Critique de lecture : L’histoire de Moïse et des Hébreux – D’après les données coraniques et archéologiques (Hocine Jaied, KA’ éditions, 2023)

L’histoire de Moïse et des Hébreux – D’après les données coraniques et archéologiques (Hocine Jaied, KA’ éditions, 2023)

« Les recherches de l’auteur (basées sur les données coraniques et archéologiques) révèlent explicitement un récit de Moïse et des Hébreux bien différent et bien plus pacifiste que celui consigné aussi bien dans la Bible que dans l’histoire traditionnelle islamique, et que l’on peut retrouver dans les ouvrages médiévaux des plus éminents savants musulmans ».
Franco-Tunisien, marié et père de famille, Hocine Jaïed vit et travaille en France. De formation universitaire en génie électrique et informatique industrielle, il est surtout passionné d’histoire des religions, du Coran tout particulièrement, et de l’Égypte antique. Se définissant comme un autodidacte, il a, au cours de ses longues recherches, apporté à certains spécialistes et éminents islamologues des éclaircissements, voire des mises au point, en rapport avec leurs articles et ouvrages. En outre, il a sollicité leurs points de vue ainsi que ceux d’autres islamologues, archéologues et égyptologues de renom, à travers une correspondance formalisée, dont les échanges les plus instructifs figurent dans cet ouvrage.

Critique de l’ouvrage :

Un livre tout bonnement incroyable, consistant en une enquête tant rigoureuse que passionnante à la recherche de la vérité historique concernant le Prophète Mûsâ (Moïse), les Hébreux et Pharaon, basée sur les données qurâniques, bibliques, historiques et archéologiques, en analysant aussi minutieusement les précisions linguistiques et historiques fournies par le Qur’ân, et consultant le regard de plusieurs spécialistes (islamologues, historiens, archéologues, …).

Il en résulte que les données archéologiques confirment les données qurâniques, dont certains détails (corroborés par l’archéologie et l’histoire) étaient absents du corpus biblique, là où certains passages bibliques ont été infirmés par l’archéologie. De même, 2 prédictions qurâniques sont évoquées, et l’une a été accomplie par le passé tandis qu’une autre a été accomplie à notre époque, avec la corruption et la terreur des forces israéliennes dans toute la région mais comme le précise le Qur’ân, en disposant d’une grande capacité de nuisance leur permettant de prendre l’ascendance sur les justes et les opprimés (le régime israélien, appuyé par l’Occident, dispose en effet d’une forte influence corruptrice sur les médias, l’éducation, les institutions financières, l’espionnage, les assassinats politiques et les opérations de sabotage, coup d’Etat et de colonisation).

Cette enquête minutieuse recense et interroge les découvertes les plus récentes, en rectifiant et écartant aussi les erreurs commises par certains chercheurs et nuançant également les affirmations parfois douteuses ou hypothétiques de certains d’entre eux. Ce livre est à saluer, tant par sa rigueur méthodologique que son intérêt (à la fois historique, archéologique, religieux, linguistique et anthropologique). Il en ressort donc que, même si le Qur’ân n’est pas un livre d’histoire ou manuel scientifique à la manière de leur conception moderne, il n’en demeure pas moins qu’il éclaire l’histoire et la science, par ses indications historiques et scientifiques – tout en étant bien plus que cela, avec des dimensions métaphysiques et cosmologiques, éthiques et spirituelles, morales et sociales, écologiques et économiques, … -.

Les conclusions limpides de cette enquête montrent que le Qur’ân n’est pas un assemblage hétéroclite construit et élaboré sur une longue période par différents auteurs, qu’il n’est pas non plus une copie (mauvaise) de la Bible comme l’ont prétendu certains, et que le Qur’ân se pose bien comme Confirmateur des vérités passées et comme Lumière pour corriger les altérations et dérives qui ont pu s’accumuler au fil du temps.

Quand les chercheurs divergent, l’auteur prend bien le soin d’évoquer les nuances et divergences, afin de ne pas donner une idée faussée des débats contemporains, nuance souvent absente même chez de nombreux académiciens et spécialistes de notre époque.

L’archéologie révèle aussi que la conquête musulmane des premiers siècles fut globalement pacifique – sans conversion forcée ni destruction systématique des vestiges, lieux de culte ou centres culturels -, et que le Qur’ân ne reprend pas les passages violents qui existent dans la Bible, lui préférant une vision plus pieuse des Prophètes et un appel constant à la paix, au refus du chaos et de la corruption, alors que la Bible comporte des passages à la fois problématiques (des Prophètes cédant à leurs caprices, à de graves péchés, à l’idolâtrie, etc.) et contradictoires (beaucoup de massacres injustifiés du point de vue moral et théologique), horreurs n’étant pas reprises dans le Qur’ân, qui bien plus, corrige justement ces visions altérées de la Doctrine primordiale des Prophètes.

L’auteur adopte aussi une approche critique envers une partie des exégètes musulmans, qui ont parfois interprété de façon erronée certains versets du Qur’ân en se basant sur des récits israiliyyâts (parmi les légendes répandues au sein des communautés des Gens du Livre), interprétations erronées réfutées par l’archéologie, l’histoire et une meilleure analyse linguistique et théologique du Qur’ân.

En effet, beaucoup passent à côté des subtilités liées à la précision linguistique du Qur’ân, dont ses correspondances avec le Réel (historique, psychologique, sociologique, spirituel, etc.) se confirment avec une grande précision, et avec les nuances qui conviennent, infirmant ainsi les prétentions orientalistes visant à réduire le Qur’ân qu’à une vulgaire entreprise de politiciens de l’époque, avec un choix arbitraire des versets.

Tout en abordant des sujets historiques et scientifiques, le Qur’ân en donne des indications précieuses et des principes généraux, laissant ensuite le soin aux chercheurs des différentes disciplines d’explorer chaque domaine pour en révéler d’autres détails ou aspects.

Plusieurs illustrations, cartographies et tableaux comparatifs (événements analysés/données archéologiques, données bibliques, données qurâniques et conclusions de chercheurs contemporains) sont fournis afin de résumer l’état de la recherche et d’aider ainsi à la lecture.

L’auteur, en fin d’ouvrage, déconstruit aussi les principales thèses orientalistes sur le sujet et en souligne les contradictions, les lacunes et les erreurs ainsi que les prétentions clairement infirmées par l’histoire et l’archéologie.

L’introduction et la conclusion du livre montrent que le Discours qurânique s’articule essentiellement autour de l’appel à la Paix et du refus de la tyrannie, de l’oppression et du désordre sur terre.

Note personnelle : 9,5/10.