Le temps ordinaire, le temps « imaginaire » et le monde céleste

Le temps est l’un des mystères de l’Univers qui a suscité le plus de débats, d’interrogations et de réflexions. Il s’agit là d’une chose à la fois évidente et complexe. Évidente, car on sait la « mesurer » et que notre conscience perçoit cette succession d’instants sur le plan temporel. Complexe, car il n’a pas vraiment de formes visibles telles que le soleil, la lune ou les plantes, et qu’il possède différentes formes, – mesurables surtout par ses effets sur la réalité physique – et nous renvoie jusqu’au commencement de l’univers, nous projetant ainsi dans des considérations vertigineuses, aussi bien à l’échelle temporelle que dans l’espace.

Pour rendre compte de certains phénomènes et concepts, des scientifiques ont parlé du « temps imaginaire », concept dérivé de la physique quantique (1).

Si l’on conçoit le « temps ordinaire » comme une ligne horizontale passant entre le passé dans un sens et le futur dans l’autre, le temps alors imaginaire irait perpendiculairement à cette ligne comme le nombre imaginaire perpendiculaire au nombre réel dans le plan complexe. De par son essence, le temps imaginaire est une façon de voir la dimension du temps comme s’il s’agissait d’une dimension de l’espace : vous pouvez aller de l’avant et vers l’arrière tout au long du temps imaginaire, tout comme vous pouvez vous déplacer à droite et à gauche dans l’espace réel. C’est le schéma classique que l’on retrouve pour expliquer ce concept, et certains problèmes de physique quantique peuvent être résolus justement en représentant le temps sous sa forme imaginaire (dans le sens conceptuel, et non pas dans le sens de « fantasmagorique » ou « d’illusoire »).

Le « temps imaginaire » permet ainsi d’expliquer un certain nombre de choses, mais les scientifiques se rendent bien compte qu’il y a encore quelque chose de plus profond qui leur échappe.

Ainsi, le scientifique Anthony Zee (élève du physicien et mathématicien Edward Witten qui reçut le prix prestigieux de la Médaille Fields) a écrit : « Certains physiciens, moi y compris, sentons qu’il pourrait y avoir là quelque chose de profond, quelque chose que nous n’avons pas vraiment compris » (2).

Quant au physicien d’origine tchèque, Luboš Motl, il dit : « Le temps imaginaire cache certains des secrets les plus précieux concernant la naissance de l’Univers » (3).

Le  « Temps imaginaire » est lié aux « aux nombres imaginaires » qui ont permis la réalisation de certaines applications techniques que nous utilisons au quotidien, comme les téléviseurs, les téléphones portables, les tablettes ou les ordinateurs.

Certains utilisent l’analogie (concernant le Temps imaginaire) à un temps sans durée, un temps « gelé » où tous les instants seraient comme superposés et « enroulés » les uns sur les autres, un peu comme la bobine d’un film où la pellicule est enroulée sur elle-même et contient toutes les images du film, et tant que le film est dans sa boite, il ne s’inscrit pas dans le temps physique (celui que nous percevons avec notre mental/temps ordinaire). Ce n’est que lorsque le film sera actionné (la bobine sortie de sa boite), qu’il s’inscrira dans le temps physique et donc dans la durée (succession chronologique d’instants).

A l’origine ce concept servait à distinguer, sur le plan mathématique, l’espace et le temps, et pour visualiser cette distinction, des physiciens et mathématiciens (comme Henri Poincaré et Hermann Minkowski) ont élaboré ce concept pour aboutir à une représentation géométrique unifiée, en parlant de la quatrième dimension (comme étant une quatrième coordonnée d’espace imaginaire). En 1908 des scientifiques ont commencé à se représenter l’univers comme un continuum à 4 dimensions étant liées entre elles par la vitesse de la lumière (perçue comme une constante de la structure de l’espace-temps).

Tout comme on mesure le temps ordinaire avec les nombres réels, on mesure le temps imaginaire avec les nombres imaginaires.

