Que l’on soit traditionnaliste, réformiste, sunnite, shiite ou autre, il ne convient pas de faire partie des gens de la discorde et du fanatisme, car ce sont là deux fléaux qui sont prohibés et condamnés par Allâh dans le Qur’ân.
Allâh a dit : « (..) la fitna (la propagation de l’idolâtrie, la persécution, le désordre, le chaos) est pire que le meurtre » (Qur’ân 2, 191). Et le contexte du verset évoque la persécution et la guerre faites par les idolâtres au nom de leur ignorance et de leur croyance, en suivant une politique fanatique et oppressive.
Ainsi, les maîtres spirituels, les savants, les penseurs, les leaders, et toute autre personne musulmane, qui souhaitent contribuer à l’élévation intellectuelle et spirituelle de la Communauté, peu importe leur tendance, ne doivent pas être des « ahl ul fitna » (gens de la discorde/tentation/provocation) mais des gens de la guidée, de l’amour, de la concorde et de la sagesse, en tant qu’héritiers des prophètes.
Chez les vrais maîtres spirituels, tout dans leurs paroles, leurs enseignements et leurs prises de position (politique, jurisprudence, etc.) doivent être inspirées par la sagesse et apporter une chose utile et bénéfique aux gens, se taire sur une chose si cela permet d’éviter la discorde, agir ou parler par nécessité quand cela peut éviter des bains de sang ou l’augmentation des troubles ou des injustices. Même s’ils ne partagent pas certains avis juridiques répandus, ou des opinions théologiques répandues dans leurs contrées, ils se focalisent sur ce qui peut rapprocher les gens d’Allâh, ce qui peut leur être profitable, ce qui cultivera l’adab et les bons caractères, ce qui est sûr et nécessaire en termes de ‘aqida, de fiqh, de tafsîr ou de akhlaq.
Or, nous voyons aujourd’hui, beaucoup de penseurs (modernistes ou non), de savants, de prédicateurs ou des leaders, se baser parfois sur certaines vérités, mais en les mélangeant avec du faux, et en les instrumentalisant pour semer le chaos, cultiver la haine, alimenter des amalgames, ou répandre injustement le sang. Or Allâh a dit : « Les croyants ne sont que des frères. Établissez la concorde entre vos frères, et craignez Allâh, afin qu’on vous fasse miséricorde » (Qur’ân 49, 10). Tout comme Il a dit aussi : « Et s’ils inclinent à la paix, incline vers celle-ci (toi aussi) et place ta confiance en Allâh, car c’est Lui l’Audient, l’Omniscient. Et s’ils veulent te tromper, alors Allâh te suffira. C’est Lui qui t’a soutenu par Son secours, ainsi que par (l’assistance) des croyants » (Qur’ân 8, 61-62).
L’équité, la piété et la justice, dans nos témoignages, nos jugements et nos actions, doivent être au centre de notre éthique et de notre vision des choses : « Ô les croyants ! Soyez stricts (dans vos devoirs) envers Allâh et soyez des témoins équitables. Et que la haine pour un peuple ne vous incite pas à être injustes. Pratiquez l’équité : cela est plus proche de la piété. Et prenez garde à Allâh. Car Allâh est certes Parfaitement Connaisseur de ce que vous faites » (Qur’ân 5, 8).
Ceux qui s’efforcent de semer la « fitna » s’opposent au Commandement divin : « Toutes les fois qu’ils allument un feu pour la guerre, Allâh l’éteint. Et ils s’efforcent de semer le désordre sur la terre, alors qu’Allâh n’aime pas les semeurs de désordre » (Qur’ân 5, 64).
La noblesse du comportement s’observe aussi à travers la recherche de la concorde et de la paix comme le rappelaient Ibn Qudama dans son Mukhtasar Minhâj al-Qâsidîn (basé sur le ‘Ihyâ de l’imâm Abû Hâmid al-Ghazâlî, puis résumé par Ibn al-Jawzî) : « Sache que la familiarité est le fruit du bon caractère et que l’hostilité relève du mauvais caractère, parce que le bon caractère favorise les affinités et la concorde et le mauvais caractère favorise les ressentiments et la haine. La vertu que recèle le bon caractère n’échappe à personne et il existe de nombreux ahadiths qui l’attestent. En effet, on rapporte que le Prophète (‘alayhî salât wa salâm) a dit : « Rien n’est plus lourd dans la balance du croyant le Jour de la Résurrection que le bon caractère ». Il est dit dans un autre hadith : « Ceux d’entre vous qui me sont chers et qui seront proches de moi au Jour de la Résurrection sont ceux qui ont le meilleur caractère. Et ceux d’entre vous qui me sont détestables et qui seront le plus éloignés de moi le Jour de la Résurrection sont ceux qui ont le plus mauvais caractère ». On a également interrogé le Prophète (‘alayhî salât wa salâm) sur ce qui faisait entrer au paradis et il a répondu : « C’est la taqwa (piété) et le bon caractère » ».
