent pas ouvertement les musulmans.

Loin d’avoir su refléter la beauté de l’Islam, la spiritualité islamique, l’éthique qurânique (incarnée aussi par le Prophète), la vision intellectuelle et holiste de l’Islam, ils l’ont plutôt dénaturé et parodié, ce qui est la caractéristique-même de Shaytan, comme nous l’a informé le Prophète Muhammad (‘alayhî salât wa salâm) dans plusieurs ahadîths.

D’après Ibn ‘Umar : « Le Prophète (‘alayhî salât wa salâm) invoqua :

« Ô Allâh bénis pour nous notre Shâm, Ô Allâh bénis pour nous notre Yémen. Ils dirent : Ô Messager d’Allah, et notre Najd ? Il dit : Ô Allâh bénis pour nous notre Shâm, Ô Allâh bénis pour nous notre Yémen. Ils dirent : Ô Messager d’Allâh, et notre Najd ? Et je pense qu’il a dit au bout de la troisième fois : De là-bas viendra les tremblements et la discorde, et c’est de là qu’apparaîtra la corne du diable » (Sahîh al Bukharî n°7094 – Chapitre : La fitna en direction de l’Est). Le hadith dit bien « notre Najd », ce qui signifie bien le Najd de la péninsule arabique, puisque l’Irak (ni à l’époque prophétique ni à la nôtre) ne fut désigné par le « najd ». Et les savants saoudiens du Najd s’appellent eux-mêmes « les savants najdites/du Najd » et leur idéologie est nommée « la daw’ah najdiyya » (la prédication najdite).
Ibn Taymiyya a dit dans “Bayan talbis bayan al-jahmiyya” (1/17-23) : « Il a été rapporté d’une manière récurrente « tawatur » que le Prophète a informé que la discorde et la source de la mécréance proviendront de l’Est c’est-à-dire de l’Est de Médine comme la région de Najd et ce qui est l’Est du Najd ». Et il a dit également : « Et il n’y a pas de doute que c’est de ceux-là que s’est produit l’apostasie et d’autres sortes de mécréance, de Musaylimah al Kadh-dhab (le menteur) et ceux qui l’ont suivi, de Tulayhah al-Asadi’î et ceux qui l’ont suivi et de “Sajah” et ceux qui l’ont suivi ».

Dans une autre version d’après Abû Mas’ûd al Ansarî, le Prophète (‘alayhî salât wa salâm) a indiqué son doigt vers le Yémen en disant : « Certes, la foi réside là-bas ! Tandis que la rudesse et la dureté des cœurs se trouvent chez les propriétaires des chameaux qui braillent leurs bêtes, chez les tribus de Rabî’a et de Mudâr, là où apparaîtra la corne du diable » (Sahîh al Bukharî n°3302 et Sahîh Muslim n°51).

D’après Yassir Ibn ‘Amr qui a dit : « J’ai demandé à Sahl ibn Hunayf : As-tu entendu le Messager d’Allâh (‘alayhî salât wa salâm) citer les Khawarij ? Il répondit : Oui je l’ai entendu et il montra l’Est de sa main, des gens qui liront le Qur’ân avec leurs langues et qui ne dépassera pas leurs gosiers, ils sortiront de la religion comme sortirait la flèche de sa cible. Dans une version : Des gens erreront du coté de l’Est, leurs têtes seront rasées » (Sahîh Muslim n°1068).

Et se raser la tête était un signe d’allégeance à Mohammed Ibn Abdel Wahhâb à son époque.

Ibn Mas’ûd a dit : « Le Messager d’Allâh (‘alayhî salât wa salâm) a dit : « Sortira à la fin des temps de jeunes gens, aux ambitions sottes, ils liront le Qur’ân et (leur compréhension) ne dépassera pas leurs gosiers, ils parleront par la meilleure des paroles, mais ils sortiront de la religion comme la flèche sort de sa cible ». L’imâm Abû ‘Issâ at Tirmidhî commenta : « Ce récit est authentique [hassan sahîh], et il fut rapporté à d’autres endroits que ce récit du Prophète où il a décrit ces personnes qui récitent le Qur’ân sans qu’il ne dépasse leurs gosiers, et qui sortiront de la religion comme la flèche transperce sa cible. Ils sont les Khawârij et les Harurites, et d’autres Khawârij » (Sunan At Thirmidhî n°2188).

Le célèbre exégète Ismâ’îl Ibn Kathîr décrivit bien les agissements des khawarij, lorsqu’il dit dans son ouvrage “Al Bidâyah wa an Nihâyah” : « Si les khawârij prennent encore le pouvoir, ils corrompront toute la terre de l’Irâq et du Shâm. Ils n’épargneront ni le garçon ni la fille, ni l’homme ni la femme, car selon leur croyance, les gens sont entrés dans un tel état de corruption qu’ils ne peuvent être réformés que par le meurtre de masse ».