Et on peut légitimement transposer cette autre forme/perception du temps, à ce qui se déroulera dans le monde post-mortem.

Dans le Qur’ân, nous avons aussi ces multiples formes liées au temps, lui-même lié à l’espace, et « mesurable » via différents corps « célestes » existenciés par Allâh :

« Allâh Qui a crée les cieux et la terre et Qui, du ciel, a fait descendre l’eau ; grâce à laquelle Il a produit des fruits pour vous nourrir. Il a soumis à votre service les vaisseaux qui, par Son ordre, voguent sur la mer. Et Il a soumis à votre service les rivières. Et pour vous, Il a assujetti le soleil et la lune à une perpétuelle révolution. Et Il vous a assujetti la nuit et le jour. Il vous a accordé de tout ce que vous Lui avez demandé. Et si vous comptiez les bienfaits d’Allâh, vous ne sauriez les dénombrer. L’homme est vraiment très injuste, très ingrat » (Qur’ân 14, 32-34).

« Nous avons fait de la nuit et du jour deux signes, et Nous avons effacé le signe de la nuit, tandis que Nous avons rendu visible le signe du jour, pour que vous recherchiez des grâces de votre Seigneur, et que vous sachiez le nombre des années et le calcul du temps. Et Nous avons expliqué toute chose d’une manière détaillée » (Qur’ân 17, 12).

Allâh rappelle aussi qu’Il est le Maître du temps, de l’espace, et les moments et lieux divers qu’ils englobent : « Et à Lui tout ce qui réside dans la nuit et le jour. C’est Lui l’Audient, l’Omniscient » (Qur’ân 6, 13).

« Par al-`asr (le temps) ! L’être humain est certes, en perdition, sauf ceux qui croient et accomplissent les bonnes oeuvres, s’enjoignent mutuellement la vérité et s’enjoignent mutuellement l’endurance » (Qur’ân 103, 1-3).

Une Sûrate très courte, mais quelle puissance elle dégage, quelle profondeur elle possède !

Elle résume à elle seule, les mystères du temps, le sens de notre vie, les actes fondateurs qui doivent poser les rythmes de notre vie terrestre, et les moyens (à travers les qualités morales et spirituelles) que nous devons mettre en pratique, pour dépasser et surplomber notre condition humaine et les affres existentiels du temps.

« Cependant, un jour auprès de ton Seigneur, équivaut à 1000 ans de ce que vous comptez » (Qur’ân 22, 47).

« Du ciel à la terre, Il (Allâh) administre l’affaire, laquelle ensuite montre vers lui en un jour équivalent à mille ans de votre calcul » (Qur’ân 32, 5).

Nous savons aussi que le nombre « 1000 », tout comme d’autres nombres, possèdent une portée éminemment symbolique.

« Les Anges et l’Esprit montent vers lui en un jour dont la durée est (de) 50 000 ans » (Qur’ân 70, 4).

Si ces questions sur le commencement du temps ordinaire demeurent mystérieuses et laissent perplexe les scientifiques comme les philosophes, c’est parce que cela nous oriente et nous amène vers ce qui dépasse le cadre de la physique, nous plongeant ainsi dans la réalité métaphysique, et par voie de conséquence, à la question du sens (Dieu ou le néant – absence de réalité et de conscience -), ainsi que de la question de la matière et de l’esprit, et de leur origine.

Ce qui est certain, c’est que la science n’a pas encore fini d’épuiser les mystères liés au temps, ni même de l’existence elle-même.



Notes :

(1) La cosmologie quantique – De l’utilité du temps imaginaire (V), Projet Luxorion – Astrosurf, consulté le 1 juillet 2020 : http://www.astrosurf.com/luxorion/cosmos-quantique5.htm ».

(2) Anthony Zee, Quantum Field Theory in a Nutshell, Princeton University Press, 2003.

(3) Luboš Motl, L’Équation Bogdanov – Le secret de l’origine de l’univers, éd. Presses de la Renaissance, 2008


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