L’orgueil est un ennemi déclaré dans l’étude de la Religion, dans la pratique du cheminement spirituel tout comme dans son application, qui doit être banni : « Il ne conviendrait pas à un être d’apparence humaine, à qui Allâh a donné l’Ecriture, et le Jugement, et la Prophétie, de dire aux humains : « Adorez-moi à la place d’Allâh ! Et pourtant, soyez des maîtres (éducateurs) spirituels (Rabbaniyyûn) en raison de l’Ecriture que vous enseignez et en raison de votre application à l’étude ! » » (Qur’ân 3, 79).
Le maître spirituel, juriste, exégète et salaf Abû’l-Qâssim al-Junayd al-Baghdâdî (210 H/830 – 298 H/910) a dit dans ses Lettres (Lettre à Abû Bakr Kisâ’î) : « Il y a quelque temps, j’avais écrit à des frères spirituels d’Ispahan : ma lettre a été ouverte et l’on s’est emparé du texte. Quelques-uns ont mal compris certaines choses qui y étaient dites, et j’ai eu beaucoup de peine à me tirer d’embarras. A la suite de cela, ces gens m’ont donné beaucoup de soucis. Il faut user de ménagements avec les gens, et ce n’est pas faire preuve de mansuétude à leur égard que de les mettre en présence de quelque chose qu’ils ne connaissent pas, même s’il arrive qu’on ne le fasse pas volontairement et de propos délibéré. Qu’Allâh soit ta protection et ton bouclier et qu’Il nous préserve toi et moi ! Il te faut donc – qu’Allâh te fasse miséricorde – contrôler tes paroles et bien connaître tes contemporains. Parle aux gens de ce qu’ils connaissent, et épargne-leur ce qu’ils ne peuvent saisir ! Il est rare, en effet, qu’un individu ignorant une chose ne la traite pas en ennemie, et « Les hommes sont comparables aux troupeaux de chameaux : sur cent, tu en trouves difficilement un seul capable de longs parcours. » Cependant, Allâh a fait des savants et des sages une miséricorde, issue de la Sienne, et dont il gratifie Ses serviteurs ; agis donc en sorte que tu sois une miséricorde pour les autres, même s’Il a fait que tu sois une épreuve pour toi-même ! Présente-toi devant les hommes non pas selon ton propre état intérieur mais selon le leur ; parle-leur avec ton cœur mais selon ce qui leur convient et cela sera plus opérant à la fois pour eux et pour toi ! ».
En effet, al-Bukharî rapporte dans son Sahîh n°127 un récit de l’imâm ‘Alî, lui-même le tenant du Prophète (ﷺ) la parole suivante : « Parlez aux gens en fonction de leur connaissance : aimeriez-vous que l’on traite Allâh et son Envoyé (Muhammad) de mensonge ? ».
De même, le Prophète Muhammad (ﷺ) a dit : « Rendez les choses faciles (aux gens) et ne (leur) compliquez pas les choses. Donnez de bonnes nouvelles (aux gens) et ne repoussez pas les gens (par le mauvais comportement et les propos repoussants). Coopérez les uns avec les autres et ne vous divisez pas » (Rapporté par al-Bukhâri dans son Sahîh n°2873). Or, beaucoup de juristes, d’étudiants ou de modernistes n’hésitent pas à embrouiller les musulmans de la masse avec des sujets périphériques (faisant en plus de cela, l’objet de divergences) très techniques, et de les perturber sans aucune nécessité.
Et enfin, c’est à la Paix, à la fois intérieure et extérieure, ici-bas comme dans l’Au-delà, que nous devons inviter, et non pas à la discorde : « Allâh appelle à la demeure de la paix et guide qui Il veut vers un droit chemin. A ceux qui agissent en bien est réservée la meilleure (récompense) et même davantage. Nulle fumée noircissante, nul avilissement ne couvriront leurs visages. Ceux-là sont les gens du Paradis, où ils demeureront éternellement » (Qur’ân 10, 25-26).
Elia – :
BarakAllâhu fik !
Qu’Allâh permette de nous taire en attendant d’acquérir savoir et sagesse.
C’est un rappel très profitable et qui invite à remettre en question cette émancipation de la parole qu’accorde le monde virtuel à des gens, souvent, non légitimes à parler…
Qu’Allâh nous préserve des fitans et qu’Il nous fasse don de Son Salam à nos cœurs.