Le grand juriste Al-Qarafî (m. 684 H/1285) a dit dans “Nafa’is al Usûl” : « Ceux qui utilisent les avis juridiques tirés des livres, sans tenir compte du contexte local, sont dans l’erreur grossière. Leurs actions sont en contradiction avec le consensus des juristes (musulmans). Ils sont coupables d’iniquité et de désobéissance envers Allâh. En outre, ils n’ont aucune excuse pour leur ignorance, car ils se sont permis d’établir des jugements sans en connaitre les fondements (…). Leur conformisme à suivre les avis regroupés dans les recueils est un égarement dans la religion de l’Islam et une ignorance complète des objectifs visés par les règles établies par les premiers savants et les grands spécialistes du passé qu’ils prétendent imiter ». Et dans “Kitâb al-Ihkam” il dit aussi : « Les règles de tout ce qui dans la loi découle de la coutume change. Ce n’est pas un nouvel effort d’interprétation (ijtihâd) (…). Tous les mujtahidîn sont d’accord là-dessus ».

En effet, à l’exception de la doctrine islamique, des rites islamiques (quand les conditions sont réunies, et avec les dérogations possibles dans des cas spécifiques) et des valeurs morales et éthiques de l’Islam, et des pratiques spirituelles, qui sont immuables et universelles, les dispositions légales et les pratiques sociales, elles, peuvent changer selon le temps et le lieu. Il s’agit là de choses très complexes où de nombreux facteurs doivent être compris, assimilé et maitrisé. Il y a en effet la question du contexte, des priorités, des catégories d’individus, des nécessités ou du plus grand mal à éviter, l’importance de la progressivité dans l’application ou la mise en place de certaines lois, l’éducation du peuple qui doit primer avant l’application des lois pénales maximales, toujours penser d’abord à l’intérêt général, accepter les bonnes coutumes, empêcher ou interdire les coutumes blâmables qui ruinent la société ou détruisent les familles, etc.

Sur la souplesse du fiqh (droit) et ses changements au fil des siècles et des régions, le grand juriste Ibn ‘Abidîn* disait dans “Majmu’at rasâ il ibn Âbidîn” (2/125) : « De nombreux jugements se transforment en raison des modifications de temps : à cause de l’évolution de l’usage (al-‘urf) des individus, de l’apparition d’une nécessité absolue, ou de la corruption des êtres humains de cette époque. Si les jugements demeuraient les mêmes, ils causeraient de la gêne et des dommages aux gens. Ils se trouveraient en contradiction avec les règles de la Sharî’ah reposant sur l’allégement, la facilitation et l’éloignement du mal et de la corruption. En raison de cela, nous remarquons que les maitres des différentes écoles ont parfois contredit l’imam fondateur de leur école sur de nombreuses questions. Ces contradictions résultaient des différences existantes à leurs époques respectives. Ces maitres étaient parfaitement conscients que si leur imam avait vécu à leur époque, il aurait certainement affirmé la même chose qu’eux ».

* Muhammad Amin Ibn Abidin (1198h/1783 – 1252h/1836) était un grand savant, théologien, juriste hanafite, mufti, exégète, spécialiste du hadîth, historien, spécialiste des fondements du droit, initié au tasawwûf (spiritualité musulmane) et médecin. Il vivait principalement à Damas (actuelle Syrie).

Cela concerne évidemment les avis juridiques qui changent selon les nécessités tout en se basant sur les fondements islamiques et les finalités du droit (bien-être et sécurité des gens), et non pas les nouvelles « fatawa » édictées par les rigoristes (pour restreindre le droit des hommes ou des femmes musulmanes) ou les «modernistes» (au sens «idéologique» du terme) qui obéissent aveuglément aux diktats des idéologies et institutions modernes (politiques, idéologiques, sociales ou économiques) visant à éradiquer l’identité musulmane, la spiritualité, le fiqh nécessaire et porteur de Barakâ, la résistance légitime face à l’oppression et aux invasions, ou encore lorsqu’ils tentent de légitimer la discrimination «laïcarde et féministe (hystérique)» contre les femmes musulmanes pour qu’elles abandonnent leur chasteté, leur pudeur et leur indépendance d’esprit face à la société de consommation et à la folie ambiante.

Ce n’est donc pas parce que nous pouvons trouver un avis juridique dans un ancien livre, qu’il est possible de l’appliquer n’importe comment, ni même de penser qu’il est fondé et légitime du point de vue purement islamique, surtout s’il contredit l’éthique et les finalités de l’Islam.

Premièrement, l’avis juridique en soi peut être erroné ou déviant, et donc non-applicable d’après les principes même de l’islam.
Deuxièmement, il peut s’agir d’un avis faisant l’objet de divergences selon les juristes.
Troisièmement, l’avis en question a été énoncé dans un contexte particulier, motivé par des conditions et spécificités restreintes qui ne sont pas valables ou existantes partout et en tout temps.


On voit qu’un certain nombre de savants et prédicateurs wahhabites ou même shiites duodécimains ou réformistes (de type moderniste), ainsi que des jeunes mal éduqués ou très mal formés dans le droit (fiqh), ses fondements (usûl) et ses finalités (maqasîd) ignorent toute la richesse juridique et ses subtilités, et appliquent des règles n’importe comment, imposent des coutumes culturelles blâmables, interdisent des pratiques autorisées en Islam qui ne nuisent à personne, mais autorisent par-contre des choses graves du point de vue islamique et qui nuisent aux familles et aux femmes comme aux enfants. Ils oublient les valeurs éthiques de l’Islam, l’importance de l’éducation spirituelle et morale, la nécessité de la justice sociale et de la bonne gouvernance politique, mais s’empressent d’appliquer des sentences légales sur le peuple, parfois injustement, et sans respecter les priorités et les conditions islamiques, ni même prendre en compte le contexte et la condition socio-psychologique du peuple.



Si certains de leurs discours peuvent paraitre orthodoxes et « séduisants » pour des faibles d’esprit, il n’en est rien lorsque l’on commence à étudier en profondeur leurs discours, et surtout à les confronter au Qur’ân et à la Sunnah purifiée qui réfutent totalement leurs assertions et pratiques qui leurs sont spécifiques. Le danger réside dans le fait qu’ils ont rassemblé toutes les mauvaises choses des sectes ou dérives passées, pour les remanier et les réunir dans leur idéologie destructrice.

Quant à leur rapport avec le tasawwûf, si Mohammed Ibn Abdel Wahhâb en faisait l’éloge en soi (comme faisant partie de l’orthodoxie islamique), ils ne le pratiquaient pas lui-même, préférant répandre son autorité fanatique plutôt que de purifier son âme et de réformer son comportement. Quant à ses successeurs et à ses disciples actuels, certains s’opposent farouchement au tasawwûf, tandis que d’autres l’acceptent, soit en l’assumant pleinement sur le plan théorique, soit timidement.

Pour autant, il ne faut pas succomber à la haine islamophobe et à l’ignorance de la masse à l’égard du wahhabisme et des salafistes, car d’une part, parfois ils imputent des choses au wahhabisme qui sont louables et qui concernent l’Islam ou le sunnisme en soi, et d’autres fois ils imputent des choses blâmables qui ne sont pas propres qu’au wahhabisme mais aussi à d’autres groupes (y compris non-musulmans). Ensuite, tous les wahhabites ne sont pas des incultes fanatiques, mais ceux qui sont respectueux et gentils connaissent généralement mal les références du wahhabisme et se sont laissés séduire par certains amalgames et discours trompeurs. Et enfin, sur le plan politique, les wahhabites s’opposent même entre eux, certains prêtant allégeance aux gouverneurs arabes corrompus, tandis que les autres s’y opposent fermement.

Beaucoup sont ignorants, et doivent être mieux renseigner, et pour cela, il faut discuter avec eux avec sagesse, faire preuve d’indulgence, prendre le temps de leur exposer les arguments pertinents, sur le plan religieux notamment, démontrant les erreurs et les déviances du wahhabisme. Car se contenter de les rabaisser, ou d’affirmer des choses sans démonstration, ne pourra jamais convaincre des gens déterminés dans leur voie, de revoir leurs positions.


2 thoughts on “Bilan historique et intellectuel sur les effets de la prédication wahhabite depuis son fondateur Mohammed ibn Abdel Wahhâb (1703-1792)

  1. :

    bonjour, j’aimerais quelques précisions sur le sens de ce qui est marqué dans le paragraphe :”mais ce qui fut le cas aussi de tous les savants musulmans avant lui et à son époque -, il confondait cependant le Tawhîd avec des choses qu’il incluait dans le shirk. En effet, le tawassûl légiféré qui consiste à demander à un pieux (qu’il soit vivant ou défunt cela ne change rien à la question du tawhîd) d’invoquer Allâh pour nos besoins, était pour lui, – surtout quand il s’agissait d’un défunt près de sa tombe -, de shirk, là où cela relève du Tawhîd, et fut pratiqué par des compagnons et des disciples de compagnons. De même pour le tabarrûk (recherche de bénédictions), ou le fait de porter sur soi des objets contenant des invocations prophétiques ou des versets du Qur’ân.”

    êtes vous en train de dire que tawassul auprès des morts est légiféré comme licite? ou que Mohammed Ibn Abdel Wahhâb le faisait passé comme licite?
    de même pour les objets contenant des invocations prophétiques ou des versets du Qur’ân, la position de Mohammed Ibn Abdel Wahhâb était favorable ou non?

    1. :

      Bonjour.

      Cela est licite en Islam (selon les autorités sunnites des 4 écoles juridiques et des 3 écoles théologiques orthodoxes) mais pas selon Ibn Taymiyya et Mohammed Ibn Abdel Wahhâb.

      Un article détaille le sujet ici : https://editions-hanif.com/le-wahhabisme-et-la-question-du-tawassul-lintercession-lentremise-et-de-listighatha-demande-de-secours/

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